Homélies des mois de juillet à décembre 2016


Mardi 27 décembre : St Jean

1 Jn 1, 1-4 : Le verbe incarné et la communion avec le Père et le Fils.

Ps 97

Jn 20, 2-8 : Le tombeau trouvé vide.

 

Marie-Madeleine, dans l'Évangile selon saint Jean, au septième jour, au petit matin, elle va au tombeau.

Dans l'Évangile selon saint Jean, ce septième jour devient le premier jour de la semaine, renvoyant à la création du monde, dans le livre de la Genèse, le jour où est créée la lumière.

La voici qui appelle les deux disciples et dans cet extrait, elle s'efface.

Tout de suite après, si vous lisez votre bible, vous verrez que Marie-Madeleine réapparaît avec force.

Elle s'efface ici, dans cet extrait.

 

Nous voyons Pierre, nous voyons Jean ; Pierre rentre le premier à l'intérieur, même si Jean était arrivé le premier.

Certains Pères de l'Eglise, certains commentateurs, veulent y voir la prééminence de Pierre.

En tous les cas, c'est bien Jean qui va voir et croire, en regardant les linges, qui sont pour lui comme des signes.

Vous savez que court la rumeur, selon laquelle le corps aurait été volé.

La présence des linges dans le tombeau, au contraire, atteste que le corps n'aurait pas été volé : il serait ressuscité.

Un corps volé, l'aurait sans doute été avec les linges.

Il voit et il croit.

 

Dans son Évangile, Saint-Jean (en fait, aujourd'hui) associe toujours le voir avec le croire.

C'est toujours un motif d'engendrement nouveau, comme Jésus va l'expliquer à Nicodème, comme cela va se produire dans les noces de Cana,

 comme cela va se produire pour l'infirme de la piscine de Bézatha,

 comme cela va se produire au moment de la multiplication des pains ou de la traversée de la mer,

 comme cela va se produire à la dernière Cène,

 comme cela va se produire pour l'aveugle-né : des signes de la foi, des signes matériels, tangibles qui vont tout à coup produire la foi.

 

On pourrait rajouter ce que Thomas, lui-même, a vu : les marques de la mort sur le corps de son Seigneur ressuscité.

Il voit et il croit.

Saint Jean voit et croit.

Apparemment, Jean a cru bien plus tôt dans la vie même de son Seigneur ; en tout cas l'Évangile nous dit qu'à ce moment-là, il croit en voyant.

 

Alors, deux jours après Noël, c'est une invitation à rentrer toujours dans le même mystère de la naissance de Jésus et nous laisser, à notre tour, engendrer dans cette foi.

Nous pouvons avoir ces célèbres représentations de la Nativité dans la tradition orthodoxe, où nous voyons sur les icônes, à la fois, ce qui pourrait être quelque chose comme une grotte ou une mangeoire (une sorte d'endroit où demeurait une mangeoire) pour la naissance de Jésus, et en même temps, le tombeau.

Les deux mystères sont associés dans la foi des chrétiens : la naissance de Jésus et sa résurrection.

 

Mais pour quel motif ?

Le motif principal c'est que nous sommes nés de Dieu.

Et nous allons suivre pas à pas des extraits des lettres de Jean autant que des extraits de son Évangile pour, à la suite de Noël, naître comme ce petit enfant ; non pas retourner dans la chaleur douillette, qui nous laisserait un peu endormis, des lendemains de Noël (un peu comme si nous étions retournés dans le ventre maternel), mais au contraire pour que notre engendrement dans la foi nous sorte et nous stimule, pour que, à la lumière de Noël, nous soyons vraiment éveillés, des témoins, nous soyons vivants.

 

Ce qui se vit et se fête les jours qui suivent Noël, a autant d'importance que ce qui se vit et se fête les jours et les semaines après Pâques.

Pour que nous ne demeurions pas trop collés à la crèche, comme il ne s'agit pas de rester trop collé au tombeau de la résurrection, nous sommes convoqués au témoignage.

Étienne hier, Jean aujourd'hui, nous verrons les martyrs, tous les autres martyrs, comme ils l'étaient d’eux-mêmes, après la résurrection de Jésus avec les apparitions du Ressuscité, son Ascension et la Pentecôte.

 

Ne restons pas là, à maintenir le corps de notre Bien-Aimé, comme Marie-Madeleine a voulu le faire, mais osons voir nos frères pour leur dire : "nous sommes nés de Dieu, vous êtes nés de Dieu, si vous venez voir et si vous croyez".

 

Amen.


Lundi 26 décembre : St Etienne

Ac 6, 8-10 ; 7, 54-60 : L’arrestation d’Etienne. La lapidation d’Etienne. Saul persécuteur.

Ps 30

Mt 10,17-22 : les missionnaires seront persécutés.

 

Le lendemain de Noël, l'Ecriture nous invite à explorer deux chemins qui semblent en apparence très éloignés, très divergents l'un de l'autre, mais en apparence seulement.

Reste à l'Esprit Saint peut-être, de tisser des ficelles, des fils entre ces deux chemins, dans votre cœur, le cœur de chacun.

 

Le premier chemin c'est celui du témoignage ou de la parole.

À la lumière de l'Évangile, proclamé le jour de Noël, nous accueillons la Parole faite chair ; nous accueillons cette Parole créatrice qui, désormais, vient prendre chair en chacun.

Chacun devient parole potentielle, parole de vérité, parole d'amour.

 

Et il y a des paroles humaines et des gestes humains qui, éclairés par cette Parole de Dieu, peuvent devenir pardon jusque dans l'adversité ; parce que le pardon dans l'amour, comme dirait Jésus : "aimer ceux qui nous aiment, à quoi cela peut-il servir ?"

Sinon éventuellement, à aimer ceux qui ne nous aiment pas.

Là est le vrai témoignage.

 

Dans ce texte que nous avons accueilli aujourd'hui, nous entendons beaucoup le verbe 'dire' et 'le témoignage' : "Quand on vous livrera ne vous inquiétez pas de savoir ce que vous direz ni comment vous le direz.

Ce que vous aurez à dire, vous sera donné à cette heure-là.

Ce n'est pas vous qui parlerez, c'est l'Esprit de mon Père qui parlera en vous".

 

La véritable vocation chrétienne, à la suite de Jésus, c'est bien : dans l'action, dans la présence au milieu du monde tel qu'il est, par nos paroles et nos gestes, dire, non pas une parole de condamnation et des gestes de condamnation mais des mots et des gestes de pardon.

J'entends par-là, non pas simplement des mots et des gestes d'amnistie mais des mots et des gestes qui dénouent ; quant à voir disparaître les blessures, c'est une affaire qui est donnée au temps et à l'Esprit, mais des mots et des gestes qui dénouent.

C'est le premier axe.

 

Alors, Saint-Étienne, comme martyr, il a souffert l'adversité.

C'est le premier ; on pourrait quand même citer le Christ, bien entendu, premier encore ; pourquoi pas Jean-Baptiste encore, bien avant, puisqu'il a la tête coupée, présentée sur un plateau.

Mais à la lumière du Christ mort et ressuscité, Étienne, premier martyr sera un témoin.

Ça c'est le premier axe : la Parole faite chair devient concrètement une parole en nous, gestes et mots pour dénouer.

 

Le deuxième axe c'est, à la lumière de Paul, qui est cité dans le livre des Actes (en première lecture), il n'était encore que Saul à ce moment-là, il était encore le juif exigeant, le juif observant d'avant sa conversion.

 

Souvenez-vous(pour ceux qui ont participé à nos temps de récollection), il a été fait allusion à un moment donné, au tout début de la lettre de Paul aux Romains : "sa foi ", dit-il, "est la foi en Jésus, fils de David, issu de la chair, par Joseph ; et le fils de Dieu issu de Marie, né d'une Vierge.

Et il l'a découvert, Paul, non pas en contemplant la crèche, mais il l'a découvert dans la persécution; mais cette fois-ci non pas du côté du persécuté mais du côté du persécuteur : c'est sur la route de Damas.

 

Lui, il rencontre le premier persécuté sur sa route, (ça n'est pas Etienne), c'est le Christ : "je suis le Christ, que tu persécutes".

"Qui es-tu Seigneur ?"

"Je fais de toi mon instrument";

Paul a été engendré à ce moment-là, non pas à la crèche mais à la Croix.

 

Nous, nous fêtons notre engendrement à la crèche, le lendemain de la naissance de Jésus ; mais Paul, pas encore converti, pas encore engendré à nouveau, est témoin du martyr d'Étienne, et il est d'accord avec le martyr ; il ne s'y oppose pas.

Le persécuteur deviendra le pardonné.

 

Amen.


Dimanche 25 décembre : Jour de Noël

Is 52, 7-10 : Annonce du Salut.

Ps 97

He 1, 1-6 : Grandeur du Fils de Dieu incarné.

Jn 1, 1-18 : Le prologue.

 

Chers amis, cette grande nuit, cette très belle nuit sainte est accompagnée dans la liturgie, par de nombreuses célébrations, plusieurs messes qui déclinent toutes les harmoniques du mystère de Noël.

Alors, pratiquement dans toutes les paroisses, nous assistons, la nuit, le soir, même tôt dans la fin d'après-midi, en début de soirée, à la messe que l'on appelle en fait, la messe de minuit, la messe de la nuit, avec le récit qui est fait dans l'Évangile de Luc de la naissance de Jésus, comme nous l'avons entendu par exemple, dans cette église, hier.

Il y a aussi la messe de l'aurore, aujourd'hui c'est la messe du Jour ; il y a la messe de la veille au soir.

 

Et dans cette messe du Jour, nous sommes sur toute autre chose que le récit qui nous est rapporté de la naissance de Jésus.

On entre dans quelque chose de plus intime, de plus secret, presque.

Et nous entrons avec cette discrétion de l'Évangile de Jean, en fait dans la foi des tout premiers chrétiens qui contemplent Dieu qui se fait homme.

 

Et je vais vous apporter, en fait, comme une toute petite méditation en quatre points à partir de cet Évangile, que nous avons entendu, au tout début de l'Évangile de Jean, ce qu'on appelle le prologue, au chapitre un.

C'est ce que le diacre a proclamé, il y a quelques instants.

 

Ce prologue commence par le mot : au commencement.

Si vous ouvrez la Bible, tout premier livre, premier chapitre, premier verset, premier mot : au commencement.

La toute première communauté chrétienne, qui est éblouie par la beauté de Dieu qui se fait homme, éprouve le besoin de coucher sur le papier, les mêmes mots : au commencement ; comme pour dire deux choses.

 

D'abord pour dire, qu’il n'y a rien avant Dieu, Dieu est le commencement de toute chose, Il est à l'origine de notre vie, de notre croissance, de l'être, de tout ce qui nous entoure, de tout ce que nous voyons, sentons, éprouvons ; Dieu est à l'origine, Il est la source.

Mais il y a aussi eu un commencement.

Alors que Dieu est Créateur et à l'origine de tout, il y a eu aussi un début dans son histoire au milieu des hommes tandis qu’il se manifeste, ce commencement, en Jésus.

Il n'y a rien avant Dieu, et d'une certaine façon, il n'y a rien avant le Christ non plus, car les tout premiers chrétiens ont associé, dans la foi, la Parole de Dieu qui crée toute chose (car la création du monde se fait par Dieu qui parle : Dieu dit et cela est ; qu'il y ait le jour,qu'il y ait la nuit, Dieu dit et cela vient,cela arrive, cela se crée), donc, les premiers chrétiens ont associé la parole de Dieu qui crée, qui fabrique toute chose, qui est toute puissante (parole qui fait ce qu'elle dit), ils l'ont associée avec Jésus, qui est à son tour la Parole, la Parole qui prend chair.

 

Dans le texte grec, de Saint-Jean, le mot logos, pourrait se traduire par parole, mais le mot est féminin et Jésus est masculin, alors nous aimons aussi dire : le Verbe.

Parole, Verbe, ce petit enfant de la crèche est celui qui a commencé à être, par le simple fait de sa naissance au milieu de nous.

Mais pour les tout premiers chrétiens, Il était depuis toujours, dès avant la création du monde.

Et ce même Jésus, alors qu'il n'était que le Verbe, pas encore fait chair, était celui qui créait, sortant de la bouche du Père, au commencement.

 

Un deuxième point dans cet Évangile, c'est le temps qui est employé.

Alors, là encore, nous sommes en grec et puis, nous traduisons en français, c'est compliqué ; mais il y a un premier temps qui apparaît en français c'est l'imparfait : "Il était, il était avant toute chose".

Une sorte de façon de dire que ce Verbe fait chair a été de tout temps avant de naître ; il fut un moment où Il était depuis toujours et dans la foi chrétienne, dans la foi tout court, quand on lit la Bible, quand on dit que quelqu'un est depuis toujours, eh bien, on parle de Dieu.

Et être depuis toujours, ne pas être soumis à la dégradation du temps qui passe, c'est une façon de dire l'intemporalité, la toute-puissance et l'éternité de Dieu.

Et le Verbe était comme ça, avant de naître ; et voilà qu’à un moment, Il s’est mis à naître au milieu de nous.

Et dans le texte qu’a proclamé en français, Étienne, il a dit : tout est venu à l'existence par ce Verbe, c'est-à-dire que, à un moment donné, toutes choses qui étaient éternelles, ont fini par être et être présentes au milieu de nous, à avoir un début et à avoir une fin.

Et Dieu ne cesse pas d'être éternel, tandis que, au milieu de nous, il y a un début et il y a une fin.

Il en était de même pour Jésus : il a commencé au milieu de notre histoire par sa naissance ; nous nous retrouvons dans cette église, au moment de la Pâque, pour célébrer sa mort mais aussi sa résurrection ; ce Verbe fait chair va connaître la dégradation du corps, va connaître la mort ; mais cela, en aucun cas, ne vient épuiser la toute-puissance et l'éternité de Dieu.

Il était, mais tout par Lui est venu à l'existence; l'éternité est venue au milieu de nous.

 

À un moment donné, la première communauté chrétienne, dans le même texte que nous avons entendu, va essayer de nous faire rentrer dans cette belle tension qui peut y avoir, cette relation entre Jésus, le Verbe, et Dieu le Père.

Et à partir d'aujourd'hui, et tous les jours qui vont suivre, jusque dimanche prochain, nous allons entendre des textes de l'Évangile ou des textes pour la première lecture, qui vont nous dire cette relation du Père et du Fils, l’intimité de Dieu.

Cela va nous paraître parfois un petit peu obscur ou abstrait ; mais c'est pour bien dire la profonde relation d'amour, de responsabilité, de liberté, relation toute puissante entre le Fils qui vient parmi nous, en Jésus, et le Père.

 

Alors nous avons entendu cela : "le Verbe s'est fait chair, Il a habité parmi nous.

Il est venu chez nous ; Il était dans le monde ; le Verbe était la vraie lumière ; en Lui, était la Vie".

Ce Verbe tient toute sa lumière et sa gloire du Père.

Enfin, ces beaux mots et ce quatrième et dernier point : "Il a habité parmi nous", ceux que certains traduisent : Il a planté sa tente (comme pour faire référence à la tente dans laquelle le peuple d'Israël, en Exode dans le désert, tandis qu'il attendait de pouvoir rentrer dans la terre promise, cette tente dans laquelle il pouvait trouver la présence du Seigneur, là où demeurait l'arche, l'arche d'Alliance) ; eh bien, cette tente de la rencontre, tout d'un coup, va devenir Jésus lui-même ; Dieu qui vient planter sa tente au milieu de nous.

Il vient habiter, Il vient même vivre dans notre cœur ; ce Verbe, Il est venu au milieu de nous.

 

Avec la toute première communauté chrétienne, nous pouvons donc, comme elle le fait à travers cet Évangile, contempler ce Dieu qui descend et rendre grâce avec elle.

 

Amen.


Samedi 24 : veillée de Noël

 

Chers amis, ce soir je voudrais m'adresser d'abord aux enfants, (mais les adultes auront une oreille attentive), ensuite je m'adresserai aux moyens et puis ensuite, aux grands.

Assez simplement, s'il fallait expliquer aux enfants ce qui se passe ce soir, celui que vous regardez dans la crèche, celui qu'on a accompagné dans la crèche, ce tout petit enfant, celui que vous regardez comme si c'était votre petit frère ou votre neveu ; eh bien, c'est Dieu lui-même.

 Alors, vous pourriez me répondre ou me poser une question : "mais c'est quoi Dieu ?"

Et moi je vous dirais plutôt : "mais Dieu, c'est qui ? (Ce n'est pas quoi ! C'est qui ?)

Qui est Dieu?"

Et je vous répondrais : "c'est celui qui était bien avant vos parents, bien avant vos grands-parents, bien avant tous ceux que vous connaissez et bien avant tout ce que vous voyez.

Dieu, il était là et c'est lui qui en est à l'origine".

Et vous me diriez : "Mais au fond, pourquoi il est là, ce soir ?"

Pourquoi il est là ce soir ?".

Et je vous répondrais :" parce qu'il le veut bien ;il le veut, c'est lui qui veut être là".

Et peut-être, je dirais encore plus simplement, pour conclure : "mais il est là parce qu'il t'aime".

Et parfois, quand on aime, il n'y a pas beaucoup de pourquoi.

Alors ensuite, si je m'adresse aux moyens-grands, je dirais : "voilà Noël ; c'est l'aboutissement de quatre semaines de préparation.

La communauté paroissiale, tous les chrétiens, pendant quatre semaines, étaient dans le temps de l'Avent.

Et pendant le temps de l'Avent, ils ont suivi pas après pas, le cheminement d'une longue promesse qui commence depuis la nuit des temps (et plus précisément à Abraham) d'une alliance faite, défaite, refaite, redéfaite, reredéfaite et rerefaite et qui finit par culminer définitivement avec Jésus-Christ.

Et on l'accueille comme le descendant du grand roi David, un roi qui était extraordinaire, qui a fait l'unité de son peuple et qui était tellement bien que tout le monde voudrait qu'il revienne.

Et comme il n'était pas immortel, eh bien, il en faut bien un autre.

Il a fallu attendre onze siècles (parce que le roi David, c'est onze siècles avant J.-C.), pour que, au fond, cette promesse qu'il y en aurait un autre aussi bien, et sinon mieux, qui ferait encore mieux que lui d'une manière définitive, qu'on appelle le Messie, le Christ, serait de la descendance de David, par Joseph (le père de Jésus, donc) et puis qui serait fils de Dieu par Marie ; eh bien voilà, c'est lui, c'est Jésus que l'on accueille, ce soir.

Alors, ce serait une affirmation un peu catéchistique ; précise, néanmoins, qui dit pourquoi on fête Noël : eh bien, on fête la venue de celui qui nous est promis et que nous avons attendu pendant quatre semaines.

Alors, quand on fête ce Dieu qui se fait si proche, si proche, si proche qu'il devient presque et qu'il est même semblable à nous, on fête Dieu qui descend à nous et l'homme qui est tiré vers le Ciel.

Et puis, si je m'adressais aux adultes qui ont déjà un petit peu de l'âge, aux adultes qui ont charge d'une famille (enfants, voire même petits-enfants), si je m'adressais aux adultes qui ont un regard assez vaste, c'est-à-dire qu'ils connaissent bien le monde, qui commencent déjà à l'avoir digéré, qui commencent à savoir où ils se situent dans ce vaste monde, des adultes mûrs ; qu'est-ce que je pourrais dire, ce soir ?

La première chose, c'est que ce Jésus, il faut absolument maintenir qu’il n'est pas né dans un autre temps que le nôtre.

Ce Jésus, il n'est pas né, il était une fois, il y a longtemps ; et il ne nous promet pas de revenir dans un autre temps que le nôtre.

Dieu ne vient pas dans une époque dépassée, ancienne ou il ne vient pas dans un autre temps à venir ; il vient dans notre temps à nous ; si bien que, quand vous serez appelés à parler de Dieu ou de Jésus aux petits-enfants et aux enfants, n'en parlez pas comme une jolie histoire, qui se conclurait par : ‘ils eurent beaucoup d'enfants et ils étaient heureux’.

Ne commencez pas par dire : ‘il était une fois’, mon chéri, non non non non !

C'est dans notre temps.

Ce fameux Quirinius, gouverneur de Syrie, l'empereur César Auguste, ce ne sont des personnages de Tolkien, ce sont des personnages tout à fait situés dans notre histoire, dans notre temps.

La deuxième chose qu'il faut maintenir, c'est que ces villes : Nazareth et Bethléem, ne sont pas quelque part sur la lune ou, là encore, tout droit sorties de l'imaginaire d'un livre de science-fiction.

Ces deux villes (surtout avec le développement des moyens de communication), sont au centre du monde.

Elles sont distantes de 100 km à peu près : Nazareth et Bethléem, (on l'a entendu dans l'Évangile) ; si Bethléem est la ville du grand roi David, eh bien, elle est aussi la ville du Sauveur.

Mais ces villes sont situées, elles ne sont pas sur une autre planète ; si bien que, quand vous raconterez une histoire à vos petits-enfants, ne leur dites pas : ‘il était une fois, dans le fond d'une forêt ou je ne sais pas où sur une montagne’, c'est dans un pays tout à fait concret et réel.

Dieu se rend présent ici, il se rend présent dans notre histoire ; et c'est bien le sens de la fête de Noël.

Dieu se fait vraiment tout proche.

Alors, je voudrais vous livrer deux réflexions : ça, c'est pour les adultes soucieux, les adultes inquiets pour leur devenir, ceux qui ne savent pas à quelle sauce ils seront mangés dans un an, ceux qui se grattent la tête quand ils regardent la télévision (ils écoutent les nouvelles, le matin, au petit déjeuner), et qui se disent : "Oh la la! le monde, il est compliqué! "

Deux réflexions : la première, c'est qu'il y a comme deux logiques qui s'affrontent dans notre vaste monde.

La première logique, c'est la logique du territoire, la logique du terrain ; la logique de la tradition, la logique de l'ancrage, de la durée, de la permanence, de ce qui est solide, connu, fixe et qui dure : c'est la logique de nos villages, de nos quartiers typiques dans nos villes ; la logique de nos familles, quand elles sont encore capables de faire mémoire de ce que disait Mamie, de ce que disait l'arrière-grand-père, c'est la logique (vous savez), des cimetières, non pas à cause de la mort, mais à cause du fait que là, sont nos racines : c'est la logique des racines.

Et cette logique (première logique) et une autre, toute autre, qui est la logique du temps qui passe, la logique du fluide, du mouvement, du déraciné, de l'accéléré, du 'il faut toujours aller plus vite' et 'il ne faut pas hésiter à aller ailleurs', c'est la logique parfois, du rendement implacable, du calcul.

Ces deux logiques,on veut les voir s'affronter, aujourd'hui et notre territoire en fait les frais, quand il s'agit de faire fermer une usine ou d'imaginer des délocalisations (par exemple, mais c'est vrai ailleurs).

Deux logiques qui s'affrontent ; alors, les uns vont dire : "il faut conserver coûte que coûte quelque chose, quelque part parce qu'on sait bien faire" ; et les autres : "ça sera forcément mieux et plus simple et moins cher si, très vite, on fait quelque chose ailleurs".

Ces deux logiques, elles s'affrontent parce que notre cœur, il est comme ça ; notre cœur, c'est un cœur où on ne sait pas bien concilier les logiques contraires.

C'est une première réflexion.

Deuxième réflexion (vous allez voir où je veux en venir), une deuxième réflexion, toujours pour les mêmes, qui, le matin, quand ils écoutent RTL, ils ont peur ; quand ils regardent les informations, le soir, ils ont peur aussi.

La deuxième réflexion, c'est de dire, quand vous écoutez les nouvelles : vous avez une logique millénariste ; ce sont ceux qui vous promettent le grand soir ou le salut, très vite.

Alors, ça peut être religieux (jusqu'à se faire exploser quelque part) ou bien ça peut être, tout ce que vous voudrez d'autres ; et alors on vous annonce les grands programmes absolument efficaces comme jamais : le grand soir, l'absolu dans l'histoire : logique millénariste.

Ce n'est pas neuf, périodiquement dans l'histoire, ça vient : il y a eu beaucoup de corps ensanglantés à cause de cette logique, je vous signale.

On annonce le grand soir, le grand soir ne vient pas : logique millénariste, en face de laquelle nous allons avoir une autre manière d'être (diamétralement opposée), qui va être : le désenchantement, le désenchantement du monde.

Alors, on est sûr qu'on ne promet rien, puisqu'on n'attend rien.

Alors, parfois on se dit : il vaut mieux être comme cela parce que ça évite d'être déçu.

On n'attend rien, on fait disparaître tout mystère dans le monde et toute promesse, tout espoir (alors, c'est fichu, de toute manière...).

Pareil, on a besoin de se tourner vers quelque chose qui nous tire en avant, on a besoin d'entendre des promesses et en même temps, on a besoin d'être prudent.

Dans nos cœurs, ça rentre en conflit encore; c'est comme le territoire qui rentre en conflit avec le rendement, parce que notre cœur, il est comme ça, une fois de plus, c'est un cœur où ça s'entrechoque, on n’aime pas bien concilier les logiques contraires.

Eh bien, chers amis, la nuit de Noël (je ne le dis pas opportunément, je le dis parce que c'est vraiment le cœur de la foi chrétienne), la nuit de Noël vient apporter la réconciliation du cœur ; c'est-à-dire ce qui, en nous, nous empêche de concilier ces démarches contraires.

Car, oui, il faut bien que nous acceptions de vivre des moments de réforme et de transformation ; ça ne vient pas remettre en cause ni nos traditions, ni remettre en cause un élan et un espoir.

Oui, il faut bien se tourner vers l'avenir, mais oui, il faut bien être prudent.

Dieu qui vient dans notre temps et qui s'enracine dans notre histoire, c'est un Dieu qui apporte concrètement, ce que l'on appelle la paix (ou là encore, dans notre foi) la réconciliation.

Alors, cette réconciliation et cette paix sont à construire autour de nous; mais elles commencent dans notre cœur, là où, justement, ça s'entrechoque, là où jaillit la peur, la peur du changement, la peur de quitter, la peur d'aller trop vite.

Le Seigneur de l'histoire est celui qui vient apporter cette réconciliation.

Enfin, ma conclusion, c'est que, tout à l'heure, à la fin de cette eucharistie, je vous invite vraiment à regarder la crèche qui sera sur votre gauche, à la sortie ; nous y avons déposé l'enfant nouveau-né.

Eh bien, regardez cette crèche, et si vous êtes en famille : Papy, mamy, papa, maman et les enfants, tonton, tata etc, regardez-la en famille et dites-vous : on va être plusieurs générations à regarder cette crèche.

Les enfants, eux, ils regardent le présent ; les jeunes, ils sont plutôt tournés vers l'avenir (alors, avec enthousiasme ou avec résistance) et les plus âgés (papy, mamy, parents qui commencent à avoir de la bouteille, qui commencent à regarder dans le rétroviseur), mais tous, en regardant la crèche (au moment où on regarde la crèche), ça n'est plus ni rétroviseur ni pare-brise, ni présent ; quand on regarde la crèche, c'est un temps de réconciliation des générations.

Si vous voulez vivre un bon temps en famille, ce soir, commencez par regarder la crèche, ensemble.

Comme ça, les aînés cesseront de regarder dans le rétroviseur, les plus jeunes cesseront de fuir en avant et les enfants cesseront d'être obnubilés par le moment présent.

Toutes les trois générations, (vous allez regarder quoi ?), vous allez regarder Celui qui est, Jésus.

Il est l'amour.

Il n'est ni le passé, il n’est ni le présent, il n'est ni l'avenir ; Il est, il est l'amour, un cœur réconcilié, apaisé.

Commencez par-là, ce soir, et vous verrez : ce sera sympa.

 

Belle fête de Noël.


Vendredi 23 décembre :

 

Depuis les commencements de l'Évangile selon Saint Luc, il y a un certain parallélisme entre Jean-Baptiste et Jésus dans la façon dont est annoncée leur venue, dans la façon dont est préparée cette venue.

Et la Visitation a marqué une sorte de petite rupture dans ce parallélisme et nous revenons à ce parallélisme : nous voyons la naissance de Jean-Baptiste et nous allons donc découvrir, demain soir, celle de Jésus.

 

Il y a une petite originalité dans la naissance de Jean-Baptiste : c'est cette affaire du nom qui est donné à Jean-Baptiste : un nom selon la tradition, Zacharie, conformément à la tradition (justement, donner le nom du père) ou bien un autre nom, au prix d'une certaine rupture avec ce qu'il convient de faire.

 Et c'est conformément à ce qui avait été promis et selon la volonté de la mère ; ce sera donc un autre prénom, ce ne sera pas Zacharie : ce sera Jean.

 

 Cette nouveauté, il convient de la méditer, aujourd'hui ; car nous nous préparons à accueillir ce Dieu qui se fait tout proche de nous, à Noël (donc, demain), mais pourvu que nous le regardions autrement que si c'était le prolongement de nous-mêmes.

Quand nous contemplons la crèche, nous ne sommes jamais complètement indemnes du risque de nous contempler petit enfant, dans cette crèche, comme si c'était nous ou comme si c'était ce que nous aurions voulu être.

Mais c'est le Tout-Autre qui vient vers nous, même s'il nous est semblable, c'est le Tout-Autre.

Et d'ailleurs, pour nous, vous savez que Jean-Baptiste vient raccommoder la fidélité des hommes avec Dieu, lui, le prophète, (dans la lignée de tous les autres prophètes qui l'ont précédé), il vient la raccommoder.

Celui qui le suit, Jésus, vient accomplir ; celui qui le précède, vient raccommoder, préparer.

 

Pour qu'une fidélité soit possible, (mesdames, quand vous êtes encore avec messieurs ; ou bien encore mes sœurs, une fidélité avec votre propre vocation et engagement des débuts ; ou toutes celles ou tous ceux qui vivent seuls et qui veulent être fidèles à eux-mêmes), une fidélité n'est possible que si, en permanence, nous acceptons que l'autre soit vraiment différent de nous.

 Combien de fois, dans les aventures à deux ou à plus, nous ramenons l'autre à nous !

 C'est un petit peu comme quand on n'entend pas bien, voyez-vous, on pense que tout le monde n'entend pas bien ; enfermé dans sa difficulté à entendre, on pense que l'orateur fait exprès de ne pas parler fort et que la terre entière n'entend pas ce que dit l'orateur.

Eh bien ça, c'est un exemple de la difficulté à donner sa place à l'autre, qui est différent de soi.

Eh bien, si on n'entend pas bien, peut-être que les autres entendent, eux ; peut-être que l'orateur parle suffisamment fort.

 

Eh bien, toute aventure à deux ou à trois, c'est une aventure qui peut durer dans la fidélité, si j'accepte que l'autre soit un tout petit peu différent de moi, un tout petit peu distant, qu’il ne pense pas complètement pareil.

 

Eh bien, ce petit enfant, ce Dieu qui se fait proche, ce petit enfant, il est aussi le Tout-Autre ; et c'est le ministère de Jean-Baptiste : il nous l'a rappelé pendant les trois premières semaines de l'Avent.

Il est même conforme à cette espérance d'Israël qui attend le retour du prophète Elie, celui qui va préparer la venue du Messie.

 Eh bien, accueillons ce ministère de Jean-Baptiste, petit enfant qui naît aujourd'hui, avec un nom différent qui lui est donné,comme pour dire : préparons-nous à cette nouveauté.

 

 Accueillons, ou préparons-nous à accueillir le Tout-Autre, demain.

 Regardons ou préparons-nous à regarder dans la crèche celui qui s'est fait si proche et si semblable et pourtant, si différent.

 

 C'est à ce prix que le salut va frayer un beau chemin de lumière dans notre cœur. 


Dimanche 18 décembre : 4° dimanche de l’Avent

Is 7, 10-16 : Seconde intervention d’Isaïe.

Ps 23

Rm 1, 1-7 : Adresse.

Mt 1, 18-24 : Joseph assume la paternité légale de Jésus.

 

Le prophète Isaïe, au chapitre 7, (nous l'avons entendu dans la première lecture), dans le texte original hébreu, dit, en s'adressant au roi Acaz et à tous les siens : " C'est pourquoi le Seigneur lui-même, vous donnera un signe : voici que la jeune femme est enceinte, elle enfantera un fils qu'elle appellera Emmanuel, c'est-à-dire 'Dieu avec nous'.

Ce texte, 200 ans avant notre ère, a été traduit en grec et il est devenu : "c'est pourquoi le Seigneur lui-même, vous donnera un signe : voici que la vierge est enceinte, elle enfantera un fils qu'elle appellera Emmanuel, c'est-à-dire 'Dieu avec nous'.

Dans son songe, Joseph, au tout début de l'Évangile de Matthieu entend : " Ne crains pas, Joseph, de prendre chez toi, Marie ton épouse, puisque l'enfant qui est engendré en elle, vient de l'Esprit Saint.

Elle enfantera un fils, tu lui donneras le nom de Jésus, c'est-à-dire 'le Seigneur sauve' ; car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés".

Et l'évangéliste, de rajouter : "tout cela est arrivé pour que soit accomplie la parole du Seigneur prononcée par le prophète".

Et nous avons de nouveau cette parole : "voici que la vierge concevra, elle enfantera un fils, on lui donnera le nom d'Emmanuel".

La jeune femme est devenue la vierge, mais Emmanuel a demeuré : 'Dieu avec nous'.

 

On est au début de l'Évangile de Matthieu ; à la fin de l'Évangile de Matthieu, Jésus, (avant de monter au ciel), ses dernières paroles avant son Ascension, sont : "Je serai avec vous jusqu'à la fin du monde".

 

Il y a vraiment (retenons, pour ce quatrième dimanche), cette insistance ou cette promesse que Dieu est et demeurera avec nous. 

De quelle façon ? 

Vous ouvrez l'Evangile de Matthieu, comme nous l'avons fait aujourd'hui, nous tombons aujourd'hui, sur le verset 18 du premier chapitre.

Mais si vous regardez les 17 premiers versets, (c'était hier, à la messe), vous tombez sur la généalogie de Jésus, sa généalogie, ses aïeux, son ascendance et vous allez avoir tout un chemin, très sinueux d'ailleurs, qui part d'Abraham et qui va se terminer par Joseph et Marie, dans l'Esprit Saint, à la venue de Jésus.

Et ce 'Dieu avec nous', va traverser les circonvolutions humaines, (sa misère, on pourrait dire), sans jamais désespérer.

La puissance de la grâce va ruisseler, traverser cette terre épaisse de cette humanité, fort peu méritante; parce que dans la généalogie de Jésus :

il y a une paire d'incestes,

de la jalousie,

des meurtres fratricides,

il va y avoir des infidélités,

il va y avoir des adultères,

il va y avoir des rois infidèles, idolâtres,

il va y en avoir quelques vertueux, (quelques femmes étrangères, par exemple, toutes belles),

il va y avoir quelques repentance,

il va y avoir surtout beaucoup de foi (à commencer par Abraham qui quitte son pays en obéissance à cette promesse qui lui est faite),

il va y avoir des pardons demandés, beaucoup de regrets (pensons à David, par exemple),

il va y avoir deux rois un peu plus vertueux et fidèles au Seigneur que tous les autres.

Mais cette généalogie de Jésus, n'est absolument pas lisse, belle et propre.

C'est toute l'épaisseur d'une humanité que l'on pourrait comparer à une forme d'humus à travers lequel, lentement, vient pénétrer (comme une rosée pénètre la terre, lentement), lentement au cours des âges, la grâce.

Avant de pouvoir entendre cette parole qui est dite à Joseph, lors de son songe, au verset 18, nous avons ces 17 premiers versets qui nous rappellent le peu de mérite de cette humanité, au milieu de laquelle Dieu promet d'être et de demeurer.

Et il demeure et il arrive, par cette naissance que nous allons fêter dans 7 jours.

Dans son origine humaine, dans cette épaisseur humaine, Jésus, de la maison de David, va donc naître.

 

Mais il est aussi pour nous, cette grâce divine, ce qui va aussi le faire naître de cette Vierge, qui va dire : "oui"; ça c'est l'Evangile de Luc ; nous l'entendrons cette semaine.

Accueillons, en tout cas, cette fidélité de Dieu et cette patience : 'Dieu avec nous' traverse nos épaisseurs.

C'est sans doute, ce que nous pouvons retenir, pour ce quatrième dimanche.

 

À présent, il convient de faire un pas supplémentaire : ces 7 derniers jours sont des jours de préparation ultime pour fêter la naissance de Jésus, qui est né une fois pour toutes.

Il est né une fois pour toutes et il renaît à chaque instant.

Chaque fois que quoi ?

Alors, il y a des vieux cantiques qui le disent :

chaque fois que je vais ouvrir ma porte aux pauvres,

chaque fois que je vais partager,

chaque fois que je vais pardonner,

chaque fois que je ne vais pas être insensible à tous les cris;

à chaque fois, ce fils de Dieu va renaître.

 

Mais, nous contribuons à sa naissance, chaque fois que nous-mêmes, nous allons ouvrir une porte, la nôtre, la porte personnelle, la porte du cœur, reconnaissant que, à travers toute l'origine de Jésus, il y a des épaisseurs et des fragilités humaines autant qu’en nous, autant qu’en nous.

 

Durant cette semaine, nous allons pouvoir nous réjouir un peu, à la lumière de tous ces préparatifs de la naissance de Jésus.

Nous lirons dans l'Évangile, jour après jour :

le songe, donc, à Joseph, aujourd'hui ;

nous allons entendre l'annonce faite à Marie ;

nous allons avoir la Visitation de Marie à sa cousine Elisabeth ;

nous allons avoir la naissance de Jean-Baptiste ;

nous allons avoir le nom donné à Jean-Baptiste jusqu’à ce que ça culmine ultimement avec le 24 au soir, la naissance même de Jésus.

 

Pour nous préparer nous-mêmes, je vous invite vraiment avec force, à accueillir cette proposition qui nous est faite, et par l'Eglise et par notre paroisse, dans le prolongement de ce jubilé de la miséricorde qui s'est terminé il y a quelques semaines, à vivre nous-mêmes, le sacrement du pardon, pour être dans ce grand mouvement de cette grâce qui traverse nos épaisseurs humaines.

Le sacrement du pardon va être célébré en paroisse, par des confessions individuelles, mardi à partir de 10 heures à Ville sur Terre ; 

mercredi à partir de 18h30 à Bar sur Aube ; 

jeudi à partir de 10 heures chez les sœurs de Clairvaux, ici même.

Et en vivant le sacrement du pardon, nous entrons dans cette dynamique de la grâce, telle qu'elle nous est évoquée, au tout début de l'Évangile de Matthieu.

Le Seigneur vient traverser nos épaisseurs humaines.

 

Ne désespérons pas de nous-mêmes, surtout ; c'est une façon de comprendre qu'il est avec nous jusqu'à la fin.

Il est avec nous à une condition : que nous ne désespérions pas de nous-mêmes ni des autres, par ailleurs ; il fait le reste.

Il fait le reste.

 

Vous savez que la fête de Noël, c'est donc la venue du Sauveur, petit-enfant.

La venue du Sauveur petit-enfant, c'est pour nous un chemin de croissance.

C'est un chemin d'humilité et de croissance : nous entrons sur un chemin d'enfance, non pas pour devenir médiocre ou vénérable, mais pour entrer dans une vraie humilité et dans un cœur qui reconnaît que, devant le Père plein d'amour, nous sommes des petits-enfants, de qui, le Père, nous dépendons.

Et le sacrement du pardon n'est rien d'autre, et c'est déjà tout, que le moment où notre cœur de petit-enfant se tourne vers le Père, dans un moment absolument incontournable, (au catéchisme vous avez appris, qui s’appelle la contrition), mais que l'on peut dire par un autre mot, le regret : "Père, je regrette".

Non pas pour se faire punir, on ne va pas sortir la règle métallique, ce n'est pas le moment du jugement, c'est le moment de l'ouverture du cœur : "Père, je regrette".

Vous n'imaginez pas la puissance, la puissance de ce mot, qui est comme l'ouverture profonde des vannes de la grâce qui coule en abondance.

 

Celui qui a un cœur qui regrette, c'est quelqu'un qui a un cœur qui s'ouvre.

Et un cœur qui s'ouvre, c'est un cœur qui lâche prise, non pas qui devient vulnérable, mais qui, tout d'un coup, aime.

Lorsque l'on se réjouit devant la crèche à Noël, on est touché par cette humilité et ce chemin d'enfance que nous présente Dieu.

Mais, ne nous y trompons pas, c'est pour nous-mêmes : permettre que le Seigneur soit avec nous jusqu'à la fin des temps.

 

Tous ceux qui ont précédé Jésus, l'ont appris à leurs dépens : le Seigneur a durement travaillé leur cœur.

Eh bien, ça a fini par donner le 'oui' de Marie et l'obéissance de Joseph et cela nous a donné la venue de Jésus.

 

Alors, entrons dans cette démarche de la réconciliation, cette semaine, ultime moment (alors il est heureux : ce sont les vacances), ultime moment avant de vivre les fêtes de Noël et de les vivre comme un vrai moment de joie et de grâce.

Amen.


Vendredi 16 décembre

Is 56, 1-3a.6-8 : Promesse aux étrangers.

Ps66

Jn 5, 33-36 : Discours sur l’œuvre du Fils.

 

Cette fois-ci, nous sommes dans l'Évangile selon Saint Jean, juste pour clôturer cette période de l'Avent qui va se terminer aujourd'hui, avant une deuxième période qui commencera demain.

À partir de demain, si vous avez lisez vos 'prions en Eglise', si vous suivez la liturgie de chaque jour, vous verrez que cette fois-ci, nous serons plongés dans les textes des récits des événements qui précèdent la naissance de Jésus : la généalogie de Jésus chez Matthieu, le songe à Joseph, l'Annonce à Marie, la Visitation jusqu'à la naissance de Jésus en passant par celle de Jean-Baptiste, justement.

 

Là, on est chez Jean et dans ce chapitre 5, du verset 30 au verset 40 (donc nous sommes en plein milieu de cette petite partie), le mot 'témoignage' revient très souvent.

L'évangéliste Jean utilise très peu de vocabulaire ; il utilise le français pour les nuls, c'est-à-dire très peu de mots de vocabulaire mais c'est presque toujours les mêmes mots qui reviennent : la vérité, la lumière, les ténèbres, le témoignage etc...

Donc là, c'est le mot 'témoignage' qui revient souvent.

Et on peut, à partir de ça, faire la carte de relations de Jésus (ceux qui ont fait de l'Action Catholique, savent ce que ça veut dire).

La carte de relations de Jésus : une relation horizontale, Jésus–Jean-Baptiste, Jean-Baptiste–Jésus et c'est ce dont il parle, pour ensuite dire : j'ai plus grand que moi, une relation plus grande que celle avec Jean-Baptiste, une relation verticale cette fois-ci, avec le Père.

Alors, il y a d'autres relations encore qui apparaissent dans ces versets, ce ne sont pas ceux qu'on a lus, mais ceux qui viennent juste après ou ceux qui sont juste avant : il y a les œuvres que Jésus fait, qui lui rendent témoignage et il y a l'Ecriture qui rend aussi témoignage à Jésus.

Comme si les œuvres et l'Ecriture étaient une personne et qu'elle-même était en relation avec Jésus.

 

La relation entre le Père et Jésus c'est une relation qui va de haut en bas : le Père vient comme faire tomber sa lumière sur Jésus ; un puits de lumière qui vient d'en haut tombe sur Jésus pour dire combien Jésus, il a au-dessus de lui et derrière lui, beaucoup plus grand que lui, mais il faut passer par lui.

 En revanche, les œuvres, les œuvres que Jésus accomplit (alors lesquels?) : la guérison d'un aveugle-né, la guérison du paralytique au bord de la piscine, les noces de Cana, la multiplication des pains, pardonner cette femme pécheresse ; eh bien, toutes ces œuvres, c'est une relation de bas en haut : Jésus rend témoignage à son Père.

 Donc, le puits de lumière, c'est l'inverse : il part du bas et il va vers le haut ; Jésus éclaire le Père.

Tandis que quand il parle du Père, c'est le Père qui éclaire Jésus.

Et les Ecritures, c'est une relation un peu double entre nous et Jésus et entre Jésus et son Père ; comme si, à travers Jésus, les Ecritures nous mettaient en relation avec le Père.

 

Alors, si ce texte vient à ce moment-là, qui change un petit peu notre manière de voir Jean-Baptiste (puisque nous avons été habitués à Jean-Baptiste depuis plusieurs semaines) eh bien, c'est comme pour dire : ça y est, Jean-Baptiste, maintenant ; ça y est, maintenant, il s'efface.

Il a eu son ministère, ministère qui montre l'Agneau, qui montre celui qui est plus grand que lui, un ministère d'appel à la conversion (il est temps de se convertir, il est temps de se nettoyer les yeux, il est temps de se mettre en route, il est temps de se réveiller), maintenant, ça y est, il a fini, il s'efface ; comme quand, au cimetière, le prêtre s'efface au moment où il s'agit de mettre le corps en terre.

Il s'efface : maintenant, il y a plus grand que lui, c'est le Père lui-même, ou Jésus (si vous voulez), celui qui va naître.

 

Que notre relation avec Christ vienne faire grandir dans nos cœurs cette grandeur, cette profondeur, cette largeur et cette hauteur de l'amour que Jésus vit avec son Père.

Que nous ayons la même chose en nous, tout cet espace, tout ce volume extraordinaire, des cathédrales intérieures, parce que, en Jésus, par son Père, il y a du volume, il y a de la beauté, il y a de la grandeur, il y a de l'air, il y a l'amour.

Que nous l'ayons, nous aussi, attachés à Christ.

 

Amen.


Jeudi 15 décembre :

Is 54, 1-10 : La revanche de Jérusalem

Ps 29

Lc 7, 24-30 : Jésus rend témoignage à Jean-Baptiste.

 

Alors, un peu comme hier, nous retrouvons dans cet extrait de l'Évangile de Luc, ce que nous avons entendu à la messe la semaine dernière, chez Matthieu, cette fois-là.

Chez Matthieu, le texte (repris chez Luc, hier et aujourd’hui),faisait un seul et même passage.

Luc, néanmoins, a une petite originalité : c'est la fin.

 

"Tout le peuple qui a écouté Jean, y compris les publicains a reconnu la justice de Dieu en recevant le baptême de Jean ; mais les pharisiens et les docteurs de la Loi, en ne recevant pas ce baptême, ont rejeté le dessein que Dieu avait sur eux".

Les publicains, ce sont les taxateurs, c'est comme par exemple, Lévi ou Matthieu qui étaient collecteurs d'impôts.

Les publicains, c'était ceux qui prélevaient l'impôt.

 

Luc cherche à pointer du doigt, la lourde responsabilité de celles et ceux qui ne se convertissent pas et il met en avant, les pharisiens et les docteurs de la Loi.

Vous savez que ce sont les détracteurs, ceux qui sont en contradiction avec Jésus, en permanence.

En revanche, il montre qu'il y en a d'autres qui sont prompts à la conversion : ils se mettent en route, ils n'ont pas peur de perdre la face devant les autres, en reconnaissant qu'il y a possibilité de changer de vie.

Et ils le font en réponse, cette fois-ci, non pas à Jésus mais à Jean-Baptiste.

 

Quand Jésus dit dans cet Évangile :"Je vous le dis : parmi les hommes, aucun n'est plus grand que Jean et cependant le plus petit dans le Royaume de Dieu, est plus grand que lui".

Parmi les hommes, aucun n'est plus grand que Jean, même Jésus, du point de vue de la génération : Jésus est un tout petit peu plus jeune que Jean-Baptiste.

Jean le précède ; nous allons bientôt entendre la Visitation : Marie, qui, en toute hâte, va voir sa cousine Elisabeth.

Jean-Baptiste et Jésus, chacun dans sa matrice exulte, se réjouit à travers ces matrices.

Jean-Baptiste va naître avant, de quelques mois : Jésus est donc plus petit.

Néanmoins, c'est quand même lui qui ouvre la porte du Royaume.

C'est quand même Jésus qui est le plus grand, raison pour laquelle, Jean-Baptiste n'est pas le plus grand dans le Royaume.

 

Retenons, en tout cas pour nous, cette vive interpellation, pour que nous nous mettions en conversion, en chemin ; à la fois pour avancer, mais en même temps, en chemin pour changer.

Nous avons la semaine prochaine, trois possibilités de recevoir le sacrement du pardon ; le sacrement qui ne vient pas effacer l'ardoise.

La conversion ne sera pas terminée au lendemain du sacrement de la réconciliation.

Mais le sacrement de la réconciliation donne une grande force, un grand soutien, une grande tendresse, pour que nous démarrions ce chemin personnel de conversion.

Nous en avons besoin pour nous laisser rejoindre par le Sauveur.

Cessons de penser que ce sont toujours les autres qui ont besoin de se convertir en premier.

Commençons enfin, par le faire nous-mêmes ; le sacrement du pardon sera nécessaire.

 

Rendez-vous compte : le Seigneur vient jusqu'à nous comme si nous étions la femme abandonnée au désert (ce que tu as lu).

Eh bien voilà, laissons-nous convertir.

 

En route !


Mercredi 14 décembre : Saint Jean de la Croix

Is 45, 6b-8.18.21b-25 : Prière. Dieu, Maître de l’univers.

Ps 84

Lc 7, 18b-23 : Question de Jean-Baptiste.

 

Nous avons déjà lu ce texte de l'Évangile, chez Saint Matthieu ; c'était ce weekend.

Il y a quelques similitudes et quelques différences ; Luc et Matthieu n'ont pas retenu exactement la même chose de Jésus.

 

Chez Matthieu, tous les miracles que les disciples de Jean-Baptiste auraient dû voir, se sont produits deux chapitres plus tôt ; ici, eh bien, c'est de manière très concise, rapporté par Luc : "À cette heure-là, Jésus guérit beaucoup de gens de leur maladie et de leurs infirmités".

Donc, nous ne sommes pas invités à regarder deux chapitres plus tôt, mais à apprendre, qu'à cet instant, presque sous les yeux des disciples de Jean-Baptiste, Jésus opère des guérisons.

 

Mais il y a deux autres points qui méritent que nous nous arrêtions.

 Le premier, c'est que Luc met en avant, (plus que Matthieu), les aveugles.

Les aveugles semblent être mis en tête, chez Luc, et avec une très belle expression, pas très bien rendue en français.

En grec, il faudrait plutôt lire : ‘il leur fit la grâce de voir’; là, j'ai lu tout à l'heure, dans la version qui est sous mes yeux : ‘il accorda de voir’.

‘Leur faire la grâce de voir’, c'est une expression très rare dans l'Évangile, qui rappelle que la vue, (cette capacité spirituelle à discerner, à voir clair au-delà des apparences), est un don de Dieu.

Et que, plus que tout, les disciples de Jean-Baptiste comme tous les autres, ne peuvent découvrir l'efficacité du Messie, que si le Messie lui-même, leur en fait le don.

 

 Pour nous, quelques points d'attention : nous sommes vraiment invités à mieux voir, (pas avec nos lunettes) ; mais à mieux voir avec, ce qu'on pourrait dire, notre cœur (si vous voulez) ;

- mieux traverser nos obscurités, nos colères, nos démobilisations, nos peurs ; mieux les traverser par ce regard perçant de la foi, en demandant à l'Esprit Saint, qu'il vienne nous donner ce regard perçant de la foi;

 

- entretenir ce regard.

 

Alors, je viens de vous parler de la prière, mais on peut l'entretenir (et il faut l'entretenir) avec la parole de Dieu.

La parole de Dieu le nourrit, ce regard; comme on va nourrir une plante en lui donnant à boire ou un vieux cuir en lui donnant de la graisse.

Nourrir ce regard perçant par la parole de Dieu.

 

 Le troisième élément, c'est faire la vérité sur soi, en permanence : c'est le don du sacrement du pardon.

Sans se livrer à des grandes affaires psychologisantes, mais tout simplement regarder, là où nous avons de la peine à regretter, où nous avons de la peine à voir clair; mais tout simplement le confier dans le sacrement du pardon.

 

Ne sous-estimons pas la puissance que va donner le sacrement du pardon pour remettre à l'œuvre chez nous, chez chacun, un regard qui voit clair.

Ce n'est pas simplement laver son linge sale, voyez ; c'est vraiment redonner une capacité pour voir.

Car un cœur livré à lui-même, qui s'enferme dans sa cécité, va finir inévitablement par voir chez tous les autres, ce qui est d'abord chez lui : le monde entier va être rempli de pailles et de poutres, mais seul, le cœur de celui qui est malade, va être bien.

À moins que vous ne vouliez vivre sur une île déserte, eh bien, je vous invite vraiment à rentrer dans cette dynamique du renouvellement du regard.

 

 

Les aveugles voient, le Seigneur leur accorde la grâce de retrouver la vue.


Dimanche 11 décembre : Gaudete

Is 35, 1-6a.10 : Le triomphe de Jérusalem.

Ps 145

Jc 5, 7-10 : l’Avènement du Seigneur.

Mt 11, 2-11 : Question de Jean-Baptiste et témoignage que lui rend Jésus.

 

Avec le troisième dimanche de l'Avent, nous passons soudainement aux prémices de la naissance du Sauveur, de la venue du Messie.

Les premières lueurs de la crèche de Bethléem, déjà zèbrent l'horizon, notre horizon de la nuit.

 

Les prophètes, ce sont des hommes qui ont parlé dans la nuit : la nuit de l'exil, la nuit de la peur et la nuit des découragements, pour des hommes et des femmes de l'Alliance, qui se trouvaient quelque peu perdus, déracinés, loin de la source qui fait vivre.

Et dans la Bible, (beaucoup dans l'Ancien Testament, on retrouve cela dans la bouche de Jésus aussi, dans l'Évangile de Jean)il est question de la ténèbre, de la nuit.

Dans le livre d'Isaïe : "Veilleur, ne vois-tu rien venir ?"

 "Je vois une nuit et après le jour et encore la nuit".

 

Notre condition humaine, je ne vous apprends rien, l'élémentaire de notre condition humaine c'est cette alternance entre nuit et jour et de nouveau la nuit et encore le jour.

Ce qui suscite souvent dans nos vies, dans nos cœurs, de l'anxiété, de l'appréhension, de la nervosité ou de la retenue, c'est l'alliance difficile entre le jour et la nuit.

Nous sommes plutôt du jour, quand même ; pas trop de la nuit.

Nous préférons le jour qui réchauffe et rassure.

La nuit c'est le lieu des peurs, des fantômes.

Alors, il y en a qui sont de la nuit.

Et puis, il y a les nuits de l'existence : les maladies, les événements inattendus qui nous plombent.

Nous sommes plutôt du jour.

 

Mais on ne peut pas nier qu'il y a des alternances.

Le Dieu de l'Alliance, dans la création (le livre de la Genèse, au chapitre un), a séparé le jour de la nuit, mais il n'a pas enlevé la nuit.

Sa parole créatrice les a liés, les a liés; séparés mais les a liés tous les deux : "il y eut un soir, il y eut un matin" et c'est cette parole toute-puissante du Seigneur qui crée cette alliance jour-nuit, nuit-jour.

 

Si un jour quelqu'un frappe à votre porte et vous promet le jour éternel dans votre vie; fuyez ou bien alors, refermez la porte très vite.

Celui qui vous promet le jour éternel, le bonheur sans fin, se trompe, vous ment.

L'inverse aussi d'ailleurs.

Les marchands de mauvaises nouvelles qui vous promettent des catastrophes sans fin et la fin de tout, une nuit épaisse, se trompent également : refermez la porte et fuyez.

 

Le plus dur, le plus audacieux et le plus courageux, c'est celui qui traverse nuit et jour, jour et nuit, sans défaillir, sans reculer, confiant dans cette alliance qui … entre nuit et jour.

La joie promise par le prophète Isaïe et la joie de l'Évangile, c’est pour ceux qui traversent, qui ne séparent pas la nuit du jour, mais qui traversent ; c’est pour ceux qui vivent jusqu'au bout cette condition de l'homme ; et ce qui émerge de cette traversée, ce n'est pas le jour sans fin et la nuit sans fin, ce qui émerge de cette traversée, ce sont ces premières lueurs, les lueurs de l'aube, celles qui viennent réchauffer et rassurent : c'est la joie.

La joie promise par Dieu n'est pas quelque chose qui vient nous faire quitter notre condition d'homme, la joie promise par Dieu, c'est cette confiance et cette audace à travers nos nuits et nos jours, nos jours et nos nuits.

 

Saint Jean-Baptiste, au tout début de son ministère de prophète, a annoncé, dans l'Évangile de Matthieu (chapitre trois), qu'il allait y avoir, le Messie, l'Agneau de Dieu et qu'il allait agir comme un feu qui allait tout bousculer avec violence, pour annoncer, pour faire venir très vite, très très vite, un jour éternel.

Nous sommes huit chapitres plus tard, et Jean-Baptiste se retrouve en prison, c'est l'Évangile que j'ai lu.

Et il envoie des émissaires demander à Jésus : "Alors est-ce bien toi celui qui doit venir?"

"Oui, oui, c'est moi. Allez rapporter à votre maître ce que vous voyez".

Chapitre huit, chapitre neuf : Jésus qui réveille la fille de Jaïre, qui était comme morte, Jésus qui va guérir des lépreux, Jésus qui va rendre la vue à des aveugles.

Jésus n'agit pas comme un feu qui apporterait le jour éternel, Jésus est celui qui relève, redresse et apporte la joie à celles et ceux qui n'ont pas d'autres solutions que de vivre dans leur condition, à travers leurs nuits, à travers leurs jours.

Jésus est celui qui apporte confiance et joie.

Alors, c'est une invitation pour nous à rentrer dans la patience.

 

Saint-Jacques nous parle de la patience, c'est un apôtre extrêmement concret, Jacques.

Dans sa lettre que nous avons lue, plusieurs fois, revient l'idée de patience et d'autres idées.

Je commence par celle de la patience.

Celui qui n'est pas un homme ou une femme de patience mais qui a le tempérament tempétueux, c'est celui qui voudrait mettre le couvercle définitivement sur toutes les nuits de nos vies et qui voudrait ne regarder que le jour.

Bon c'est bien, mais ce n'est pas très réaliste et ça produit quand même beaucoup de violence.

La patience est mère de sainteté.

Rentrons dans cette patience pour pouvoir voir poindre les premières lueurs de la joie que nous promet St Jean.

 

Jacques rajoute une autre idée dans sa lettre : la médisance.

Je lis : "Ne gémissez pas les uns contre les autres, ainsi vous ne serez pas jugés".

La médisance, c'est terrible puisque la médisance n'est ni une parole vraie ni une parole fausse : il y a des médisances vraies et il y a des médisances fausses ; mais les médisances sont des paroles qui tuent, qu'elles soient vraies ou qu'elles soient fausses.

Elles tuent à bout portant, c'est le terrorisme fraternel.

Vous parlez à quelqu'un et vous savez que vous allez lui faire mal, "bim", quel que soit ce qu'il dit.

Ça peut être une vérité comme ça peut être quelque chose de faux.

La médisance est une façon de plonger dans la nuit éternelle celui à qui on s'adresse.

Mais, très souvent, comme le promet Jacques, cette nuit éternelle va se retourner contre celui qui la prononce.

 

Patience, fuyons la médisance et rentrons dans cette tranquille endurance qui nous permet de traverser nuit et jour, jour et nuit et voir poindre les premières lueurs de la joie.

Voilà par anticipation ce que la crèche nous promet en cette nuit de Noël, que nous allons vivre maintenant.

 

Amen.


Vendredi 9 décembre :

Is 48, 17-19 : Le destin d’Israël

Ps 1

Mt 11, 16-19 : Jugement de Jésus sur sa génération.

 

Voilà, nous sommes invités à accueillir ce texte de l'Evangile vraiment pour ce qu'il est, c'est-à-dire une critique très forte à travers l'image de Jean-Baptiste ; une critique que Jésus lui-même, nous adresse.

 

Alors, on peut le prendre dans tous les sens.

Si nous commençons autour de ce que l'on prête à Jean-Baptiste et que l'on prête au Fils de l'homme : l'un est possédé alors qu'il est ascète dans sa conduite (il ne mange pas il ne boit pas) ; l'autre, au contraire et on vient le critiquer.

Peut-être que l'on peut pointer, à la fois la médisance. (la médisance, c'est un vrai poison, en fait) et on peut aussi pointer notre contradiction, notre contradiction.

 

Voilà ce que nous avons, ce que nous attendons, mais ça ne nous plaît toujours pas.

Une figure, le Fils de l'homme vient répondre à ce que nous attendons face à la critique adressée à Jean-Baptiste, mais ça ne plaît toujours pas.

Médisance et contradictions.

 

Et puis, la première partie du texte : "A qui vais-je comparer cette génération ? "

À des gamins qui engagent un rite funéraire.

Jouer de la flûte, engage un rite funéraire dans cette partie-là de l'Évangile, (ça n'est pas uniquement pour faire la fête) mais c'est pour mettre en route tout ce que la ritualité juive imposait en ce temps : une danse, une danse funèbre, lamentations, se frapper la poitrine.

Des gamins annoncent un deuil et personne n'entre dans le deuil.

 

Ça peut être une critique forte de la perte du sens du rituel ou de la ritualité ou des obligations de la vie sociale.

Et peut-être, là encore, cela peut nous interroger nous-mêmes sur la manière dont nous nous investissons ou du moins, nous comprenons, nous sommes engagés de l'intérieur de nous-mêmes, dans tout ce qui peut constituer notre vie communautaire.

 

Voilà donc quelques critiques que Jésus fait et qui peuvent nous interpeller nous-mêmes dans notre propre façon de vivre notre foi.

Médisance, contradictions, peut-être légèreté dans notre façon de nous engager dans tout ce qui constitue nos obligations communautaires.

L'occasion de nous redire que nous aurons dans une dizaine de jours, la possibilité de vivre le sacrement de la réconciliation et que, pour bien nous aider à rentrer dans ce sacrement, eh bien, soyons attentifs aux interpellations de la parole de Dieu.

Ces interpellations prépareront notre cœur pour que nous puissions confesser l'amour de Dieu.

 

Amen.


Mercredi 7 décembre : St Ambroise

Is 40, 25-31 : La grandeur divine.

 Ps 102

Mt 11, 28-30 : Jésus, doux et humble de cœur, Maître au fardeau léger.

 

C'est seulement St Matthieu qui se souvient de ces paroles de Jésus, les trois autres évangélistes ne les rapportent pas.

Et, il n'y a que dans cette partie-là de l'Évangile de Matthieu, que l'on parle du cœur de Jésus.

C'est beau : "Je suis doux et humble de cœur".

 

Alors, le fardeau, le joug, ça renvoie à la Loi, cette Loi qui est très lourde à porter, très contraignante ; dans un langage moderne, on dirait très culpabilisante.

Jésus s'en plaint très fort auprès des pharisiens, à la fin de l'Évangile de Matthieu, au chapitre 21 : il leur reproche par leur rhétorique, (par leur manière de parler de Dieu), de rendre son chemin vers lui encore plus culpabilisant.

Et Pierre, dans les actes des Apôtres, alors que le tout premier concile de l'Eglise sera réuni (le fameux concile de Jérusalem), va dire lui aussi, après une expérience personnelle où il verra descendre du ciel les animaux impurs interdits à la consommation et une voix qui lui dit : ‘immole et mange, Pierre, ce n'est pas grave’ ; il dira, il plaidera lui-même, même si en vérité, Paul lui reproche d'avoir été très frileux sur la question, mais il plaidera lui-même, en faveur d'une autre interprétation de la Loi ; ou bien encore d'une autre façon de comprendre le chemin qui mène vers Dieu.

 

Le chemin qui mène vers Dieu est un chemin de (alors, souvenez-vous, il y a un an et un jour nous sommes entrés dans le jubilé de la Miséricorde ; on n’a pas oublié, normalement) ; ce chemin qui mène vers Dieu, c'est un chemin de miséricorde.

Alors, nous sommes sur la ligne de crête, sur une montagne : à la fois un chemin très exigeant, qui nécessite, effectivement, beaucoup, beaucoup d'efforts ; et en même temps un chemin très rassurant ou allégeant (on va dire), très souple, permettant à chacun d'avancer avec son propre péché.

 

Alors, retenons cette image du cœur de Jésus doux et humble, qui nous propose de trouver le repos et sachons que, pendant ce temps de l'Avent, nous sommes invités à la pénitence, nous sommes invités à vivre un temps de pardon, de réconciliation.

Peut-être faut-il le rappeler, le plus important dans la réconciliation sacramentelle (dans le sacrement du pardon, dans la confession), le plus important c'est ce gros mot : la contrition ; c'est-à-dire, non pas la liste, (l'aveu), non pas la liste des péchés numérotés par ordre d'importance pour gagner des points, (quand on va voir le prêtre) ,c'est important ; ce qui est plus important encore, c'est la démarche qui précède (une démarche d'ailleurs, très personnelle), à la lumière de la parole de Dieu : "Seigneur, je suis tout petit devant toi".

Un peu comme ce, (souvenez-vous) ce publicain, dans le temple, qui n'ose pas lever les yeux et qui dit : "Seigneur, prends pitié de moi, je ne suis qu'un tout petit, devant toi".

Ça, c'est l'acte de contrition ; eh bien, c'est ça qui fait le sacrement.

C'est ça qui produit la puissance de la réconciliation que Dieu nous donne, parce que ensuite, on avoue et que ensuite, on a la ferme volonté de changer, mais c'est cette démarche du cœur.

"Venez à moi vous tous qui ployez sous le poids du fardeau, je vous procurerai le repos".

 

Bienheureux sommes-nous si nous rentrons dans ce chemin, cette vérité et cette vie que nous donne le Christ.

 

Amen.


Jeudi 1° décembre : Saint Eloi

Is 26, 1-6 : Hymne d’action de grâce

Ps 118

Mt 7, 21. 24-27 : la maison sur le rocher et la maison sur le sable.

 

Jésus pointe un verbe important, dont les nuances sont difficiles à rendre en français.

En français, on va dire écouter, écouter, le verbe écouter; mais Jésus, il veut aller plus au fond encore, parce qu'on peut écouter très distraitement et on peut écouter de façon à ce que ça ne produise rien, ou à ce qu'on ne se souvienne même pas de ce qui a été dit, ou qu’on s'en souvienne mais que ça ne nous engage pas.

Jésus veut parler d'un "écouter" qui va jusqu'à signifier "accueillir", jusqu'à ce que ça se grave dans notre cœur ; donc c'est un verbe qui veut même dire entendre, accueillir, accepter, consentir.

On accueille ces mots jusqu'à ce que ça ait un effet dans notre cœur, c'est quand même pas rien.

Ça a tellement d'effet dans notre cœur que sa parole va produire son fruit et que la maison va demeurer debout.

 

On sait par ailleurs, dans l'Évangile, vers la fin, que Jésus dit qu'il est la pierre angulaire sur laquelle l'architecte bâtit ; et il est cette pierre angulaire grâce à laquelle tout l'édifice va être solide.

Et puis, on sait aussi qu'il va dire de Pierre (Simon Pierre), qu'il est le roc sur lequel il va fonder son Eglise.

Donc, il y a une idée de solidité, de durée, de parole qui produit son effet parce qu'elle est accueillie en Jésus et dans l'Eglise.

 

 

Ça me fait penser un extrait du livre d'Isaïe (pas celui qu'on a lu, un autre), où il est question que la parole de Dieu est comme la pluie ou la rosée : elle tombe mais elle ne remonte pas au ciel tant qu'elle n'a pas produit son effet. 


Mercredi 30 novembre : St André

Rm 10, 9-18 :

Ps 18a

Mt 4, 18-22 : Appel des quatre premiers disciples.

 

Voilà des pêcheurs de poissons, des hommes qu'on pourrait imaginer un peu rustres, voici qu'ils sont choisis : Simon, André, ensuite Jacques et Jean.

Ils sont choisis, non pas pour être de bons répétiteurs, des gens qui vont redire ce que Jésus a dit ; mais pour devenir des disciples, ce qui n'est pas pareil.

 

Ils ont été appelés pour être envoyés.

Ils deviennent vraiment des envoyés.

Et il leur faut, en fait, tout leur ministère à la suite de Jésus ; enfin, tout ce chemin que Jésus leur fait faire entre ce lac et la Croix.

C'est un long temps de catéchèse, un très long temps de formation.

Saint Matthieu, un peu comme Marc par ailleurs, dit que les choses vont très vite : "aussitôt, ils le suivirent".

C'est peut-être vrai physiquement ; peut-être qu'ils ont suivi, aussitôt.

Mais pour former à la poutre il faut du temps.

 

Il faut se laisser engendrer.

Vous savez peut-être que l'on va fêter avec la nativité, l'engendrement du Fils de Dieu et notre propre engendrement dans la foi : ça, c'est la fête de la nativité.

 

Mais les apôtres, et Paul en premier ; c’est Paul qui va beaucoup l'écrire, le dire, ont été engendrés aussi, mais pas dans la naissance de Jésus.

Ils ont été engendrés dans sa mort et sa résurrection.

C'est la raison pour laquelle d'ailleurs, dans cet extrait de la lettre aux Romains, il est redit : "si dans ton cœur. tu crois que Dieu l'a ressuscité d'entre les morts, alors tu seras sauvé", tu seras engendré.

"Nulle difficulté, nul obstacle, nulle menace sur ton chemin d'apôtre n'aura raison de ton espérance et de ta foi, car je suis le premier-né d'entre les morts".

 

Voilà, nous sommes dans le mois de l'engendrement, et au fond, André, au tout début, nous aide, un peu comme quelqu'un qui va inaugurer cette marche vers d'autres engendrements plus doux, il est vrai, plus beaux: celui, à la crèche.

 

Alors, demandons au Seigneur, peut-être non pas d'avoir la même fin que celui qui est mort à Patras, en Grèce, là, comme cela, crucifié, André ; mais d'avoir une fin de beau disciple à la suite de Jésus.

 

Donc, pas simplement des bons répétiteurs, mais des beaux disciples, des envoyés prompts à témoigner, vivre, montrer que Jésus est ressuscité.


Dimanche 27 novembre : 1° dimanche de l’Avent, dimanche autrement.

Is 2, 1-5 : La paix perpétuelle.

Ps 121

Rm 13, 11-14a :Le chrétien est enfant de lumière.

Mt 24, 37-44 : Veiller pour ne pas être surpris.

 

Voilà, chers amis, je ne vous apprends rien si je vous rappelle que nous sommes des hommes et des femmes de désir.

Une aspiration profonde, très grande pour obtenir un objet, une personne, franchir une ligne, que nous convoitons.

Une force nous traverse ; ce qui, déjà, se prépare dans des arbres, qui là, ont déjà perdu leurs feuilles et qui vont se préparer au printemps.

Cette force qui nous traverse tous, une aspiration vers une fécondité quelle qu'elle soit : imaginez un torrent, un torrent de montagne, pour exprimer cette force.

Cette force, elle peut être, soit contrariée, (ce qui peut produire beaucoup de souffrance personnelle, autour de soi, parfois, des conflits, des tristesses intérieures), ou bien cette force, elle peut parvenir à sa fin, elle peut être réalisée, elle peut se réaliser.

Et alors, elle va produire de la joie, de la satisfaction et engendrer une force plus grande encore.

 

Chers amis, la parole de Dieu, dès aujourd'hui et pour ces quatre semaines qui nous préparent à Noël, n'a pas d'autre ambition que de revisiter, pour nous, avec nous, ce que nous faisons de nos désirs.

Qu'est-ce que l'on en fait ?

Il n'y a pas de désir inintéressant dans nos vies.

Avoir envie de manger du chocolat ou décrocher la lune, sont tous les deux des désirs; ne fermons pas les yeux sur ces désirs.

Vouloir faire la guerre ou vouloir faire la paix, ce sont des désirs; ne fermons les yeux sur ces désirs.

Il y a des désirs bons, il y a des désirs qui ne le sont pas, (c'est une autre caractéristique du désir) ; un désir qui va nous accomplir, construire, édifier, faire grandir ; et il y a des désirs (vraiment une aspiration profonde), qui vont détruire, diviser, faire tomber.

Il n'y a pas que des désirs exaucés ou des désirs contrariés ; il y a des désirs qui édifient et des désirs qui n'édifient pas.

Nous sommes tous traversés par ce torrent.

 

Nous croyons, c'est notre foi, (la présence d'Emeline et Tiphaine, ce matin nous le rappelle avec force : c'est heureux que vous fassiez votre entrée en catéchuménat, aujourd'hui), nous croyons que la parole de Dieu, si nous nous y attachons, vient consolider et orienter nos désirs, pour qu'ils parviennent vers la paix.

Nous croyons que cette parole de Dieu vient conjuguer nos désirs personnels et ceux des autres, pour édifier la paix ; un peu comme nous aurions besoin d'un tuteur pour qu'une plante se redresse, que nous aurions besoin de faire une assemblée pour qu'un malentendu soit dissipé.

Nous croyons que la parole de Dieu, si nous nous y attachons, vient orienter, concourir à la paix.

 

Il y a plusieurs images dans la parole de Dieu d’aujourd'hui, qui nous disent quelque chose du désir: "montons à la montagne du Seigneur", "venez", "tous les peuples afflueront vers toi Seigneur".

La maison peut être percée en pleine nuit (la maison, vous savez, c'est souvent le cœur, le cœur de l'être, son cœur); une maison percée, une porte fracturée, c'est un cœur qui a été pénétré à son insu, un cœur divisé, un cœur fragile ; on imagine l’existence qui a du mal à tenir toute seule debout.

Il y a des désirs qui viennent briser les fondements de l'existence, parfois.

 

"Veillez donc", nous dit Jésus dans cet extrait de l'Évangile de Matthieu, "veillez donc" précisément, attachez-vous à cette parole, pour que vous ne laissiez pas vos désirs vous écarteler dans tous les sens, vous fatiguer, vous épuiser, vous faire tomber.

Ces désirs, s'expriment profondément dans cette vérité fondamentale qui nous traverse tous : nous sommes des êtres d'attente.

 

Nous attendons souvent plein de choses, dans la vie ; plein de choses.

Et nous sommes aussi des hommes et des femmes de promesses.

Combien cela nous fait plaisir d'entendre quelqu'un d'autre nous faire une promesse, que nos attentes, (l'une ou l'autre) se réaliseraient.

Car ça nous fatigue d'attendre ; on peut s'impatienter d'attendre.

Mais, tant qu'il y aura du désir en nous, il y aura de l'attente.

Et tant que ce désir ne parviendra pas à sa fin, il n'y aura pas d'attente satisfaite.

Combien nous avons besoin d'une promesse qui vient apaiser ces attentes, qui vient orienter et calmer ce désir.

 

Abraham, être de désir, c'est lui que vous trouverez quand vous sortirez tout à l'heure dans la crèche, à gauche, en sortant, dans l'église; celui qui ressemble à ce berger dans le désert, c'est Abraham, le père des croyants, homme qui a attendu; qui aurait pu exploser, lui qui voulait avoir une descendance : sa femme était stérile.

Dieu lui a fait une promesse, et au lieu d'exploser, au lieu de rester allongé chez lui, il s'est mis en route, le père d'une multitude de croyants, dont nous sommes ce matin, signe que Dieu accomplit ses promesses (si nous sommes là, c'est que Dieu accomplit sa promesse) : "Tu auras une descendance nombreuse" : Eh bien, voilà, on en est une portion de cette descendance nombreuse, en Jésus.

Et nous marcherons, dimanche après dimanche, pour parvenir à découvrir que Dieu accomplit sa promesse en venant faire éclore, dans cette maison du cœur, sa parole, sa paix.

 

Combien nous en avons besoin, de cette paix, alors que, comme dit Job, parfois, dans la Bible, nous ployons sous le poids du jour !

Le livre de la Sagesse nous le redit : "vanité des vanités", il y a un jour, il y a un matin, il y a un soir, on travaille, on se couche, la succession des jours vient nous rappeler que parfois, c'est long d'attendre.

Dieu accomplit sa promesse, l'attente n'est pas vaine.

 

Je m'adresse à vous, Tiphaine, Emeline : vous, vous n'êtes pas baptisées, vous êtes grandes.

Alors, Emeline, toi, tu es au lycée, en classe de terminale ; Tiphaine, tu es grande, mère de famille.

À un moment donné, vous avez senti que, dans votre cœur, à la fois, il y avait de la dispersion (il y en a eu par le passé, et puis, tout d'un coup ça se conjugue, ça vient se tisser, ça fait une belle trame : tiens, c'est curieux, c'est curieux !), et puis, par un concours de circonstances ou par l’effet de la grâce, (allez savoir), vous avez frappé à la porte de la paroisse.

On vous a dit : tiens, baptême ou KT ou je ne sais quoi.

Alors pour ce qui est de Tiphaine, c'est la préparation au baptême de ta petite fille ; Emeline, le désir de pouvoir partager la foi de ta grand-mère.

Et puis, tout d'un coup, (c'était votre projet au départ : c'est vous qui avez frappé à la porte, on n'est pas allé vous chercher), tout d'un coup, depuis plusieurs mois, vous vous préparez, parce que ça ne n'est pas aujourd'hui, ça fait au moins six mois qu'on se prépare, vous dites : "en fait, ce n'est pas moi qui ai frappé à la porte (si c'est moi qui ai frappé à la porte), mais, en fait, c'est le Seigneur lui-même qui est venu à ma rencontre en premier, c'est lui qui m'a attiré vers lui, j'en suis très heureuse, alors je peux dire comme une réponse : oui, me voilà, je viens à toi".

Le baptême n'est encore pas pour tout de suite, il y a encore du chemin, mais c'est le sens de cette étape, ce matin.

 

Une attente qui croise une promesse : "relève-toi, ma fille, tu seras mon enfant, je t'aime, je t'ai choisi et je suis venu loin, loin, loin, te chercher".

Ainsi, vous ne serez plus fatigués par vos attentes, vous ne serez plus dispersés par vos désirs, et en vous attachant fermement à la parole du Seigneur, vous finirez par connaître dans votre cœur, la paix, le plus beau cadeau que le Seigneur puisse faire à ses enfants.

 

Amen. 


Vendredi 25 novembre 

Ap 20, 1-4.11à21, 2 : Le règne de mille années. Le jugement des nations.

Ps 83

Lc 21, 29-33 : La parabole du figuier.

 

Matthieu et Marc, qui se souviennent de ces paroles de Jésus, ont une mémoire plus grande encore, puisqu'ils se souviennent de deux strophes supplémentaires, qui ne sont pas rapportées par Luc.

Ils disent : "nul ne sait quand est-ce que ça va survenir, sauf le Père ; même pas le Fils, ni les anges, seul, le Père sait quand est-ce que tout ceci va arriver.

Mais ça va arriver, et mes paroles ne passeront pas".

 

Voilà, alors qu'est-ce qu'il va arriver ?

Eh bien, c'est tout ce que l'on a lu les jours d'avant ; donc, ce long passage de l'Évangile de Luc où il est question de destructions, de catastrophes, d'effroi qui peuvent être autant devant nous, qu'en nous.

 

À la fois, dans la lecture du livre de l'Apocalypse et dans la lecture de cet extrait de l'Évangile, on entend souvent le verbe :"voir".

Alors dans l'Apocalypse, ce sont des visions de Saint-Jean; alors, il voit.

C'est normal, il voit : je vis, j'ai vu dans le ciel.

Et là, Jésus, insiste beaucoup : "voyez, le figuier et les autres arbres.

Quand vous verrez arriver cela, sachez que le Royaume de Dieu est tout proche.

Regardez-les, dès qu'ils bourgeonnent".

Voir.

 

En fait, au fond, la grande question de la parole de Dieu, en ce jour, à la veille (l'avant-veille) du temps de l'Avent, c'est de se demander : est-ce que l'on voit clair ?

Car c'est la condition pour bien connaître Jésus-Christ et son propre temps.

Si on ne voit pas clair, on peut toujours se gausser de croire, on peut toujours approfondir sa foi, voilà…mais est-ce que vraiment on connaît comme Jésus-Christ connaît ?

Eh bien, peut-être pas.

Il nous faut donc travailler sur notre : voir.

 

Voir ; effectivement pas simplement, nous le savons, avec nos yeux ; mais notre capacité à symboliser et à accueillir, donner du sens à ce que nous voyons.

Et là, c'est plus compliqué, parce qu'il y a beaucoup d'interférences personnelles dans notre histoire, dans notre cœur, qui font que ce que nous voyons, n'est pas nécessairement ce qui est à voir.

 

On peut faire un test : quand vous vous regarderez dans votre miroir, demain matin, au réveil, vous regarderez vos cheveux.

Vous direz, (ou pas), mais vous pourrez dire (alors, il faut qu'il y en ait des cheveux) : voilà, mes premiers cheveux blancs ou mes nouveaux cheveux blancs.

Est en train d'arriver le printemps éternel.

 

Amen.


Mercredi 23 novembre : St Clément 1er et St Colomban

Ap 15, 1-4 : Le cantique de Moïse et de l’Agneau.

Ps 97

Lc 21, 12-19 : Les signes précurseurs.

 

Nous retrouvons un extrait de l'Évangile (avec hier, aussi) que nous avons entendu, il y a une dizaine de jours à la messe.

Vous vous souvenez, dans l'Évangile de Luc, avec cette finale : "c'est par votre persévérance que vous garderez votre vie".

J'aime bien sa version d'origine, en grec : "c'est par votre endurance que vous posséderez votre âme".

Endurance, on voit ce que ça veut dire.

En tout cas, c'est un mot qui est propre à Paul ; Saint-Paul quand il veut parler de la foi.

Il y a quelque chose qui est de l'ordre de la course ou bien encore parfois, de la guerre, avec cette armure de la foi.

Et Luc reprend ce terme.

Je ne sais pas s'il a entendu Paul le dire, mais il reprend ce terme.

 

"Vous garderez votre âme".

C'est un résultat au fond.

C'est un résultat, cette âme ; nous l'avons ou nous ne l'avons plus, mais au terme de toute une endurance.

 

Et laquelle ?

Eh bien c'est une endurance grâce et à cause du nom de Jésus, (ça paraît plusieurs fois dans l'Évangile), pour éviter de tomber dans les sirènes de ceux qui font prendre des vessies pour des lanternes.

Vous savez, sur ce trépied significatif de l'existence : la vie, la mort et le désir, eh bien il y a beaucoup de sirènes qui nous font prendre la vie, la mort et le désir, nous font l'accueillir, l'appréhender, l'envisager, d'une façon bien courte.

 

Et Jésus donne un autre sens et c'est ce sens-là que nous voulons pour nous.

Eh bien, en nous mettant en route à la suite de Jésus, nous avons dit : "nous voulons vivre de ta vie ".

Alors, ne nous arrêtons pas en si bon chemin, car nous vivrons effectivement de sa vie, si nous avançons avec lui.

Voilà, donc, ce n'est pas le moment de faillir sur cette route ; donc, continuons.

 

Et nous pouvons faillir comment ?

Qu'est-ce qui nous ferait faillir sur cette route, sur ce chemin ?

Eh bien, par toutes ces illusions, ces faux-semblants, ces sirènes, ces vessies (dont je vous parlais tout à l'heure), qui au fond, nous feraient croire que cette vie à la suite de Jésus, pourrait miraculeusement nous paraître plus savoureuse qu'elle ne l'est.

La vie à la suite de Jésus n'est pas toujours une affaire savoureuse, souvenez-vous de ces rouleaux amers au ventre, dont certains prophètes ont fait l'expérience.

 

Alors, le nom de Jésus contre le nom de la Bête, puisqu'il est question du nom de la Bête, dans l'Apocalypse.

Eh bien, cette Bête est multiforme et ceux qui ont trempé leur vêtement dans le sang de l'Agneau, ont été victorieux de cette Bête.

Ce récit que nous avons lu dans le chapitre 15 de l'Apocalypse, nous fait penser peut-être, à un récit que nous lisons à la Veillée Pascale : la traversée de la mer Rouge.

La mer et le cristal, personne ne se voit, et à la fin il y a un cantique.

Ce n'est pas : " il a jeté à la mer, cheval et cavalier", mais "grandes, merveilleuses, tes œuvres, Seigneur, Dieu, Souverain de l'Univers".

 

 

Ne nous arrêtons pas en si bon chemin, "c'est par notre endurance que nous gagnerons notre âme".


Jeudi 24 novembre : St André Dung-Lac et ses compagnons

Ap 18, 1-2. 21-23 ; 19, 1-3.9a : Un ange annonce la chute de Babylone. Chants de triomphe au ciel.

Ps 99 

Lc 21, 20-28 : La ruine de Jérusalem, les catastrophes cosmiques et la manifestation glorieuse du Fils de l’homme

 

Alors, Saint Luc, à la fin de ce petit extrait, nous décrit, (quand il écrit cet Évangile), il ne dit pas : "rédemption" ; il dit : "avènement".

Avènement, c'est un mot que l'on va beaucoup réemployer dans les textes de l'Ecriture, pendant le temps de l’Avent, en parlant de l'avènement du Fils de l'homme ou l'avènement de celui qui est promis : le Messie ; son advenue, si ça vous dit quelque chose.

Alors, ça a été traduit par rédemption.

Alors, Saint Matthieu, pour dire la même chose, il emploie un autre mot.

St Matthieu, c'est un évangéliste qu'on entendra beaucoup pendant toute l'année qui vient.

Et lui, il ne dit pas "avènement", il dit un mot que, Mesdames, vous qui avez mis au monde, vous connaissez bien.

Il dit : "délivrance", votre délivrance.

Mais, pas forcément au sens où on sort d'une prison, voyez; au sens : j'accouche.

Ce n'est pas forcément, je m'échappe de quelque chose, que plutôt : un cadeau m'ai fait, mais au prix, effectivement de quelques douleurs (et encore, c'est petit, je pense !).

 

Alors on peut méditer sur ce mot : "avènement" et peut-être "délivrance", si ça vous parle plus ; mais, dans le sens où Jésus se manifeste à nous, vraiment, dans notre histoire, comme elle est.

Et on a des histoires personnelles, qui sont parfois turbulentes comme la prise de Jérusalem : voyez ; on imagine des scénarii, un peu catastrophes, mais parfois dans nos vies, au fond de nous, il y a un peu comme une catastrophe intérieure ; ça arrive d'être tourmenté comme si ça s'effondrait à l'intérieur de nous, comme ça s'effondre parfois, à l'extérieur de nous.

 

 Eh bien, c'est jusque-là et c'est dans ça aussi, que Jésus vient se révéler.

 Jésus, il ne vient pas se révéler en disant : "hop, j'efface tout et on passe à autre chose", voyez ; ou il ne nous dit pas : "pour me connaître, quittez ce qui ne va pas en vous".

 C'est dedans notre histoire qu'il vient, Jésus ; ce n'est pas à côté.

 C'est à l'intérieur de notre histoire qu'il vient, ce n'est pas à côté.

 C'est un petit peu dans ce sens-là que, par exemple, (par rapport à la Centrafrique), ce geste important de la visite du pape François, au moment d'ouvrir la porte de la miséricorde, au moment de l'ouverture du Jubilé ; c'est dans ce sens-là, à l'intérieur de cette histoire, histoire nationale particulière, mais qui connaissait beaucoup de signes analogues à celui de l'Évangile ; eh bien, Christ vient là.

L'idée, ce n'est pas de dire : "arrêtez vos affaires, faites place nette pour que le Christ vienne"; non, non, c'est à l'intérieur de cette histoire trouble.

 

Alors, comment faire pour accueillir Jésus dans cette histoire trouble ?

Eh bien ça, ça sera ce que nous diront les textes à partir de dimanche, qui vient.

En tout cas, n'ayons pas peur de nos peurs ; ça peut être aussi une autre façon de parler de l'Évangile d'aujourd'hui et de l’accueillir, aussi.

N'ayons pas peur de nos peurs, Jésus arrive très bien à tracer sa route à l'intérieur.

 

Amen. 


Dimanche 20 novembre : le Christ-Roi de l’univers.

2 S 5, 1-3 : Sacre de David comme roi d’Israël.

P 121

Col 1, 12-20 : Primauté du Christ.

Lc 23, 35-43 : Jésus en croix raillé et outragé. Le "bon Larron"

 

Chers amis, en cette fête du Christ-Roi, il est heureux que nous croisions également cette fête de nos amis musiciens, chanteurs : la Sainte Cécile ; tradition qui nous est chère en ces terres, parce que le concours que peuvent apporter le chant et la musique à la liturgie, notamment à l'eucharistie, nous permet de mieux comprendre, nous remettre davantage dans les sentiments de ceux et celles qui ont été à l'origine de la vie de l'Eglise.

 

On va pouvoir faire un petit travail d'imagination.

Nous sommes au lendemain de la Pentecôte, donc 51 jours après la résurrection de Jésus.

Qui avons-nous ?

Nous avons ces fameux disciples devenus apôtres, des hommes un peu rugueux, pas de grande culture, pêcheurs de poissons et terriens.

Et nous avons quelques femmes, dont Marie, mère de Jésus ; et toute une bande d'hommes et de femmes que Jésus a attirés à lui au cours de sa route entre la Galilée et Jérusalem.

Souvenez-vous : une dizaine de lépreux guéris.

Avant de l'être, ils disent : "Seigneur, prends pitié de moi".

Vous avez cet aveugle à Jéricho :"Seigneur, prends pitié de moi".

Vous avez cette femme cananéenne que Jésus rencontre :"Seigneur, prends pitié de moi".

Vous avez ce publicain dans le temple vous qui ose à peine regarder ce pharisien qui se croit juste.

Il baisse la tête, il dit : "Seigneur, prends pitié de moi".

Et puis encore, toute une collection d'aveugles, d'adultères, de pécheurs de toutes sortes.

 

Ces hommes et ces femmes sont des pardonnés qui deviennent des pardonnant.

Eux non plus, ne sont pas de grande culture, des gens simples; pas bêtes, simples!

Ils n'ont plus grand-chose à faire valoir, sinon le nécessaire qui est dans leur vie.

Des hommes et des femmes tout simples, pardonnés qui deviennent pardonnant.

 

Voici ce que nous avons au petit matin du lendemain de la Pentecôte.

Voilà la bande (si j'ose m'exprimer ainsi) de bras cassés qui entoure Jésus, à l'origine de notre vie d'Eglise.

Ils se retrouvent toutes les semaines pour fêter la résurrection de leur Maître et Seigneur, leur Roi ; leur Roi, car personne d'autre que lui, leur a pardonné.

Ils étouffaient dans leurs pratiques sociales et religieuses qui n'arrêtaient pas de leur rappeler qu'ils étaient des mauvais, des pécheurs.

Qui ne l'est pas?

Oh les sales pécheurs!

Seul,Jésus, le Roi, leur dit: " je te pardonne".

De pardonnés, ils deviennent des pardonnant.

 

Peu à peu, et nous arrivons au quatrième siècle, ces rendez-vous hebdomadaires de cette bande de bras cassés qui se multiplient autour du bassin méditerranéen, va créer ce que l'on appelle : la messe.

Ils se retrouvent depuis l'origine, autour d'un repas.

Un repas, pas plus.

Donc, c'est à l'heure du déjeuner.

Pourquoi ?

Parce qu’à l'occasion d'un repas (sauf, si on a trop bu), nous sommes relativement égaux, d'une part ; et d'autre part, nous sommes plus aisément, à la fête.

Nous n'avons rien à faire valoir, nous sommes à table.

Ce n'est pas le moment de régler nos petites affaires, c'est le moment de partager le repas, comme Jésus l'a fait.

 

Mais des prières primitives se sont déployées dans ce repas, le fameux : "Seigneur, prends pitié de moi" des dix lépreux, de la cananéenne, même du Roi David dans son psaume 50, ce fameux "prends pitié de moi" du publicain, nous le retrouvons dans le "Kyrie eleison", car les premières liturgies étaient en grec.

On parlait grec, mes amis, ils se retrouvaient en parlant grec.

 

"Kyrie eleison : "Seigneur, prends pitié de moi", c'est ainsi que commence la messe.

"Christe eleison" : "Christ, prends pitié de moi", par trois fois.

La messe ne commence pas sur fanfare et tambour battant pour dire la gloire d'un puissant, la messe commence sur l'évocation toute simple de ces pécheurs pardonnés et pardonnant.

 

Le "Gloire à Dieu", (Gloria) ; car au sixième siècle, tous les chants sont passés en latin sauf le "Kyrie".

Le "Gloire à Dieu" reprend le chant des anges (nous sommes dans l'Évangile de Luc, chapitre deux), à Bethléem, dans le ciel, "gloire à Dieu au plus haut des cieux", souvenez-vous vos Noëls passés.

Gloire à Dieu, gloire à lui, celui qui nous a pardonnés.

Et ensuite, nos chers aïeux ont glosé et ont fait toute une adresse au Christ Seigneur, des invocations à Jésus pour terminer sur : gloire à toi Père, gloire à toi Fils, gloire à toi Esprit Saint.

 

Le fameux "Sanctus", pour introduire la grande prière eucharistique.

Le fameux "Sanctus" reprend la liturgie céleste que nous voyons dans l'Apocalypse.

Si vous étiez à la messe, cette semaine, vous avez entendu le chapitre 4 et le chapitre 5 du livre de l'Apocalypse : les anges et les archanges dans le ciel, qui, devant le trône et devant l'Agneau, participent à cette liturgie du ciel en reprenant les mots, d'ailleurs, entendus dans le livre d'Isaïe, chapitre 6 : "Saint, Saint, Saint, le Seigneur, Dieu de l'univers.

Le ciel et la terre sont remplis de ta gloire".

Et tout de suite après, nous reprenons les mots de l'entrée de Jésus à Jérusalem ; quand nous étions dans cette église, au moment des Rameaux, avec nos palmes à la main, l'Evangile que nous avions, (vous vous souvenez ?): " hosanna, au plus haut des cieux.

Voici celui qui vient au nom du Seigneur", voici notre Roi, monté sur un âne, (nous ne savions pas encore que nous allions le crucifier).

C'est exactement ce que nous chantons dans le Sanctus et ce que nous chantons depuis le quatrième siècle, dans ce repas.

 

L'Anamnèse, que nous entendrons tout à l'heure en français, sur un air anglo-saxon bien connu.

Cette Anamnèse redit que nous sommes là pour faire mémoire (le mot anamnèse, ceux qui ont fait médecine ou grec savent, eux, anamnèse, anamnesis : se souvenir, faire mémoire).

Nous faisons mémoire de la mort, de la résurrection de Jésus et nous redisons ses mots à lui et nous refaisons ses gestes.

 

Donc, nous ne sommes pas là uniquement pour nous remplir le ventre, nous sommes à table pour faire comme il l'a dit.

 

L'Agnus : "Agneau de Dieu", juste au moment où le prêtre rompt le corps du Christ, l'hostie, reprend, là encore, des mots de la parole de Dieu.

L'Agneau, c'est l'Agneau Pascal (repris de l'Ancien Testament), mais c'est celui du chapitre 5 de l'Apocalypse, l'Agneau qui participe à cette liturgie céleste, qui est à côté du trône, mais c'est surtout celui que Jean-Baptiste désigne (dans l'Evangile de Jean) : " voici l'Agneau de Dieu, celui qui enlève le péché du monde".

Cet Agneau, c'est celui qui est sacrifié à notre place, c'est celui qui permet que nous devenions des pécheurs pardonnés, et surtout des pardonnés pardonnant.

 

Le Royaume de Jésus n'est pas un Royaume de façade ou de pouvoir temporel, le Royaume de Jésus est le Royaume de tous ces pauvres qui n'ont rien à faire valoir d'autre que ce pardon.

 

Amen. 


Vendredi 18 novembre

Ap 10, 8-11 : Le petit livre mangé.

Ps 118

Lc 19, 45-48 : Les vendeurs chassés du Temple. Enseignement dans le Temple.

 

Il m'est déjà arrivé au catéchisme, de découvrir que même les catéchistes ne savaient pas pourquoi Jésus était mort.

Même les catéchistes !

Je ne vous poserai pas la question : pourquoi Jésus est-il mort ?

On trouve souvent, on retient un raccourci de la Passion, le vendredi Saint : à cause des romains.

Voilà, les méchants romains ont tué Jésus.

Et ça n'est pas une raison.

 

Jésus est mort à cause des siens, pas à cause des autres, déjà d'une.

De deux : il s'adresse directement aux siens, les plus religieux ; de deux.

Et de trois, à ceux et celles qui ont fait de leur foi un commerce, dans tous les sens du terme ; tous les sens du terme, pas simplement achat-vente, mais un commerce.

C'est-à-dire au fond, le centre de leur foi a été perdu.

Ils se sont en revanche, eux-mêmes perdus dans un certain nombre de périphéries de leur foi, sans intérêt, des détails, comme on dit.

 

Alors d'ici, on va se dire : "oulala, c'est compliqué".

Ça nous parvient dans l'Évangile par cette affirmation brutale, du milieu de cet extrait de l'Évangile, une citation du livre d'Isaïe : "ma maison sera une maison de prière" ; et la sentence de Jésus : "or vous, vous en avez fait une caverne de bandits".

 

La maison, (le Temple d'Israël, ce temple, lieu de la rencontre de toutes les nations pour reconnaître le Dieu de l'Alliance), au lieu de chercher à reconnaître celui qui y est présent tout en étant invisible, on va commencer à s'occuper de mille détails : on transforme donc la foi en un commerce ; mille détails, mais qui sont tout à fait périphériques à la rencontre de Dieu.

 

"Ça, c'était il y a deux mille ans", va-t-on dire, "à Jérusalem" ; ça a coûté la vie de Jésus, tout de même, donc la chose était quand même assez périlleuse à dénoncer.

Pas simplement la dénoncer mais à corriger cette chose-là, ce problème, d'une certaine façon.

La question est de savoir : est-ce que c'est un problème qui date seulement d'il y a deux mille ans ?

Et la réponse que je vous fais et que le pape François fait et que n'importe quel disciple de Jésus peut faire, (sans lire dans une boule de cristal), c'est de se dire que : ce problème est toujours actuel et que, ceux qui sont attachés à Jésus peuvent se fatiguer ou s'occuper de mille détails sans aucun intérêt, (finalement), par rapport à cette rencontre promise avec le Christ.

Mille détails, on peut en faire la liste.

Alors, il y a les détails les plus flagrants ; les plus flagrants c'est quand deux chrétiens se fichent dessus par exemple, surtout à la sortie de la messe.

Deuxième détail flagrant, c'est tout ce que l'on va dire par derrière : et pschut pschut pschut et pschut pschut pschut et puis Madame machin et Monsieur truc.

Troisième détail, c'est quand on se divise : ça ce sont des détails flagrants.

Il y a des choses qui passent plus inaperçues, parce que ça ne paraît pas négatif, ça ne paraît pas mauvais, parce que ça ne produit pas de choses ‘pas belles’.

Mais ça peut être, par exemple, des questions autour de l'argent, autour de la manière de regarder ou de ne pas regarder les pauvres, de s'ouvrir ou de ne pas de s'ouvrir.

Est-ce que c'est intéressant une communauté qui est douillette, chaleureuse, nombreuse, mais qui est incapable d'accueillir qui que ce soit qui ne fait pas partie du clan ?

Alors, on se ne s'en aperçoit pas ça, parce qu'on est content d'avoir tel monde, que c'est chaleureux, que peu ou prou, on s'entend, (évidemment, parce qu'on n'aborde pas les sujets qui fâchent).

Mais dès qu'il s'agit d'accueillir deux, trois personnes différentes, ça ne va pas.

Alors, sur les sujets qui paraissent moins flagrants, un Évangile comme celui-ci, nous invite aussi à ouvrir les yeux.

 

Mais si Jésus est mort hier, il continue à mourir aujourd'hui pour les mêmes raisons : c'est parce que ces détails nous fâchent.

Et à chaque fois qu'ils nous fâchent, eh bien, nous tournons le dos à celui qui nous appelle ou bien, on en revient aux détails les plus flagrants: on s'en prend à son frère, on va causer derrière etc.

C'est dur finalement, la suite de Jésus.

Donc, voilà pourquoi il est mort.

 

Il est mort hier et il mourra aujourd'hui et malheureusement, peut-être, encore demain.

Mais cette mort, elle a vaincu le mal, parce qu’il a été plus fort, dans la mesure que, au fond, la véritable communauté du Christ, ce n'est pas là où il y a du monde, ce n'est pas là où c'est riche, ce n'est pas là où c'est efficace, ce n'est pas là où c'est fervent ou pieux, la véritable communauté de Jésus, eh bien, c'est là où il y a des bras cassés, c'est là où il y a des pauvres, c'est là où c'est tout petit, c'est là où ça ne va pas toujours, finalement.

E c'est ça, sa résurrection.

 

Quand on va célébrer la fête du Christ-Roi, dimanche, on va dire ça : " oui! C'est notre Roi".

Mais alors, on va avoir un texte de l'Évangile, vous savez lequel ?

Où il va être sur la croix avec les deux larrons.

Il y a quand même plus glorieux, hein?

C'est comme si on fêtait l'élection d'un président de la république sous la pluie, par exemple voyez !

Comme si ! Par exemple.

Eh bien, c'est pareil : Christ-Roi glorieux ; paf : eh bien, il est sur une croix, deux larrons.

 

En fêtant notre Roi, on fête à la fois un Messie humilié et en même temps celui qui a donné raison aux plus petits.


Jeudi 17 novembre

Ap 5, 1-10 : Dieu remet à l’Agneau les destinées du monde.

Ps 149

Lc 19, 41-44 : Lamentation sur Jérusalem.

 

Alors, hier nous lisions, un chapitre, (le chapitre d'avant) du livre de l'Apocalypse, celui qui précède ce que nous avons lu aujourd'hui.

Nous avions vu une belle et grande liturgie céleste avec le Dieu créateur au centre, sur son trône, le Roi créateur.

 

Et là, Jean voit toujours une belle liturgie céleste, mais à la place, il voit l'Agneau.

Alors l'agneau, ça vous dit quelque chose ?

Pâques ; ça fait penser à Jésus qui s'offre : "voici l'Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde", dit le prêtre, quand il montre le corps du Christ brisé.

 

Et on continue à préparer cette fête du Christ-Roi de l'univers, dimanche.

Donc cet Agneau au centre, c'est, comme hier d'ailleurs, (je vous avais dit à ceux qui étaient là) : c'est le Christ-Roi.

Nous nous préparons à reconnaître et à louer celui qui est notre Roi.

Mais il n'est pas arrivé comme ça, ce Roi.

 

Et dans l'Évangile, Jésus a quitté Jéricho et il monte à Jérusalem.

Il arrive à Jérusalem et avant d'entrer dans la ville, il pleure ; ou du moins, il est pris quand même, d'une émotion importante, très grande émotion.

Il reconnaît, avant même de pénétrer dans la ville, cette ville qui ne reconnaît pas ce Dieu qui vient la visiter.

Seul, saint Luc se souvient de cette scène ; mais ça donne toute son épaisseur à la façon dont Jésus va devenir Roi.

 

Il devient Roi, parce qu'il ressuscite mais parce que Jésus est allé jusqu'au bout de sa mission, dans un amour infini et une liberté très grande ; mais une mission qui ne va pas être reconnue comme telle.

Ce n'est qu'après, après, que les uns et les autres vont ouvrir les yeux… Après.

Mais, ça n'était pas trop tard.

Il devient ce Roi, à la fois bafoué et en même temps, celui qui apporte un salut très grand.

Nous avons un Roi dont le pouvoir ne réside pas dans les forces humaines.

Nous avons un Roi dont le pouvoir réside dans sa fidélité à son Père, quels que soient, (c'est ce que nous voyons), tous les événements qui ont pu surgir dans sa vie, qui ont été jusqu'à sa mort.

Son pouvoir ne réside pas dans son armée, dans ses ministres, ses courtisans, son argent, il va résider dans cette fidélité à son Père.

 

Il est digne d'ouvrir le Livre.

Il a été immolé, alors, c'est une réalité du peuple de l'Ancienne Alliance, (du peuple juif), il a été offert en sacrifice.

Donc, nous terminons cette année liturgique pas à pas, jusqu'à cette image qui nous reste d'un crucifié qui est la source de tout.

Amen.


Mercredi 16 novembre

Ap 4, 1-11 : Dieu remet à l’Agneau les destinées du monde.

Ps 150

Lc 19, 11-28 : Parabole des mines

 

 Le livre de l'Apocalypse que nous lisons aujourd'hui, que nous avons lu hier, nous permet de contempler aujourd'hui, une belle liturgie, une liturgie céleste qui était aperçue dans une vision par Jean.

 

 Jean a une vision assez semblable à celle d'Ezéchiel, à celle de Daniel et d'Isaïe ; et celui qui est au centre de cette vision, c'est le Dieu créateur.

 D'où la présence des Vivants, ces fameux quatre Vivants, que bien vite, la tradition chrétienne a assimilé aux quatre évangélistes.

 On peut imaginer que ça n'était pas du tout (on peut imaginer!), que ce n'était pas du tout le sens de cette vision chez Jean : les quatre Vivants couverts de quantité de paires d'yeux et qui louent ou vénèrent, en même temps que ces Anciens, ce Dieu créateur ; avec cette très belle hymne en plein milieu, que l'on reprend d'ailleurs, à l'eucharistie (qu'on va chanter tout à l'heure), qui vient du livre d'Isaïe (du moins on la trouve aussi dans le livre d'Isaïe, au début), et puis, cette autre hymne plus inédite, tout à la fin, que nous avons coutume de prendre dans la liturgie des heures (je pense entre autres à nos sœurs, mais c'est ouvert à tous, il y en a d'autres aussi qui prient (des consacrés), la liturgie des heures, et reprennent cette hymne).

 C'est une très belle liturgie devant un roi, qui est sur ce trône.

 Ces Vieillards peuvent faire penser à quantité de personnes différentes : alors soit des Anciens du peuple d'Israël, soit 2 fois 12 tribus d'Israël,soit les Anciens des synagogues ou bien encore les Anciens, tels qu'ils apparaissent dans les lettres de Paul ou de Pierre quand ils s'adressent aux Anciens, c'est-à-dire aux aînés et aux plus sages des communautés chrétiennes.

 Ce sont eux qui, en tout cas, il y a des Anciens qui vénèrent ce Roi créateur.

 

Retenons cette liturgie, et puis, nous n'hésiterons pas à l'associer à ce que nous lirons demain, la suite, le chapitre suivant dans l'Apocalypse : cette fois-ci, le Roi ne sera plus le Créateur, ce sera l'Agneau.

 Mais ne les dissocions pas ; ces deux-là ont été unis, ce sont d'ailleurs les mêmes, pour les chrétiens : le Verbe fait chair était tout près de Dieu depuis la création du monde et il est le Créateur. 

 

 Jésus monte à Jérusalem, dans l'Evangile ; hier, il était à Jéricho, il a rencontré Zachée.

 Vous savez pourquoi il monte à Jérusalem : il va connaître sa Passion et il va surtout devenir Roi.

 Et vous savez que nous nous préparons à fêter le Christ-Roi de l'Univers, dimanche.

 

 Et, dans cette parabole qu'il raconte, avant d'amorcer sa montée à Jérusalem, il s'agit d'un roi, du moins quelqu'un qui part avant de revenir roi.

 Il part, il n'est pas roi ; il revient, il est roi.

 C'est peut-être une parole, déjà par anticipation, une parabole qui servirait à nous encourager, une fois de plus, parce que, en fêtant le Christ-Roi de l'Univers, dimanche, nous fêtons une fin (j'en ai beaucoup parlé) du calendrier liturgique ; et en même temps, un effacement.

 Voilà, ce Christ-là, s'efface pour réapparaître petit-enfant, à Noël, comme cet homme qui, dans la parabole, s'efface avant de revenir Roi.

 

 Une royauté qui est à la fois, définitivement acquise, et en même temps, qui est à construire, à l'image de ces trois personnages qui ont reçu chacun une part, mais chacun n'a pas su la faire fructifier de la même façon.

 Christ est Roi, mais cette royauté, bien que définitive, elle va s'étendre progressivement dans le cœur de chacun. Il faut du temps, des années, des années et beaucoup de travail de la Grâce.

Amen.


Mardi 15 novembre : St Albert le Grand

Ap3, 1-6. 14-22 : Lettres aux église de Sardes et de Laodicée.

Ps 14

Lc 19, 1-10 : Zachée

 

Dans le livre de l'Apocalypse, l'ange s'adresse à plusieurs églises.

Nous avons ici celle de Sardes et celle de la Laodicée.

Dans le texte, entre les deux, il y a aussi celle de Philadelphie.

Mais la liturgie ne nous propose pas ce que l'ange dit à l'église de Philadelphie.

À l'église de Laodicée, voici ce qu'il dit : "tu es tiède et c'est pour cette raison que je vais te vomir.

Tu te crois riche, alors, je te le conseille…"

 

"Alors, je te le conseille", rappelle cette parole que Jésus adresse à tous les pécheurs, les petits, (surtout les pécheurs), avec tendresse et miséricorde, lorsqu'il dit : "lève-toi" ou "va, ne pèche plus".

C'est avec cette même tendresse, cette même miséricorde, que l'ange s'adresse à l'église de Laodicée en disant : "je te le conseille".

C'est cette même exhortation pleine de compassion, comme Jésus, lorsqu'il voit des foules affamées et sans berger, Jésus qui est pris aux entrailles.

L'ange, au nom du Seigneur, de la même façon, adresse un conseil, pris aux entrailles, à cette église qui a été fidèle, qui est née en lavant son vêtement dans le sang de l'Agneau, mais qui est devenue tiède, et qui est tombée dans les sirènes des idoles.

"Alors, je te le conseille : achète chez moi ; achète ; viens et vois"

" Où demeures-tu Seigneur?"

"Viens, achète ; viens avec moi à la crèche ; viens prendre l'odeur des brebis ; viens t'allonger avec moi sur la paille ; n'aie pas peur d'avancer avec moi jusqu'à la Croix, de perdre beaucoup pour être riche autrement.

"Viens, achète de mon amour ; choisis-moi ; viens à ma suite.

 

"Achète chez moi pour t'enrichir, de l'or purifié au feu, des vêtements blancs pour te couvrir et ne pas laisser paraître la honte de ta nudité, un remède pour l'appliquer sur tes yeux afin que tu voies".

" De l'or pour t'enrichir, des vêtements blancs pour te couvrir, un remède pour l'appliquer sur tes yeux" : trois remèdes qui s'appliquent à trois états, ou trois moments de la vie du pécheur.

Le pécheur pèche toujours, en réponse à un besoin.

Nous ne pouvons pas nous défaire de nos besoins : nous sommes des humains, nous ne sommes pas des choses.

"Pour t'enrichir, achète de l'or".

Le besoin de connaître a conduit la femme du jardin d'Éden à prendre du fruit, connaître le Bien, le Mal.

Peut-être, le besoin chez Zachée, l'a conduit à mettre dans sa poche.

"Achète chez moi pour t'enrichir" : premier moment du pécheur.

 

Deuxième moment, la honte : "après qu'ils eurent mangé du fruit, ils se découvrir nus, ils avaient honte ".

 

"Un remède pour l'appliquer sur tes yeux pour que tu vois" : troisième étape du pécheur, du pécheur gracié.

C'est exactement ce que la mort et la résurrection de Jésus produisent, jusque chez ses aïeux du jardin des origines.

Chassés du jardin, obligés de travailler et de souffrir et du travail et des douleurs de l'enfantement, il leur fallait retrouver la vue , comme Saul devenu Paul, comme les aveugles qui voient dans l'Évangile, comme Pierre finit par choisir son Seigneur, après l'avoir renié trois fois et avoir été trois fois pardonné.

 

"Achète chez moi pour t'enrichir, de l'or ; pour te couvrir, des vêtements blancs ; un remède pour voir".

Ce que l'ange propose à l'église de Laodicée , c'est de revivre son baptême.

À notre tour de nous laisser entraîner sur ce chemin pour revivre notre baptême.

Amen.


Dimanche 13 novembre :

Ml 3, 19-20a : Triomphe des justes au Jour du Seigneur.

Ps 97

2 Th 3, 7-12 : Actions de grâces pour les nouvelles reçues.

Lc 21, 5-19 : Discours sur la ruine de Jérusalem. Les signes précurseurs.

 

Chers amis, nous pouvons accueillir ce texte de l'Evangile avec plusieurs niveaux de lecture. 

 Le premier niveau de lecture c'est : l'exactitude historique de ce que Jésus annonce, car ces faits effrayants peuvent ressembler, parfois, à des faits qui nous sont beaucoup plus contemporains.

 L'année liturgique se termine souvent avec cette évocation dans l'Évangile, de ces signes effrayants, de ces phénomènes cosmiques et de ces divisions des nations les unes contre les autres, et même à l'intérieur des familles et des communautés.

 

 Au temps de Jésus, que s'est-il passé ?

 Surtout par rapport à cette annonce de la destruction du temple.

 Le temple de Jérusalem a, en effet, été détruit une cinquantaine d'années après que Jésus a annoncé sa destruction.

 

 Quand Jésus parle du temple, il est dans un temple qui est en cours de reconstruction.

 C'est le roi Hérode qui en a décidé sa reconstruction.

 Un temple qui avait été détruit par Nabuchodonosor, le roi de Babylone.

 Le temple, c'est la centralité de la vie religieuse juive, la vie politique aussi.

 Le temple que Jésus regarde, c'est un temple presque terminé, mais déjà flambant neuf, beau.

 Il sera, en effet, une nouvelle fois, détruit et définitivement, au moment de la révolte de Bar Kokhba, qui sera détruit par les factions romaines.

 Et puis, aujourd'hui, il n'en reste qu'une ruine.

 L'esplanade du temple, pour celles et ceux qui, parmi vous, ont déjà vu sur place ou à la télévision, c'est ce lieu avec quelques contreforts accessibles, et l'un d'entre eux, c'est un mur devant lequel nos amis juifs prient : c’est le fameux mur des lamentations.

 Et sur cette grande esplanade, il y a une mosquée qui a été construite, après : c'est cette grande mosquée avec un dôme jaune, doré, que l'on voit souvent sur les représentations de la vieille Jérusalem, dans la vieille ville.

 Donc, le temple a bien été détruit.

 

 Et puis, un certain nombre de phénomènes que Jésus expose se sont produits, toujours à partir des années 70 : il y a eu des persécutions en grand nombre et une dispersion des juifs et des juifs devenus chrétiens.

 Une dispersion qui a produit une expansion, d'ailleurs, du christianisme, tout autour du bassin méditerranéen.

 Et puis, cet autre phénomène des divisions à l'intérieur des familles s'est aussi produit, surtout à l'intérieur des familles judéo-chrétiennes, à cause précisément de ceux qui ne s'étaient pas convertis à Christ et ceux qui s'étaient convertis à Christ : les uns se sont montés contre les autres.

 Dans toutes les époques de persécution, d'ailleurs, ce genre de phénomène de division familiale se produit.

 Et puis, ces nations qui se montent les unes contre les autres, eh bien, là encore, ça s'est produit jusqu'à l'effondrement de l'empire romain, bien plus tard.

 Ces phénomènes ne sont pas simplement cantonnés loin dans le passé, même si c'est à l'origine de notre vie chrétienne, dans les cent premières années de notre ère, ces phénomènes se reproduisent encore, aujourd'hui.

 Et il y a encore, malheureusement, des persécutions, des guerres, des famines, des épidémies.

 

 Alors, il n'y a plus de temple à détruire ; mais le temple, pour un chrétien, c'est d'abord le corps, le corps de chair.

Depuis l'Incarnation, et même depuis la Pentecôte, ce corps est un temple sacré.

 Peut-on dire qu'il est détruit ?

 Alors, nous croyons qu'il ne l'est pas par la mort, mais peut-être qu'il est détruit par d'autres attitudes, que nous pouvons avoir avec ce corps.

 C'est le premier niveau de lecture.

 

 Le deuxième niveau de lecture c'est : ce que ce texte vise à édifier en nous.

 Il vise à édifier une attitude endurante, une attitude de persévérance.

 Nous sommes à la fin du texte.

 Jésus nous promet que nos cheveux ne seront pas perdus; nous voilà rassurés ; mais surtout que c'est par notre espérance que nous gardons notre vie.

 Et dans le texte grec, c'est par notre persévérance que nous conserverons notre âme.

 Alors c'est directement le troisième niveau de lecture que cela entraîne.

 

 Je m'arrête un tout petit peu sur le deuxième niveau de lecture : cette parole de Jésus qui vise à nous encourager.

 Et quand parfois, nous sommes un petit peu défaillants, fragiles ; quand parfois, nos pieds semblent se dérober sur la route, parce que la route est longue, l'hiver s'installe, eh bien, il est important d'avoir ces paroles de réconfort et de stimulation.

 

 Imaginez qu'un ami ou un soignant vous dise l'inverse (eh bien je ne sais pas) : "laisse-toi tomber par terre"; ce ne serait pas très réconfortant et ça viserait même à, carrément, complètement détruire la personne, ne serait-ce qu'avec des mots.

 Donc Jésus, au contraire, réconforte, met un sérieux coup de pied par derrière pour nous mettre en route, quand la tentation serait grande de nous tâter un petit peu tous les pouls, pour savoir si on va bien.

 

 Le troisième niveau de lecture : "c'est par votre persévérance que vous garderez votre âme".

 Pour pouvoir durer, il est important de toujours regarder et s'appuyer, regarder ce qui est beau et bon, juste et vrai ; et s'appuyer sur ce qui est solide, non pas sur ce qui est fendu.

 On ne construit pas quelque chose sur un terrain meuble ni même sur un fondement brisé.

 Ce qui est brisé c'est quelque chose qui est divisé.

 Quelque chose qui est divisé finit toujours par se diviser davantage.

 Construisons sur ce qui est solide. 

 Retenons ce que nous avons appris de Jésus.

 Et tout au long de cette année liturgique, l'Évangile nous a appris des choses sur le Christ.

 C'est le moment de les exhumer, de les ressortir de nos boîtes à trésor.

 C'est le moment, justement, de nous en ressouvenir de ne pas les laisser périr quelque part.

 Un des trésors que nous avons découvert de Jésus (alors, j’ai dit la fois d’avant, c’était, par exemple, la résurrection).

 Mais cette fois-ci, le plus beau trésor du Christ, c’est sa relation avec son Père.

 Un des plus beaux bijoux ou trésors de la foi, c’est cette unité profonde entre Jésus et son Père.

 Cette unité prévaut sur toutes les tentatives de mort, toutes les tentatives d’obscurité, toutes les tentatives qui viseraient à nous apeurer, à nous faire tomber, à nous intimider.

 Cette unité de Jésus avec son Père produit la lumière, c’est un langage que Jean a retenu quand il a écouté Jésus, Jean l’Evangéliste.

 Chaque fois que notre âme ou notre cœur est divisé, il y a de la ténèbre en nous-mêmes, et cette ténèbre nous fait toujours regarder avec fascination ce qui est moche : la guerre, les conflits, les épidémies, les divisions, etc…

 C’est exactement ce qui s’est passé, il y a un an, quand nous étions devant nos écrans de télévision, hébétés, à cause de ces attentats à Paris ; c’est exactement ce qui se passe, chaque fois que nous sommes fascinés par les petites misères des uns comme des autres, ou c’est à chaque fois ce qui se passe, lorsque nous prenons un malin plaisir à regarder ce qui ne va pas, plutôt qu’à regarder ce qui va.

 Notre âme est divisée et elle est dans la ténèbre.

 Ça peut durer un certain temps.

 On a besoin de personnes qui regardent ce qui ne va pas, c’est le rôle des soignants, c’est le rôle des confesseurs, ça peut être le rôle des personnes qui accompagnent spécialement les gens en difficulté.

 Il faut bien regarder ce qui ne va pas, mais pour mieux tirer vers ce qui va.

 Mais toutes ces personnes dont c’est le rôle, ont besoin elles-mêmes d’être accompagnées, d’être supervisées, comme on dit, sans quoi, elles finiront par tomber dans le même trou : "un aveugle ne peut pas conduire un autre aveugle".

 Quelqu’un qui est dans la ténèbre, ne peut pas marcher très longtemps dans la ténèbre, il finira par se prendre les pieds dans un obstacle.

 Alors ne jouons pas les apprentis-assistante sociale ou les apprentis-médecin, mais contentons-nous, pour notre part, de regarder ce qui est beau et uni, et c’est le Christ uni à son Père, pour que la lumière vienne enfin éclairer, apporter dans tous ses rayons cette chaleur dont nous avons besoin à l’intérieur de notre cœur.

 Ça c’est le troisième niveau de lecture : retenons cette unité que Jésus vit avec son Père ; sinon, si nous oublions cela, notre Eglise, notre communauté locale et notre vie personnelle deviendront aussi branlantes que ce que Jésus raconte dans son l’Evangile : un temple détruit, des nations qui se mettent les unes sur les autres, des familles qui se divisent, des épidémies, des guerres etc. ; sans quoi notre Eglise, comme notre vie personnelle, finirait de la même façon.

 

 C’est un grand enjeu.

 Imaginez que, demain, vous soyez chacun, pour votre part, complètement livrés à vous-mêmes, (plus personne pour vous guider, si vous voulez), plus de pasteurs, plus de voisins, plus de personnes édifiantes, plus personnes qui seraient là, à vos côtés.

 Que feriez-vous pour durer ?

 Eh bien, vous seriez bien obligés de développer, mettre en place un certain nombre d’aides.

 La première aide c’est de vous rappeler qui est le Christ, et de vous accrocher à lui fermement.

 La deuxième aide c’est d’installer en vous, une attitude de prière.

 La prière c’est l’endurance du pauvre, c’est l’aliment du disciple de Jésus, c’est la respiration de tout corps et de tout être, qui a conscience de venir du Père.

 Si vous oubliez la prière et si vous oubliez le Christ, eh bien, demain, vous vous retrouvez tout seul, ça ne va pas durer longtemps.

 C’est pour ça que Jésus nous stimule à la persévérance.

 

 Jésus-Christ est beau, apprenons à le regarder, à l’aimer, à le désirer et à marcher à sa suite.

 

 Amen.


Mercredi 9 novembre : La dédicace de l’Eglise du Latran

Ez 47, 1-2. 8-9. 12 : La source du Temple.

Ps 45

Jn 2, 13-22 : La purification du Temple.

 

Les quatre Évangiles rapportent cette scène, dite "de la purification du Temple".

Ils rapportent ces propos de Jésus sur le temple ; d'ailleurs, dimanche prochain, dans l'Évangile de Luc au chapitre 21, nous aurons cet épisode narré un petit peu différemment.

Seul, l'Évangile de Jean le situe au début, au chapitre 2.

 

Dans cet épisode, Jésus a des paroles dures sur le temple et presque blasphématoires : le temple est une réalité très importante au cœur de la foi de son peuple, et notamment pour lui, c'est dans ce temple, à l'âge de 12 ans, qu'il va être retrouvé par ses parents "ne saviez-vous pas qu'il fallait que je sois dans la maison de mon Père."

 

Ce temple avait été détruit par Nabuchodonosor et il a été reconstruit ou il était en cours de reconstruction par le roi Hérode, au moment où cette scène se déroule.

Et puis, il sera détruit définitivement, dans les années 70, pour devenir ce que c'est aujourd'hui : vous enlevez la mosquée qui est au-dessus et vous avez ce que c'est devenu après les années 70.

 

Ces paroles sont donc dures.

Est-ce que Jésus prédit ce qu'il va se passer ?

Enfin, il faut croire ; en tout cas il n'est pas reconstruit, comme il le dit.

 

Peut-être que le Corps du Christ ou l'Eglise, l'assemblée de celles et ceux qui communient à la vie offerte du Christ, constitue ce temple nouveau : en tout cas, dans la foi, c'est ce que nous croyons.

 

Une autre réalité est importante, c'est que Jésus, comme il le dit à plusieurs reprises, ailleurs, dans l'Évangile, ne vient pas détruire la Loi.

Il vient l'accomplir.

Et cette réalité vécue dans le temple d'Israël, il ne vient pas d'abolir.

Dans ce temple d'Israël, le lieu du contact entre le ciel et la terre, il y avait des sacrifices, sacrifices animaux.

Alors, les grands savants disent que c'est un progrès par rapport aux sacrifices humains, mais ces sacrifices d'expiation permettaient, en tout cas, d'entretenir cette relation précieuse entre ciel et terre.

 

Il fait disparaître ce lieu, Jésus ; et de fait, le lieu a disparu, le lieu du sacrifice; jusqu'à ce que ce soit Jésus lui-même qui s'offre en sacrifice : c'est ce que nous vivons dans l'eucharistie.

Donc, il ne fait pas disparaître une réalité précieuse pour nous, il la convertit, il l'accomplit, comme il dit, pour la situer ailleurs, non pas dans un lieu fait de pierres, mais dans nos propres corps, en relation avec ce sacrifice que Jésus fait de lui-même.

Donc, il y a toujours ce contact précieux entre ciel et terre mais c'est quelque chose qui passe, pour nous, à travers Jésus, dans sa vie offerte.

 

On pourrait retenir, pour notre propre méditation, ce que Jésus chasse (les brebis, les bœufs, la monnaie des changeurs, leurs comptoirs, les marchands de colombes et les marchands de bœufs etc.), il les chasse.

Alors Jésus, ne vient pas enlever une réalité qui n'avait pas sa place : toutes ces choses-là avaient leur place dans le temple, nous le savons, on nous l'a souvent dit.

Mais, peut-être que, en voulant faire du temple autre chose, eh bien ces vendeurs, leurs animaux et leurs monnaies, n'avaient plus leur place.

 

Quelles réalités de cette sorte, à l'intérieur de notre cœur empêchent l'unité de notre cœur et empêchent cette relation vivante entre ciel et terre, dans notre vie ?

La Bible, par ailleurs, appelle cela : les idoles.

Et Jésus vient les briser ; pas simplement, à ce moment-là, mais à d'autres épisodes de sa vie, et notamment, sur la croix.

Alors, les idoles, nous en avons beaucoup ; et il y a sans doute trop de compromis à l'intérieur de notre cœur avec ces choses, (je ne sais pas comment on peut les appeler autrement), le péché, on va dire aussi, qui nous arrangent bien, participent de notre construction intérieure, de nos équilibres personnels, un peu comme pour rendre la tâche plus agréable.

Mais, en la rendant plus agréable, eh bien, elles divisent.

 

Présentons-les dans notre prière ou dans cette eucharistie pour que le Christ vienne faire son œuvre, une œuvre purificatrice.

Et que l'unité, qui peut se produire par la grâce de nos "oui", que cette unité, devienne visible à l'échelle de nos communautés, de notre Eglise.

 

Amen.


Mardi 8 novembre :

Tt 2, 1-8.11-14 : Devoirs particuliers à certains fidèles

Ps 36

Lc 17, 7-10 : Servir avec humilité.

 

Il n'y a que St Luc qui s'est souvenu de cette parabole de Jésus et qui nous en parle.

Une parabole qui met en avant, comme vous l'aurez entendu dans cette première écoute, plutôt l'humilité.

C'est toujours un peu compliqué d'ailleurs, d'entendre une parabole comme celle-ci, car on aimerait bien la tourner dans tous les sens, pour voir en quoi elle pourrait être à notre avantage.

Et voir : "Tiens, ben oui, le Maître va se mettre à nous servir, à nous laver les pieds…

Et bien ça n'est pas le cas.

On a beau la prendre dans tous les sens, elle ne dit ça.

 

Avec un peu, quand même, de brutalité, elle va vous dire, elle me dit : "Eh bien, même si tu as l'impression d'avoir peiné toute ta sainte journée, eh bien, ça n'est pas une raison pour attendre qu'une gratitude te tombe du ciel.

Ce n'est pas très heureux.

Mais ce qui l'est encore moins, ce qui est entre les lignes d'ailleurs, c'est de s'entendre dire que nous n'ajoutons rien à l'œuvre de Dieu.

 

Nous n'ajoutons rien à l'œuvre de Dieu.

Alors, à quoi ça sert, (ben ça, c'est moi qui rajoute ça), à quoi ça sert tout ce qu'on fait, du coup ?

Nos engagements dans la paroisse, nos bonnes actions, nos colères rentrées, nos pardons forcés, à quoi ça peut servir si nous n'ajoutons rien à l'œuvre de Dieu?

 

Eh bien, c'est peut-être déjà le début d'une nouvelle vie spirituelle que d'en arriver à ce point-là, à cette espèce de constat ; puisque, tout de suite après d'ailleurs cette parabole dans l'Évangile, nous entendons cette rencontre que Jésus a, avec dix lépreux.

Ils sont guéris tous les 10, mais n'est justifié que celui qui vient rendre grâce.

 

Peut-être, est-ce l'attitude la plus juste devant le Seigneur : l'action de grâce.

Si nous arrivons devant l'autel en disant, (cet autel-là), en disant au moment de communier : "Voilà Seigneur tout ce que j'ai fait pour toi, pour Monsieur le curé, pour la paroisse, pour mes voisins et mes voisines ; je mérite bien un peu quelque chose".

Eh bien, ça ne va pas.

 

Amen.


Dimanche 6 novembre :

2 M 7, 1-2. 9-14 : Le martyr des sept frères.

Ps 16

2 Th 2, 16-3 ,5 : Exhortation à la persévérance.

Lc 20, 27-38 : La résurrection des morts.

 

Voilà, chers amis, il est temps d'accrocher nos ceintures : ces textes de l'Ecriture sont effectivement, assez ardus.

L'intelligence de l'Esprit-Saint peut être quelque peu obscure quand on les aborde sans quelques clefs.

On peut déjà les regarder avec un premier niveau de lecture, un niveau très basique mais néanmoins très rationnel.

 

Le texte de cette première lecture, le livre des martyrs d'Israël (il y en a deux), peut-être que ce sont des livres que vous ne connaissiez pas : ils sont dans l'Ancien Testament, dans vos bibles.

Si ce sont des bibles catholiques, ils apparaissent ; si ce sont des bibles protestantes, ils n'apparaissent pas.

Ce sont des textes dont la langue originale est le grec.

Les protestants rejettent les textes de l'Ancien Testament, écrits en grec.

Ils sont parfois, dans nos bibles, intitulés : livre des Maccabées, premier livre des Maccabées, deuxième livre des Maccabées.

Ce ne sont pas ceux qui sont dans le cimetière, autour ; Maccabées c'est un nom de famille.

Le nom d’une famille juive de l'époque de la conquête grecque de la terre d'Israël.

 

Nous sommes au deuxième siècle avant J.-C., en 165 avant Jésus.

Sous domination grecque,un certain Antiochus Epiphane persécute des juifs et leur demande d'apostasier leur foi.

Ce n'est pas la première fois dans la grande histoire du peuple d'Israël.

Vous avez déjà entendu, ça paraît beaucoup chez les prophètes, l'ennemi Assyrien, venant de Ninive, la Bagdad actuelle, de l'autre côté du Jourdain vers l'est, en Mésopotamie, eux aussi, bien avant, ont conquis le peuple d'Israël, (la terre d'Israël) et ont déjà, à l'époque, demandé aux juifs d'apostasier leur foi.

 

Alors, il y a des résistants, c'est ce que l'on aperçoit dans cette lecture que vous avez entendue, des fervents de l'Alliance qui vont renoncer à apostasier leur foi, au prix de leur vie : on va les découper en mille morceaux, leurs mains, leur langue, leurs bras, leur tête, mais ils ne vont pas renier le Dieu de l'Alliance.

Et un d'entre eux, c'est pour ça que (je pense), que cette lecture nous a été proposée dans la liturgie, l'un d'entre eux, le quatrième frère de cette première lecture, va dire : "moi je crois en la résurrection de ma chair, de mon corps.

Vous allez me couper en mille morceaux, ce n'est pas grave ; je sais que le Seigneur va me les rendre, ces morceaux, et dans le bon ordre, en plus".

L'affirmation de la foi en la résurrection, (alors nous, on baigne dedans ; bon ben on baigne tellement dedans qu'on l'oublie tous les jours, mais on baigne dedans) ; mais cette affirmation de la résurrection, c'est tout nouveau à cette époque-là, ça apparaît au deuxième siècle avant Jésus.

Des juifs, comme ça, notamment sous la persécution, et sous la persécution grecque, vont commencer à dire : "même pas peur !même pas peur parce que, ce que vous voulez me ravir, Dieu me le rendra".

Et qu'est-ce que l'on peut ravir d'hyper important dans la vie d'une personne ?

Eh bien la réponse est dans la question, c'est : sa vie et la vie de son corps.

"Eh bien, même si vous me la ravissez, cette vie-là, Dieu va me la rendre.

Pas peur, continuez, moi je ne renie pas le Dieu de l'Alliance".

 

Je continue ma lecture basique, ras-des-pâquerettes, néanmoins rationnelle ; vous avez l'Évangile avec une question savante, casuistique, très rhétorique et légaliste de gens qui refusent la résurrection : on les appelle des Sadducéens, ce sont des juifs comme Jésus, mais eux, ils sont contre la résurrection.

Ils disent que c'est des affaires de femmes saoules, ils n'y croient pas.

Par contre, ils veulent vérifier si Jésus lui, il y croit.

 

Alors Jésus, il y croit, il va le dire.

Alors, il n'y croit pas en disant : je vais ressusciter ; ça, si vous avez écouté, vous avez entendu qu'il n'a pas dit ça.

Il dit : j'y crois parce que,regardez, dans le buisson ardent, Dieu se révèle, c'est le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, tout ça ce sont des vivants, ce sont des vivants.

Et d'ailleurs, le peuple de ceux qui croient en cela, ce sont des vivants, même ceux qui sont morts, ils vivent avec nous.

Et alors, surtout qu'en plus, il leur dit que, la question qu'ils lui posent, est sans fondement.

Alors, cette question qui peut nous paraître surréaliste : une femme épouse un frère, il meurt ; elle épouse son deuxième frère, il meurt ; un troisième frère, il meurt ; (en même temps ça fait beaucoup de monde au ciel), à la résurrection du coup, elle va être l'épouse de qui ?

Jésus ne répond pas, il ne dit pas : "elle va être l'épouse de l'un ou l'autre", peu importe.

 

J'arrête-là pour passer au deuxième niveau de lecture.

Je peux ?

Deuxième niveau de lecture, je repars de l'Évangile, cette fois-ci.

Deuxième niveau de lecture : ce qui est dit dans l'Évangile c'est que, une raison pour faire des enfants et une raison pour se marier, (les anciens, vous savez que le mariage est un remède à la concupiscence, on vous a dit ça, non, parfois ?

C'est ce qu'il se disait, parfois); donc pour que cette concupiscence soit bien orientée, bien dirigée, donc faisons des enfants.

Eh bien, la génération, pour dire les choses joliment, la génération est une façon, une façon de dire "même pas peur".

Même pas peur, puisque le temps vient nous faire mourir, le temps vient nous faire vieillir, le temps vient nous faire peur, surtout en automne, hiver.

Mais si nous avons une descendance, nous sommes plus forts que le temps.

Pas vrai ?

Bon !

C'est ce qui permet d'ailleurs, de transmettre notre patrimoine : nous avons des terres, heureusement qu'il y a une descendance (sauf que ça marche de moins en moins comme ça, malheureusement).

C'est donc la génération, comme une sorte de remède contre la corrosion du temps.

C'est une sorte de persécuteur le temps, parfois, dans nos vies.

 

Jésus vient dire : "à la résurrection, on n'a plus besoin de tout ça, de faire des enfants etc".

À la résurrection on n'a plus besoin de ça.

À la résurrection nous sommes plus forts que le temps, on ne vieillit plus, nous ne sommes plus corrompus de mille façons que ce soit.

Donc, nous sommes hommes, femmes, on continue à l'être, mais on n'est plus dans ce type de relations qui vise à se défendre des ravages du temps.

Alors, vous me suivez toujours ?

Ça, c'est le deuxième niveau de lecture.

 

Troisième niveau de lecture, je reviens à la première lecture ; donc : ceux qui sont découpés en mille morceaux.

Je reviens à cette première lecture.

Vous observez qu'ils résistent, les braves, au prix de leur vie.

Mais ils disent : "même pas peur" parce que Dieu nous rendra nos corps.

Parfois, le persécuteur, celui qui vient nous faire peur, ce n'est pas le temps qui nous vieillit les cheveux, c'est celui qui, dans nos écrans de télévision, nous dit : "si vous ne changez pas dans vos têtes et dans vos cœurs, si vous ne renoncez pas à votre Dieu, on vient vous couper la tête".

Hein ? Pas vrai ?

Et il nous fait peur ce persécuteur-là.

 

Eh bien qu'est-ce qu'il se passe dans la première lecture ?

Ils se planquent ? Ils renoncent ? Ils abandonnent ?

Non! Ils résistent.

Et c'est quel genre de résistance ?

Belliqueuse ? Violente ? C'est une résistance comment ?

Eh bien, c'est un enracinement plus grand encore dans cette confiance en la résurrection : "vous n'aurez pas ce que j'ai de plus digne dans ma vie.

Et ce que j'ai de plus digne dans ma vie, c'est ma confiance que, quoi qu'il se passe et quoi que vous me fassiez, Dieu, lui, ne m'abandonne pas, même si vous dites que c'est un Dieu de minable.

Il ne m'abandonne pas, il me fera ressusciter".

Ça, c'est le troisième niveau de lecture.

 

Je peux passer au quatrième ? Oui ?

Quatrième niveau de lecture, c'est la deuxième lecture.

Alors, deuxième lecture, c'est Saint-Paul aux Thessalonissiens.

Alors, les Thessalonissiens, si vous voulez, c'est un peu nous, ce matin.

Toute petite communauté minuscule, église où il fait froid, au début du christianisme.

Ils ne savent pas où est-ce qu'on va.

Le Christ va-t-il revenir ? Pas revenir ?

On n'en sait rien.

Hein, Bernard ?

Le Christ reviendra-t-il, quand ?

Ils en sont là, les Thessalonissiens.

Et parfois, durer jour après jour, c'est un peu lourd.

C'est qu'il nous a fait plein de promesses, mais ses promesses ne se réalisent pas tout de suite.

On ne les voit pas venir.

" Sœur Anne, sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?"

Ben non, pas grand-chose.

Que dit l'apôtre ?

" Que notre Seigneur Jésus-Christ, lui-même, et Dieu notre Père qui nous a aimés (source de notre foi, ça c'est moi qui dit source de notre foi), il nous a toujours donné réconfort et une bonne espérance par sa grâce".

Eh bien qu'aujourd'hui, vous ne vous laissiez pas apeurer par un troisième persécuteur, qui n'est ni le temps ni les débiles de la télévision ; mais le troisième persécuteur, c'est quoi ?

Le doute, l'ennui, l’hésitation, la mélancolie.

"Que ce Dieu-là réconforte vos cœurs et qu'il les affermissent en tout ce que vous pouvez faire de bien et dire de bien.

Priez et priez aussi pour ceux qui sont censés vous affermir", pour qu'au lieu de leur raconter vos petites misères permanentes, vous les stimuliez par vos paroles et par votre foi ; pour que dans cette stimulation collective, nous soyons plus forts que ce troisième persécuteur.

 

Et pour quelle raison mes frères et sœurs, sommes-nous plus forts que ce premier persécuteur, ce deuxième persécuteur et ce troisième persécuteur ?

Vous vous souvenez le premier persécuteur, c'est qui ?

Le temps.

Le deuxième persécuteur ?

Les débiles mentaux de la télévision.

Et le troisième persécuteur c'est qui ?

Le doute.

Et pourquoi nous sommes plus forts ?

À cause de la résurrection.

 

Voilà, vous avez fait l'homélie.

 

Amen.


Vendredi 4 novembre : Saint Charles Borromée

Ph 3, 17-4, 1 : la vraie voie du salut chrétien.

Ps 121

Lc 16, 1-8 : L’intendant avisé

 

Ça fait plaisir de revoir ceux qui sont partis, et qui reviennent : Giselène, bienvenue. 

 

Nous avons un texte de l'Évangile qui est tout à fait dans le style de Saint Luc, c'est-à-dire, Saint Luc a beaucoup retenu de ce que Jésus a dit et fait, une sorte de mise en garde par rapport à l'argent et à son pouvoir.

Vous vous souvenez peut-être que vers la fin septembre- mi-octobre, les textes d'aujourd'hui et le texte d'hier, nous les avons déjà entendus lors de la messe, des messes du dimanche.

Au chapitre 12 de l'Évangile selon Saint Luc, il y a déjà une parabole, la parabole de cet homme qui veut garder beaucoup d'argent, beaucoup de ses blés, de ses réserves dans ses greniers et construire encore beaucoup plus de greniers.

Un homme plutôt avare qui veut accumuler beaucoup de richesses.

Ici au chapitre 16, on a la parabole que l'on vient d'entendre et on a un petit peu après, la parabole de Lazare et le riche.

Et chaque fois, c'est l'occasion pour Jésus de faire un discours ou un enseignement sur le pouvoir de l'argent.

 

La parabole que l'on vient d'entendre, peut être assez difficile à interpréter et on ne sait pas trop comment l'accueillir.

L'Esprit Saint, si chacun joue le jeu de se laisser interpeller par cette parabole et même par sa rugosité, l'Esprit-Saint parvient toujours à susciter l'une ou l'autre lumière pour chacun.

On peut quand même retenir cette question de l'habileté.

L'habileté de ce gérant malhonnête, qui est à la fois l'objet de toutes les louanges de son maître et en même temps qui n'est jamais qu'un homme malhonnête, finalement.

Si on regarde de près dans cette parabole, tout le monde finit par être endetté vis-à-vis de tout le monde; et encore plus.

Et on se demande à qui profite la dette, finalement ; à part éventuellement à ce gérant lui-même qui, au lieu que ce soit son maître, qui ait le pouvoir, c'est désormais lui qui l'a ; mais tout le monde est lié, ligoté par une dette financière ; ce qui ressemble d'ailleurs un peu parfois aussi, au système financier international.

 

Mais la chute, sans doute, peut nous aider à passer de ce registre à un autre, qui nous concerne davantage : "les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les fils de la lumière", qui me fait penser immédiatement au chapitre huit de la lettre que Paul adresse aux Romains, nous invitant à avoir une dette qui est d'une toute autre nature : c'est la dette de l'amour mutuel.

Et pourvu que nous soyons liés les uns et les autres par cette dette.

 

Amen.


Jeudi 3 novembre : St Martin de Porres

Ph 3, 3-8a : La vraie voie du salut chrétien.

Ps 104

Lc 15 1-10 : la brebis et la drachme retrouvées.

 

Alors, les trois premières lignes sont importantes : il y a des gens qui sont très pressés de voir Jésus et de l'écouter : ce sont les publicains et les pécheurs ; et puis il y en a qui ne sont pas très pressés, ou tout du moins qui n'ont aucune raison de se déplacer parce qu'ils pensent qu'ils sont à la bonne place : ce sont les pharisiens et les scribes.

Les premiers n'ont rien à dire, ils viennent écouter: les pécheurs et les publicains ; et les deuxièmes qui pensent être à leur place, eux, ils causent, ils récriminent, ils murmurent.

 

Et puis ensuite, on a cette parabole, ces deux paraboles.

Alors, la brebis, elle, elle est partie.

Ce n'est pas sûr, (on n'en sait rien), elle, elle ne demande rien : la brebis, elle ne cause pas ; et puis, il y a cette pièce ; pareil, elle ne cause pas, qui est sous le lit.

Mais ce sont les propriétaires qui se déplacent, qui bougent.

Une fois qu'ils l'ont retrouvée, ils sont tout contents et ils sont dans la joie, une joie qui est censée être celle de Dieu lui-même.

 

Alors, ces deux paraboles ont un intérêt, qui semble utile, c'est d'appuyer très très fort sur la joie de Dieu de retrouver l'un ou l'autre qui est perdu.

Et puis, ce sont deux paraboles qui viennent fermer la bouche (comme dit très élégamment l'Évangile, parfois) viennent fermer la bouche de ceux qui récriminent très très fort et qui se croient à leur juste place.

Ils sont tellement sûrs qu'ils sont à leur juste place, qu'ils ne se rendent pas compte que Dieu vient jusque vers chez eux pour les trouver, comme s’ils étaient perdus quelque part sous un lit ou quelque part dans un désert.

Dieu vient jusqu'à eux, mais ils récriminent.

D'abord ils n'entendent pas Dieu vienne jusqu'à eux puisqu'ils pensent qu'ils y sont déjà ; et du coup, ils sont assez imperméables à la miséricorde.

 

Alors, l'intérêt avec ces paraboles c'est qu'elles nous réconfortent souvent, en se disant : « je savais bien qu'untel et untel c'était une brebis perdue.

Ça me fait plaisir de savoir que Dieu vient à sa rencontre ».

Mais ne prenons pas trop vite la place des pharisiens, se croyant sûrs de ne pas en avoir besoin de cette miséricorde de ce Dieu qui vient jusqu'à nous.

Voilà, on est tout à la fois, celui qui a besoin de cette miséricorde et celui qui se réjouit qu'elle s'adresse aussi à d'autres.

Mais on en a besoin également.

 

Il y a quand même, par deux fois, la joie qui apparaît dans cet Évangile.

Eh bien, osons-nous réjouir de cette patience de Dieu vis-à-vis de nous, autant que de ce beau pèlerinage du Seigneur vis-à-vis des autres.

Il nous aime autant qu'un pécheur, c'est peut-être ça la bonne nouvelle.

 

Amen.


Mardi 1° novembre : Toussaint

Ap 7, 2-4.9-14 : Les serviteurs de Dieu seront préservés. Le triomphe des élus au ciel.

Ps 23

1 Jn 3, 1-3 : Vivre en enfants de Dieu.

Mt 5, 1-12 : Les Béatitudes.

 

Chers amis, cette fête de la Toussaint nous permet de rentrer dans une profonde communion avec le monde invisible.

 Le monde invisible, nous n'en n'avons pas souvent l'expérience, nous le réduisons à des phénomènes paranormaux.

 Le monde invisible, c'est la beauté de ce que la foi nous donne à contempler, telle que Jésus lui-même l’a vue, si nous osons tourner les pages de l'Évangile.

 Le monde invisible, le plus resplendissant, (peut-être le plus fameux, à chaque fois que l'on pense à Jésus), c'est sans doute tout ce qu'il dit que son Père, dans l'Évangile.

Et nous avons cette affirmation très belle : "je te loue Seigneur du ciel et de la terre, d'avoir caché cela aux sages et aux savants et de l'avoir révélé aux tout-petits".

 

Par exemple, cette affirmation de Jésus, dans l'Evangile, s'adresse directement à ce monde que les disciples dans cet instant ne voient pas, et pourtant, Jésus, lui, s'adresse à ce Père dans la puissance de l'Esprit-Saint.

Nous pouvons penser à d'autres rencontres ou événements dans la vie de Jésus, qui habite notre mémoire depuis notre catéchisme, et c'est sans doute le baptême de Jésus : cette colombe qui descend du ciel, (que d'autres ont vue d'ailleurs), avec cette voix ; ou bien encore, au moment de la transfiguration du Seigneur sur la montagne.

Alors, il est vrai, les disciples sont témoins de quelque chose mais ce n'est pas très précis pour eux.

Nous, les lecteurs de l'Évangile, nous sommes privilégiés : on nous dit que, il y avait Moïse, il y avait Elie.

Ce monde invisible prend visage en Jésus.

Nous avons d'autres scènes encore, peut-être moins resplendissantes, auxquelles nous ne penserions pas, et pourtant, c'est l'éclat du monde invisible qui se manifeste en Jésus : eh bien, c'est chaque fois que le Christ, sur sa route entre Capharnaüm et Jérusalem, va relever tel aveugle sur le bord de la route, va soigner tel autre, pardonner les péchés d'un troisième ; c'est l'apparition, l'avènement du Royaume.

C'est la vision du monde invisible qui prend forme en Jésus, au milieu des pauvres.

 

Et nous sommes promis à cette vision, à cette perception que Jésus appelle le Royaume, d'ailleurs ; c'est promis dès Jean-Baptiste.

Il le promet aussi à Nathanaël : "tu dis que tu crois parce que je t'ai vu sous le figuier, mais tu verras des choses plus grandes encore : le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre".

 

Quand on fête la Toussaint, on fête l'Eglise du ciel et ceux qui nous précèdent, ceux que l'on ne voit plus, bien naturellement, car ils sont déjà morts ; et pourtant nous éprouvons le besoin de les façonner dans des statues de pierre ou bien encore sur des vitraux ou bien dans des enluminures, comme pour donner forme à ce qui nous précède et qui est désormais disparu à nos yeux.

Un peu, comme lorsque nous nous déplaçons dans un cimetière, pour nous recueillir sur la tombe de ceux qui ont beaucoup compté.

Nous ne les voyons plus, parfois il y a une photo, un objet souvenir.

Mais rien que la tombe suffit à donner forme à ce qui a beaucoup compté dans notre histoire, qui nous a fait grandir.

Malheureusement, parfois, cette réalité de l'histoire, qui nous a fait grandir, est comme morte, ou très éloignée.

Et plus ça s'éloigne dans notre mémoire et dans notre cœur, plus ça meurt, plus ça nous rend triste.

 

Pourtant, l'Eglise du ciel, c'est une Eglise vivante qui nous propose le bonheur : être en communion avec tous les saints.

Et nous y sommes, je vous rassure, à chaque eucharistie.

Chaque fois que nous célébrons l'eucharistie, nous invoquons ceux qui nous précèdent, à commencer par la Sainte Trinité ; Jésus, le premier des saints.

Et à chaque fois que nous l'invoquons, nous voulons rendre vivant et donner un peu d'épaisseur à notre bonheur sur terre, car parfois, vouloir être conforme à l'Évangile, c'est un peu lourd.

Peut-être qu'on finit par sentir qu'il y a de la peine sur le chemin de la perfection que nous propose l'Évangile.

On reconnaît trop souvent un chrétien à la tristesse qu'il arbore sur son visage : "ils se composent une mine défaite", une mine de carême.

 

Pourtant, être en communion avec tous ceux et toutes celles qui nous ont précédés, c'est dire tout simplement : ça vaut la peine.

Et même s'il y a certains matins, un peu difficiles, ça vaut la peine.

Et le bonheur n'est toujours pas, forcément, qu’au terme de la route.

Je peux le cueillir, jour après jour ; j'y crois, je sais que ça vaut la peine parce que d'autres ont peiné avant moi, d’autres ont choisi l’Evangile avant moi et ils sont sortis victorieux de ce chemin à la suite du Christ.

Victoire que le Christ lui-même, avait promise.

 

Je vous propose trois petits jalons, tout simples, pour entrer dans ce chemin de bonheur ou tout simplement, pour donner de l'épaisseur à tous ces saints qui nous précèdent sur la route.

Non pas, pour qu'en communiant avec ces saints, nous devenions des idolâtres, que nous multiplions les dieux dans le ciel, mais tout simplement pour donner beaucoup plus de vie et de puissance à ce chemin unique de notre unique Seigneur Jésus.

 

Le premier jalon, c'est de ne pas avoir peur des contraires, dans notre vie.

Nous aimerions quelque chose de beau ; très souvent, nous devons composer avec ce qui est moins beau.

Nous aimerions quelque chose de bien et nous devons composer avec ce qui est moins bien.

Nous aimerions un monde plein d'amour et nous devons composer avec l'ivraie au milieu du bon grain.

Dans l'Évangile des Béatitudes, que le diacre Maurice a proclamé, il y a des contraires : Heureux les pauvres, les doux, les affligés, ceux qui ont soif de justice.

 

Je vous mets au défi de proposer une telle affirmation de bonheur à des gens qui n'en ont pas.

Peut-être, auriez-vous peur, d'ailleurs, d'affirmer une chose pareille.

Pourtant, c'est une réalisation, dès aujourd'hui, que Jésus a pu proposer à ceux qu'il a rencontrés.

Quand Jésus propose un chemin de perfection et propose le Royaume, il ne propose pas que les hommes et les femmes qui veulent le suivre, soient autrement qu'ils ne sont.

N'ayons pas peur d'être ce que nous sommes.

Si nous arrivons à composer avec les contraires dans nos têtes, peut-être parviendrons-nous alors, à nous accepter tels que nous sommes.

Que j'ose mettre en perspective mes idéaux avec leurs contraires ; peut-être alors, petit à petit, j'accepterai d’être ce que je suis, pas toujours à la hauteur de mes prétentions.

C'est le premier jalon.

 

Le deuxième jalon, c'est la prière.

Et pour mieux comprendre la simplicité du chemin que Jésus nous propose, nous pourrions chacun à notre compte, reprendre notre chapelet ; celui que parfois nous avons oublié, soit au fond d'un tiroir ou la boîte à gants ou même tout simplement que nous n'avons pas.

Et prier tout simplement les mystères joyeux, les cinq premiers mystères :

l'Annonciation,

la Visitation,

la Naissance de Jésus,

sa Présentation au temple

et son Recouvrement.

Nous ne sommes pas là, à contempler ce que Jésus a dit ou fait (éventuellement, au recouvrement au temple); mais Jésus n'a encore pas commencé sa vie publique.

Nous contemplons d'abord, ce qu'ont fait quelques personnages autour de lui, à commencer par Marie, sa mère.

Il y a Elisabeth, il y a Joseph, il y a quelques bergers et puis, on peut imaginer les gens de Nazareth ou ceux de Bethléem, ceux qui partent en pèlerinage à Jérusalem et en reviennent.

Eh bien, en priant à partir de ces mystères tout simples, nous pouvons nous dire que notre chemin de perfection est aussi simple que ce qui s'est vécu autour de Jésus, dans son enfance.

Il ne s'agit pas de déboulonner la lune, de construire une tour de Babel pour rejoindre le ciel, il ne s'agit pas d'être au-dessus de ce que l'on est, il s'agit d'être, dans une vie domestique, la plus élémentaire qui soit.

Dieu nous rejoint jusque-là, et c'est possible dans notre prière, par la prière.

Prions ; nous pouvons nous aider du chapelet, des mystères joyeux.


Et puis, le troisième jalon, c'est l'action.

Il est bon d'agir aussi, et pas uniquement être statique ou faire travailler seulement son imagination ou son cœur.

On peut faire travailler son cœur et ses pieds ou son cœur et ses mains: l'action.

À commencer par : oser demander pardon à des personnes que l'on aurait persécutées, à des personnes que l'on aurait ignorées, à de la justice à laquelle nous n'aurions pas collaboré, à des affamés à qui nous n'aurions pas donné à manger ; demander pardon.

Tout simplement parce que, peut-être, qu'en ayant fait tout cela, eh bien, nous avons voulu nous protéger pour ne pas nous-mêmes, être pauvres ; pour ne pas nous-mêmes, être affamés ; pour ne pas nous-mêmes, souffrir d'injustice.

 

Cette démarche, toute simple aussi, mais en même temps, qui paraît si compliquée pour beaucoup, cette démarche de vérité, elle peut être inspirée par l'Esprit Saint dans nos vies ; et elle nous aidera à être des saints.

 

Vous l'aurez compris, chers amis, ces trois jalons : l'art des contraires dans notre vie,

la prière

et cette manière d'agir,

c'est pour briser en nous nos désirs de perfection, qui sont des vrais poisons et qui font des chrétiens, souvent, de pâles figures, de pauvres reflets.

 

Soyons plutôt des saints, des gens en marche, qui n'ont pas peur de se relever, de tomber et surtout soigner des blessures, celles des autres avant de soigner les leurs.

C'est de cette façon que l'on sera saint, que l'on verra cette Eglise du ciel, qu'elle nous fera vivre et que nous serons un beau reflet de tous ceux qui nous ont précédés.

C'est un chemin joyeux, nous en avons besoin, nous avons besoin de cette joie et de cette lumière.

Ça ne dépend que de notre collaboration.

Soyez certains que, nous pouvons avoir beaucoup de puissance pour vivre ce chemin-là.

Ça dépend seulement de notre collaboration.

 

Amen.


Dimanche 30 octobre :

Sg 11, 22-12, 2 : Raisons de la modération divine envers l’Egypte.

Ps 144

2 Th 1, 11-2, 2 : Action de grâce et encouragements. La rétribution dernière.

Lc 19, 1-10 : Zachée

 

Parmi nous, il y a des jeunes générations.

Parmi les plus jeunes générations, j'adresse une question : ne vous est-il déjà jamais arrivé, (notamment en regardant les aînés autour de vous, les personnes les plus âgées des communes ou des villages que vous habitez), ne vous est-il jamais déjà arrivé de vous demander : "qu'est-ce qui a fait que cette dame ou ce monsieur, âgé, ait autant duré dans sa vie ?

Qu'il ait duré, non pas qu'il soit vivant, mais qu'il soit persévérant.

Cet homme, cette femme, continue à vivre : chaque matin se lève et continue à conserver ses habitudes, même si cet homme ou cette femme peut parfois être un peu aigri ; il continue à se battre pour que la vie gagne.

 

Ça ne vous est jamais déjà arrivé de vous dire : "et moi, est-ce que je pourrai, chemin faisant, avoir la même fidélité, alors que peut-être, bien des artifices ou bien des obstacles pourraient jalonner ma route personnelle, me donner envie de prendre plein de chemins de traverse ou de fléchir le genou à terre ? "

Qu'est-ce qui a fait que cette vieille dame ou ce vieux monsieur, dure ?

 

Au terme d'une année liturgique, nous parvenons peu à peu, avec la fête du Christ Roi de l'univers, le 20 novembre, nous parvenons aussi à une fin.

Et on peut se dire un peu en regardant dans le rétroviseur : "qu'est-ce qui a fait également que nos communautés et chacun d'entre nous a pu durer durant cette année ?"

Quel était, au fond, notre carburant ou dit autrement : quel était notre trésor ?

Sur quoi avons-nous investi et fondé pour que nous demeurions ?

Demeurer, un verbe qui apparaît dans l'Evangile selon Saint-Jean, pour dire un enracinement profond en Jésus-Christ.

 

Alors, avec d'autres mots, c'est un petit peu la problématique de Saint-Paul.

Nous avons déjà eu l'occasion, d'autres dimanches, de dire que Paul, s'il a écrit des lettres, c'est qu'il n'était pas dans ses communautés au moment où il voulait s'adresser à elles ; il était en captivité.

C'est pour ça que nous avons les lettres de Paul.

Il aurait été dans ses communautés, nous n'aurions pas eu de lettres.

On n'aurait pas su d'ailleurs ce qu'il avait voulu dire.

Il a adressé des lettres ; et dans une de ses lettres, notamment celle-ci, il annonce qu'il y a dans les communautés, autour d'elles, des gens qui peuvent annoncer le retour du Christ, la fin des temps.

"Ne vous laissez pas méprendre", dit-il à ses communautés.

 

Au début de sa vie apostolique, au début de son ministère d'apôtre, Paul avait une idée tout à fait contraire ; il disait à ses communautés : "préparez-vous, le retour de Jésus est imminent.

Ça sera peut-être pour demain.

Soyez prêts, après tout ".

Et puis vers la fin de son apostolat, il dit le contraire.

Il dit : "oulala, ne vous laissez pas avoir par ceux qui vont vous dire que tel signe des temps, tel événement dans le ciel ou tel travers signifie le retour de Jésus, demain.

Restez la tête froide, continuez à persévérer, continuez à demeurer.

Que votre fidélité ne s'érode pas.

Même si on vous annonce peut-être, que demain, c'est la fin, pas de relâchement".

Paul a changé d'avis peut-être (on ne sait pas pourquoi), peut-être parce que effectivement, il s'est rendu compte que Jésus ne revenait pas aussi vite qu'il le pensait ; mais il a pu de cette façon, dans l'Esprit Saint, continuer à exhorter ses communautés à demeurer.

Et c'est ce que nous sommes appelés à vivre, nous aussi.

 

Vous savez qu'à chaque prière eucharistique, le prêtre annonce que nous attendons jusqu'à ce que le Christ vienne.

Et l'année liturgique va se terminer avec cette promesse : "je serai avec vous jusqu'à la fin des temps".

Et hop, le temps de l'Avent commence ; et le temps de l'Avent c'est : la préparation à la venue du Seigneur.

Eh bien, comment a-t-il fait Paul, pour que ses communautés s'investissent pour durer ?

Et durer après lui ?

 

Eh bien nous avons la réponse dans cet Évangile, (sans transition, on passe à l'Évangile) : cette rencontre tellement connue qu’on passe à côté.

Donc, Zachée, Zachée et Jésus : on en entend parler au KT, c'est dans nos mémoires.

On sait que : voilà, un pécheur, dans son arbre, il était tout petit, Jésus, il passe, il le voit, et hop ça transforme la vie de ce pécheur.

Une fois qu'on a dit ça, on croit qu'on a tout dit.

Et puis c'est foutu, on passe à côté d'une belle rencontre.

Alors, Zachée, certes, il était riche.

Entre parenthèses, vous savez qu'il n'y a pas beaucoup de riches dans l'Evangile, qui se convertissent.

Il y a éventuellement le centurion romain, si tant est qu'il était riche ; c'est un homme de pouvoir.

Il y a un jeune homme riche qui ne va pas se convertir puisqu’à la dernière minute, il va partir.

Il n'y a pas beaucoup de riches qui se convertissent.

 

On a des femmes, qui suivent Jésus, on pressent qu'elles ont de l'argent puisque l'Évangile selon saint Luc nous dit que ces femmes vont aider le Christ avec leur argent.

Mais, une conversion assez splendide de quelqu'un qui a beaucoup d'argent, il n'y en a pas beaucoup.

Mais cet homme n'était pas que riche, il avait du pouvoir : c'était le chef des collecteurs d'impôts.

Ce n'était pas un subalterne, c'était le chef.

 

À partir du moment où on a du pouvoir, on sait tout ce que ça peut produire : des convoitises, des courtisans qui apparaissent, il faut aménager le pouvoir pour qu'ils nous soient favorables, de sorte que l'on ait moins d'argent à donner, voire même qu'on puisse en gagner.

Argent, pouvoir ça va ensemble, d'ailleurs.

Cet homme, par curiosité (ou on ne sait pas pourquoi), en tout cas, veut voir Jésus.

Ça commence par là.

Alors, il monte dans l'arbre ; bon, ça peut paraître étonnant, mais il veut voir Jésus.

Remarquez que cette rencontre a lieu parce que Jésus le veut bien ; c'est lui qui va avoir l'initiative la plus importante dans cet épisode : il lève les yeux et il invite Zachée à descendre de son arbre : "ce soir, je veux demeurer chez toi, je viens chez toi".

Nous sommes invités à demeurer en Christ, autant que lui, vient demeurer chez nous.

Et cette parole de Zachée, une fois que la rencontre a lieu, une fois que la rencontre a lieu : "je vais donner la moitié de mes biens et je veux demander réparation".

Alors, c'est là que le miracle a lieu.

 

Permettez-moi d'ouvrir une autre parenthèse.

Vous savez que, on a coutume de dire, dans une leçon de KT un peu trop rapidement faite, que Jésus était un homme formidable, extraordinaire, vraiment génial : Il aime tout le monde, l'ami des pauvres et des petits et puis il pardonne tous les péchés.

Bon, un homme génial.

C'est vrai que beaucoup de personnes, dans l'Évangile, le suivent, se mettent en route, sont attirées vers lui par son caractère un peu exceptionnel.

C'est pour eux, Jésus de Nazareth, le fils de Marie et de Joseph, et c'est vrai qu'il est étonnant.

C'est Jésus de Nazareth.

Zachée s'apprêtait, sans doute, à rencontrer l'homme, Jésus.

 

À partir du moment où la rencontre a lieu, il n'est plus seulement l'homme, Jésus.

Il devient Christ et Seigneur.

Il devient le Fils.

Cet homme extraordinaire et génial devient le Fils, le visage de la miséricorde du Père.

Il devient, dit très simplement, il devient : trésor.

Et n'est pas trésor, qui veut.

 

N'est pas trésor, qui veut.

Parce que, deviendrait trésor, qui veut ; ce serait tout simple sur la terre.

Et comme ne devient pas trésor, qui veut, on a besoin d'accumuler dans nos greniers, dans nos comptes bancaires d'autres trésors.

Donc, ne devient pas trésor, qui veut.

Il faut être le Fils de Dieu pour devenir trésor et produire un trésor énorme dans le cœur de ceux et celles qui le rencontrent.

 

Vous vous souvenez de Thomas, celui qui ne croit que ce qu'il voit.

Après la résurrection de Jésus, lui qui n'avait pas été le témoin privilégié des premières apparitions du ressuscité ; eh bien Thomas, une fois qu'il le rencontre, il va dire l'affirmation de la foi la plus belle : "Ça n'est plus mon super copain, Jésus, que je revois, c'est le Christ et Seigneur".

En lui, il a trouvé son trésor.

 

C'est ce qu'il va se produire pour Zachée.

Si Zachée change de vie, c'est toujours ce que l'on retient (voyez, pécheur converti, il donne de l'argent, il est génial), c'est aussi quelqu'un qui a découvert dans la foi, que ce Jésus devient Christ et Seigneur, pour lui.

Voici son trésor, son nouveau trésor ; raison pour laquelle il n'a plus tellement besoin d'accumuler autant dans ses poches, autant d'argent et de pouvoir.

 

Peut-être, alors, c'est ce qui lui permet de demeurer fidèle au long des jours qui passent, il n'a plus besoin de courir après le temps pour pouvoir courir après des richesses qui lui assureraient une sorte de stabilité, qu'il n'a plus qu'à recevoir : Celui qui se donne à lui comme un trésor.

Sans doute, Zachée, alors, peut tout naturellement devenir un homme beaucoup plus serein et beaucoup plus ouvert, partageant.

Mais ceci n'est possible que s'il a rencontré son trésor dans sa vie, avec cette belle rencontre avec Jésus, Fils de Dieu.

 

Alors, c'est une façon de récapituler toute cette année liturgique : qu'est-ce qui nous fait durer, qu'est-ce qui nous invite à durer encore ?

Qu'est-ce qui peut faire durer ces vieilles personnes que nous rencontrons dans nos villages ?

L'amour, sans doute.

Ce n'est pas leur argent dans leur compte bancaire (les pauvres, ça ne leur permet pas de l'emmener au ciel), mais l'amour et la foi.

En tout cas, c'est une promesse qui nous est faite, à nous qui sommes attachés à Jésus.

C'est ce que nous allons célébrer dans cette eucharistie ; nous donnons tout, comme Zachée, au fond, a pu donner, mais nous recevons ce trésor du Christ qui nous réconcilie avec lui.

Alors, au terme de cette année, pour demeurer, demandons-lui, que tout ce que nous allons lui offrir de beau et de pas beau, il en fasse une source de vie, pour nous.

 

Amen.


Vendredi 28 octobre : St Simon et St Jude, apôtres

Ep 2, 19-22 : Réconciliation des juifs et des païens entre eux et avec Dieu.

Ps 18a

Lc 6, 12-19 : le choix des Douze. Les foules à la suite de Jésus.

 

Il est commun, qu’à chaque fête d’apôtre, nous ayons le même texte de l'Évangile : l'appel des 12.

Et ce qui est marquant, c'est le temps que Jésus va passer avant d'appeler : il va prier; une nuit entière à prier Dieu. 

Aujourd'hui quand, en Eglise, des personnes sont appelées pour recevoir une mission, pour exercer une responsabilité au service de la mission, souvent, ça n'est pas une nuit, ce sont des jours, des semaines, des mois à prier, à réfléchir, à consulter.

 

Ce qui est remarquable dans l'aventure de la construction de l'Eglise, hier mais aussi aujourd'hui, c'est que le matériau à disposition de Jésus, n'est pas un matériau noble.

C'est ce qu'il a sous la main.

Il ne va pas chercher des personnes de l'autre bout de la terre, qui auraient été choisies pour leurs grandes qualités, un peu comme les négociants d'épices rares.

Il va prendre et choisir ceux qui sont à sa disposition.

Il en est ainsi aujourd'hui ; ça n'est pas un choix par dépit, au contraire, c'est un choix commandé par la volonté même du Père : "Heureux les pauvres, le Royaume des Cieux est à eux".

 

Un autre appel de Jésus dans l'Évangile pour continuer à bâtir son Eglise, ce sont les Béatitudes.

Ils ne sont pas 12, mais ils sont beaucoup plus nombreux et ils viennent aussi à lui.

Ils n'ont pas de nom ceux-là, ce sont les pauvres.

Et ces braves douze-là, du texte d'aujourd'hui, vont redescendre dans la plaine pour être au milieu de cette foule nombreuse : des pauvres.

Ils ne vont pas rester à part, tout du moins ils ne vont pas être extraits de leur milieu natif.

Ils vont y retourner bien vite.

Leur mission, au nom de Jésus, ne les changent pas ; ils demeurent ce qu'ils sont pour être avec ceux, au milieu desquels, ils étaient.

 

Amen.


Mercredi 26 octobre

Ep 6, 1-9 : Morale domestique

Ps 144

Lc 13, 22-30 : la porte étroite et l’entrée dans le Royaume

 

 Le premier niveau de lecture de ce texte, souvent, ce que peuvent faire les exégètes, c'est de se dire : St Lucse souvient de cette parole de Jésus comme d'une parole qui peut viser au premier chef, la communauté des pharisiens, de ceux qui sont les maîtres de la Loi et de la religion et leur dire : "eh bien regardez, il y a des gens qui sont extérieurs à l'Alliance de Dieu et qui eux, ont part au Royaume.


Et puis, il y a un deuxième niveau de lecture que l'on peut accueillir pour soi-même, c'est celui de la fidélité.

Vous savez, la fidélité, c'est cette capacité (peut-être, pourrions-nous dire), en tout cas cette permanence d’une promesse dans le temps.

Et très curieusement, dans ce texte, Dieu semble ne pas être fidèle : Il ferme la porte ; voire même plus qu'infidèle, il semble être indifférent : "Je ne sais pas d'où vous êtes".

C'est terrible, hein ? pour un disciple qui a cru en tout cas, avoir été proche de Dieu, jusqu'à ce qu'il entende le Maître lui dire : "je ne sais pas d'où vous êtes".

Ça peut nous faire penser à l'expérience de la Croix, d'ailleurs, pour Jésus : ce silence curieux du Père en plein moment où Jésus vit la déréliction sur la croix.

 

C'est alors que se dégage ce verset : "efforcez-vous d'entrer par la porte étroite".

Le texte originel veut dire, peut se comprendre par le verbe : lutter.

Luttez.

Et c'est un effort de chaque jour et de chaque instant.

Ce n'est pas "efforcez-vous d'entrer par la porte étroite, (je ne sais pas), la veille de votre mort ou je ne sais pas quand" ; c'est tout le temps, luttez.

Luttez, au fond, pour vraiment accueillir celui qui est et qui vient ou bien encore pour vous détacher de ce que vous croyez qu'il est ; ou de ce que vous avez dans votre mémoire de belles présences de Dieu du passé.

Ces belles présences de Dieu du passé comme des photos que l'on met sur sa cheminée en souvenir : Dieu a été comme si pour moi tel jour, Dieu a été comme si pour moi telle année.

Et je m'accroche à cette belle expérience de Dieu et puis je ne vois même pas que Dieu est autrement, aujourd'hui.

Essayons de vérifier, chacun, quel type de conversion nous pouvons vivre pour lutter chaque jour, pour laisser Dieu apparaître comme il est, pour de vrai, en chacun d'entre nous, de sorte que, au moment venu, et Il ne nous apparaisse pas sur la figure d'un inconnu ; et que, le moment venu, nous lui soyons vraiment connus.

Demandons au Seigneur alors, d'ouvrir nos yeux à sa présence qui vient, ça nous rappelle un petit peu l'Avent qui arrive.

 

Amen.


Dimanche 23 octobre :

 

Chers amis, je suppose que ça nous déjà arrivé à un grand nombre parmi nous, d'être amoureux, et pas qu'une fois.

J'espère que pour certains, être amoureux est un état presque permanent (c'est souhaitable, tout du moins), même si, cet amour que l'on peut avoir pour quelqu'un d'autre, n'est pas toujours constant, du moment qu'il est durable, même s'il connaît des variations.

Et la joie de l'Évangile, tout du moins, ce que l'Evangile essaie de nous communiquer de la personne du Christ, dimanche après dimanche, jour après jour, c'est (cette joie) de rentrer dans l'amour ou être dans une relation pleine d'amour avec la personne du Christ ; que cette personne du Christ nous donne aussi de l'amour ;que nous ne soyons pas avec lui, comme si nous étions devant un code de bonne conduite ou devant ce juge implacable qui nous attend, tel un lion tapi en embuscade, lorsque viendra le jour de notre grand passage, vers l'Au-delà.

Et c'est, je l'espère tout du moins, ce que nous pouvons découvrir petit à petit lorsque nous venons à nos eucharisties : entrer dans une relation amoureuse avec Dieu.

En tout cas, il n'a que ça à nous offrir, si vous voulez tout savoir, il n'a que ça à nous offrir.

 

Nous aimerions parfois qu'il nous offre uniquement une belle conduite, surtout quand on est enfant : que le petit Jésus nous fasse découvrir ce qu'il faut bien faire ; comme ça on sera des bonnes personnes.

De fait, Jésus nous dit ce qu'il faut faire, comment il faut être, aussi ; mais il est subtil, Jésus, parce qu'il ne nous donne pas simplement une bonne recette pour des bons gestes et des bonnes attitudes ; il parle beaucoup de notre cœur.

Souvent le cœur, c'est un peu plus invisible et voire même, ce qui va compter pour le Christ est même invisible aux yeux : ça fait penser au Petit Prince : l’amour n’est visible qu’au cœur.

 

Alors, cette suite de Jésus, dimanche après dimanche, tout au long de cette année liturgique va consister peu à peu, à faire mûrir notre amour.

 

Alors, dans l'Évangile que nous avons accueilli aujourd'hui, nous avons deux attitudes diamétralement opposées.

On ne sait presque pas d'ailleurs, quoi faire avec ces deux attitudes-là.

Il y en a une qui nous semble, somme toute, fort hypocrite finalement : c’est ce pharisien qui juge que tous les autres sont bien moins bons que lui.

Et on peut au moins se réjouir que ce pharisien, il prie.

Il prie, il est dans le temple à prier et il s'efforce sur ce chemin de la vie bonne.

On ne peut pas le lui reprocher.

D'ailleurs, peut-être que nous sommes comme lui, en tout cas, moi je le confesse : je suis comme lui, tout du moins à rechercher la vie bonne.

Et puis, nous avons ce publicain, qui semble être tout le contraire.

Il confesse tout de suite que c'est un pécheur ; on ne sait pas d'ailleurs ce qu'il a à se reprocher.

Il ne pense pas, d’ailleurs, du tout à se comparer aux autres, il ne lève même pas les yeux vers son Père et il se sent bien médiocre.

Pourtant très curieusement, c'est lui qui est justifié, entendons par-là, c'est lui qui est agréable aux yeux de Dieu : c'est ce que dit Jésus, en tout cas.

Alors, c'est très désarçonnant parce que du coup, on peut se demander : mais qu'est-ce qu'on a à faire sinon à être de médiocres pécheurs, si c'est comme ça que l'on rentre au ciel ?

 

Alors en fait, je vous invite plutôt à prendre quelques centimètres de hauteur par rapport à cette scène et puis à y lire très simplement en y regardant de plus près : nous sommes et l'un et l'autre, ou tout du moins, et l'un et après l'autre, avant de revenir au premier.

Cela nous colle à la peau comme la neige peut nous coller aux chaussures, l'hiver.

Mais qu'est-ce que va nous apporter cette parole lumineuse de Jésus, à la fin de cet Évangile?

Parce que Jésus en fait, utilise une histoire.

C'est une histoire, il n'est pas en train d'observer une scène qui se passe en réalité ; il raconte une scène qui ne se passe pas en réalité.

Il la raconte pour illustrer son propos.

 

Eh bien, c'est que chaque fois, que nous osons nous approcher de lui et ouvrir la Parole de Dieu, nous allons vivre deux choses, si nous le voulons bien, si l'Esprit nous le permet, si l'Esprit nous permet d'ôter, de lever ce voile qui vient couvrir notre cœur.

 La première chose, c'est que, le Christ, dans son amour, vient faire la vérité dans notre conscience : il vient la faire, cette vérité, il apporte un tout petit peu de lumière pour que nous ne soyons pas en permanence (et c'est plus fort que nous, ce n'est pas la peine de nous défendre de cela, c'est plus fort que nous), que nous ne soyons pas en permanence enfermés dans cette conscience un peu narcissique, égoïste où nous pensons que notre moi est bien supérieur.

Et si nous ne le pensons pas, nous le vivons.

Un symptôme, pour savoir si nous sommes là-dedans, si nous sommes empêtrés dans cette façon d'être, c'est de se demander si, en permanence, les autres ne sont pas un problème.

Si nous nous croyons supérieurs ou si nous pensons que les autres sont une gêne, ou beaucoup d'autres, pas forcément tous, mais beaucoup, alors, nous nous faisons quand même illusion parce que nous souffrons de ce moi un peu trop enflé.

Et Jésus, jamais ne nous laisse tranquille par rapport à ce moi enflé.

Il vient donc, ce que l'on dit, faire la vérité.

Il apporte un tout petit peu de lumière, comme s’il voulait ouvrir une cave noire et très humide, que l'on n’a jamais ouverte : c'est notre intérieur, notre cœur.

 

La deuxième étape, le deuxième cadeau, dans son amour, toujours, que le Christ nous offre, c'est la certitude que, quand même, nous sommes aimés.

Car, qu'est-ce qui nous empêche de nous laisser convertir, souvent ?

Qu'est-ce qui nous empêche de reconnaître nos limites ?

Qu'est-ce qui empêche que cette vérité se fasse dans nos cœurs ?

C'est sans doute la peur de perdre de l'amour.

Pourquoi un petit enfant a de la peine à avouer une bêtise qu'il aurait faite, mais que bien vite les adultes voient ?

Pourquoi ?

Qu'est-ce qui empêcherait un enfant d'avouer une bêtise qu'il a faite ?

Eh bien, (vous avez tous l'expérience, ou tout du moins les parents) : c'est que très vite, c'est la peur de perdre sa place, cette reconnaissance précieuse et l'amour de sa maman et aussi de son papa.

Alors, on va différer l'aveu de la bêtise.

On va dire : "eh bien ce n'est pas moi"; et puis ça finit par être moi; et puis c'est blessant; et bien vite, c'est cicatrisé parce que l'amour n'est pas perdu.

 

Mais si nous avons la certitude que Christ nous aime, (non pas qu'il accepte que nous fassions n'importe quoi, pas plus que dans un couple ou dans toute relation amicale), si nous avons cette certitude qu'il nous aime, alors nous avançons et nous nous abandonnons, nous nous convertissons.

Ces deux mouvements sont précieux et c'est une relation d'amour que nous pouvons vivre ou en tout cas, que je vous souhaite.

Je vous le souhaite de vivre avec l'Évangile, sans quoi Jésus, nous faisons de lui une sorte de figure tutélaire qui, bien vite, va s'user.

Je vais vous lire un tout petit extrait de Saint-Jean, dans une de ses lettres.

Voici ce qu'il dit (on sent que Saint-Jean a l'expérience d'une communauté à laquelle il faut redire, ce que lui-même a vécu comme disciple bien-aimé), il dit : "Si nous disons : « nous n'avons pas de péché », nous nous abusons.

La vérité n'est pas en nous.

Par contre, si nous les confessons, il est assez fidèle, le Christ, et juste, pour nous les remettre et nous justifier."

Et voilà, sont éclairés ces deux personnages, à la fois le pharisien et le publicain.

 

C'est une relation, c’est un chemin d'amour fait d'alliances défaites et d'alliances refaites, de chutes et de relèvements, de patience surtout et beaucoup d'humilité, peut-être un peu d'humour sur soi-même, mais sans jamais perdre le fil de Celui qui nous aime.

Aimons-Le ; en tout cas, Il nous aime et c'est sans doute ce que nous avons vécu tout au long de cette année liturgique ; peut-être personnellement aussi, dans nos prières quotidiennes, en ouvrant la Parole de Dieu.

Le point culminant a sans aucun doute été la Passion de Jésus, le vendredi Saint, la résurrection, le dimanche.

Pourvu que nous gardions quelques éclats de cette lumière, tandis que l'hiver peu à peu va s'installer.

Que la ténèbre n'ait pas raison de cet amour.

 

Amen.


Dimanche 16 octobre :

Ex 17, 8-13 : Combat avec Amalec

Ps 120

2 Tim 3, 14- 4, 2 : Mise en garde contre les périls des derniers temps.

Lc 18, 1-8 : Le juge inique et la veuve importune.

 

Chers amis, je faisais allusion un dimanche à l'automne qui s'installe.

L'automne qui s'installe pour chacun, c'est … dans la gorge : les premiers mots de gorge de l'année, mais c'est aussi parfois l'impression de rentrer dans un temps qui va changer ; non pas le climat, mais un temps qui va être long : le long hiver.

Alors, on interroge les druides, les connaisseurs de la terre, les rebouteux et autres personnes qui connaissent bien les signes des temps, pour savoir si cet hiver sera rude, pas rude, long, pas long ; parce que le temps, quand il est long, c'est fatiguant.

Ça ne vous est jamais arrivé de dire : "j'en ai marre ? "

Ça ne vous est jamais arrivé de dire : "ça m'agace ?"

Alors, il y a des moments pour ça (pour d'autres c'est l'été).

Alors disons, à l'automne, par exemple, ça peut être ça.

On a un rapport au temps qui peut ressembler un peu, à celui qui veut dompter un cheval sauvage : c'est compliqué, c'est long, c'est parfois usant et on peut parfois recevoir des coups.

 

Et si je te dis ça,c'est parce que dans la parole de Dieu, il en est question.

Et dans la première lecture Moïse qui doit garder son bras levé pendant longtemps, (ça paraît curieux comme scène, mais c'est ainsi), il faut que son bras soit levé pendant longtemps.

Ensuite, nous avons une recommandation que Saint-Paul adresse à Timothée : il faut annoncer à temps et à contretemps, sans perdre patience et toujours avec le souci d'instruire.

Alors, on imagine le caractère laborieux de cette tâche, au point que Paul encourage son disciple Timothée pour qu'il ne finisse pas par perdre patience et dire : "j'en ai marre, je te remets tout entre les mains, tu te débrouilles. "

 

Et puis, nous avons cet Évangile où il faut prier sans cesse, sans se décourager.

On a une image que Jésus nous rapporte.

C'est une image : il est question d'un juge inique et d'une pauvre veuve.

Jésus ne fait pas de Dieu, son Père, un juge inique : attention !

Jésus insiste, non pas sur l'iniquité du juge, mais plutôt sur la patience (qui est récompensée) de cette pauvre veuve qui ne va pas cesser d'interpeller son auditeur pour obtenir ce qu'elle veut.

Voilà ce rapport au temps.

Si nous sommes en rapport avec ce temps comme un cavalier avec un cheval sauvage, il se peut que parfois, nous accusions des coups, nous accusions des échecs et qu'on finisse par en avoir un peu marre.

 

Ça se traduit dans nos prières, d'ailleurs.

Il y a trois façons de prier, trois façons de prier.

Et on espère (et c'est bien), secrètement, que nos façons de prier vont passer de la une à la deux et de la deux à la trois, comme une forme de progrès, sans retour en arrière.

Pourquoi pas ?

 

La première façon de prier, c'est s'adresser à Dieu comme pour lui demander qu’il nous protège : car il y en a marre de recevoir des coups, d'accuser des échecs ; il y en a marre d'être fatigué.

Alors, on a besoin qu'il nous protège et dans notre prière, on va le lui dire : "Seigneur, fais ceci, fais cela, que mon voisin arrête de m'embêter, que mon mari... ceci, ma femme... cela, que j'ai de bonnes notes (tout ce que l'on voudra, quoi !), pour être protégé.

 

Alors, c'est déjà bien parce qu’on s’adresse à Dieu, c'est déjà bien.

Mais c'est un petit problème aussi, parce qu'on s'adresse à Dieu comme si on s'adressait à son papa ou à sa maman.

Pour les enfants du KT, on commence par-là, toujours : on ne peut pas faire autrement.

Mais arrive un certain âge, on peut moins s'adresser à son papa et à sa maman, et puis au-delà encore, au-delà de notre père et de notre mère.

 

Il y a une deuxième façon de prier qui peut paraître parfois, comme une forme de progrès par rapport à la première : c'est, j'ai besoin de me rappeler qui je suis.

 C’est une prière comme pour se rassurer, souvent quand le monde autour de moi change beaucoup : Eh bien, il y a des gens que j'aime bien qui ont disparu; à la télé, ce n'est plus comme avant ; eh bien, j'ai besoin de me rassurer.

Un peu comme quand je veux m'assurer que je ne suis pas en train de rêver, je me pince : je suis bien vivant, je suis bien réveillé.

C'est une prière comme pour se rassurer : on s'adresse à Dieu en lui disant : "pourvu que, Seigneur ; pourvu que…"

 

Alors c'est déjà toujours bien, puisqu'on s'adresse toujours à Dieu, on continue à prier, on ne s'est pas découragé.

L'inconvénient, c'est qu’on s'adresse à Dieu comme si on s'adressait à soi-même.

Vous avez déjà vu des gens qui parlent tout seuls dans la rue ?

Eh bien voilà, on s'adresse à soi-même, on se fait ses petits scénario.

 

Alors, il y a une troisième façon de prier qui paraît encore un progrès par rapport à la deuxième, une sorte de maturité, de sommet, on va dire.

Dans cette façon de prier, on s'adresse à Dieu comme pour patienter, on veut patienter ; comme quand on est chez le médecin et qu’on doit attendre ; on patiente.

On ne lui demande pas d'accélérer le temps ; on ne lui demande rien, à vrai dire ; on ne lui demande rien, on lui donne.

Donc, on pourra lui dire des choses, par exemple : "je t'offre", (voyez),"Seigneur je t'offre, je t'offre ma journée, j'aurais peut-être voulu qu'elle soit différente, mais elle n'est pas différente, donc je te l'offre quand même, je te le donne Seigneur… tout, tout ce qui me vient, comme dirait Job, d'ailleurs, dans l'Ancien Testament, je te l'offre.

 

Et dans cette prière-là, Dieu se fait hôte : il n'est ni père, ni mère, ni moi-même, il est un autre.

Autre, donc hôte : Il vient habiter chez moi, il vient faire sa demeure.

Alors là, on va dire : bingo ça y est, je sais ce qu'il faut faire ; voilà, on va s'y atteler, c'est le progrès de la prière, troisième étape : il faut que j'y arrive.

Ben oui, sauf que, on ne réussit pas

On est tantôt dans la première manière, tantôt dans la deuxième, tantôt dans la troisième.

Un peu au Monopoly, on rétrograde dans la deuxième, ou la première et on revient à la troisième : il ne faut pas désespérer de cela.

 

Dieu accueille toute prière, mais Dieu n'exauce pas toutes les prières.

Dieu est d'abord présence, il n'est pas banque, tiroir-caisse, assurance-vie ; le Seigneur est présence.

Et voyez, dans cette troisième façon de prier, il ne s'agit pas de dompter un cheval sauvage (voyez, on voudrait que le temps soit à ma mesure).

Dans cette troisième façon de prier, j'accueille ce qui vient.

Je m'insère dans ce temps et donc je ne risque pas de dire : "il y en a marre ou ça m’agace".

 

Il y a des fruits abondants, savoureux dans cette troisième façon de prier :

 

Premier fruit, c'est spontanément : j'ai un cœur qui accueille plus, je suis moins renfrogné, c'était le mot de l'évêque la semaine dernière ; j'accueille plus.

 

Deuxième fruit de cette troisième façon de prier, c’est : je vais plus aisément me laisser nourrir par Dieu, je vais à la source, je me laisse former et façonner par lui, comme un potier, son vase.

 

 Et le troisième fruit de cette troisième façon de prier c'est ce que nous vivons ce matin, c'est l'eucharistie : on rend grâce ou on donne,

 

 Eh bien, je vous souhaite, à chacun, de faire comme il peut dans la prière mais déjà ne pas cesser de prier et puis se rendre compte que cette prière ne peut pas : ni changer le monde,ni annuler le temps, au mieux, peut-être nous permettre de rencontrer Dieu qui se cache, là, dans ce temps qui est le nôtre.

 

Amen.


Jeudi 13 octobre 2016 :

Ep 1, 1-10 : Le plan divin du salut

Ps 97

Lc 11, 47-54 : Contre les Pharisiens et legistes

 

Nous sommes au cœur, avec l’Evangile entendu aujourd’hui, et celui d’hier, de la signification de ce qu’est une étole.

L’étole du prêtre est le signe d’un fardeau, mais un fardeau très particulier : pas uniquement celui de la charge de conduire sa communauté (la communauté n’est pas un fardeau, bien qu’elle puisse être une charge au sens propre comme au sens figuré) mais le fardeau de la parole de Dieu, qui nécessite d’être mise en pratique, autant par celui qui doit l’annoncer que par ceux à qui cette parole est destinée.

Ce n’est pas uniquement le lot du peuple de Dieu, comme si les prêtres et les évêques pensaient en être libérés.

Eux aussi, ceux qui l’annoncent, doivent mettre en pratique ce qu’ils annoncent.

 

Et qu’est-ce qui fait que cette parole de Dieu est incarnée, c’est-à-dire qu’elle peut s’entendre par tous, par les plus petits comme par les plus forts ?

Qu’est-ce qui fait que cette parole peut être savoureuse et douce comme du miel ?

Et qu’est-ce qui fait que cette amertume peut être digeste ?

Eh bien, c’est que celui qui l’annonce essaie de la vivre.

 

Cette parole de Dieu deviendrait très amère si celui qui l’annonce ne la vit pas.

Non pas que celui qui l’annonce doive la diluer et la rendre insipide.

Non, il doit déjà essayer de la vivre.

Et ce fardeau représenté par l’étole montre à la fois une sorte de solidarité : nous sommes tous présents dans la même aventure, à la fois les prêtres et tous les baptisés, l’aventure d’accueillir la parole.

 

Et en même temps, il y en a quelques-uns qui ont une responsabilité supplémentaire ; cela les met à l’écart, mais pas sur un piédestal.

Ce sont les prêtres.

Responsabilité supplémentaire de la cohérence de ce qu’ils annoncent.

 

Ce que Jésus reproche aux pharisiens et aux docteurs de la Loi hier et avant-hier, c’est : « Au fond, vous chargez tout le monde des fardeaux de la Loi, mais vous êtes vous-mêmes, incapables de les porter.

Vous êtes pleins de contradictions.

Du coup, votre exigence est très grande.

Vous êtes très très exigeants pour les autres mais vous ne l’êtes pas pour vous-mêmes ».

 

Dans une communauté, il y a une répartition des responsabilités.

C’est pour cela que tout le monde ne porte pas une étole.

Mais tout le monde pourrait porter un vêtement blanc, car nous sommes tous baptisés, pas seulement le prêtre.

Nous pourrions tous être en aube car nous sommes tous baptisés.

Mais il n’y en a qu’un qui porte une étole, c’est le prêtre.

En revanche, entre tous les baptisés l’enjeu est le même.

Et de plus en plus aujourd’hui, parce que nous avons des responsabilités les uns par rapport aux autres : un tel est relais-village ; un tel ouvre l’église parce qu’il a la clef ; tel autre a la charge d’animer un groupe de prière ; tel autre prépare des obsèques.

Et là, on a la responsabilité des uns par rapport aux autres : sur ce que nous sommes censés représenter, annoncer, que nous soyons les premiers à le vivre, que nous soyons cohérents.

C’est de cette façon-là que la parole de Dieu, cette exigence que le Christ nous donne, sera féconde.

Cette exigence donnera envie, envie d’être vécue.

Sinon, on recrée des paroles de Dieu qui n’intéressent personne ou qui sont vécues de manière très hypocrite : « Voyez, voyez, je suis chrétien, mais à condition de ne pas faire ce que je dis, ou plutôt, que ce soient les autres qui le fassent à ma place.

 

Et c’est ce que reproche Jésus …


Mardi 11 octobre : St Jean XXIII

Ga 5, 1-6 : la liberté chrétienne

Ps 118

Lc 11, 37-41 : Contre les pharisiens et les légistes.

 

Ces invectives contre les pharisiens, dans d'autres Évangiles, elles apparaissent dans un contexte différent.

Luc se souvient de cet épisode au cours d'un repas : Jésus était invité, il prend sa place avec d'autres, et voici que, ne faisant pas ses ablutions, ça lui est reproché.

L'occasion pour lui, d'un enseignement où il va droit au but.

 

Si vous avez en mémoire le récit qu'en fait St Matthieu (Matthieu avait peut-être plus de mémoire sur le sujet), nous avons une longue liste de reproches très cinglants que Jésus adresse aux pharisiens.

Heureusement que je n'étais pas à leur place, je pense que ça m'aurait agacé les moustaches, parce que Jésus y allait fort contre les pharisiens.

Là, il va droit au but dans le souvenir qu'en a Luc.

 

Il enlève cette longue série de reproches et il va dire: "Insensés, celui qui a fait l'extérieur, n'a-t-il pas fait aussi l'intérieur ?"

Alors, il faut prendre cette conclusion de Jésus, à sa juste mesure.

Jésus reproche un excès.

Jésus ne va pas dire : "ne faites rien".

Il reproche un excès des pharisiens.

Aussi lorsque l'on entend : "Insensés, celui qui a fait l'extérieur, n'a-t-il pas fait aussi l'intérieur ?", de deux choses l'une : soit alors, on purifie l'intérieur autant que nous purifions l'extérieur, (première hypothèse) ;soit nous considérons que, par grâce, miséricorde (ou que sais-je !) ou amnistie divine, nous n'avons pas à purifier l'intérieur comme nous ne purifions donc pas l'extérieur.

Vous voyez la nuance.

 

La nuance, chez Jésus, consiste à casser cet excès pharisien qui consistait à dire : vous tombez dans une forme d'hypocrisie à montrer bien devant tout le monde que vous faites des efforts pour purifier les parties extérieures de votre corps, mais en fait, il n'y a aucun effort à la conversion à l'intérieur, en vous-même, dans votre cœur.

Alors, c'est peut-être des choses sans intérêt puisque vous allez dire : mais nous, on ne purifier rien du tout à l'extérieur, au mieux, on se lave les mains pour éviter d'avoir la grippe et la gastro, mais c'est tout.

Mais n'empêche que c'est important puisque chez Jésus le corps et le cœur sont un.

 

Le corps et le cœur sont un.

Nous aimons avec ce que nous sommes et ce que nous sommes, c'est ce que nous donnons à voir, aussi.

Ça n'est pas uniquement cette espèce de réalité intérieure et invisible aux autres, seule visible à Dieu.

Non, ce que nous sommes (et quand bien même nous sommes des êtres éventuellement de prière), nous donnons à voir une partie de nous-mêmes aux autres.

Et c'est alors que d'autres enseignements de Jésus peuvent se révéler dans nos têtes.

Par exemple (par exemple !) : on reconnaît un arbre à ses fruits.

on ne cueille pas des fruits sur des épines.

le cœur, si jamais il ressemble à un sépulcre blanchi, ne peut rien donner.

et je peux avoir une foi à transporter les montagnes ; si je n'ai pas l'amour, je ne suis qu'un cuivre qui résonne.

L'unité du corps avec le cœur.

Quelqu'un qui va affirmer qu'il aime très fort le Seigneur et qu'il est un homme profondément converti et nettoyé à l'intérieur (ça peut arriver que certains le croient, après tout ; après tout, nous cheminons dans cette perspective); si à l'extérieur, cette même personne est une personne (je ne sais pas moi !) violente, aigrie (et tout ce que vous voudrez), il y a un problème.

 

Ce qui est l'occasion aussi, et pour terminer, de dire quelques mots sur cette espèce de débat qu'il y a dans la communauté des Galates: alors, je vais chez Saint-Paul, cette fois-ci.

Ça peut nous paraître abscons : Loi, foi, grâce, Loi de Moïse, Jésus.

Il se trouve que la communauté des Galates, ( et c'est aussi vrai dans d'autres communautés de Saint-Paul), la communauté des Galates est déchirée parce que certains (vous le savez), convertis à Jésus-Christ étaient juifs (et juifs un peu comme les pharisiens), soucieux d'une vraie droiture religieuse.

Ils étaient circoncis (ils n'y étaient pas pour grand-chose, cela leur était arrivé fort jeunes) et pour eux c'était un titre de gloire (après tout, pourquoi pas ?), cette marque dans la chair.

Ils suivent la Loi de Moïse, (du moins ils essaient de la suivre) et ils se plaignent alors que d'autres, (qui n'étaient pas juifs et donc n'avaient pas ces observances de la Loi de Moïse, mais aussi convertis à Jésus) ils se plaignent que ceux-là puissent prendre place à table, pour vivre les mêmes cultes qu'eux.

Et Paul, lui-même juif converti, lui-même circoncis et grand observant de la Loi de Moïse, va essayer de favoriser la communion dans sa communauté, au nom du Dieu communion : Père, Fils et Esprit et au nom de la mort et de la résurrection de Jésus qui brise toute barrière ; car il a repéré, Paul, que l'observance de la Loi est bonne ; mais c'était un prétexte.

Cette observance avait été détournée comme prétexte pour mieux diviser.

Et, à ce moment-là, cette Loi, en elle-même, n'est plus bonne, puisqu'on l'a détournée de son sens premier pour diviser la communauté : il y a des bons, il y a les pas bons ; il y a ceux qui se purifient et ceux qui ne le sont pas.

 

Alors, il va contrebalancer, il va dire : mais il y a aussi la foi ou, (va-t-il dire dans d'autres textes), la grâce.

Pour dire autrement: ça n'est pas uniquement la force de nos poignets qui nous permet d'arriver au sommet d'une échelle de perfection, ça va être aussi la puissance du Christ, mort et ressuscité.

Attention ! Il n'oppose pas les deux.

Il n'oppose pas les deux.

 

Eh bien, pour nous-mêmes : cet enjeu pour nous, c'est de ne rien détourner ni manipuler dans notre foi, sous prétexte de vouloir être parfait, au détriment des autres.

Pour nous, cet enseignement de ce jour consiste,au contraire, à garder cette profonde unité entre notre cœur et notre corps;

entre nous et nos frères ;

entre nos imperfections et notre recherche de perfection.

Cette unité s'appelle la sainteté.

Seigneur, augmente en nous cette sainteté.


Vendredi 7 octobre : Notre-Dame du Rosaire.

Ga 3, 6-14 : La thèse de Paul. Preuve par l’Ecriture.

Ps 110

Lc 11, 15-26 : Jésus et Béelzéboul. Intransigeance de Jésus. Retour offensif de l’esprit impur.

 

Ce texte peut être un peu déstabilisant, si peu que nous soyons éprouvés durement, l'un ou l'autre, dans notre vie personnelle, actuellement.

Le fait que Jésus évoque le chef des démons, qu'il évoque l'homme fort, bien armé, qui tout d'un coup se voit dépouillé par 7 démons.

Ces évocations peuvent, pour certains en tout cas, fragiliser.

 

Mais si vous avez écouté ce texte, et si vous avez entendu l'affirmation de Jésus : "c'est par le doigt de Dieu que j'expulse les démons, et non par Béelzéboul", Jésus propose un renversement de perspective, qui est en fait, énorme.

 

Quel est-il ?

Il est que, c'est par l'amour qu'un mal peut être soigné.

Alors, dans toute l'histoire de l'humanité,nous avons coutume, nous avons reçu des anciens et nous utilisons encore aujourd'hui et dans notre imaginaire et dans la science, l'idée, selon laquelle le mal peut guérir du mal.

Les médecins, les pharmaciens le savent, notamment avec cette image du serpent qui crache son venin dans une coupe.

C'est bien celui qui est à l'origine du venin qui va nous donner, ou avec lequel nous allons pouvoir trouver l'antidote pour se guérir.

C'est dans cette idée aussi que, dans un livre de la Bible, dans l'Ancien Testament, nous parlons de ce serpent de bronze, érigé dans le désert, qui vient guérir tous ceux qui ont été mordus d'une morsure brûlante par les serpents.

Et il peut y avoir cette idée, (il peut y avoir cette idée) quand on regarde la Croix : nous voyons le péché, et le voyant, nous pouvons être sauvé.

 

Mais Jésus va beaucoup plus loin en réalité.

Il convertit cette possibilité ou cette affirmation que le mal peut nous guérir, en disant: c'est l'amour qui va guérir, c'est l'amour.

Faites une expérience, si vous ne l'avez pas encore faite : trouvez-vous quelque chose qui vous fait mal dans votre tête ou dans votre corps et allez sur Internet pour comprendre qu'est-ce qui est à l'origine de ce mal, qui vous fait mal.

Et alors, vous allez trouver une tonne de maladies et vous allez vous trouvez encore plus mal que vous n'étiez au départ, avec un cœur divisé parce que vous allez vous mettre à douter :

 Est-ce que l'on m'a vraiment tout dit ?

 Est-ce qu'il ne faudrait pas que j'en dise plus à mon médecin ?

 N'y a-t-il pas des investigations supplémentaires à réaliser ?

Vous allez finir par vous trouver beaucoup plus mal.

Le propos est que, tout ce que vous allez trouver dans votre recherche, va n'être qu'une série de symptômes et hypothèses qui envisagent tous un mal, ou essaient de donner une explication à un mal.

C'est sans doute nécessaire, mais il faut plutôt laisser les professionnels manier cela, c'est leur travail.

Mais il y a une autre façon de faire.

C'est : se réconcilier ou aimer ou écouter ou voir ou visiter quelqu'un qui nous aime.

Ça ne va pas forcément guérir une maladie, mais ça va nous rendre fort devant cette maladie.

C'est toute la différence entre des médicaments (qui sont souhaitable est nécessaire) et des visites auprès des personnes malades.

Le mystère du Rosaire : c'est Notre-Dame du Rosaire aujourd'hui, consiste à regarder dans la vie de Jésus, du beau, du bon, de l'amour, des scènes toute simple qui se sont produites : l'annonce à Marie, la visitation à Elisabeth, la naissance, le baptême de Jésus, les noces de Cana, la transfiguration, la Pentecôte.

Ces mystères joyeux, lumineux, douloureux, glorieux (même les mystères douloureux, il y a de l'amour).

Quand on récite le chapelet, on est au cœur de la vie de Dieu et on est au cœur du beau.

Et ceci a été possible par le "oui" de Marie.

Ce que Jésus dit : "c'est par le doigt de Dieu que je chasse les démons", c'est cela.

Alors Jésus ne met pas (ni moi d'ailleurs) ne met pas dos à dos science et foi, telle n'est pas la question, mais de redonner toute la puissance à l'amour.

 

Amen.


Mercredi 5 octobre

Ga 2, 1-2.7-14 : L’assemblée de Jérusalem

Ps 116

Lc11, 1-4 : Le Notre Père

 

Nous avons la prière du Notre-Père.

Vous savez, (on est dans l'Évangile de Luc), dans l'Évangile de Matthieu, cette prière du Notre-Père, elle est introduite à l'intérieur de cette séquence que nous accueillons au moment du mercredi des Cendres : "alors quand tu fais l'aumône, que ta main droite ignore ce que donne ta main gauche ; quand tu jeûnes, parfume-toi ; quand tu pries, enferme-toi dans ta chambre. "

Et à chaque fois Jésus rajoute : Dieu, ton Père qui est là dans le secret, sait ce dont tu as besoin.

Et, sur l'épisode de la prière, apparaît cette mention du Notre-Père.

Là, ici, c'est une demande.

L'Évangile de Luc retient, la réponse à une demande que les disciples font : "Jean-Baptiste prie et il a appris à ses disciples à prier, et nous, alors ?

Qu'est-ce que l'on doit dire ?

Comment pries-tu ?"

 

Ce que l'on peut retenir, c'est d'abord, l'image de Jésus qui prie.

Et on peut se dire que cette prière est éternelle.

Ça n'est pas la prière d'un instant, en tout cas pas comme nous.

Et aujourd'hui encore, Jésus continue à prier, nuit et jour.

Un peu, comme dirait une parabole de l'Évangile : "qu'il dorme ou qu'il se lève, la semence pousse toute seule" ; c'est par rapport à une parabole de la semence.

Mais que nous dormions ou nous nous levions, Christ prie.

Dans l'Évangile de Jean, on a un détail sur cette prière, en plus de la prière du Notre-Père, on sait que Christ prie pour l'unité des siens.

 

Mais revenons ici, à cette prière-là.

C'est une prière qu'il apprend à ses disciples.

C'est une prière, par excellence, communautaire.

C'est la raison pour laquelle nous disons : "notre" ; et c'est la raison pour laquelle, dans la prière qui est déclinée dans l'Évangile, tout est à la première personne du pluriel : "Quand vous priez, dites : Père" ; ensuite : "donne-nous".

Il y a des prières qui sont infiniment personnelles, que nous récitons, que nous formulons ; mais celle-ci est par excellence communautaire, même si nous sommes tout seuls: la prière des disciples à travers les âges.

 

 "Que ton nom soit sanctifié" : le désir que Dieu nous permette de reconnaître que, grand, Il est, que son nom est Saint et que cette sainteté nous soit communiquée.

Alors on pourrait se dire : "mais qu'est-ce que ça veut dire ?"

Eh bien, ça veut tout simplement dire que parler à Dieu, qui ne serait pas Dieu, ça n'a pas de sens.

Autant parler à son ami ou à son chien ou à je ne sais qui.

Mais donc, dire que Dieu est grand et que son nom est saint, c'est tout simplement se mettre en face d'une réalité, autre que nous-mêmes.

Sinon ce n'est plus une prière, c'est (je ne sais pas), une conversation avec quelqu'un d'autre que Dieu.

 

"Donne-nous le pain": ce verbe, donne-nous, dans la langue originale, est un verbe qui ne s'interrompt jamais, c'est un "donne-nous pour toujours, tout le temps" ; "donne-nous tout le temps".

Tout le temps, donne-nous ce dont nous avons besoin, tous les jours.

Notre communauté, comme toute la communauté chrétienne à travers la terre, a besoin tous les jours, du nécessaire ; elle le reçoit.

Du moins, qu'elle apprenne à le recevoir, un peu comme la manne dans le désert.

Chaque jour, je reçois ce dont j'ai besoin et je ne peux pas faire de provision par peur de manquer.

Vous savez que cette manne, elle pourrit le lendemain, si nous avons conservé celle de la veille.

 

Il y a eu de grands débats sur la traduction récente de: "ne nous laisse pas entrer en tentation", car le verbe original voudrait dire à la fois : être dans l'épreuve, ou à la fois : être tenté.

Dieu, peut-il nous envoyer du mal ?

Nous disons : non.

Peut-il nous aider à éviter une épreuve ?

Nous disons : oui.

Le traducteur, en français, a décidé alors, pour trancher, de couper la poire en deux.

Et c'est : "ne nous laisse pas entrer en tentation", c'est-à-dire (ça n'est pas : ne nous tente pas, ça n'aurait pas de sens que Dieu tente ses créatures), mais permets-nous de ne pas aller au-delà de la ligne rouge ; au-delà de cette ligne rouge nous finirions inévitablement par rentrer dans le domaine, non plus de Dieu, mais du mal.

Permets que nous n'allions pas au-delà.

 

Cette belle prière du Notre-Père est une prière, vous l'avez compris, de tous les jours: une sorte de pain quotidien qui forme en nous, progressivement, une sorte de cœur de disciple.

Ceux qui sont mariés depuis des dizaines d'années deviennent petit à petit des vrais époux, petit à petit.

Ceux qui sont menuisiers depuis des années, commencent à avoir des mains de menuisier.

Eh bien, ceux qui prient le Notre-Père tout le temps, commencent, commencent à devenir disciples.

C'est bien mieux comme cela.

 

Amen.


Mardi 4 octobre : St François d’Assise

Ga 6, 14-18 :

Ps 15

Mt 11, 25-30 : L’Evangile révélé aux simples. Le Père et le Fils. Jésus maître au fardeau léger

 

Dans cet Évangile selon saint Matthieu, nous avons une révélation unique dans tout l’Evangile, (surtout dans les Évangiles de Matthieu, Marc et Luc), c'est la révélation trinitaire : Jésus, son Père, l’unique Esprit.

On peut retenir de cette révélation : les tout-petits, ceux du psaume 8.

Ces tout-petits qu'on retrouve juste après la purification du temple, ceux qui chantent : "hosanna au Fils de David".

Il ne s'agit pas de l'entrée à Jérusalem, il s'agit de ceux qui, derrière le geste violent de Jésus de la purification du temple, ces tout-petits, ceux qui ne vivent pas des commerces du temple, ceux qui reconnaissent en lui le Messie.

C'est aussi (ou l’on peut voir) les tout-petits des Béatitudes, les pauvres, du même Évangile au chapitre 5.

 

Le poids du fardeau, le joug, ça n'est pas la vie lourde et difficile, encore que !

C'est le poids de la loi, c'est le poids de la conscience qui cherche à vivre la vie droitement ; ceux qui ont une conscience religieuse aiguisée et qui trouvent que le chemin qui mène vers le Royaume est bien difficile.

Jésus ne vient pas changer cette loi, il n’ôte aucune lettre de la loi.

Mais parce qu'il est doux et humble de cœur, parce qu'il est doux et humble de cœur, Jésus, il invite tous ces petits à poursuivre leur route vers l'excellence du royaume en s'appuyant sur lui : "Oui, mon joug est facile à porter et mon fardeau léger".

 

Si la liturgie propose ce texte, cette révélation trinitaire en la fête de Saint François (alors, la liturgie a ses raisons que nous ne connaissons pas toujours), mais on peut peut-être imaginer que cette sagesse révélée aux tout-petits et cette connaissance toute particulière de Dieu tout entier (Père, Fils et Saint Esprit), est pour nous un appel à vivre de même : continuer à nous mettre en route à la suite de l'exigence de l'amour et du Royaume, tout en s'appuyant sur le Christ,le Christ total, (pas le Christ de nos rêves ou de nos revendications), le Christ total : crèche, croix, tabernacle.

 

Amen.


Dimanche 2 octobre : les anges gardiens

Ha 1,2-3 ; 2, 2-4 : Première plainte du prophète : la déroute de la justice.

Second oracle : le juste vivra par sa fidélité.

Ps 94

2 Tm 1, 6-8.13-14 : Les grâces reçues par Timothée.

Lc 17, 5-10 : la foi du serviteur. Servir avec humilité.

 

Voilà, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais nous sommes dans la saison où déjà, des grosses araignées noires montent au plafond.

Ça ne vous est pas arrivé ?

Ça commence, hein ?

J'en ai même vu dans l'église Saint-Pierre, hier, ces araignées qui font peur.

Mais elles montent aussi au plafond de notre cœur, parfois aussi : ce sont des matins plus compliqués et les soirées plus longues, mais pas parce que l'on flâne dehors, mais parce que tout d'un coup (paf!) une sorte de solitude nous explose à la figure, voyez ?


C'est la saison des prières un peu plus suppliantes.

Ça précède le changement de couleur des feuilles dans les arbres, prière suppliante: "Seigneur, augmente en nous la foi".

Voyez, comme si on avait une foi comme une vessie, qu'il fallait qu'elle augmente.

Plus elle serait augmentée, plus on serait comme prémuni de bien des araignées au plafond.

Prière suppliante d'un cœur qui souffre un tout petit peu ou beaucoup.

 

Mais en fait, on est les deux pieds sur terre et quand nous agissons ainsi, nous sommes tout à fait normaux : c'est la saison.

Peut-être que les apôtres à ce moment-là, étaient un petit peu… avec ces araignées qui montent, pour qu'ils puissent faire une prière ainsi, s'adressant à Jésus : "augmente en nous la foi".

Comme si ça allait donc, les rendre invincibles.

On peut deviner des disciples fatigués.

On peut deviner des disciples pour lesquels la fidélité commence à leur coûter :

je ne comprends pas, il me manque de la reconnaissance ;

je ne comprends pas, beaucoup de promesses ont été faites et je ne vois pas leur réalisation ;

je ne comprends pas, les personnes autour de moi ne réagissent pas comme je voudrais.

 "Seigneur, augmente en nous la foi".

 

Cette image de la vessie qui doit se gonfler est intéressante, mais ça montre une mauvaise perspective.

D'ailleurs, Jésus va réagir avec de l'humour : eh ben oui ! l'arbre et la graine de moutarde.

Puisque les disciples utilisent l'image de la vessie, eh bien ! Jésus va étudier l'image de l'arbre et de la graine : voyez, vous auriez une foi, pas grosse comme une vessie mais toute petite comme une graine de moutarde, un arbre vous obéirait.

C'est pour dire !

 

Résultat : "mais qu'est-ce que vous attendez pour abandonner vos images de la vessie et de la graine et que, enfin, une fois pour toutes, vous vous décidiez à comprendre que la foi n'est pas quelque chose qui doit se gonfler ou se dégonfler, mais que la foi est une relation avec votre Père ?

Et que cette relation passe à travers l'écoute obéissante de sa Parole.

Alors, vous auriez une foi si petite que ça, mais si puissante puisque, basée sur l'écoute de la Parole qui vient de votre Père : même un arbre vous obéirait".

 

Alors c'est pour ça que Jésus lui-même, va donner sa définition de la foi : non pas celle de la vessie qui se gonfle et qui se dégonfle, mais ça va être l'image toute simple, mais qui nous remet en place et qui nous bouscule, surtout quand on a la tendance à être un petit peu fatigué ; c'est celle du serviteur qui a passé son temps, toute sa journée dehors; fatigué, il rentre le soir et il faut encore qu'il fasse quelque chose.

Ça me donne des souvenirs : Mesdames peut-être, quand le soir, une fois que vous êtes bien éreintées de votre journée, il faut encore que vous fassiez quelque chose.

Mais c'est vrai aussi pour certains messieurs.

C'est justement, ces soirs-là, quand il y en a marre, que les araignées montent au plafond… et il faut encore faire quelque chose.

 

La foi, c'est une relation.

Une relation d'écoute et une relation de réponse à cette écoute.

Mettez la Parole de Dieu au centre de votre vie, sinon vous allez être comme les disciples : la foi va être une affaire de vessie que l'on doit gonfler, gonfler, gonfler.

Plus elle sera grosse, plus on sera en sécurité.

Attention à ce qu'elle n'éclate pas et que, finalement, vous vous retrouviez gonflés de vos propres illusions.

 

La foi, c'est une écoute obéissante à Celui qui nous parle.

Et Il nous parle par l'Ecriture.

L'Ecriture n'est pas à l’affaire que du prêtre.

L'Ecriture n'est pas l'affaire que de trois ou quatre religieuses, de trois ou quatre consacrés qui la méditent, tels des spirituels.

Non !

L'Ecriture c'est l'affaire de tous.

Je sais que, il y a trois générations en arrière, l'Ecriture était interdite ou alors il fallait connaître le latin, être des grands littéraires.

Et certainement vous avez entendu Monsieur le curé qui vous disait : (alors je parle vraiment aux aînés, aux aînés, aux aînés, quand vous étiez en culotte courte) "non ! non ! ne touche pas.

Ce qui compte c'est, à la limite, ton missel le dimanche, les prières, ton catéchisme.

L'Ecriture, livre interdit".

 

Mais ouvrons l'Ecriture, ouvrons-la.

Rentrons dans cette découverte progressive de Quelqu'un et pas de quelque chose.

Pas d'une graine, pas d'un arbre, de Quelqu'un qui se révèle à travers les pages de toute l'Ecriture.

Il est une édition qui vient de sortir : promis, pour la feuille de messe de dimanche prochain, je vous en donne la référence précise, promis, promis !

Une édition qui vient de sortir, très très chouette, de la totalité de la Bible (totalité de la Bible !).

Vous savez que ce gros livre très lourd, là, qu'on utilise chaque dimanche pour la messe, eh bien il n'y a pas toute la Bible, dedans.

Si vous allez à la messe tous les jours, que vous faites toutes les fêtes carillonnées et que vous allez tous les dimanches à la messe, eh bien, vous n'entendez pas toute la Bible.

Si vous rajoutez toutes les prières de l'Eglise, il manque encore de la Bible !

C'est quelque chose, hein ?

Eh bien, cette édition donc je voulais vous parler : toute la Bible répartie sur 365 jours.

C'est-à-dire qu'on n'a même pas à se casser la tête : qu'est-ce que je vais lire aujourd'hui et qu'est-ce que je vais lire demain ?

Cela été choisi à notre place !

Et c'est toute la Bible : il y a l'Ancien Testament, le Nouveau Testament, il y a l'Évangile et les lettres de Paul, de Pierre, de Jude et puis l'Apocalypse, Jean etc.

 

Eh bien de cette façon-là, ça veut dire que, au lieu de m'occuper à gonfler et dégonfler quelque chose, je vais plutôt m'occuper à mettre un tout petit espace dans mon agenda du jour, pour dire : je lis la Parole de Dieu.

Je n'ai pas compris ?

Ce n'est pas grave ; ce n'est pas pire que, quand je ne comprends pas mon mari ou ma femme.

C'est dur ?

Ce n'est pas grave ; ce n'est pas plus dur que mes genoux qui me font mal quand je me réveille le matin.

C'est pénible ?

Ce n'est pas grave ; ce n'est pas plus pénible que de se dire : tiens, encore une année qui se prépare.

 

Vous l'aurez compris, j'espère : l'enjeu, c'est de construire une fidélité qui est basée sur cette écoute de la parole de Dieu.

Nous ne serons jamais au sommet définitif d'une vie où tout est beau, tout est chant, où tout est merveilleux.

Nous continuerons à éprouver ces saisons qui passent, ces araignées qui montent et qui descendent.

Mais justement, ne faisons pas de notre foi une affaire de sentiments, faisons de notre foi une relation.

Et comme le Christ se fait d'abord Parole, en plus de cette nourriture qui s'offre à nous dans l'eucharistie, accrochons-nous à cette nourriture quotidienne, de cette Parole qui rentre jusque dans ma maison et dans ma chambre.

Ce qui n'est pas vrai de l'eucharistie.

 

Alors, renouons cette image de l'arbre :

-  Et l'arbre, il vous obéirait ?

Alors, pourquoi vous n'obéissez pas au Seigneur ?

-  Pourquoi ?

 Eh bien, je ne sais pas ce qu'il me demande !

-  Écoute-le donc !

 

Amen.


Vendredi 30 septembre : St Jérôme

Jb 38, 1.12-21 ; 40, 3-5 : La Sagesse créatrice confond Job.

Ps 138

Lc 10, 13-16 : Mission des soixante-douze disciples.

 

Ce texte est tout bref ; on peut même se demander, d'ailleurs, ce que l'on peut en faire.

Il fait suite à un envoi de 70 disciples, deux par deux, par Jésus, envoi en mission, quelques versets avant ; et c'est la fin de l'envoi en mission.

Il indique qu'il y a des localités qui n'accueilleront pas et il envoie des malédictions à ces localités et il termine en disant : "Celui qui vous écoute, m’écoute etc".

 

C'est donc un contexte de mission.

La mission, qu'est-ce que l'on peut en dire pour nous aujourd'hui ?

Cette mission qui animait nos villages, il y a 100 ans, 200 ans ; ces missions qui ont laissé ici ou là, des croix sur les bords de chemins ;qui ont orné les églises de bannières, que nous avons encore, ces missions qui sont à l'origine de la vitalité de nos communautés, aujourd'hui.

Il y a les missions que l'on voit à la télévision, les missions dans les pays dits de mission, telles qu'on les a dans notre imaginaire : l'Afrique noire, l'Asie, l'Amérique latine.

Et puis, il y a ce que disent nos évêques en France, et le pape : l'Europe est de nouveau une terre à missionner, une terre où il faut partir en mission, comme nous l'avons fait jadis.

Et puis, Jésus le dit lui-même, (pas là, mais quelques versets avant) : "les ouvriers sont peu nombreux mais la moisson est abondante".

Il y a de quoi faire.

 

Et, petit peuple de Dieu, (nous sommes le fruit de ces missions d'antan), nous ne nous sentons pas toujours capables de partir nous-mêmes en mission, comme d'autres l'ont été avant nous.

L'attitude, parfois prosélyte de l'un ou l'autre qui vient frapper à la porte, au nom de sa foi (témoins de Jéhovah, protestants), parfois nous effraie et l'expression religieuse des musulmans peut aussi renforcer notre fermeture

Mais nous vivons quand même de la mission.

 

Dans notre organisation paroissiale, nous savons que nous avons désormais, des équipes de moisson.

Jésus parle de la moisson dans les versets qui précèdent cet Évangile et il ne s'agit pas pour ces équipes, en tout cas, de faire comme nous l'avons vécu il y a 100 ou 150 ans.

Mais déjà, ce sont des chrétiens qui partent à la rencontre d'autres chrétiens.

Rien que cela, c'est déjà toute une aventure.

Il ne s'agit pas forcément de convertir des gens qui ne sont pas disciples de Jésus, il s'agit d'entretenir et d'encourager les ardeurs de ceux qui sont déjà disciples de Jésus.

Et reconnaissons-le, pour nous, c'est déjà une sacrée épreuve.

 

Jésus nous apporte des paroles d'encouragement : "celui qui vous écoute, m'écoute ; celui qui vous rejette, me rejette ; celui qui me rejette, rejette Celui qui m'a envoyé".

Pourquoi ces paroles sont-elles des paroles d'encouragement ?

Tout ouvrier de la moisson, tout missionnaire, tout disciple actif que nous sommes, chacun a le droit, a besoin de recevoir des paroles de soutien, d'encouragement et de reconnaissance.

Sinon, ce ne serait pas humain de ne pas éprouver ce besoin.

N'ayant pas honte de ce désir d'être reconnu dans cette mission que nous pouvons vivre à cause de notre foi.

 

L'Évangile de dimanche prochain, néanmoins, nous dira le contraire.

L'Évangile de dimanche prochain mettra en avant, celui qui obéit au Seigneur, sans chercher aucune reconnaissance.

Mais si Jésus dit ça, c'est que bien souvent, nous avons quand même besoin de reconnaissance, peut-être de trop !

Mais c'est nécessaire d'avoir un frère chrétien, le prêtre, ou quelqu'un qui, au nom du prêtre, va nous dire : "vas-y", "c'est bien", "merci", "n'ai pas peur".

Et lorsque Jésus dit : "celui qui vous écoute, m'écoute ; celui qui vous rejette, me rejette", c'est pour que les disciples qui essuient des échecs ou bien même, qui engrangent des succès, se rappellent, (au moins pour les échecs), qu'ils n'en sont pas la cause.

La cause, c'est celui qui les envoie.

Et celui qui les envoie, c'est le Christ, mais lui-même est envoyé par le Père.

Il est bon parfois, surtout dans nos fatigues, et dans nos échecs, de savoir que le Christ peut servir de paratonnerre, afin que nous ne nous sentions pas complètement anéantis par l’échec.

Lorsque nous vivons, au nom de notre foi, un service au sein d'une communauté, ou même un service au nom de notre communauté, à l'extérieur, rappelons-nous que nous ne sommes qu'un instrument.

Que les échecs ne nous anéantissent pas ; à l'inverse, que les succès ne nous enflent pas trop d'orgueil.

Nous ne sommes qu'un instrument.

 

Amen.


Mardi 27 septembre : St Vincent de Paul

Jb 3, 1-3.11-17.20-23 : Job maudit le jour de sa naissance.

Ps 87

Lc 9, 51-56 : Mauvais accueil d’un village de Samarie.

 

Alors, nous entrons dans l'Évangile de Luc, dans cette lente montée vers Jérusalem.

Luc prend soin de solenniser ce départ vers Jérusalem, un peu comme cela se passe dans l'Ancien Testament lorsque des rois ou des prophètes se mettent en route : des messagers partent devant.

"Il durcit sa face" nous dit le texte original.

Ici, c'est traduit :"le visage déterminé".

 

Jérusalem ! Jérusalem, ville dont se sont séparés les samaritains à la mort du roi Salomon, en 922 avant JC.

Jérusalem, ville où Jésus va entrer triomphalement pour ensuite, y être jugé et exécuté.

Ces samaritains, deux siècles après la mort du roi, lors d'une bataille, celle de Samarie en 721, vont se paganiser : ils vont se mélanger avec d'autres qui ne sont pas d'Israël.

D'où cette espèce d'exclusion réciproque entre samaritains et juifs.

Peut-être que Jésus, en se mettant en route vers Jérusalem, en traversant un village de samaritains, peut-être va-t-il contribuer à abattre quelques frontières ou quelques cloisons entre juifs et samaritains.

Vous savez que, deux chapitres plus loin, Jésus va raconter cette histoire du "bon samaritain" et il va empêcher que Jacques et Jean fassent tomber le feu du ciel, comme le fit Elie, en d'autres temps.

Nous sommes surtout aussi invités à regarder tout le reste des textes de l'Évangile qui vont suivre là, comme cette lente préparation à l'accueil, à Jérusalem.

 

Nous savons que notre Maître et Seigneur fait de nous des gens qui marchent et non pas des gens assis, des gens qui marchent à sa suite, allant de ville en village, ou en tout cas, en acceptant de bouger beaucoup à l'intérieur de nous-mêmes, pour nous laisser conduire là où nous ne voudrions pas.

La Croix demeure en permanence le symbole de là où nous ne voudrions pas aller.

Il nous y conduit.

N'ayons pas peur de nous y rendre.

Ça ne veut pas dire que nous mourrons, à moins que nous ne mourrions à nous-mêmes : grande leçon de l'école française de spiritualité, par ailleurs, la mort à soi-même.

Mourir à soi-même, en tous les cas, pour mieux être présents dans l'"ici et le maintenant du royaume de Dieu", pour mieux quitter quelques certitudes trop bien enracinées en nous, qui nous immobilisent et qui effacent finalement, et les autres et Dieu.

 

Amen.


Dimanche 25 septembre :

Am 6, 1a.4-7 : Contre la fausse sécurité des grands.

Ps 145

1Tim 6, 11-16 : Adjuration solennelle à Timothée

Lc 16, 19-31 : Le mauvais riche et le pauvre Lazare.

 

Chers amis, la semaine dernière, l'Évangile nous parlait de Mammon, cet argent trompeur.

Il y a deux semaines, Jésus parlait de la brebis perdue, la pièce perdue et le jeune frère perdu, tous trois retrouvés. 

Aujourd'hui, il est question d'un drôle de riche, anonyme et d'un Lazare pauvre, mais identifié, avec un abîme gigantesque, une distance incroyable entre les deux.

Et le comble de tout, c'est que dans cet Évangile, qui parle des fins dernières, il n'y a même pas Dieu.

Je ne sais pas si vous avez repéré, il n'y a même pas Dieu : il y a Abraham, il y a Moïse, il y a un mystérieux "quelqu'un qui pourrait ressusciter", mais il n'y a pas Dieu.

 

Cet Évangile ne parle donc pas de celui qui est perdu et retrouvé ni de celui qui se laisse égarer par l'argent trompeur, mais cet Évangile met en avant la pauvreté relationnelle, l'indifférence terrible de cet homme anonyme ; d'une joie apparemment tout à fait éphémère, lui qui est vêtu de riches vêtements et qui vit des festins somptueux.

Mais ce qui prédomine, c'est d'abord son indifférence ; tellement indifférent à celui qui est à sa porte, qu'il est indifférent à celui qui est au-dessus de sa tête et que, arrivé après sa mort, il ne sait même pas comment il s'appelle, ce Dieu, qui lui fait si peur et qui le conduit tout droit dans un lieu de torture.

 

Alors j'ouvre une parenthèse : cet Évangile nous parle de l'enfer, ou du moins donne des images à cet enfer-là, et la tradition chrétienne a puisé dans cet Évangile toutes les images que l'on voit reproduites sur des tableaux ou des vitraux, qui nous parlent de l'enfer.

Mais, il n'y a guère que cet Évangile, car en réalité, le Nouveau Testament nous parle peu de ce qui se passe après la mort.

Éventuellement, nous parle-t-il de la résurrection des morts au jugement dernier et même Saint-Paul, dans sa première lettre aux Corinthiens, chapitre 15, veut nous en dire plus, mais il avoue lui-même qu'il n'en sait guère (car tout simplement, encore faut-il y aller pour savoir ce qu'il se passe).

D'où l'absurdité de l'Évangile, d'ailleurs, aujourd'hui.

Je ne dis pas que l'Évangile est absurde, mais ne cherchons pas à puiser dans cet Évangile, des clefs pour comprendre ce qui se passe après la mort.

Ce qui est représenté dans cet Évangile, c'est l'imaginaire juif des fins dernières ; et c’est en réalité, non pas l'enfer mais le shéol qui est représenté.

Nous, nous sommes chrétiens et, à la suite du Christ, notre espérance est tout autre.

 

Lorsque nous préparons des obsèques, lorsque nous accompagnons des personnes, au nom de notre foi, qui vivent un deuil, nous ne pouvons pas en rester à ce qui se passe après la mort, car nous devons avouer notre impuissance à répondre aux questions.

Nous sommes conduits à accompagner les êtres dans l'espérance, non pas de après, mais d'aujourd'hui.

Et Jésus, dans son Évangile, entend bien ré-enchanter l'aujourd'hui et non pas donner des clefs pour comprendre demain, l'après-mort.

Je referme la parenthèse.

 

Ne cherchons donc pas, à comprendre dans cet Évangile, ce que nous appelons en réalité, les fins dernières.

L'Évangile nous met en alerte sur l'indifférence, indifférence dans deux directions :

 - l'indifférence par rapport au frère, (alors ça, c'est déjà la semaine dernière et la semaine d'avant : l'Évangile martelait notre capacité à devenir complètement stérile ou aveugle vis-à-vis d'autrui, quitte à se perdre et à se perdre dans ce qui nous trompe, ce qui nous égare.

Nous oublions autrui à notre porte, nous oublions même le Père.

 

 - Et c'est la deuxième direction de cet Évangile : l'indifférence vis-à-vis de Dieu.

Car, même cet homme, arrivé dans le shéol, ignore Dieu.

Il parle d'Abraham, il est question de Moïse, mais ça n'est pas Dieu : ce sont des patriarches, des prophètes.

Ce "quelqu'un qui pourrait bien ressusciter d'entre les morts", n'a pas de nom.

 

C'est celui qui nous rassemble, aujourd'hui.

 

Deux manières de combattre l'indifférence :

 - Alors la première, c'est cette charité dont il est question dans la lettre qu'a lue Anne-Sophie, à l’instant, dans la lettre de Paul à Timothée : charité, charité par rapport au frère.

Mais je voudrais insister sur une deuxième manière de combattre l'indifférence.

C'est notre indifférence par rapport au Christ, qui d'ailleurs, quand nous la combattons, cette indifférence, nous permet d'être moins indifférents vis-à-vis de notre frère.

 

De quelle façon pouvons-nous être moins indifférents vis-à-vis du Christ, pour être moins indifférent par rapport à nos frères ?

Nous avons la fâcheuse habitude de penser que Jésus-Christ, ce sont quelques spécialistes qui savent le prier, qui savent en témoigner ou qui le connaissent : des saints, des mystiques, des grands personnages du passé, deux, trois paroissiens plus ou moins héroïques, Monsieur le curé.

Et puis les autres suivent derrière, comme ces petits chiens qui veulent ramasser les miettes tombées de la table, pourvu que nous puissions glaner les deux, trois nourritures de ceux qui savent, connaissent, ceux qui ont l'habitude de Jésus.

Si bien que, dans notre pyramide nous mettons en tête, parfois, Monsieur le curé ou deux, trois saints, ensuite les religieux, les religieuses, les paroissiens héroïques qui nous agacent et puis nous, nous sommes en bas.

Et nous nous disons que peut-être, quelque chose pourrait parvenir vers nous.

 

C'est une erreur profonde car finalement, il nous appartient de construire ce trésor du Christ et de ne pas attendre qu'il tombe sur nous.

Il nous appartient de déposer notre cœur ou de l'orienter sur ce trésor-là.

 

Premier écueil dans lequel il ne faut pas tomber : être savant pour connaître Jésus, être savant pour lire la Bible.

Ne tombons pas dans cet écueil.

Nul besoin d'avoir fait de la théologie ou d'avoir lu beaucoup de livres pour lire la Bible.

La Bible, ça n'est pas le récit de grands philosophes de l'Antiquité ou de je ne sais quel scientifique contemporain.

La Bible, trois, quatre versets jour après jour, sans recourir à des notes particulières, et nous pouvons mieux l'accueillir tout simplement.

Nous nous laissons interpeller par elle.

Toute personne amoureuse c'est ce que signifie : se laisser toucher.

Il peut y avoir un verset, un mot, une attitude de Jésus qui peuvent nous toucher : soit nous réveiller, soit nous bousculer, soit tout simplement, nous faire du bien, comme une caresse.

Mais plus nous raisonnons, moins la Bible nous fera du bien ; plus nous la croyons trop savante pour nous, moins nous nous approchons d'elle.

Donc, cessons de croire que la Bible est pour les parfaits ou les raisonneurs, sinon nous sommes profondément indifférents.

 

La deuxième façon de ne pas être indifférent à Jésus-Christ, c'est de croire qu'il faut beaucoup de temps, qu'on n’a jamais le temps.

Évidemment le temps, si on ne le prend pas, on n'en aura jamais.

Là encore, si Christ est un trésor, il est possible de se donner ce temps, petit temps qui se construit patiemment au quotidien.

Surtout au quotidien et pas une fois par mois ; petit temps pour précisément, ouvrir la parole de Dieu.

 

 Troisième façon de ne pas être indifférent à Jésus, (c'est une sorte de cercle), c'est de ne pas être indifférent à ceux et celles qui sont nos frères.

Et si nous avons une communauté, c'est que, nous pensons que là, voilà une sorte d'échantillons de personnes que Christ nous donne, et qui tout simplement, par leur simple présence : heureuse, moins heureuse, belle, moins belle, suscitent en nous une ouverture, une remise en question, une disponibilité, même toute petite.

 

Eh bien, pour ne pas s'enfermer, trois façons de ne pas être indifférent à Jésus ; et en n’étant pas indifférent à lui, je ne suis donc pas indifférent au frère.

Mais cela permet quoi ?

 

C'est quoi la conclusion de ce texte d'Évangile ?

C'est de ne pas tomber dans cette tristesse de ce riche anonyme.

Finalement, sa vie est bien triste : il fait la fête, il meurt, il n'a plus rien, le voici condamné à mille tortures.

 

Notre espérance chrétienne, elle est pour aujourd'hui.

Croire que le ciel est pour aujourd'hui, dans notre façon de mettre au cœur de notre vie, ce trésor qu’est le Christ.

Notre espérance chrétienne ça n'est pas, uniquement, le souci de l'après-notre-mort.

 

Alors, laissons cette place à ce trésor pour que ne se creusent pas en nous des abîmes, des distances, que nous ne tombions pas dans cette tristesse, mais que la joie promise en Jésus-Christ mort et ressuscité, soit réelle et concrète, aujourd'hui.

 

Amen.


Vendredi 23 septembre : St Pio de Pietrelcina

Qo 3, 1-11 : Temps et durée

Ps 143

Lc 9, 18-22 : Profession de foi de Pierre et première annonce de la Passion.

 

C'est rare, dans les autres Evangiles, que l'on nous parle de la prière de Jésus ; chez Jean, on en parle ; mais chez Matthieu et chez Marc, on n'en parle pas beaucoup.

Luc fait plusieurs fois mention de la prière de Jésus, comme au début de cet extrait: "En ce jour-là, Jésus était en prière à l'écart".

On peut même lire dans le texte original : dans la solitude.

À d'autres endroits, Jésus est en prière, en particulier au moment de son baptême.

C'est à cet instant que le ciel s'ouvre et que descendent du ciel, une colombe et une voix.

A un autre moment, Jésus est en prière : au moment de la Transfiguration.

Il est à l'écart, mais pas seul : avec Pierre, Jacques et Jean, sur la montagne.

Ici, Jésus, à nouveau, est en prière. "Pierre prit la parole et dit : le Christ, le Messie de Dieu".

Dans les autres Evangiles, de cette affirmation, Jésus dit : "c'est Dieu qui parle en toi, ce n'est pas la chair et le sang qui s'expriment, Pierre, par ta bouche.

Je vais faire de toi, mon Eglise.

Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise".

Là, Jésus ne le dit pas, dans cet Évangile-là.

Luc ne retient pas cela.

Mais il retient son expression de foi : "le Christ, le Messie de Dieu".

Quelqu'un d'autre, dans l'Évangile de Luc va le dire, plus tard.

Jésus sera sur la croix.

Ce sont les chefs du peuple, qui, du pied de la Croix, s'adresseront à Jésus en se moquant de lui : "Puisque tu es le Messie de Dieu"… et vous savez la suite.

"Puisque tu es le Messie de Dieu, descends donc de la croix".

Et nous avons cette annonce.

Je vous ai dit, pour ceux qui étaient à la messe hier, à Clairvaux, que, par trois fois, nous avons cette annonce dans l'Évangile : l'annonce de la Passion de Jésus, de sa mort et de sa résurrection.

Eh bien là, nous avons la première : "Il faut que le Fils de l'homme souffre beaucoup, qu'il soit rejeté par les Anciens et les grands prêtres, les scribes, qu'il soit tué et que le troisième jour, il ressuscite".

Ce ne sont jamais des paroles très agréables et je pense que Pierre l'a mal vécu, et ses compagnons.

Parce qu'en disant qu'il est le Messie de Dieu, Pierre et ses compagnons entendaient par-là, que cet homme était invincible et que, eux-mêmes, le deviendraient.

Tout de suite après, Jésus annonce sa mort.

Qu'est-ce que l'on peut retenir pour nous ?

Aucune connaissance de Jésus ou aucune certitude de foi, pour nous, ne peut être séparée de notre liberté.

Car si Jésus meurt, c'est à cause de la liberté des hommes, de le mettre à mort, et de Dieu, de se laisser mettre à mort.

Et notre liberté nous fait parfois souffrir, car c'est bien elle qui, parfois, se laisse tenter.

Et pour être invincible, quoi de plus simple, que de ne plus se laisser tenter (ou finalement ne plus être libre) ?

Mais attention, cela dépend dans quel camp nous nous mettons : dans le camp de ce qui est bien ou dans le camp de ce qui ne l'est pas.

Or, nous sommes libres et nous n'y pouvons rien puisque Dieu nous a créés ainsi.

Et dans cette liberté, tout de suite après avoir accueilli Jésus, les rameaux à la main, à Jérusalem dans la joie et la fête, les mêmes le condamnent.

Qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende.

 

Amen.


Jeudi 22 septembre :

Qo (ou Ecclésiaste) 1, 2-11 : Prologue

Ps 89

Lc 9, 7-9 : Hérode et Jésus.

 

Dans l'Évangile de Luc, Hérode cherche à voir Jésus et cette rencontre aura lieu.

Elle n'est racontée que par Saint Luc, les autres évangélistes n'en parlent pas.

Cette rencontre aura lieu au chapitre 23 : c'est au moment de la comparution de Jésus, entre son arrestation et sa présentation devant Pilate.

Pilate le renvoie à Hérode et ensuite il retourne devant Pilate.

 

Alors, cette mention de : "il cherchait à le voir", il ne faut pas la prendre comme par exemple : cette femme hémorroïsse qui cherche à toucher Jésus absolument pour que, dans sa foi, elle soit sauvée ;

ou ça n'est pas comme le centurion romain qui cherche absolument à ce que Jésus vienne à lui.

Non, non, Hérode cherche à voir Jésus, comme pour assouvir une sorte d'appétit à la fois de curiosité et en même temps … de curiosité criminelle, le mot est fort, (mais, en fin, en tout cas il ne s'opposera pas à la mort de Jésus).

 

Vous savez que dans l'Évangile, au moins par trois fois, il est fait mention de la mort prochaine de Jésus de manière explicite ; mais parfois, il y a des mentions plus cachées.

Jésus, pendant toute sa mission, avant même qu'il soit arrêté, il y a des petites alertes qui disent : "ououh, ça ne sent pas bon pour lui !".

Eh bien, c'en est une, voilà : "Et il cherchait à le voir" (pensez déjà derrière à quelque chose autour du vendredi Saint).

 

Et puis, dans cet Évangile, Hérode ne sait pas dire qui est cet homme, alors que dans d'autres Évangiles il pense que, à travers Jésus c'est Jean le Baptiste qui est réincarné.

Là, il ne se prononce pas.

 

Une invitation à nous rappeler, pour nous-mêmes, dans notre attachement à Jésus, dans notre vie de tous les jours, que Jésus nous aime jusque dans ce don de la vie qu'il a fait pour nous et il continue à la donner, sa vie, pour nous, tous les jours.

 

Ça n'est pas une évocation lointaine du passé.

On ne peut pas regarder la croix de Jésus comme on regarde les pyramides d'Égypte en disant : "oh! C’était une trace ancienne de quelque chose de fabuleux".

Tous les jours, Jésus nous aime jusqu'à donner sa vie, tous les jours ; nous, et les autres.

Il nous aime jusqu'à donner sa vie et on le célèbre dans l'eucharistie.

Mais pourvu que cela nous stimule, pourvu que cela nous remette en selle.

 

Nous avons entendu ce texte qu'a lu Xavier, du livre de l'Ecclésiaste, avec une pointe un petit peu … "vanité des vanités", une sorte de vision très(ce n'est pas pessimiste mais c'est assez plat), une vision très plate, peu enchantée en tout cas, de la vie de tous les jours.

Remarquez que ça peut être la nôtre, parfois.

On a des visions un peu dépressives sur le monde de tous les jours.

Je ne dis pas que c'est la vision de l'Ecclésiaste,mais on pourrait la tirer dans ce sens.

 

Rappelons-nous que, même si l'oreille n'a jamais fini d'entendre et l'œil de voir, il y a une chose qui ne finit pas : c'est le don de Dieu pour nous, tous les jours.

 

Amen.


Mercredi 21 septembre : St Matthieu

Ep 4, 1-7. 11-13 : Appel à l’unité.

Ps 18a

Mt 9, 9-13 :Appel de Matthieu et repas avec les pécheurs.

 

Ailleurs, dans l'Évangile, il est dit que Matthieu est fils d'Alphée, comme Jacques, un autre apôtre.

Peut-être étaient-ils frères.

Et puis, un autre détail encore sur sa vie et ses origines, il semblerait qu'il soit originaire de Capharnaüm.

Une fois que l'on a dit tout ça, (ce qui était dit dans l'introduction, tout à l'heure), on a un portrait un petit peu plus précis de Saint Matthieu.

 

On pourrait rajouter deux choses, toutefois :

 La première c'est que, en lisant son Évangile (alors, tout l'Évangile, pas simplement ce qui a été lu, ce matin) on puisse se dire que l'expérience que Matthieu a faite en contact avec le Christ, a produit en lui une telle ouverture ou un tel retournement, que lui, juif qu'il était (comme les autres apôtres, d'ailleurs), Matthieu a vu tout de suite cette belle unité ou cette belle transition entre l'Alliance qui a été faite, de toujours à son peuple (que l'on appelle la première Alliance, maintenant), et puis cette nouvelle, qui a été scellée dans la mort et la résurrection de son Christ et Seigneur.

 

Matthieu, dans son Évangile, est celui qui semble s'adresser le plus, aux juifs, en fait.

(Mais bon, ça, il faut avoir des lunettes un peu spéciales pour le détecter, mais si vous lisez vos bibles, vous verrez des petites notes ici ou là, qui vous le montre, dans le texte).

 

 La deuxième chose, c'est assez commun dans chacune des fêtes dédiées aux apôtres ; mais Matthieu a cette particularité d'être vraiment le pécheur appelé.

C'est la lecture de la lettre aux Ephésiens qui peut nous le rappeler : l'apôtre est celui qui a été le plus mis en face de ce qu'il est, pour de vrai ; c'est-à-dire, absolument pas un super homme ; c'est celui qui est peut-être le plus lucide sur lui, le plus lucide.

Donc, pas forcément un super homme, mais quelqu'un qui voit clair.

Alors, il voit clair avec ce qu'il est.

 

Mais cette lumière contribue à conduire d'autres dans cette même lumière et ça produit, à terme, la construction d'un corps et d'une communauté, dont l'apôtre est, par le fait même, à cause de cette lumière sur lui, mis à part et en même temps mis au centre.

Mis à part, parce qu'il va être en permanence celui qui va éclairer d'autres et peut-être aussi en agacer d'autres.

Mais en même temps, mis au centre, parce que, du coup, toute une communauté va s'appuyer sur cette grâce qui lui a été faite, d'avoir été proche du Seigneur.

 

Alors, vous savez, que, chaque fois que l'on fête un apôtre, on fête ceux qui sont à l'origine du sacrement de l'eucharistie, (alors, origine : attention ! ce ne sont pas ceux qui l’ont inventée, mais, « à l'origine » parce qu’ils en ont été témoins ; ils ont été les premiers bénéficiaires et l'ont transmis, tous les sacrements dont le sacrement de l'eucharistie).

C'est comme si, si on enlevait ce maillon-là, comme si tout ce que l'on faisait, était complètement déconnecté de la source.

C'est comme si vous débranchiez un appareil électrique qui ne soit plus sur sa prise.

Eh bien, grâce aux apôtres, on a branché nos appareils sur les prises.

Et le jus sur circule : la grâce.

 

Amen.


Dimanche 18 septembre : 

Am 8, 4-7 : Contre les fraudeurs et exploiteurs.

Ps 112

1 Tim 2, 1-8 : La prière liturgique.

Lc 16, 1-13 : L’intendant malhonnête.

 

"Travailler la terre, je n'en ai pas la force.

Mendier, j'aurais honte".

 

Imaginez que nous soyons chacun, devant cette hypothèse ultime dans notre vie, pour vivre.

Quitter une sorte d'accommodement ou de confort, au profit, parce que nous n'en avons pas le choix, de ce travail pour lequel nous n'aurions pas de force ou de cette mendicité qui produirait de la honte.

La réaction de cet homme acculé, renvoie à une sorte d'inconfort originel, fragilité de la vie, fil ténu que nous ne voulons pas voir et qui renvoie, dans l'imaginaire biblique, à Adam, expulsé du jardin des origines.

Souvenez-vous, le voilà expulsé : il va devoir travailler.

Tout lui était donné, il va devoir cultiver et travailler, souffrir même.

 

La vie religieuse ou la foi, démarre précisément à ce carrefour.

Quel carrefour?

Ce carrefour entre un homme (ou une femme), conscient de cette fragilité originelle de sa vie et qui, soit va l'intégrer pour lui-même, l'accueillir, l'accepter (comme dirait la sagesse populaire : va faire avec) ; soit va se le masquer, va en détourner son regard.

C'est cela le carrefour : soit je fais avec, soit je le nie, préférant alors, que la honte soit réservée au mendiant du coin de la rue plutôt qu'à moi-même (raison pour laquelle d'ailleurs, je ne le regarde pas, le mendiant du coin de la rue, puisque je me masque cela).

La vie de foi commence là, et elle commence pour celui qui va faire avec ; celui qui va faire avec.

 

Alors que choisit l’autre, celui qui prend l'autre chemin.

Eh bien, il choisit de faire avec autre chose, non pas avec ce fil ténu de l'existence, mais avec ce que l'Évangile nomme (vous n'avez pas entendu parce que la traduction française a décidé de proposer un autre mot).

Je vais vous dire ce qu’a dit Jésus, (le mot qu'il a dit), il a dit : "Mammon", "Mam-mon",

M A M M O N, "Mammon": un mot intraduisible.

Alors vous l'avez entendu traduit par : argent trompeur.

 

Jésus parle d'une puissance.

S'il fallait expliquer brièvement, comme on le ferait à des enfants, ou à des ados, on dirait : vous savez, c'est ce qui nous fait tourner la tête, comme les jolies jeunes filles du 14 juillet.

Ce qui vous fait tourner la tête.

L'argent lui-même, il ne fait rien, les jolies jeunes filles possiblement non plus.

Mais c'est la puissance entre l'argent et celui qui s'en sert ou la puissance entre les jolies jeunes filles et celui qui les regarde.

Cette puissance-là, ça s'appelle "Mammon".

Et vous comprenez que ce n'est pas une puissance électrique, ce n’est pas ce qui fait tourner un moteur.

Cette puissance, elle a une particularité : c'est qu'elle trompe, elle divise, elle enferme… toute sorte de qualificatifs que l'on peut en fait effectivement retrouver dans une forme d’utilisation excessive de l'argent.

Mais il n'y a pas que l'argent qui agit comme cela : c'est toute sorte de choses créées de mains humaines.

Ce n'est pas la puissance de certains individus pervers, c'est ce que fabrique l'homme, qui va servir à l'homme comme un masque, pour cacher ce qu'il dénie de son existence, ne pas le regarder.

Alors cette chose fabriquée par l'homme, va produire une puissance qui va susciter l'inverse : au lieu que ce soit un ressenti d'une existence fragile, au contraire, je sentirai une puissance, une force, une sorte de supériorité (un peu comme une forme de drogue, si vous voulez).

Cette puissance dévastatrice, Jésus la vise et veut nous en prémunir.

 

C'est exactement de cette façon qu’est née, dans nos villes et dans nos villages, ce que nous appelons la sécularisation, c'est-à-dire que nos églises se vident, que nos clochers ne sonnent plus, et que l'on s'atermoie de la disparition du peuple de Dieu : où est-il parti ?

Les humains ont-ils changé ou Dieu a-t-il disparu ?

Les humains sont toujours des humains, (même fil ténu de l'existence), et Dieu existe toujours.

Mais les humains se fabriquent ce qu'ils se fabriquent depuis toujours, depuis le début de la nuit des origines.

Dans l'Ancien Testament on l'appelait : "idole"; dans le Nouveau Testament, Jésus l'appelle "Mammon" : ce qui va prendre la place de Dieu.

Mais, alors que Dieu va nous réconcilier avec le fil ténu de notre existence, "Mammon" veut nous le faire oublier.

Mais cet oubli n'enlève pas la réalité, c'est tout le problème.

Si seulement !

 

Quand on regarde le texte de l'Évangile, cet argent trompeur, ce "Mammon", rend tout le monde endetté et la puissance de cet argent va finir par vouloir en désirer davantage : j'ai besoin d'argent, je m'en trouve, mais je ne suis pas satisfait, il m'en faut encore plus.

Cette dette creusée par "Mammon" dans l'Evangile, Jésus veut la remplacer par une autre dette.

Il parle de l'amitié.

Et ailleurs, pas dans l'Évangile directement, mais dans un texte de Saint-Paul, une autre dette nous est proposée : celle de l'amour mutuel.

La dette de "Mammon" renferme, exclut et nous empêche de regarder en face le fil ténu de notre existence et de comprendre la souffrance des autres, tandis que la dette de l'amour mutuel nous permet de glorifier le pauvre et l'étranger.

La dette de l'amour mutuel nous permet de nous réconcilier avec nous-mêmes et de comprendre davantage la souffrance d'autrui.

Vous voyez la grande différence entre "Mammon" et Jésus-Christ.

 

Il y a urgence à s'attacher à Jésus et le Jésus de l'Évangile.

Car le contact avec ce qu'il vit et ce qu'il fait, nous permet de décrypter la puissance déjà en acte de "Mammon" dans notre vie à chacun.

Ça n'est pas que chez les autres, c'est aussi chez nous.

Ça n'est pas qu'à travers l'argent, ça peut être à travers toute autre forme d'outils technologiques ou d'outils tout court.

 

Attachons-nous à Jésus-Christ pour ne pas croire que le meilleur moyen de s'en sortir c'est de fermer les yeux, de s'isoler ou de s'appauvrir.

Ça n'est pas en se dépouillant de nos richesses que l'on va devenir tout d'un coup, plus capable d'aimer.

On ne peut pas faire sans ce qui nous permet d'échanger entre les humains.

Mais c'est la valeur que l'on va lui accorder qui compte : "faites-vous des amis avec l'argent trompeur", c'est-à-dire ne créez pas de dette avec autrui sauf celle de l'amour mutuel.

C'est de cette seule façon, que petite communauté chrétienne qui survit à ce processus de sécularisation, continuera à témoigner.

Sans quoi, alors, notre communauté ou même notre religion ne deviendra qu'un business, visant tout simplement à atteindre des objectifs pour convaincre.

Ça n’est pas cela, notre foi.

Notre foi, c'est d'entrer dans la dette de l'amour mutuel.

Amen.


Vendredi 16 septembre : Sts Corneille et Cyprien

2 Co 4, 4-15 :Tribulations et espérance du ministère.

Ps 125

Jn 15, 18-21 : Les disciples et le monde

En cette fête de Cyprien et de Corneille, la liturgie nous propose un extrait de l'Évangile selon Saint Jean, chapitre 17, extrait que Cyprien, dans son œuvre, a beaucoup commenté.

Il s'est beaucoup intéressé à la Trinité, et dans l'Évangile selon Saint Jean, Jésus parle de son Père et parle de l'Esprit.

Et nous sommes au début d'une grande prière que Jésus adresse à son Père avant, comme il est dit, qu'il passe vers son Père (avant qu'il connaisse la passion).

 

Et ce que nous pouvons retenir, (même si souvent chez Saint-Jean, une fois que la phrase est terminée, on a oublié le début), ce que l'on peut retenir c'est :

-  d'abord l'unité qui règne entre le Fils et le Père.

Cette unité-là, est le modèle de l'unité qui règne, qui doit régner dans la communauté

des disciples (c'est une première chose).
La communion en Dieu est un modèle pour la communion dans les communautés de chrétiens, de baptisés.

Ça met la barre assez haute.

 

-  Ensuite, Jésus est celui qui rend possible cette communion, dans nos

communautés.

Il la rend possible.

Ce n'est pas uniquement en essayant de regarder ce modèle, en se disant : "oh la la, combien nous sommes loin, combien c'est dur de lui ressembler".

Jésus rend possible cette ressemblance, ce modèle.

Il permet qu'il y ait de la communion dans les communautés, de plein de façons :

 °la première façon la plus efficace, c'est de la demander, chacun.

Mais, ce n'est malheureusement pas celle que nous faisons le plus, que nous utilisons le plus, bien qu'elle soit la plus efficace ;

 ° une autre façon, c'est l'eucharistie ;

On reçoit l'eucharistie et, de manière très efficace, Jésus nous aide à ressembler de plus en plus à cette communion qu’il y a à l'intérieur de Dieu :

 °la parole de Dieu, aussi.

Accueillir cette parole vivante, comme autant de moyens que Jésus nous donne de faire la vérité sur nous-mêmes.

 

-  Car, et c'est le troisième point, nous contemplons souvent nos aïeux dans

foi et ceux qui ont souffert le martyr, comme des héros de la foi.

Ils le sont.

Mais nous fantasmons un peu leur époque, bien qu'elle ait été fort difficile, en se disant : "nos aïeux dans la foi se protégeaient et protégeaientleurs frères contre les adversaires".

Mais les adversaires, en réalité, ne sont pas tellement ceux que l'on imagine.

Ça n'était pas que les bêtes dans les arènes romaines.

Un travail d'unité ou de communion, comme l'a vécu Cyprien, c'est d'essayer de rendre les uns et les autres de sa communauté, les transformer en frères, en frères et sœurs, pour qu'ils acceptent les autres frères et sœurs comme des frères et des sœurs.

L'ennemi n'est pas toujours le persécuteur extérieur à la communauté.

Il se peut que nous soyons en devenir des frères, et que nous ne le soyons pas pleinement.

D'où cette parole de Jésus : "sanctifie-les dans la Vérité".

Il ne parle pas de ceux qui sont à l'extérieur et qui sont des menaces, il parle du groupe même de ses disciples.

 

Ressembler à ce modèle de communion du Père et du Fils dans la puissance de l'Esprit, c'est à la fois savoir à qui l'on est : au Christ ; mais aussi, accepter que de l'ivraie soit présente en chacun et en soi, pour que cette ivraie, progressivement, soit circonscrite par la parole de Vérité.

 

Louons le Seigneur pour les exemples qu'il nous donne et demandons-lui de toutes nos forces, qu'il produise en chacun de nous ce qu'il nous promet.

 

Amen.


Jeudi 15 septembre : Notre Dame des 7 douleurs

He 5, 7-9 : Le sacrifice terrestre : au jour de sa chair.

Ps 31

Jn 19, 25-27 : Jésus et sa mère

 

Le peuple chrétien ne peut jamais oublier d'honorer sa Mère : c'est la raison pour laquelle, normalement nous devrions célébrer l'eucharistie en l'honneur de la Vierge Marie, chaque samedi et que de nombreuses fêtes du calendrier liturgique sont dédiées à Marie notre Mère.

Il est évident que, même dans les fêtes mariales, notre raison de nous rassembler c'est d'abord, Jésus.

Mais Jésus n'est pas venu comme ça, tout seul, il est bien né du sein de Marie.

 

Là, nous avons l'évocation douloureuse, puisque c'est quand même la mémoire de Notre-Dame des douleurs, mais en même temps, qui renvoie aux mystères de l'enfantement.

Marie, au pied de la croix, elle perd son fils et un disciple perd son maître ; mais Marie va retrouver un fils et le disciple va trouver une mère.

Alors on n'est pas dans la substitution ni l'adoption ; on est vraiment dans la foi ou la transmission.

Tout ceci est possible au pied de la croix, par la parole de Jésus.

 

Alors, on assiste à un enfantement, mais l'enfantement de l'Eglise.

C'est l'Eglise qui est évoquée, comme en germe, au pied de la croix, l'Eglise sous les traits de cette femme, l'Eglise à travers ce disciple bien-aimé, qui connaît Jésus de très près, l'Eglise naissante.

Alors, cette Eglise est née dans les douleurs de l'enfantement.

Comme tous ceux et celles qui sont marqués par les douleurs d'un enfantement, on ne peut pas oublier cette réalité très humaine de la douleur.

Le pape François a su nous rappeler qu'il trouvait préférable que notre Eglise ressemble à un hôpital de campagne, plutôt qu'à une belle bâtisse toute pimpante.

Il serait préférable que nos communautés soient souillées par le travail missionnaire et parfois les difficultés de la vie communautaire, plutôt qu’une communauté complètement stérilisée, une communauté qui soit dépourvue de toutes marques ou de toutes traces.

C'est aussi, me semble-t-il, (je ne sais pas si c'est ça qu'il avait dans l'esprit), mais, une manière d'évoquer ce qui naît dans les douleurs de l'enfantement, au pied de la croix.

 

Peut-être de manière plus élevée encore, plus spirituelle, au risque d'être parfois, peut-être un peu trop théorique, nous rappeler que nous avons au pied de la croix, l'amour, dans l'amour d'une Mère et l'amour d'une Mère qui a été mis à rude épreuve, comme nous pouvons l'imaginer en cet instant, mais un amour qui ne va pas faillir.

 

Amen.


Mercredi 14 septembre : la Croix glorieuse

Ph 2, 6-11 : L’abaissement du Christ.

Ps 77

Jn 3, 13-17 : L’entretien avec Nicodème.

 

Ceux qui étaient présents à Baroville, au mois de juillet, (je crois, début juillet), pour cette célébration que nous avions eue un vendredi, me semble-t-il, en fin d'après-midi, à l'occasion de la bénédiction d'une nouvelle croix de chemin (non ? cela ne vous dit rien ?)

Donc, on était plusieurs membres de la communauté paroissiale et nous avions pris cette messe pour la Croix glorieuse.

Une occasion de reprendre, ou de retrouver la signification de la croix, telle que nous la célébrons beaucoup, au moment du vendredi Saint.

C'est une sorte de révision, pour nous.

Nous qui arborons des croix, qui en avons autour du cou ; nous signons de la croix régulièrement.

Pour celles et ceux qui participent à la pastorale des obsèques, nous parlons de la croix à chaque funéraille.

 

Mais c'est un symbole que nous avons de la peine à intégrer, dans la vérité de ce qu'il est, de ce qu'il est pour nous.

La croix n'est pas un symbole de mort.

La croix n'est pas un symbole magique.

La croix n'est pas un signe de ralliement, bien que ça serve effectivement : les chrétiens se reconnaissent par leurs croix ; et que, lorsque nous voyons une croix quelque part, nous pensons souvent, effectivement, à la possibilité d'un corps mort, enterré, là, (pour ceux qui sont dans l'espérance chrétienne, d'ailleurs).

La croix, c'est beaucoup plus subtile : c'est le mouvement même de Dieu, tel qu'il nous est rappelé dans cet Évangile, Evangile qui fait référence aussi à un vieux texte de l'Ancien Testament : le livre des Nombres.

 

Jésus descend ; il vient habiter parmi nous et en habitant parmi nous, il va descendre plus bas encore, jusqu'à la mort même ; et de la mort jusqu'aux enfers.

Et nous savons que cela coïncide, correspond avec notre propre élévation.

Plus Jésus descend, plus nous nous levons, plus nous montons, plus nous sommes tournés vers le Père. 


Alors, de quelle façon ?

Restons attachés très très fort à ce que nous célébrons, le vendredi Saint.

Nous adorons Celui qui nous aime et qui ne nous juge pas, mais qui descend et qui est mort par notre péché.

Donc, nous voyons en lui, à la fois l'amour et en même temps notre faute.

Nous n'adorons pas notre faute.

Mais nous voyons l'amour qui vient nous aimer dans notre péché.

Et c'est ce qui nous élève, si nous acceptons de le regarder.

 

Car, là, est le problème ou là, est le défi spirituel pour chacun, si nous acceptons de le regarder : l'amour et notre faute aimée.

Nous ne sommes pas morbides, maso, ou je ne sais quoi, à vouloir se faire du mal à cause de notre péché, nous aimons Celui qui aime notre péché.

Et donc, il nous élève de cette façon, il nous libère.

 

On peut donc, à chaque eucharistie, comme nous célébrons à l'instant, venir à la source de Celui qui vient nous aimer jusque dans notre ténèbre et obscurité : ceci est mon Corps, ceci est mon Sang, pour vous.

Corps et Sang n'auraient pas été livrés si nous n'étions pas là ; mais ils deviennent notre nourriture.

Et nous savons que, déjà, nous sommes ressuscités, guéris, élevés, transformés par ce que nous allons recevoir.

C'est le mystère, disons-nous, pour nous les chrétiens, de la croix.

 

Et si nous avons du mal à l'intégrer, parce que parfois, ça peut être un petit peu compliqué, nous pouvons avoir une autre image : celle du serpent ; ça, c'est le livre des Nombres.

Celui qui est à l'origine d'une morsure brûlante, dans le désert, pour le peuple d'Israël, est celui-là même qui va donner l'antidote pour nous en guérir.

La croix concentre en elle-même, alors, et ce qui est à l'origine de notre souffrance et ce qui est à l'origine de notre guérison.

 

Demandons au Seigneur de nous attacher à lui, et de toujours, avec lui, regarder la lumière.

 

Amen.


Mardi 13 septembre : Saint-Jean Chrysostome

1 Co 12, 12-14.27-31a : Comparaison du corps.

Ps 99

Lc 7, 11-17 : Résurrection du fils de la veuve de Naïm.

 

C'est tout à fait intéressant que ce texte soit lu en ce jour, en la mémoire de Saint-Jean Chrysostome, et ça n'est pas du tout voulu (ce n'est pas le texte spécifique à sa fête, donc sa mémoire).

 

Cet épisode vécu par Jésus est unique dans l'Évangile : c'est seulement Saint Luc qui en fait le récit.

Il fait un peu penser à un épisode qui peut ressembler, dans l'Ancien Testament, (premier livre des rois, chapitre 17), lorsque le prophète Elie ressuscite un enfant.

Peut-être que ceux qui ont participé aux "Dimanches autrement", cela leur évoque quelque chose : c'était le texte de l'année dernière pour entrer dans l'Avent.

"Dieu a visité son peuple", ça évoque le cantique de Zacharie, au début de l'Évangile de Luc.

 

Dieu visite son peuple.

Et ce que je vous propose de conserver en cette fête de Saint-Jean Chrysostome, où il est question de l'éloquence d'un pasteur, c'est de retenir qu'il n'y a pas que les mots qui permettent de vivre une rencontre, mais aussi la compassion.

Jésus est saisi aux entrailles.

Il ne fait pas un enseignement, il n'est pas en train de prononcer les Béatitudes.

Jésus est saisi jusqu'aux entrailles par cette femme.

On peut l'imaginer verser une larme, en tout cas, ce verbe le suggère.

Et pourtant, il dit à la femme : "ne pleure pas !"

 

Un ordre adressé au jeune homme : "lève-toi, ressuscite! ", et le voici, ressuscitant.

Si bien que le jeune homme a tendance à s'effacer, alors que le texte mettait bien en scène son arrivée, mort, à l'horizontal, sur une civière.

Il ne s'agit plus désormais que de l'expansion d'une rumeur : "un grand prophète s'est levé parmi nous, Dieu a visité son peuple".

Peu de mots, mais beaucoup de mots après : c'est le peuple lui-même qui devient prophète et qui devient évangélisateur.

Le pasteur n'a été que saisi aux entrailles.

 

Amen.


Dimanche 11 septembre

Ex 32, 7-11.13-14 : Nouvelle prière de Moïse.

Ps 50

1Tim 1, 12-17 : Paul en face de sa vocation.

Lc 15, 1-32 : les trois paraboles de la miséricorde.

 

Chers amis, on pourrait se demander pourquoi Jésus raconte trois histoires pour faire face aux murmures qui s'élèvent contre lui, aux récriminations, comme nous dit le texte.

Parce que Jésus, dans ces trois histoires, ne vient pas dire que les récriminations sont justes ou si elles sont fausses.

Le problème d'une récrimination, c'est que ce n'est jamais ni vrai ni faux.

 

Alors pourquoi Jésus, utilise-t-il ces trois histoires pour réagir à ces murmures qui s'élèvent contre lui ?

Le problème de ces murmures, c'est qu'ils manifestent un manque d'amour.

Et un manque d'amour tellement criant, qu'on peut même dire d'ailleurs, que ceux qui récriminent, n'aiment pas : Jésus a face à lui des gens qui n'aiment pas, qui sont pleins de haine.

Parfois, murmures et récriminations assèchent notre bouche et hantent nos nuits, obsédés que nous sommes, d'avoir raison.

Mais ça n'est pas une affaire de raison ou tort, c'est une affaire de manque, de manque d'amour.

Ceux qui se présentent comme des adversaires de Jésus, n'aiment pas.

Ils n'aiment pas plus d'ailleurs, que ce grand fils, à la fin de la troisième histoire.

Il est à côté de son père, il n'a pas bougé, il a fait tout comme on lui a dit ; au fond, il est dans le juste, mais il semble qu'il n'aime pas plus.

 

Regardons ces trois histoires.

Nous avons une brebis, dans la deuxième histoire, nous avons une pièce et dans la troisième histoire, nous avons un fils.

Brebis, pièce et fils sont perdus.

 

Brebis et pièce mobilisent beaucoup d'énergie de la part de leurs propriétaires, mais seulement brebis et pièce.

Le berger doit marcher beaucoup pour retrouver sa brebis qui est perdue.

La femme doit balayer beaucoup pour finir par retrouver sa pièce qui est perdue.

Mais le père, dans la troisième histoire, il ne s'use pas beaucoup les pieds, il ne va pas chercher le fils.

Vous allez me dit :"oui mais, après tout, ce n'est pas pareil, fils, brebis et pièce".

Certes, mais on aurait presque pu imaginer que le berger et la femme ne bougent pas et que le père parte à la recherche du fils.

 

Rester sous un lit, être éloigné et attendre, ça ne vous fait pas penser à des réactions d'enfants, qui ont tellement besoin que l'on accourt vers eux, parce qu'ils ont besoin d'être aimés ?

Des enfants, quoi !

Ils ont besoin d'être au centre : ils pleurent, on leur donne à manger ; c'est Noël, c'est l'heure des jouets.

Leur amour, c'est d'avoir besoin d'amour.

 

Le fils, personne ne se déplacera pour lui.

Il va loin, (d'ailleurs cette histoire est plus longue), il va loin, il va se perdre : les prostituées, les cochons, la faim.

Jusqu'au jour où, par grâce peut-être, il rentre en lui-même.

"Dans la maison de mon père", peut-être qu'en cet instant, par grâce peut-être, le fils commence seulement, à devenir fils.

Et c'est lui, qui se met en route.

C'est lui qui va s'user les pieds, une deuxième fois pour revenir dans la maison du père.

Il se raconte son histoire, il essaye de trouver les mots, il se prépare à la rencontre.

 

Nous voici au terme de cette troisième histoire.

Nous retrouvons le grand frère.

Il n'a pas bougé, lui ; il est gentil, lui ; c'est l'aîné.

Il fait ce qu'on lui dit, obéissant en toute chose, il lui manque quelque chose : il n'aime pas.

Il ne bouge pas plus qu'une pièce et une brebis perdues.

Il n'attend qu'une chose, c'est qu'on vienne à lui.

Il crève d'amour autant que la pièce et la brebis, mais il n'aime pas.

 

Il y a quelque part des faims ou des soifs d'amour, mais ça n'est pas de l'amour.

Ça empêche d'aimer, ça murmure, ça récrimine, ça cherche le vrai, ça cherche à attirer l'attention d'un père, mais ça n'aime pas.

Et Jésus, par sa mort et sa résurrection, nous donne ce dont nous avons besoin, dans l'eucharistie, pour rentrer en nous-mêmes et nous mettre en route.

Enfin, pour aimer, respirer ou prendre le large.

Aimer.

 

Amen. 


Vendredi 9 septembre      (incomplète - il manque le début)

1 Co 9, 16-19.22-27 : L’exemple de Paul

Ps 83

Lc 6, 39-42 : Condition du zèle

 

...…L'aggraver, peut-être un état des lieux que l'on produit, d'ailleurs, mais qui finit par l'aggraver.

Partons sur le principe que nous sommes potentiellement tous, quand même aveugles, ou avec une paire de poutres dans nos yeux.

Ça ne nous empêche pas d'avoir une opinion et une certaine liberté dans nos agissements.

 

À partir du moment où nous fonctionnons ensemble et non pas comme des individus solitaires dans un désert, il nous faut nécessairement alors, prendre en considération que nous ne sommes pas la vérité à nous tout seuls.

Cette vérité est forcément plus en dialogue, en concertation.

Acceptons cet état de fait, nous ne pouvons, en soit, pas grand-chose.

 

Par contre, effectivement, nous pouvons progresser vers plus de clarté.

L'Évangile sert à ça : Jésus par sa parole, sert à ça, si toutefois ça n'est pas grave de l'instrumentaliser.

C'est le but de l'Évangile : nous aider à détecter nos poutres, au lieu de nous acharner sur les pailles de nos frères.

 

Amen.


Jeudi 8 septembre       (incomplète - il manque le début)

Mi 5, 1-4a : Détresse et gloire de la dynastie de David

Rm 8, 28-30 : Le plan du salut

Ps 12

Mt 1,1-18 : L’engendrement de Jésus

 

........Nous avons entendu« engendrer ».

Et comme la personne engendrée, n’est pas engendrée toute seule, forcément il y a toujours des prénoms avant et après le mot engendrer.

Vous avez vu que ce n'était pas l'engendrement de Marie, c’est l'engendrement de Joseph, et par Marie et Joseph de Jésus, dans ce texte.

 

Ce que l'on peut retenir, c'est que vous savez, nous nous approchons petit à petit de ces jours, qui sont de plus en plus courts, et des nuits de plus en plus longues.

Vous savez que l'on s'approche très lentement (Dieu soit loué, surtout avec le soleil qui est dehors), on s'approche très lentement de ce que l'on appelle l'automne…et des araignées qui grimpent au plafond.

Mais c'est le temps que Dieu choisit pour renaître.

C'est beau, c’est Noël !

 

Et donc, il nous attire à lui et il vient progressivement installer sa demeure.

Ça commence par cette fête, un peu comme ça qui, (non pas marque le commencement de cette affaire), mais nous rappelle, que progressivement il vient renaître.

 

Préparons-nous, un peu à la manière, si vous voulez, de la fourmi (à la différence de la cigale), à vivre ce beau temps où le Verbe vient demeurer, grâce à Marie et l'Esprit Saint.

 

Il nous a destinés à être l'image de son Fils et nous le sommes par l'Esprit Saint.

C'est notre renouvellement, cette naissance du Verbe en nous.

Et nous rendons grâce aujourd'hui à Marie, car ce fut possible par son "oui".

Merci à Anne de lui avoir appris à dire "oui", aux appels de Dieu.

 

Amen.


Mercredi 7 septembre

1 Co 7, 25-31 : Mariage et virginité.

Ps 44

Lc 6, 20-26 : Les Béatitudes.

 

Il y a un point commun entre cette première lecture, extraite de la lettre de Paul (la première aux Corinthiens) et puis cet Évangile, c'est : le temps.

Le temps est court dans ces deux textes.

 

Pour Paul, au tout début de son ministère, la venue de Jésus, son retour, était imminent, une affaire de quelques années tout au plus, pour lui et les communautés qu'il accompagnait.

Le temps était court.

Il n'y avait pas de projection dans un millénaire plus tard.

Tout simplement, parce que, ces toutes premières communautés recevaient de leurs aïeux dans la foi, (de ceux et celles qui avaient marché avec le Christ, vécu avec lui), cette annonce de son retour, le retour du Fils de l'homme ; et au moment de l'Ascension, la promesse du don de l'Esprit, et plus tard du retour de celui qui est monté vers le Père.

 

Nous avons par exemple, peut-être, en mémoire, cette parabole du jugement dernier, la fin des temps : ce roi mettra à sa gauche, mettra à sa droite...

Et ce jugement, cette fin des temps, les premières communautés pensaient qu'il était imminent.

La suite de Jésus, le respect de sa parole, cette espèce d'exemplarité ou bien de soucis de sainteté à la suite de Jésus, les uns et les autres le projetaient sans imaginer que la fin allait se reporter sur un nombre incalculable de générations après eux.

Donc, il faut entendre ces prescriptions de Paul, (mais d'ailleurs plein d'autres encore), à la suite de cette affirmation.

 

Alors, il y a toutes ces considérations sur le célibat, sur le mariage et puis, arrive cette affirmation, que tu as lue Xavier : " Frères, je dois vous le dire, le temps est limité... Ceux qui ont une femme, comme s'ils n'en avaient pas ; ceux qui pleurent, comme s'ils ne pleuraient pas ; ceux qui sont dans la joie"etc...

Paul donne des recommandations, finalement, comme pour être prêt à l'imminence d'un événement annoncé, un peu comme nos frères hébreux qui se préparaient à vivre la Pâque : du pain sans levain parce que nous n'avons pas le temps de le faire lever.

Le départ, pour quitter cette terre d'esclavage, peut arriver à un moment ou à un autre, très rapidement.

 

Le deuxième texte, l'Évangile chez Saint Luc, vous fait peut-être penser à celui de Saint Matthieu : ses Béatitudes.

Jésus n'est pas sur la montagne, là, il est dans la plaine.

Matthieu s’adresse beaucoup à des chrétiens d'origine juive, Luc s'adresserait davantage à des païens, c'est-à-dire, des chrétiens qui n'étaient pas d'origine juive.

Matthieu a beaucoup retenu de Jésus, cet accomplissement de la loi. : Jésus ne vient pas rendre caduc ce qu'il a reçu de Moïse.

Luc n'en parle pas.

Alors, est-ce que Jésus a parlé deux fois?

Nous ne savons pas.

Est-ce qu'il n'a parlé qu'une fois, et l'un a retenu la montagne, l'autre a retenu la foule de disciples ? (car il semblerait que, pour Luc, il y a une adresse toute spécifique aux disciples et à leur pauvreté).

Quand Luc parle des pauvres ou quand il parle des riches, il parle de ceux qui n'ont pas d'argent ou ceux qui en ont.

Ce ne sont pas des pauvretés spirituelles, comme dans le Magnificat, quand il retient les paroles que Marie a pu prononcer : "le Puissant fit pour moi des merveilles, il renverse les riches".

C’est vraiment, non pas une question d'orgueil, c'est vraiment une affaire de possession.

 

Alors je vous invite à retenir cette idée que, même pour Jésus le temps est court puisque, entre le maintenant et l'avenir, il y a l'espace de sa mort et de sa résurrection.

Et je vous invite à retenir ce regard, Jésus levant les yeux sur ses disciples :

 Heureux, un chemin de bonheur qui nous est proposé.

 

Peut-être ne sommes-nous ni pauvre ni complètement riche.

Chacun peut se situer, en conscience, dans cette échelle un peu exigeante du pauvre ou du riche, et de se dire que : ce qui m'importe c'est ce chemin de bonheur proposé par le Christ et je sais que je n'échapperai pas, pour ce chemin de bonheur, à une échéance, sans savoir si elle est proche ou si elle est éloignée.

Et cette échéance, c'est la rencontre avec celui qui, à la fois m’aime et en même temps me juge.

 

Que le Seigneur fasse par son regard, (à la fois me scrute), qu’il fasse la vérité dans mon cœur et en même temps, qu'il puisse ou que nous soyons disposés à recevoir ou à voir sa tendresse.

Que l'un soutienne l'autre.

Que sa tendresse soutienne mon effort pour pouvoir me laisser scruter et faire la vérité.

Seigneur ce qui compte, pour moi, c'est ce chemin de bonheur sur ta propre route.

 

Amen.


Dimanche 4 Septembre : Canonisation de Mère Thérésa

Sg 9, 13-18 : Prière pour obtenir la Sagesse

Ps 89

Phm 9b-10.12-17 : Requête en faveur d’Onésime

Lc 14, 25-33 : Renoncer à tous ce qu’on a de cher et en particulier à tous ses biens.

 

Chers amis, l'apôtre Paul a écrit de nombreuses lettres qui sont donc, dans notre nouveau testament, et il y en a une qui fait exception.

Car toutes les lettres que nous avons, s'adressent à une communauté ou à un chef de communauté ou à un futur chef de communauté, sauf une ; et qui donne d'ailleurs, à cette lettre, toute sa beauté, toute sa tendresse.

C'est la lettre, l'extrait que nous avons entendu, même pas un chapitre, quelques versets.

 

Que se passe-t-il pour Paul ?

Paul est poursuivi, un peu dans les mêmes intrigues que celles que nous reprochions à Jésus : bouleversement de la stabilité locale.

Les chefs religieux soupçonnent qu'il va être un ennemi.

 

Paul, pour mieux l'inculper, on peut le dénoncer auprès des responsables de l'empire romain et dire qu'il veut déstabiliser l'empire.

Il est donc en attente de jugement, mis en prison.

Et tel va être une très très grande partie de son ministère.

 

On imagine peut-être, un Saint Paul, allant d'une ville à l'autre en permanence, bâtissant des églises, créant des communautés et les stimulant et les fortifiant sur place ou à distance.

C'est, en partie, vrai.

Paul a créé des communautés, il en a aussi rejoints quelques-unes qui existaient déjà et les a consolidées, fortifiées dans la foi, servant en permanence, l'unité.

 

Mais, si nous avons des lettres et non pas des homélies écrites, comme Saint-Augustin par exemple, c'est que Paul n'était pas dans ces communautés, au moment où il s'adresse à elles, au moins pour les lettres que nous avons.

Il était ailleurs.

Il s'adresse à un certain nombre de ces communautés, depuis un autre lieu, et donc il fait lire sa lettre par une sorte de disciple qui, sur place, porte la responsabilité de mettre en application ce que Paul écrit dedans.

 

Et où était Paul ?

Il était en prison.

Quand il dit dans nombreuses de ses lettres : " je suis emprisonné pour le Christ, je suis prisonnier du Christ ", ça n'est pas une métaphore.

Il est réellement derrière des barreaux.

Et ça dure presque la moitié de son ministère.

 

Paul est citoyen romain, ce qui fait la grande différence avec un certain nombre de ses détracteurs, d'ailleurs, de Palestine.

Et Paul veut recourir à la juridiction suprême, qui se trouve à Rome.

C'est la raison pour laquelle, l'instruction de son affaire mettra un temps considérable, pour aller d'une ville à l'autre, progressivement, avant d'arriver à Rome.

À Rome, on pourrait dire avec notre langage moderne, qu'il était en liberté surveillée, pas complètement derrière les barreaux.

Il va avoir une activité apostolique moins claustrale, moins enfermée, bien qu'il adresse une lettre à cette communauté de Rome.

Et puis, il mourra.

 

Alors, il s'adresse à mystérieux Philémon et il parle d'un Onésime, qu'il nomme être son fils.

Il se trouve que Philémon, c'était un bon ami à Paul.

Ça n'était ni un chef de communauté, ni une communauté.

Et cet homme était le maître d'un esclave, peut-être même de plusieurs, d'ailleurs ; mais, au moins un, dont on parle et qui s'appelle Onésime.

 

On imagine qu'Onésime était jeune.

Et Onésime s'est retrouvé, on ne sait trop comment, aux côtés de Paul, dans sa cellule.

Et manifestement, Onésime a été un vrai soutien pour Paul, dans son incarcération.

Et Onésime est libéré ; du moins, il a la possibilité de partir.

Paul lui remet une lettre, destinée au maître de l'esclave : Philémon.

 

Et vous avez entendu ce qu'il dit : il appelle Philémon à transformer son esclave en un égal.

Il ne lui dit pas : "N'en fais plus un esclave", il lui dit : "accueille le ou aime le, autrement qu'un esclave, mais comme un frère bien-aimé.

Aime le, comme si c'était moi, ton ami, au nom de Jésus. Tu aimes le Christ, j'aime le Christ, alors fais de ton esclave, celui qui a été si tendre à mes côtés, fais de lui un frère, un ami".

Certaines mauvaises langues, par périodes, disent : "Paul n'a pas aboli l'esclavage".

Peut-être c'était un peu tôt, mais Paul a vraiment tordu la conception commune que l'on pouvait se faire d'une relation d'un maître avec son esclave.

 

Observez que l'affirmation que Paul, d'ailleurs, dit dans d'autres lettres :

"Jésus-Christ a fait tomber le mur de la haine qui séparait juifs et grecs, païens et hommes libres", cette affirmation se poursuit et on pourrait dire :

"Christ fait tomber cette relation maître-esclave".

En tout cas, "accueille-le comme un fils, au nom du Seigneur Jésus".

Voilà comment, on peut accueillir cette lettre et la comprendre.

 

Nous sommes au début d'une nouvelle année, une année scolaire. Alors, j'ai dit tout à l'heure en préambule, les vacances pour certains, certaines ; quand même, une reprise pour d'autres, ceux qui sont liés par un travail, ou une activité associative, les études, l'école.

Et l'enjeu pour nous, cet Évangile tombe à pic : c'est de durer.

C'est de durer.

Toute entreprise, plus elle est longue, plus elle lance un sérieux défi à chacun : c'est une sérieuse endurance.

 

Alors, c'est vrai pour quelqu'un qui veut construire une tour, c'est vrai pour quelqu'un qui veut partir en guerre, c'est vrai pour un jeune couple qui prépare son mariage, et c'est vrai même, pour un vieux couple qui veut aller jusqu'au bout, c'est vrai pour quelqu'un qui veut risquer son unique existence à la suite, soit du Christ, soit de quelqu'un d'autre, quel que soit son état de vie : il faut pouvoir durer.

Quand les œuvres sont toutes petites, ce n'est pas très compliqué.

Dès que je n'ai plus envie, j'arrête.

Parfois même, d’ailleurs, l'œuvre est terminée avant même que je me décourage.

Mais il faut pouvoir durer.

 

Je vous rappelle, si vous ne le savez pas suffisamment, que nous sommes des êtres de désir et que le désir a une particularité : c'est qu'il est extrêmement variable.

Donc, aujourd'hui je suis super content ; demain, ça marche moins bien.

Mesdames, qui aviez vos petits-enfants pendant deux mois, vous êtes-vous peut-être rendues compte que ce qui vaut une journée, ne vaut peut-être pas le lendemain.

Ce qui rend d'ailleurs, la tâche périlleuse, de l'accompagnement de ses petits-enfants.

On ne peut pas les emmener à Nigloland, tous les jours.

Bon !

 

Pour qu'un désir puisse se maintenir, pour qu'une fidélité puisse tenir, encore faut-il se donner des moyens.

Et d'une manière très concrète, hyper-concrète, le Seigneur nous parle de ce devoir de s'asseoir.

Le devoir de s'asseoir ce n'est pas non plus une métaphore.

Ce n'est pas une idée comme ça, en l'air.

Le devoir de s’asseoir, c'est ce temps que, jamais, je ne parviens à me donner, car sinon le Seigneur ne nous en parlerait pas (si ça nous était si naturel), le temps que je n'arrive pas à me donner pour me poser ou partir en retrait.

 

Vous savez, dans l'Évangile selon saint Matthieu, le texte que nous entendons pour le mercredi des Cendres : "Enferme-toi dans ta chambre.

 Prie, là, en secret le Seigneur qui est là.

 Il connaît ce qu'il y a dans le fond de ton cœur".

 

Cet exercice du retrait, de s'asseoir, de prier, c'est comme une sorte de respiration qui permet à chacun de descendre progressivement là, où le Seigneur l'attend.

Il ne l'attend pas dans le ciel, il l'attend, là, au fond, au fond de son cœur, mais bien en-dessous, bien en-dessous et des eaux troubles, et de la vase : Il nous attend au cœur.

 

Pour pouvoir descendre jusqu'à lui, il faut donc pouvoir se donner ces temps de respiration.

Le plus gros problème, c'est de savoir lesquels ? et pour qui ?

Il n'y a pas, il n'y a pas une consigne unique d'un devoir de s'asseoir qui vaudrait pour tout le monde.

Je prends un exemple : des personnes qui sont entre 30 et 45 ans, sont dans une activité frénétique : le travail, l'accompagnement des enfants s'il y en a, la vie associative, parfois même un certain nombre de loisirs ou d'occupations très domestiques.

On peut avoir des journées très pleines, très très pleines.

 

La nature a horreur du vide, le cœur a horreur de se retrouver seul avec lui-même.

 

Donc, moins j'ai à en faire, plus je vais chercher à en faire.

C'est d'ailleurs une maladie des jeunes.

Le devoir de s'asseoir va donc être à prendre au premier degré :

 Assieds-toi.

 Parle avec ceux avec lesquels tu vis.

 Apprends à écouter et fais silence.

Même si, on ne sait pas trop ce qu'il faut dire, ou ce qu'il faut écouter, le simple fait de s'asseoir et de se tenir ainsi, vous allez voir, chers amis de 30 à 45 ans, les fruits que cela peut porter.

 

Ceux qui sont à la retraite, mais encore suffisamment en forme pour avoir une activité abondante, ça sera pareil, pareil.

 

Ceux qui sont tiraillés par des tas de soucis, de douleurs, de maladies qui font que leur être est plus au repos qu’à l'action, l'enjeu est le même : peut-être qu'il ne s'agit pas de s'asseoir, mais il s'agit d'organiser dans ses journées, cette pause nécessaire, qui, même si vous êtes déjà assis toute la journée, consiste à dire : "là, j'éteins la télé"

 " là, je mets de côté deux secondes mes soucis

 " là, je m'enferme (je ne sais pas) dans ma chambre si je n'y suis pas encore et je me crée un espace de silence".

Ça s'appelle la prière.

 

Et pour les ados qui, au contraire mériteraient de se mettre debout ou de bouger quand ils ne bougent pas suffisamment, l'enjeu, là encore, est le même.

Ça n'est pas parce que, te voici à penser vaguement à quelque chose, comme :

"il faudrait prier",

ou bien : "ah oui, je suis sur ma tablette, mais, voyez, je suis silencieux…"

Non ! Non! Non!

Une petite abstinence quotidienne et d'images et de sons, crée et installe cet espace intérieur nécessaire et vital pour une respiration.

 

Alors, le disciple de Jésus qui mûrit progressivement la suite du Maître, va installer dans sa vie des temps de retraite, des temps d'accompagnement spirituel, va installer dans sa vie, la confession, pas uniquement pour obéir à un impératif qui viendrait de l'extérieur, mais comme cette respiration nécessaire : parler, être écouté, s'asseoir, organiser ma vie de façon à ce que j'aie ces temps-là, comme autant d’oasis sur ma route, me permet toujours de durer.

 

Attention aux oreilles auxquelles vous vous confiez : toutes oreilles qui paraissent sur votre route, ne sont pas forcément des oreilles qui nous conduisent vers notre cœur.

Tout espace de silence que vous instaurez dans votre vie, ne sont pas nécessairement des espaces qui vous conduisent vers votre cœur.

Vous pouvez être en silence et avoir laissé l'agenda ouvert sur votre table,

être en silence et avoir laissé une feuille et un stylo pour noter toutes les courses que vous avez à faire pour demain.

 

Enlevez ça, le temps de votre prière.

 

Pour une communauté, pour un groupe humain, c'est d'autant plus nécessaire.

Quelle association ne se réunirait pas annuellement pour faire une assemblée générale ?

Quelle paroisse n'aurait pas sa journée de rentrée ou bien la rencontre de son équipe pastorale ?

Quelle commune n'instaurerait pas ces temps nécessaires pour que les habitants se rencontrent ?

Ces temps de respiration, d'écoute et de parole nous sortent de notre routine quotidienne.

 

Quand le Seigneur dit : "Celui qui ne me préfère pas à son père, sa mère, frères, sœurs, et autres membres de sa famille ou de ses proches, c'est précisément ce qu'il appelle de ses vœux : "Connaissez le chemin qui mène vers votre cœur.

 Connaissez-le, n'ayez pas peur de l'affronter".

 

Ceci ne signifie pas qu'il faut que vous reniiez père, mère, frères, sœurs.

Cela signifie qu'il faut créer cette fêlure pour pouvoir durer.

C'est une belle invitation.

 

Mais, il reste encore une étape : pourquoi, il faut s'obliger à s'asseoir puisque ça ne nous est pas si naturel ?

Pourquoi Jésus, nous impose-t-il cette consigne qui semble extrêmement basique, comme s’il nous disait : il faut apprendre à manger avec une fourchette à gauche et un couteau à droite ?

Pourquoi ?

 

Parce que je vous mets au défi, d'emprunter le chemin qui mène vers votre cœur, sans jamais éprouver de difficultés.

Si vous n’éprouvez pas de difficultés, c'est que vous vous êtes plantés de chemin.

Car Christ, pour que nous parvenions jusqu'au bout, nous invite à identifier notre fardeau et le déposer sur ses épaules.

Pas de fardeau identifié, ce n'est pas le bon chemin.

 

Allons jusqu'au bout, laissons-nous attirer par celui qui nous appelle, confiants en son amour.

Alors, nous pourrons durer jusqu’au bout, à sa suite.

 

Amen.


Jeudi 1° septembre : 

1 Co 3, 18-23 : Le rôle des prédicateurs de l’Evangile

Ps 23

Lc5, 1-11 : Appel des quatre premiers disciples

 

Hier, ce Maître guérisseur, avec beaucoup de tendresse, s'est adressé à une grande quantité de malades (hier, dans l'Évangile que nous avons peut-être lu ou entendu à la messe) et il va jusque chez Simon-Pierre et il se penche sur sa belle-mère.

 

Aujourd'hui il revoit Simon.

C'est étonnant d'ailleurs, il le voit comme s'il ne l'avait pas vu la veille.

Il le voit et il descend dans sa barque.

Officiellement, c'est pour mieux se faire entendre.

 

Après avoir manifesté sa puissance à tous ces malades, de jour comme de nuit, voici qu'il va manifester sa puissance à ces pêcheurs.

Et il les rétablit dans une vraie fécondité : ils n'avaient pas pris de poisson, tout d'un coup la pêche est abondante.

Le fait que Pierre reconnaisse en Jésus, son Seigneur ou son Maître, manifeste que déjà, une porte s'ouvre en lui.

Cette fécondité qu'il commence à retrouver dans sa vie, va croître petit à petit, au fur et à mesure qu'il va suivre le Maître.

 

Simon-Pierre a trouvé un Maître dans sa vie, un Maître qui va faire croître sa fécondité.

Une fécondité qui va l'ouvrir : "je ferai de toi un pêcheur d'Hommes".

Une fécondité qui se communiquera à d'autres.

Une fécondité qui progressivement créera l'Eglise.

 

Et nous savons que Simon-Pierre va passer avec son Maître de l'idéal au péché, du péché au pardon.

On sait que Pierre va laisser tomber bien des masques.

On sait que Pierre va devenir un roc dans sa faiblesse.

Voilà Pierre qui rencontre le Maître.

 

Que nous puissions à notre tour, reconnaître, connaître et suivre le Maître qui, seul dans l'Évangile, se manifeste à nous.

Le Maître, pas des maîtres ; celui-là seul, qui rétablit en nous notre fécondité.

 

Il nous fait faire des deuils.

Il nous permet de tourner des pages dans notre vie.

Il nous permet de dépasser quelques ambitions orgueilleuses parfois, qui nous immobilisent, qui nous ouvrent.

Attachons-nous à ce Maître et demandons à l'Esprit Saint, qu’il nous fasse connaître ce Maître.

"Tu es beau, tu viens jusque dans ma barque, tu peux me rétablir dans ma fécondité.

 

Que je te reconnaisse et que je t'aime".


Mercredi 31 août :

1Co 3, 1-9 : Le rôle des prédicateurs de l’Evangile

Ps 32

Lc 4, 38-44 : Guérison de la belle-mère de Simon-Pierre et guérisons multiples

 

Claude-Annie, heureusement que tu étais là, parce que nous avons ton "prions en Eglise".

On peut contempler Jésus qui se penche sur la belle-mère de Simon-Pierre.

On peut contempler Jésus qui, au coucher du soleil, accueille, en posant ses mains sur chacun d'eux, tous ces infirmes, ces malades qui lui sont présentés.

Il y a quelque chose de très tendre dans le détail que nous donne l'évangéliste, Luc : il pose ses mains sur chacun d'eux.

On pourrait, en ayant en mémoire la première lecture qui a été lue juste avant, celle de Paul aux Corinthiens, se dire que cette forte fièvre de la belle-mère de Simon-Pierre et que ces infirmités dont sont atteints tous ces malades, c'était cette sorte de conduite tout humaine que dénonce Paul.

Il ne juge pas sa communauté en disant cela.

Il leur indique juste, qu'ils ont encore du chemin à faire et il justifie de cette façon, le lait qu’il leur donne en nourriture, c'est-à-dire une façon toute simple de leur parler de Dieu.

Peut-être que Jésus, en se penchant sur la belle-mère de Simon-Pierre, en accueillant ces malades, de manière toute simple, toute simple, présente le visage de son Père.

Mais il y a encore du chemin à parcourir, et quel chemin puisque ça va être sa montée à Jérusalem.

Il ne peut peut-être pas tout de suite prêcher un Messie crucifié, ou tout de suite être le crucifié, alors que Paul dans ses lettres, parfois, s’envole devant ses communautés en disant : « tout ce qui est sage aux yeux du monde est folie aux yeux de Dieu et tout ce qui est sage aux yeux de Dieu est folie pour ce monde. »

À la fois, Paul prend le temps de donner du lait pour des hommes et des femmes qui n'ont pas encore la possibilité de comprendre Dieu et en même temps Paul,va être l’apôtre fougueux et va tout de suite présenter : Dieu qui va mourir pour l'homme.

Jésus en tout cas, là, lui, va en rester à un visage tout simple, tout simple du Père, pour des foules encore peut-être fragiles.

Mais contemplons cela, contemplons Jésus qui se penche, contemplons Jésus qui pose ses mains sur chacun et puis ceux qui le suivent, peu à peu, découvriront qu’il les conduit vers la croix et la résurrection, chacun en son temps, à sa mesure.

 

Amen. 


Dimanche 28 août :

Si 3,17-18.20.28-29 : L’humilité

Ps 67

He 12, 18-19.22-24a : Les deux alliances

Lc 14, 1.7-14 : Sur le choix des places

 

Chers amis, l’une des grandes redécouvertes pour toute l'Eglise, durant le XXe siècle, c'était le caractère relationnel de l'Homme.

Pendant très longtemps, dans la grande histoire de l'Eglise, les spécialistes, les spirituels parlaient de l'Homme comme d'une réalité unique, solitaire, enfermée dans un bocal, qu'ils scrutaient comme une créature de laboratoire.

Mais au XXe siècle, sans doute à cause de mille progrès extérieurs à l'Eglise, tout d'un coup, les spirituels, les théologiens, les pasteurs, relisant la Parole de Dieu, se sont dit : "Mais on ne peut pas dire que l'homme est tout seul comme un rat de laboratoire, enfermé dans sa cage.

L'homme est relationnel.

L'homme est relation".

Donc, on ne peut pas parler d'un seul, on doit toujours parler de plusieurs, ensemble.

Quand, chrétiens, nous disons que l'Homme est un être relationnel, ce n'est pas pour dire (un peu comme on dit parfois au KT, voyez : on doit se faire plein de copains, on est une grande bande de potes, il faut absolument être avec les autres…), ce n'est pas ça.

C'est bien, mais il y en a qui sont plus heureux, un peu moins entourés de monde et d'autres sont plus heureux avec plein de monde autour d'eux.

Quand on dit qu'un être, que l'Homme est un être relationnel, à l'image de Dieu, on dit qu'il ne peut pas se connaître, il ne peut pas connaître Dieu, s'il n'y a pas en face d'autres visages.

Et pourvu qu'en face, ce ne soit pas son visage qu'il regarderait dans un miroir, mais d'autres visages, d'autres personnes.

Sinon l'homme ne se connaît pas et il ne connaît pas Dieu.

Il a besoin d'autres autour de lui.

 

Alors, au temps de Jésus c'était quelque chose de tout à fait acquis, normal.

Au temps de Jésus, tout le monde baignait là-dedans, la preuve : il est souvent question de repas.

Et un repas, figurez-vous que ce n'est pas uniquement pour alimenter son estomac.

Un repas c'est un lieu où, (alors très fortement au temps de Jésus), où nous sommes plusieurs autour d'une table.

Et en plus, c'est souvent ce qui vous arrive, peut-être pendant ce temps de vacances, notamment pour des familles qui, pendant l'année, à cause du rythme un peu compliqué des uns et des autres, à cause de la précipitation imposée par les programmes de chacun, eh bien un repas, notamment pour des familles, pendant les vacances ça va être : on prend du temps, on est autour d'une table, on va avoir un long apéritif, on va avoir un repas qui dure, préparé par plusieurs, on s'y échange des nouvelles, on finit par s'assoupir.

Mais beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses s'échangent, autres que cette nourriture qui se trouve dans nos assiettes.

 

Et Jésus avait repéré dans l'Évangile, deux éléments :

- le premier, c'est : ce qui se cache dans le cœur de celui qui est invité au repas

- et le deuxième : ce qui se cache dans le cœur de celui qui invite.

Deux éléments qui disent la limite de l'humain.

On n’est jamais en relation avec les autres sans nos propres limites, sans nos lunettes, sans nos pré-compréhensions, sans notre péché nous dirions, depuis le livre de la Genèse.

L'autre est souvent en fait, considéré et compris à partir de moi.

Et puisque nous sommes un être relationnel, nous avons besoin que l'autre corrige ce que nous croyons avoir compris de lui.

 

Alors, c'est pour ça que Jésus dit : "invite celui qui ne te rendra pas en retour" ou bien encore "ne choisis pas la première place" pour ne pas te croire le centre, l'unique.

Nous sommes des êtres relationnels.

Mais vous observerez que notre manière d'être, projetant sur les uns et les autres notre propre ego, dans tout ce qui fait nos jeux, nos relations, (alors du coup pas simplement dans les repas : ça peut être dans des réunions, ça peut être dans des relations amicales, toute chose, toute organisation humaine qui mettent plusieurs humains ensemble), chaque fois que nous sommes en relation, si nous ne sommes pas suffisamment conscients de ce qui se joue entre nous, eh bien nous pouvons perpétuellement blesser ou être blessés.

Jésus veut nous en libérer car très souvent, des conflits, des violences, des enfermements sont liés aux blessures que l'on peut produire aux autres ou que les autres produisent en nous-mêmes (tout simplement lié au fait que l'on peut ignorer que nous projetons sur les autres cette blessure de notre cœur).

 

Alors, il y a cette affirmation capitale et de la première lecture et de l'Évangile :

"Qui s'élève sera abaissé, qui s'abaisse sera élevé".

Cette affirmation est capitale parce que si nous en restons simplement au constat tout à fait plat, que nous sommes des êtres qui blessons et qui pouvons être blessés, eh bien, nous n'avançons pas et nous produisons en fait une image de l'humanité très triste, très austère, très pessimiste comme si nous étions condamnés à rester dans une sorte de vallée de larmes avec des malentendus permanents entre nous, finalement faisant de l'autre quelqu'un que je ne finirai jamais par comprendre et de moi-même du coup, une sorte de brute, qui, en permanence, ne permet pas de comprendre les autres et de se faire comprendre elle-même.

On n'avance pas.

 

C'est la raison pour laquelle, celui qui est fortement attaché à Jésus, se rend compte que, comme en creux, comme à l'intérieur de nos plis, de ces limites que nous manifestons dans le jeu des relations, ce n'est pas simplement notre fragilité qui se manifeste mais c'est aussi le visage de Jésus.

Son visage plein d'amour qui s'est révélé sur la croix.

Chaque fois que nous célébrons l'eucharistie, que nous regardons le Corps et le Sang du Christ ou chaque fois que nous contemplons la croix, ça n'est pas l'échec du Fils de Dieu que nous regardons, c'est son amour au creux de notre misère.

C'est son amour qui vient se loger dans les plis de notre vie.

 

Alors, la bonne nouvelle, c'est que dans nos jeux relationnels, ça n'est pas la limite de l'autre qu'il faut regarder obsessionnellement ni même nos fragilités qui viendraient nous rendre pessimistes sur nous-mêmes, mais c'est la beauté d'un amour qui vient nous relever et qui vient se loger au cœur de notre misère et dans les plis de notre vie.

 

C'est le sens de l'eucharistie, car c'est un repas.

Certes, point d'apéritif ni de sieste, mais c'est un repas.

Certes, on ne se cause pas beaucoup, et c'est la limite de nos eucharisties en Occident (mais nous pourrions après tout, avant ou après), mais c'est un repas.

Et nous pourrions repérer la façon dont nous sommes en relation avec celui qui est assis à notre droite, à notre gauche, devant, derrière et surtout pour ceux qui sont des habitués.

Ils ne peuvent pas dire :"je n'ose pas parler avec l'autre, je ne le connais pas, (pour ceux qui passent deux semaines dans cette église).

 

Mais pour ceux qui viennent tous les dimanches, qui observent tous les dimanches les mêmes visages, tous les dimanches vont manifester la même distance, la même méfiance, le même jugement, ou tous les dimanches vont exclusivement rester avec les mêmes pour dire toujours les mêmes choses ; eh bien cela tombe sous le poids de la Parole de Jésus en ce dimanche : est-ce juste ?

 

"Qui s'abaisse sera élevé".

N’ayons pas peur d'arriver à la table eucharistique, non pas en disant : "je suis un médiocre puisque je n'arrive pas à rencontrer du monde", mais arrivons à la table eucharistique en se disant : "tous les visages qui sont autour de moi, qui partagent le même repas, le même Corps du Christ, ils sont autant de signaux pour moi, pour me dire : oui, petit je suis".

 

Mais il me faut bien être petit pour que le visage de Jésus se révèle.

Sinon, alors, à quoi bon le chercher ?

Il n'y a pas de place en nous pour l'accueillir.

Être petit devant lui c'est faire le vide, c'est faire de la place pour qu'il puisse s'installer dans nos creux, dans nos plis.

 

Il y a une nouvelle équipe pastorale paroissiale qui s'est installée dans notre paroisse.

Pour ceux qui sont des permanents de nos communautés comme pour ceux qui sont de passage, il est bon de savoir que, pour les mois qui viennent, un gros effort d'explication et de pédagogie va se faire jusqu'au moins la rentrée pastorale paroissiale du 9 octobre (notez bien cette date), pour expliquer le squelette que nous nous donnons, la colonne vertébrale que nous nous donnons dans notre communauté, désormais, pour les années qui viennent.

C'est plein d'organisation, c'est très technique, ça peut paraître pas hyper spirituel, mais après tout, Jésus dans l'Évangile est très technique : "au lieu d'aller devant, va derrière", "creuse-toi la tête pour inviter ceux qui ne te rendraient pas en retour" (c'est hyper technique).

 

Mais cette équipe pastorale paroissiale s'est déjà réunie et elle s'est dit :" il est important que pour les presque deux ans qui viennent, nous redécouvrions ensemble l'eucharistie, le sens de nos assemblées du dimanche, le sens du dimanche, le sens de la messe (un peu dans l’esprit de ce texte de l'Évangile de ce jour), pour sortir et de nos tentations uniformisantes mais aussi pour sortir de nos querelles sur les différences.

 

Dans une communauté, il est bon qu'il y ait de la différence.

Dans une communauté, il est bon que nous ne soyons pas tous d'accord.

Ça n'est pas la question, ça n'est pas un mouvement d'intérêt, ça n'est pas un parti politique, ça n'est pas un lieu de débat à l’image du monde.

Peu importe, ce qui compte c'est que les uns par rapport aux autres, nous soyons tous des panneaux indicateurs qui nous aident à nous abaisser suffisamment pour faire de la place à celui qui veut prendre sa place : visage de la miséricorde du Père dans les plis et les creux de notre vie.

Il nous faudra du temps, mais ce n'est pas grave.

Après tout, ça fait 2000 ans que les communautés s'exercent à vivre l'eucharistie.

Alors, ceux qui sont de passage, et qui vont repartir, priez pour nous.

 

Ceux qui restent, en route. Amen.


Vendredi 26 août :

1 Co 1, 17-25 : Sagesse du monde et sagesse chrétienne

Ps 32

Mt 25, 1-13 : La parabole des 10 vierges

 

Ce texte est très passionnant à plus d'un point.

Il peut nourrir facilement notre imaginaire et notre prière : voilà des noces, dix jeunes filles, elles sont toutes en attente.

Et puis, un cri dans la nuit qui vient de déchirer leur sommeil, et cinq d'entre elles sont recalées et cinq autres, d'une certaine façon, sont prises, de l'autre côté de la porte.

 

Ce texte est instructif d'abord pour nous redire que notre vie chrétienne n'est ni plus ni moins une vocation à l'attente, à l'attente active.

Notre vie n'est pas simplement à être orientée vers la mort ou simplement à ne rien faire.

On sait tous que l'on fait des choses, mais nous sommes tous tendus vers… et vers quoi ?

Vers une rencontre.

Et cette rencontre n'a pas lieu qu'après notre mort.

C'est important de se le dire.

Notre rencontre, cette rencontre dans la foi, n'a pas lieu qu’après notre mort.

Notre foi la plus profonde, c'est que nous puissions rencontrer Christ, que notre cœur aime et cette rencontre peut survenir bien avant, à plusieurs reprises, et souvent à un moment où on l'attend le moins, cette rencontre.

D'où l’appel à une sorte de vigilance active.

 

Alors hier, souvenez-vous, c'était le maître de maison (on n'avait pas eu la messe mais peut-être que vous avez lu vos "prions en Eglise"), le maître de maison qui doit partir et ce maître de maison confie à un serviteur sage et fidèle la charge de sa maison.

Sage et fidèle.

Il va dire également dans son histoire que le maître de la maison va aussi confier sa maison à un serviteur qu'il croyait sage et fidèle et qui va malheureusement s'impatienter de ne pas voir son maître revenir.

Et il va, comme ruiner la maison.

Mais sage et fidèle pour ce serviteur, c'est exactement la même chose pour ces cinq vierges qui ont mis de l'huile dans leur lampe et prévoyantes.


Le deuxième point : mais c'est quoi cette huile ?

Qu'est-ce qui donne cette sagesse ?

Qu'est-ce qui nous permet d'être prêts, surtout éveillés ?

Eh bien pour nous, c'est (et c'est précisément notre manière d'être attaché à Jésus qui donne cette huile dans la lampe), une attache très très active, très très dynamique.

Nous voulons effectivement que sa parole, nous en goûtions et nous la vivions le plus possible et jusqu'à adopter dans notre vie, le style de Jésus : c'est ça qui met de l’huile dans nos lampes.

Et sans transiger, sans transiger là-dessus.

C'est lui qui permet d'être (enfin sa parole, accueillie dans notre vie), qui va nous permettre d’être prêts.

 

C'est normal que nous ressentions de la résistance : ça c'est le troisième point.

Il y en a toujours eu et il y en aura malheureusement encore beaucoup : nous sommes fabriqués comme ça.

Alors Jésus, dans ses paraboles nous fait peur, un peu.

Il envisage les cinq vierges qui n'ont pas d'huile : pas de bol pour elles, elles restent derrière la porte.

Alors cette peur que ça peut susciter, pourvu qu'elle nous stimule ; ce n'est pas une peur pour nous condamner, c'est une peur pour nous faire grandir.

Comme hier : il s'agissait de l'hypothèse aussi, d'un serviteur qui dilapide les biens de la maison.

Eh bien, le jugement est terrible pour cet homme-là.

Ça peut faire peur : eh bien tant mieux d'une certaine façon ; mais non pas pour nous condamner ou nous juger mais pour nous stimuler.

Pourvu que vous ayez de l'huile dans votre lampe !

Voilà, pourvu que nous ayons de l'huile dans nos lampes !

Et cette huile, elle n'est pas très loin, elle est à notre disposition.

 

Quand nous allons communier, on peut se dire :"tiens, je vais chercher de l'huile pour ma lampe ".

Mais attention, même si nous recevons Jésus-Christ présent dans l'eucharistie, ce Jésus-Christ, il faut qu'il prenne toute sa place dans nos corps et dans nos vies.

Et ça n'est pas l'œuvre d'un jour.

Ce n'est pas parce que un jour nous avons dit à Jésus : "je me donne tout entier à toi", que c'est fait.

C'est l'œuvre de tous les jours, sinon il n'y aurait qu'une messe dans notre vie or il y en a tous les jours.

Tous les jours, il faut redonner sa place au Maître.

Mettons un peu d'huile dans notre lampe.


Mercredi 24 août : St Nathanaël (Barthélémy)

Ap 21, 9b-14 : la Jérusalem messianique

Ps 144

Jn 1, 45-51 : Les premiers disciples

 

Nathanaël, Barthélémy serait donc de Cana, pense-t-on.

Et puis certains attribuent le fameux Philippe dans les Actes des apôtres qui rencontre l'eunuque, ils l'identifient aussi à Nathanaël.

C'est un personnage dont pourtant, même si historiquement on a du mal à le situer après la Pentecôte, il vit une rencontre extraordinairement importante à travers cet Évangile.

 

Nous savons que l'Évangile de Jean dit des choses ultra importantes avec très peu de mots, alors ce n'est parfois pas très aisé.

Il a un vocabulaire très réduit, Jean.

Mais là par exemple, c'est assez simple, avec une lecture attentive, de voir quelques différences entre le début et la fin du texte.

 

Il est beaucoup question de Jésus, fils de Joseph, de Nazareth, au début du texte : on peut dire, l'identité la plus humaine, la plus immédiate et accessible par n'importe quel témoin lorsqu'il rencontre Jésus.

Et puis progressivement, on a affaire au Fils de Dieu, roi d'Israël.

 

 Aussi, il est question de Nazareth et progressivement on passe de Nazareth au figuier et du figuier au Ciel : une sorte d'ouverture ou d'ascension.

 

Qu'est-ce qui permet cette progression ?

C'est la rencontre progressive entre Jésus et Nathanaël.

" Je t'ai vu sous le figuier", voilà ce que dit Jésus après que, au départ, ce soit un compagnon de Nathanaël qui lui dit :"viens et vois".

 

Et au lieu de voir, c'est d'abord Nathanaël qui a été vu le premier.

Alors ça peut nous faire penser à une parole de Jérémie : "avant que naisses, je t'ai connu,dans le ventre de ta mère" dit Dieu au prophète.

Mais peut-être que cela rejoint notre expérience spirituelle de dire que, (nous dire à nous-mêmes), nous avons d'abord été saisis plus ce que nous avons saisi nous-mêmes.

Et on peut même jouer sur les mots : avant de saisir Dieu, (peut-être au sens de l'avoir compris), c'est Dieu qui nous a saisis, (au sens qu'il nous a pris).

 

"Je t'ai vu, avant que tu ne viennes me voir. Je t'ai vu sous le figuier".

La tradition attribue au figuier l'arbre de la connaissance, voire même l’arbre de la Parole de Dieu.

 

Ce Nathanaël a la chance de ne pas être rusé et c'est rare que Jésus rencontre un de son peuple qui n'est pas rusé.

Rappelez-vous toutes les invectives qu'il peut avoir contre les pharisiens, les scribes, les docteurs de la loi.

Encore pas plus tard que dimanche prochain, nous aurons un texte où précisément tous les pharisiens au milieu desquels Jésus se trouve, ont le regard fixé sur Jésus, comme pour lui tendre un piège.

Voilà un de son peuple qui n'est pas rusé, qui est simple, qui ne cherche pas à saisir Jésus.

 

Il se laisse saisir, rejoindre.

Un peu comme Zachée qui se laisse rejoindre.

Or Zachée était un pécheur invétéré, on ne dit pas la même chose de Nathanaël.

 

"Tu verras des choses plus grandes encore", et ça c'est peut-être l'étape qui nous appartient tous de franchir : c'est de cesser de raisonner.

Lorsque nous raisonnons beaucoup la Parole de Dieu et l'Évangile ou notre foi (et c'est nécessaire parce que nous sommes fabriqués avec une raison, une intelligence, une tête ; parce que nous cherchons à réfléchir à ce en quoi on croit, mettre des mots pour mieux en parler aux petits enfants ou mieux rédiger les prières universelles le dimanche ou je ne sais quoi encore), lorsque nous raisonnons avec la tête la Parole de Dieu , nous tuons l'Évangile.

 

"Tu verras des choses plus grandes encore", c'est l'étape suivante : l'étape d'une foi qui, désormais, se laisse rejoindre, sans avoir à construire rien du tout, comme si elle s'ouvre.

Ça peut arriver parfois dans notre prière, dans la rencontre des petits, dans le service, peut-être à la messe : tout d'un coup, voir apparaître Celui qui est plus grand que nous.

 

Jésus a promis d'être le chemin vers le Père, peut-être alors c'est ce qu'il promet à Nathanaël.

 

Réjouissons-nous de cette belle rencontre et demandons au Seigneur qu'elle soit pareille pour nous afin que nous puissions faire cette belle proclamation de foi en Jésus : tu es le Messie, le Roi d'Israël, le Fils de Dieu.

 

Amen.


Lundi 22 août : Marie Reine

Is 9, 1-6 : la délivrance

Ps 112

Lc 1, 26-39 : l’annonciation à Marie

 

Celui qui a fait l'expérience de côtoyer et de vivre avec des pauvres peut alors comprendre ce que l'Eglise fête à travers toutes les fêtes mariales et quand elle se reconnaît Eglise en marche, en marche vers la réalisation des promesses qui lui est faite.

Car la spiritualité mariale c'est d'abord la spiritualité d'un peuple qui se sait pauvre, en pèlerinage et qui a la tendre affection d'une mère, comme un peuple d'enfants.

 

Il faut regarder ce qui se passe dans les sanctuaires mariaux pour reconnaître que cette image de l'Eglise, c'est une image pleine d'affection, pleine de tendresse (parfois peut-être un peu dure), mais l'image d'hommes et de femmes qui cherchent à se blottir dans le manteau de celle qui leur a donné le Sauveur.

 

L'expérience de la pauvreté aujourd'hui, comme hier d'ailleurs, on a plutôt tendance à la cacher, la pauvreté, ou à la réduire à la pauvreté spirituelle (voyez : on est pécheur, on est fragile, on a quelques zones d'ombre dans notre cœur, ce qui est vrai).

C'est presque une sorte de pauvreté, presque coquette ; c'est-à-dire, nous sommes fragiles mais nous en avons presque honte.

La pauvreté dont il est question, là, c'est celle au sens de Saint Matthieu, les béatitudes; au sens de Saint Luc, les pauvres, les pauvres d'argent, ceux qui n'ont pas.

 

Eh bien cette Eglise itinérante voilà, c'est celle-là, celle qui se reconnaît en Marie.

L'idée ce n'est pas de devenir pauvre, tel n'est pas la question, mais c'est pour rentrer dans cette spiritualité des fêtes mariales.

 

Aujourd'hui, quelques jours après l'Assomption, où nous fêtions celle qui est élevée au Ciel, nous reconnaissons qu'elle est notre Reine.

Et donc, quand la prions, notamment à la fin de chaque eucharistie, lorsque nous la prions cette Marie, nous souhaitons remettre entre ses mains notre vie pour qu'elle intercède pour nous, un peu comme une maman, ou une reine au sens du Moyen Âge (voyez : la maman du roi), celle qui va pouvoir présenter à son fils toutes nos intentions.

 

Alors en cette fête, nous pouvons prier particulièrement pour les communautés paroissiales qui sont vraiment des communautés de très pauvres.

Il y en a en France, on peut penser en particulier aux communautés de migrants et puis on peut penser très fort à d'autres pays, d'autres continents où cette pauvreté est plus flagrante et qui en ces jours de fêtes manifestent toute leur ferveur.

 

Amen. 


Mardi 5 juillet : St Antoine-Marie Zaccaria

Os 8, 4-7.11-13 : Anarchie politique et idolâtrie, contre le culte purement extérieur.

Ps 113b

Mt 9, 32-38 : Guérison d’un démoniaque muet et misère des foules.

 

Voilà des scènes de vie ordinaire dans l'Évangile, Jésus en pleine activité dans son ministère publique, guérit, expulse des démons, suscite l'intérêt des foules : des hommes et des femmes s'interrogent.

Et voici qu'il est soucieux de la moisson.

 

On peut retenir quelques aspects de ce ministère trépidant du Seigneur :

Le premier aspect c'est qu’il rend la parole.

Il libère.

À chaque fois qu'il rend la vue ou la parole ou l'intégrité physique ou spirituelle à un être, le Maître remet en contact, (en communication), cette créature, cet être avec le Créateur.


Un deuxième aspect, c'est la parole des pharisiens : "C'est par le chef des démons qu'il expulse les démons".

Quand nous avons la mention des pharisiens, il ne faut pas forcément s'attendre à des chefs de peuple, mais n'empêche qu'il faut s'attendre à des gens qui ont la connaissance, au milieu du peuple.

Et cette parole nous renvoie à leur propre cécité, le propre mutisme de ces personnages, qui pourtant sont censés avoir la connaissance.

Pour eux, Jésus ne fait rien à ce moment-là, sinon qu’il s'attriste ou bien plutôt est saisi de compassion parce qu'il manque ouvriers pour la moisson.

Il manque de pharisiens, il manque de bergers, il manque d'hommes et de femmes libérés de leurs démons et recouvrés dans leur intégrité pour pouvoir participer à la moisson.

 

Alors, si nous en sommes, participons à la moisson ; si nous n'en sommes pas, demandons au Seigneur qu’il nous attire à lui, afin qu'il fasse en nous son œuvre.

 

Amen.


Samedi 2 juillet : messe anticipée

Is 66, 13-14 C : Jugement sur Jérusalem

Ps 65

Ga 6, 14-18 : Préceptes variés autour de la charité et du zèle.

Lc 10,1-12.17-20 : Mission des 72 disciples

 

Chers amis, dans ce texte de l'Évangile, il y a comme un bestiaire qui apparaît :

 il est question de loups,

 il est question de bêtes sauvages,

 il est question de serpents,

 il est question d'ennemis, de toutes choses hostiles qui pourraient faire du mal à ces 72 disciples envoyés dans toutes villes ou localités, là où le Seigneur doit aller.

 

Cette réalité des loups, des bêtes sauvages et autres choses hostiles qui pourraient nuire aux disciples de l'Évangile, renvoie à cette réalité spirituelle, universelle, présente, rappelons-nous, toujours dans le cœur de chacun : cette espèce de loup ou de lion, tapis en embuscade au plus profond de notre cœur, dans cette espèce de forêt sauvage intérieure et qui vient comme à la fois, nous fasciner et en même temps, nous faire peur, à la fois ; produit en nous un certain nombre de stratégies d'évitement, un certain nombre de craintes, un certain nombre d'abandons parce que cette espèce de réalité dont Jésus nous parle, est présente depuis au fond, la nuit des origines, ce que le livre de la Genèse appelle : la faute originelle.

 

Mais la belle nouvelle du disciple, notre belle nouvelle c'est que, par sa mort et par sa résurrection, le Christ vient comme détruire ces réalités hostiles, vient comme nous rassurer en les faisant disparaître, non pas de manière sauvage ni à son tour, les chassant comme un chasseur, mais comme les éclairant de l'amour de Dieu.

À l'intérieur de chacun d'entre nous, est comme tapis ce besoin d'amour, cette soif très très grande.

Et le meilleur moyen de s'en défaire ou de ne plus en souffrir ou que ça ne se transforme plus en peur, en obstacle à éviter en permanence, eh bien il suffit (mais là est le dynamisme et toute la difficulté de notre vie spirituelle), il suffit de l'exposer à la fontaine intarissable de l'amour du Père, en Jésus.

 

Alors, cette grande réalité, (dite comme cela, ça peut paraître très abstrait), elle a quelques implications très concrètes, notamment dans cet exercice missionnaire imposé aux disciples.

Car ces loups, ces bêtes sauvages et autres réalités hostiles, démoniaques et qui peuvent constituer pour nous comme des adversaires, ne sont pas présents que dans le cœur, au plus secret de nous-mêmes, mais peuvent apparaître autour de nous.

 

Je me suis demandé pendant très longtemps quand j'étais adolescent, quand j'ai découvert ces quelques textes de l'Évangile : mais à quoi bon apporter la paix quand on est missionnaire ?

Eh bien il peut y avoir plein d'autres choses à dire en premier :

 expliquer qui est Jésus,

 exposer la foi,

 raconter d'où il vient et ce qu'il veut de nous.

Mais pourquoi apporter la paix, parfois même sans rien dire ou en secouant la poussière des pieds, sans parole : à quoi bon ?

 

Et je me suis rendu compte, chemin faisant, qu'il n'existe plus sur terre (alors, encore moins ici), il n'existe plus aucune contrée toute vide, ou aucune contrée tout à fait vierge de quelconque projet humain ou de quelconque réalité religieuse, si bien que le missionnaire quand il arrive, il rencontre sur sa route forcément d'autres gens, déjà là.

D'autres gens qui n'attendent rien, ou d'autres gens qui sont déjà en train d'exposer d'autres projets, d'autres idéaux, d'autres gens qui offrent d'autres chemins.

Si bien que le missionnaire a comme à se frayer un chemin pour qu'il puisse arriver jusqu'aux portes des maisons pour faire entendre ce qui anime le fond de son cœur.

La force du missionnaire, c'est de pouvoir compter sur cette confiance très grande, ce pardon, cet amour dont il a été le premier bénéficiaire pour pouvoir se frayer une route, sans rentrer dans une sorte d'adversité ou sans rentrer dans une sorte de guerre avec toutes les autres personnes qu'il rencontre sur sa route.

 

Troisièmement, pour être encore plus concret, il apparaît parfois que ces fameux loups dont il est question, existent jusque dans notre communauté ou dans nos villages et que les loups ne sont pas forcément des personnes que nous ignorons, des personnes tout à fait anonymes.

Il se peut parfois que, ces loups soient des personnes que nous connaissons bien.

 

J'avance encore un pas : quatrième marche.

Il se peut que nous soyons des loups pour d'autres et que, dans notre volonté de prendre notre place et de partager ce qui nous anime, nous en finissions presque, par être aussi violent qu'un loup.

Il nous arriverait presque de faire tomber les autres sur notre route au lieu, au contraire, de partager cette bonté et cette tendresse dont nous sommes porteurs.

 

Chers amis, être disciple de Jésus, et être disciple de Jésus en sortie, ce n'est pas aussi simple et il se peut parfois que cela se transforme en une course à celui ou celle qui arrivera le premier, ou celui ou celle qui emportera le plus de satisfaction, le plus d'adhésions.

Quand Jésus envoie ses 72 disciples, de cette façon, avec toutes les recommandations qu'il se doit, il les met en garde de ne pas rentrer dans cette espèce d'esprit mondain dont nous parle le pape François souvent dans ses textes.

Celui qui est disciple de Jésus, il a les mains vides et il n'a aucune envie d'être un compétiteur à la mode du monde.

 

Alors, dans nos communautés, nous allons, à partir du mois de septembre, voir apparaître des hommes, des femmes, que nous connaissons bien, qui sont parmi nous, et qui ont accepté une mission au nom de notre communauté, pour le service de l'Évangile.

Alors on dit, habituellement, que c'est pour aider le prêtre, le curé, (c'est vrai) mais c'est surtout pour prendre sa part et faire avancer tout le monde à la suite de l'Évangile.

 

Alors, ce texte de l'Évangile s'adresse autant à eux qu'à nous tous.

Attention que ni les uns ni les autres ne deviennent des loups, des prédateurs, mais que, et les uns et les autres, (et les envoyés et ceux qui les reçoivent), ils puissent se rappeler que cette fontaine intarissable de l'amour du Père s'adresse à tous : et aux uns et aux autres.

Être au service de la communauté, cela ne signifie pas : être supérieur.

Accueillir quelqu'un qui est au service de la communauté, cela ne signifie pas : perdre sa place.

Alors, dans cet exercice tout simple de l'humilité, (on va dire presque collective), réentendons cet Évangile qui nous invite à être doux et humble et à être des vrais porteurs de la paix.

Un petit mot de conclusion : généralement, quand on arrive à la fin d'une année, bien fatigué, comme si on avait couru toute cette année on a envie de dire : « la paix, on a plutôt envie qu’on nous la laisse, laissez-moi la paix, laissez-moi en paix, fichez-moi la paix ».

Mais si le disciple de Jésus agit de cette façon, il risque très certainement de fermer les yeux sur ses responsabilités, sur la puissance de l'Évangile.

La paix, elle n'est pas là pour qu'on nous la fiche (excusez-moi l'expression).

La paix, elle est là pour qu'on se la donne.

Et c'est tout autre chose, ça nous oblige donc à ouvrir les yeux.

Et je nous souhaite, véritablement, qu’ensemble, (que les uns envoyés, que les autres qui accueilleront), eh bien qu'ensemble nous nous donnions la paix.

 

Amen