Homélies des mois de Janvier à Juin 2017


Vendredi 30 juin : Les premiers martyrs de l’Eglise de Rome

Gn 17, 1. 9-10.15-22 : L’Alliance et la circoncision.

Ps 127

Mt 8, 1-4 : Guérison d’un lépreux.

 

Nous nous souvenons : après que l'Alliance a été conclue avec Moïse, (remontons à Moïse dans le livre de l'Exode) Moïse va tenter de rencontrer Pharaon et d'obtenir de lui une solution, (on dirait pacifique), pour les hébreux, en terre d'Egypte ; et puis, il va lui falloir manifester des œuvres, des œuvres de puissance devant Pharaon, pour lui permettre de céder et ce sont les fameuses plaies d'Egypte : neuf, attribuées à Moïse, avec la puissance de Dieu et la 10e, ( la mort des premiers-nés) attribuée à Dieu, directement.

Après cette dixième plaie, c'est l'organisation de la Pâque et la sortie d'Égypte.

Et plus tard, il va y avoir, dans le désert du Sinaï, sur le sommet de la montagne, ce don de la Loi à Moïse.

 

Là, nous sommes dans l'Évangile de Matthieu, au sommet de la montagne ; Jésus, dans la mémoire de l'évangéliste, a tous les traits de ce nouveau Moïse ‘qui n'est pas venu abolir mais accomplir la Loi’, un nouveau législateur avec une Loi qui est en même temps ancienne et en même temps nouvelle, ce Jésus, sitôt descendu de la montagne, va accomplir des œuvres de puissance comme Moïse.

Voilà la première d'entre elles : cette purification du lépreux.

 

Alors, on a souvent entendu que Jésus, en purifiant le lépreux, enfreint la Loi et en même temps, en lui demandant d'aller voir le prêtre, il respecte la Loi : nous pouvons aller lire le livre du Lévitique pour repérer cela ou regarder les notes qui sont dans nos Bibles.

 

Matthieu nous invite à accorder toute notre confiance à Jésus et à mettre notre foi en lui : il a toute la puissance de Dieu, comme Moïse a eu celle de Dieu.

Nous ne nous trompons pas en accordant notre confiance au Christ, comme a fait Abraham, en son temps et son épouse Sarah : ils ont eu raison, car la puissance du Seigneur, dans leur vie, a elle, eu raison de leur grand âge et de leur incapacité à engendrer : après Ismaël, voici qu’est annoncé Isaac.

 

 

Eh bien, à notre tour, en accueillant le Christ dans cette communion à son corps et à son sang, nous redisons notre confiance, notre foi.


Jeudi 29 juin : Solennité de St Pierre et ST Paul, Sts patrons de la paroisse et du diocèse

Ac 12, 1-11 : L’arrestation de Pierre et sa délivrance miraculeuse.

Ps 33

2Tim 4, 6-8.17-18 : Recommandations suprêmes.

Mt 16, 13-19 : Profession de foi et primauté de Pierre.

 

Cet homme mendiant, qui est devant le temple, à Jérusalem, à la neuvième du jour l'après-midi, (nous sommes peu de temps après la Pentecôte), Pierre, accompagné de Jean vont prier, le rencontrent.

Souvenons-nous de la scène et visualisons-la :

cet homme est assis, il mendie ;

les apôtres sont là, devant lui ;

Pierre parle : "regarde-nous, nous n'avons pas d'argent ; au nom de Jésus, lève-toi", redresse-toi.

 

Il se redresse et nous avons donc, toutes les caractéristiques d'un miracle, comme dans les Évangiles : la joie de cet homme, la joie des personnes qui sont témoins de la scène et leur stupéfaction, comme par exemple, l'aveugle Bartimée, à la sortie de Jéricho.

"Regarde-nous, au nom de Jésus lève-toi " redresse-toi ;

comme la belle-mère de Simon Pierre : Jésus se penche sur elle, ‘redresse-toi’; elle se redresse, elle qui est guérie alors qu'elle était allongée à cause d'une forte fièvre ;

comme ce paralytique, un jour de sabbat dans la Synagogue : ‘qu'est-ce qui est le plus facile de dire : redresse-toi ou je te pardonne tous tes péchés ?’

 Et Jésus dit : ‘je te pardonne tous tes péchés’ ; cet homme se redresse ;

comme la fille de Jaïre : elle est allongée, comme morte ; Jésus la prend par la main, elle se redresse ;

comme les annonces que Jésus va faire de sa Passion, par trois fois : "le Fils de l'homme, le troisième jour, se redressera" ;

comme les disciples, avant qu'ils soient envoyés, (Pierre, Jacques et Jean), au sommet de la montagne de la transfiguration : ils sont contents, assoupis, ils ont vu Moïse et Elie, leurs maîtres ; ils s'endorment.

Jésus leur enjoint de redescendre de la montagne avec lui, ils se redressent

et nous fêtons à chaque eucharistie le redressement de Jésus, sa résurrection.

 

Le pouvoir des apôtres est un pouvoir du Ressuscité lui-même, la foi qu'ils ont reçue de lui et qui est née à Pâques.

Et ce mendiant de la ‘belle porte’ en est comme une image (de cette foi-là et de sa puissance), ce que les apôtres vont dire d'ailleurs, quelques versets plus loin, lorsqu’ils vont expliquer leur geste : "grâce à la foi au nom de Jésus, ce nom vient d'affermir cet homme que vous regardez et que vous connaissez et la foi qui vient de Jésus, a rendu à cet homme toute sa santé, en votre présence à tous".

 

Cette foi en Jésus ressuscité a un pouvoir, le pouvoir qui, dans l'Esprit Saint, se transmet à toutes celles et à tous ceux qui ont foi en ce nom et qui le proclament.

Et ça ne produit pas que des miracles individuels, à commencer par celui qui croit, ça produit des miracles dans l'Eglise.

 

Plus loin, dans les actes des Apôtres au chapitre 16, de la même façon que les pieds de cet homme se sont affermis, (ce mendiant de la ‘belle porte’), par la puissance des Apôtres, ce sont les pieds des Eglises elles-mêmes qui s'affermissent : les Eglises deviennent plus fortes dans la foi et croissent en nombre de jour en jour par la puissance des Apôtres.

 

Cela a des conséquences pour nous : d'abord, nous redire que cette généalogie qui nous raccroche à Jésus-Christ, elle est possible par la foi de ceux qui nous ont précédés, (alors, il y a eu les apôtres et puis tout ceux après et ça peut même passer par nos grand-mères et grand-pères, nos catéchistes), pas uniquement par ces deux personnages, mais par eux, d'abord.

Ensuite, cette foi, elle produit quelque chose, donc elle affermit nos pas et nous permet de nous redresser et ce redressement, (cette résurrection), est très important car une foi qui ne porte pas de fruits, c'est comme l'arbre dont on a parlé cette semaine, à la messe : on reconnaît un arbre à ses fruits.

Et troisièmement, une Eglise, une communauté, peut se raffermir à mesure de la foi de ses membres : si notre foi est morte, eh bien, cette Eglise-là s'affaisse grandement comme un soufflé.

 

Je vous propose de garder une scène en mémoire, celle de ces disciples de la transfiguration : ils sont contents, les disciples, ils ont vécu quelque chose, ça les touche, mais ils en restent là et ils sont un peu engourdis et il faut la parole du Maître pour qu'ils se redressent.

 

Alors, nous tous qui allons communier en cette fête de Saint-Pierre et Saint-Paul, nous reconnaissons combien leur foi est structurante pour nous, mais ne nous endormons pas, redressons-nous.

Que cette foi ait une efficacité pour nous-mêmes, mais surtout, qu'elle vienne innerver, alimenter notre Eglise.

Voilà et cette Eglise, elle n'est que ce que l'on donne de nous-mêmes.

 

Amen. 


Mercredi 28 juin : St Irénée

Gn 15, 1-12.17-18 : les promesses et l’Alliance divine.

Ps104

Mt 7, 15-20 : Les faux prophètes.

 

Dans le livre de la Genèse, plus tôt encore que l'histoire qui nous est rapportée d'Abraham, (de la promesse de sa fécondité) ; c'est au chapitre trois, après la faute commise dans le jardin des origines : il est promis à Adam qu'il va en être chassé et qu'il va devoir vivre de la force de son poignet.

Il ne pourra plus jouir des richesses et des fruits de l'arbre du jardin et de tout le jardin, dans lequel il était et il lui est dit qu'il va devoir cultiver la terre et en extraire sa pitance, au milieu des épines et des chardons.

On voit bien le poids de la faute qui frappe toute l'humanité de génération en génération et que Jésus, dans sa mort et sa résurrection, vient dépasser.

 

Il nous propose de restaurer en nous, cet amour du Créateur pour sa créature et de la créature pour son Créateur ; un amour des origines, qui est marqué en chacun d'entre nous, mais dont l'accès ou la voie, tout comme la porte étroite d'hier, semble égaré dans les broussailles de notre existence et de notre cœur.

Et le Christ est celui qui le restaure pour celles et ceux qui, effectivement, vont chercher à demeurer en lui.

 

Il est question de l'arbre bon qui donne de beaux fruits.

La question pour nous, c’est de savoir comment nous pouvons être ce bon arbre, comment nous pouvons donner de beaux fruits pour ne pas être jetés au feu : nous sommes invités à demeurer en lui.

 

Ce qu'a lu Xavier tout à l'heure, cette petite antienne, rapporte une autre affaire de fruits et de fécondité, dans l'Évangile, non pas en Matthieu mais cette fois-ci, chez Saint-Jean : ce n'est pas un arbre, c'est une vigne.

Le sarment qui est attaché à la vigne porte du fruit ; s'il ne demeure pas sur la vigne, il est tout sec et il bon à être jeté au feu.

La sentence paraît, dans l'histoire de la vigne, un peu moins douloureuse que celle dans l'Évangile de Matthieu, parce qu'il est toujours possible de décider de demeurer sur la vigne, si l'on veut porter du fruit.

Alors, nous sommes invités à décider de demeurer en Christ ; d'abord, parce que Père et Fils aiment et leur projet, c'est que nous aimions et nous les aimions, à notre tour.

 

Rappelons-nous cette grande prière que Jésus adresse, chez Saint-Jean, un peu avant d'être enlevé à ses disciples, au chapitre 17 : il s'adresse à son Père et il redit que tous ceux que le Père lui a donnés, il les a aimés, il les a accompagnés et sa joie serait que les disciples, ceux-là précisément, entrent dans sa joie.

 Et c'est quoi ?

À savoir qu'il aime le Père, que le Père aime le Fils et que ses disciples puissent demeurer dans cet amour-là, en aimant les commandements qu'il laisse et en les mettant en pratique.

Et l'amour de ses disciples pour ses commandements produit la joie véritable du Père et du Fils et des disciples.

 

Pour rentrer dans ces commandements, encore faut-il aimer Jésus et pour aimer Jésus encore faut-il le connaître.

Alors, on peut regarder dans l'Évangile ce que nous savons de Jésus et ce que nous ne connaissons pas encore de lui et regarder plus précisément quels sont ses fruits, en quoi il est bon arbre ?

En quoi Jésus est bon arbre qui donne de beaux fruits ?

Il y a des épisodes célèbres, d'autres qui sont plus cachés ; peut-être l’un ou l'autre nous attirerait, produirait en nous le désir de faire de Jésus notre Bien-Aimé, mais véritablement ; pas un amour furtif ou qui se cache, mais un amour qui dure et qui demeure.

 

Nous sommes invités à nous laisser séduire et ravir par ce Bien-Aimé.

 

Amen.


Mardi 27 juin : St Cyrille d’Alexandrie et 50 ans de vie religieuse de Sœur Yvette

Gn 13,2.5-18 : Séparation d’Abraham et de Lot.

Ps 14

Mt 7, 6.12-14 : ne pas profaner les choses saintes. Les deux voies.

 

Il y a de nombreuses portes dans l'Évangile et il est intéressant de regarder chaque fois qu'elles apparaissent, pour bien comprendre la signification de cette parole de Jésus, dans cet Évangile, au chapitre sept de Matthieu.

On arrive vers la fin du discours sur la montagne ; souvenez-vous que le point culminant de ce discours sur la montagne, c'est deux chapitres plus tôt : "je ne suis pas venu abolir la Loi mais je suis venu l'accomplir".

Et par une série de sentences, d'observations, Jésus montre comment il l'entend ou comment déjà, en lui-même, dans sa personne, il l'accomplit.

Alors, vous pressentez déjà, quel pourrait être la signification de la porte dont il est question.

 

Mais des portes,  en voici quelques-unes :

Il y a la porte de la chambre qu'il convient de refermer, pour être à l'intérieur de la chambre et prier son Père dans le secret, au chapitre six : "quand tu pries, enferme-toi dans ta chambre, ferme la porte".

Il y a aussi la porte de la ville : la veuve de Naïm sort avec un cortège et son fils mort, tandis que Jésus s'apprête à passer par la même porte et rentrer dans la ville ; ces portes qui sont faites pour être ouvertes ou fermées et quand elles sont fermées, les villes sont protégées.

C'est par ces portes que l'on passe pour pénétrer dans les villes.

Dans sa maison à Capharnaüm, Jésus, notamment au début de son ministère (quand il est encore à Capharnaüm et avant d'engager sa longue marche vers Jérusalem), à sa porte, s'agglutinent, s'amoncellent de nombreux possédés, malades ; toute la nuit et ils attendent pour pouvoir être guéris, libérés.

Ce mauvais riche, à sa porte, Lazare est assis et il attend de pouvoir recevoir quelque chose, en nourriture et souvenez-vous, tous les deux vont mourir, (c'est dans une histoire que Jésus raconte) et l'un va se retrouver dans le shéol, le mauvais riche et Lazare va se retrouver au Ciel.

Il y a des portes du Ciel, celles dont Jésus promet de donner les clefs à Pierre et ces portes-là ont un pouvoir plus important que celles de l'hadès, ce fameux shéol, ce lieu neutre, ce gouffre où les morts se retrouvent en attente mais dans l'Évangile de Luc, Jésus en fait un lieu de torture (rappelez-vous donc, le mauvais riche).

Et puis, il y a cette porte qu'est Jésus lui-même ; le berger, le berger des brebis.  

Il est la porte par laquelle les brebis (il connaît chacune par leur nom) passent pour entrer et sortir de l'enclos.

 

Alors, il y a des portes ouvertes et des portes fermées et il s'agit, là, d'une porte étroite, (celle dont il nous parle) ; porte étroite, chemin étroit ou porte large, chemin large.

 Mais, porte étroite, chemin étroit, il est difficile d’y circuler, mais pourtant, il faut y circuler.

C'est sans doute la même signification que ce chas d’aiguille par lequel il est plus facile à un chameau de passer qu'à un riche.

La porte dont il est question dans cet Évangile, n'est pas une porte fermée,

ce n'est pas une porte qui fait une limite entre le dehors et le dedans,

ce n'est pas une porte protectrice,

ce n'est pas une porte qui exclut mais c'est une porte qui resserre.

 

Et ça dit bien tout le sens de la fidélité à Christ.

Pour pouvoir parvenir au Royaume, (goûter de la vie promise), Jésus n'est pas là pour cliver, (il n'est pas clivant), il est là pour inviter chacun à renouveler leur fidélité à la Loi, à travers lui, en lui ; fidélité à sa propre personne et ces renouvellements de fidélité ne sont pas si aisés, ça n'est pas aussi simple que de se lever chaque matin ; renouveler sa fidélité à celui ou à celle qu'on aime, chaque jour n'est pas aussi simple que de se mettre en position verticale, chaque matin (et Dieu sait que parfois, ce n'est pas si facile de se réveiller, le matin).

 

 Alors, demandez à des vieux couples, pour ceux qui sont plus jeunes ou demandez à des vieilles sœurs, pour ceux qui sont vieux couples ; demandez à celles et ceux qui ont 50 ans, 60 ans de vie religieuse, (c'est un vrai trésor de les avoir parmi nous), pour savoir combien cette fidélité peut avoir son aridité mais sa fécondité également.

Et que, si le chemin est resserré, c'est pour mieux avancer peut-être et non pas se perdre sur les bords, comme ça arrive souvent, dans l'Évangile.

 

Accueillons donc ce discours de Jésus sur la montagne, comme une invitation à la vigilance, comme ça réapparaîtra à la fin de l'Évangile : comme d'autres qui restent derrière la porte, ces vierges, qui (certaines d'entre elles) n'ont pas mis d'huile dans leur lampe ; l'époux passe et les portes se referment.

 

Invitation à la fidélité et à la vigilance, à toujours réentendre chaque jour, cette parole que Jésus adresse à chacun d'entre nous : "viens  et suis- moi".

Amen.


Dimanche 25 juin : Fête de l’école Ste Thérèse

Jr 20, 10-13 : Confessions.

Ps 68

Rm 5, 12-15 : Adam et Jésus-Christ.

Mt 10, 26-33 : Parler ouvertement et sans crainte.

 

Qui peut me dire un jeu ou plusieurs que vous faites dans la cour de récréations, toute l'année, à l’école ?

Vas-y ma grande, levez la main, qui ?

Alors, un nom de jeux, vas-y : ‘Loup-épervier’, ça rappelle des choses aux grandes personnes, loup-épervier ? Non?

‘Le facteur n'est pas passé’, quel autre jeu, encore ?

Vas-y mon garçon : un jeu que vous faites à l'école ; ‘le loup touche-touche’, j'en apprends ; pour l'instant, au moins un que je ne connais pas.

Vas-y ma grande : ‘la marelle’ ; j'y ai pensé ce matin au petit déjeuner, figure-toi que ce qui est rigolo dans la marelle, c'est qu'il y a la terre et il y a le ciel : évidemment pour un curé, ça passe bien, le ciel.

Quel autre jeu encore ?

Tu veux dire quelque chose, mon garçon ? 

Dernier jeu : loup glace ;  oui, je vois à peu près le genre, dès qu'on se fait toucher, on ne bouge plus, c'est ça.

Ah! Vraiment, un ultime : cache-cache.

 

Quand on joue, on est content.

Est-ce que parfois ça arrive que les jeux dérapent un peu ? c'est-à-dire qu'on ait du mal à les finir ; on a du mal à rentrer en classe.

Ça arrive de se faire gronder quand les jeux ne se terminent pas bien ?

Jamais. Formidable !

Et quand on perd alors, est-ce que c'est rigolo ?

Pas de problème ? Ça se passe bien ?

Quand il y en a qui ne sont pas contents parce qu'ils ont perdu à un jeu ; qu'est-ce qu'on leur dit souvent ?

‘Ce n’est pas grave, ça n'est qu'un jeu !’

 ‘C'est pour s'amuser!’

Mais parfois, on ne peut pas s'amuser quand la cloche sonne, c'est le moment de rentrer dans les classes ou quand on se bagarre, on fait la tête parce qu'on a perdu à un jeu.

Par exemple : j'ai joué, j'ai gagné, ça tombe bien, tout le monde est content,  je vous propose un petit visage souriant.

- J'ai joué, j'ai perdu ; ce n'est pas grave,  ça n'est qu'un jeu : petit visage souriant.

- Mais, j'ai joué, j'ai perdu et je ne suis pas content, je fais la tête ; ça ce n'est pas bien

- et j'ai joué, j'ai perdu, je ne suis pas content et je me bagarre avec celui qui a gagné; ce n'est pas bien non plus.

Ça n'est qu'un jeu !

 

Alors, autres exemples : quelle est la plus grosse bêtise qui a été vécue en classe, cette année ?  

On va demander aux parents de partir, peut-être, je crois.

‘Prendre les jouets dans la classe de la maîtresse’ : oh la grosse bêtise !

‘Discuter quand le maître parle’ : à mon avis c'est une grande classe non ? CM 2?

Autre grosse bêtise : Sacha a mordu Agathe, grosse bêtise.

Alors, quand ça arrive, que disent les grandes personnes ?

"Tu as fait une bêtise, ce n'est pas bien; ce n'est pas un jeu, arrête de jouer !"

 Souvent les grandes personnes disent cela quand elles ne sont pas contentes et quand on n'a pas obéi, "arrête de jouer, ce n'est pas un jeu".

Alors, Sacha qui a mordu Agathe ; ça, ce n'est pas bien non plus, ni pour Sacha, ni pour Agathe.

Les jouets qui ont été pris, ce n'est pas bien.

 

Je vais vous donner quelques exemples et vous allez me dire si c'est : visage qui sourit ou visage qui ne sourit pas.

Manger le Nutella de maître Béranger sans le lui demander, c'est bien ou ce n'est pas bien ?

Ce n'est pas bien du tout, c'est son Nutella, à lui.

Jouer à la marelle dans la cour, c'est bien ou ce n'est pas bien ? C'est bien.

Jouer à la marelle dans la cantine, c'est bien ou ce n'est pas bien ? Ce n'est pas bien et William ne va pas être content du tout.

S’amuser avec l'eau dehors, quand il fait chaud c'est bien ou ce n'est pas bien ? (Je regarde la directrice du coin de l'œil) c'est bien ou ce n'est pas bien ? C'est bien.

S’amuser avec l'eau dans la classe ? Ce n'est pas bien.

 

On va parler de Jésus, un petit peu : quand je dérape un peu, quand je confonds un jeu avec un moment où on ne joue pas, eh bien ! je me fais gronder.

Et souvent, quand on se fait gronder, c'est comment ?

C'est un gros orage, le ciel est orageux.

Jésus lui, il est allé à l'école ; l'Évangile raconte ce que quand il était petit, il était avec son père et sa mère ; Joseph et Marie ; le papa était charpentier ; Marie, je suppose qu'elle était avec Jésus.

Et l'Évangile dit deux fois : "il grandit en sagesse et en taille" ; sagesse, il devait être sage Jésus !

Peut-être qu'il jouait à la marelle, peut-être qu'il jouait au loup glacé, je ne sais pas.

Mais il devait faire la différence entre jouer et être sérieux: ça, il savait faire.

 

Et Jésus, il est aussi un peu, maître d'école (je regarde les maîtres et maîtresses) parce qu'il dit une fois dans l'Évangile : "venez à mon école, vous tous qui ployez sous le poids du fardeau et je vous procurerai le repos" ; alors, il était un peu maître d'école.

 

Jésus, il a un côté super : c'est qu'il nous aide à faire la différence entre jouer, s'amuser et ne pas dépasser les limites ; mais il ne le fait jamais comme ça, jamais comme ça (visage en colère) ; il le fait comme ça (visage qui sourit).

 

Qu’est-ce que vous voyez, là ?

Qui est-ce qui peut décrire ?

Tu peux me dire ce que tu vois ?

On a l’impression qu’il ouvre les rideaux.

Il tient deux personnes dans la main.

On pourrait même dire que deux grandes personnes le tiennent, d'ailleurs on n'est pas sûr que ce soit lui, c'est un petit garçon ; deux grandes personnes  le tiennent sur la route.

Et Jésus, il est comme ça avec chacun d'entre nous, il nous fait avancer sur notre chemin, la vie et nous fait grandir et c'est vrai pour les petits comme vous et c'est vrai pour les grands, c'est vrai pour les parents, c'est vrai pour les instituteurs, pour les institutrices.

Jésus nous fait grandir et il nous apprend ce qui est ‘jouer’ et ce qui est ‘être sérieux’.

Il nous dit par trois fois dans l'Évangile d'aujourd'hui : N’ayez pas peur, ne craignez rien, ne craignez pas les éclairs et la colère, ne craignez pas l'orage, moi je vous accompagne sur votre route, écoutez-moi, venez à mon école, venez, je suis doux et humble de cœur, pour que toujours, dans votre vie et dans celle des autres, vous soyez comme ça (visage qui sourit), souriants.

Si vous apprenez ça à l'école, les enfants, tant mieux ; si vos parents vous l'apprennent, tant mieux (à avoir dans votre vie confiance et sourire).

Amen.


Samedi 24 juin : Nativité de St Jean Baptiste

Is 49, 1-6 : Deuxième chant du Serviteur.

Ps 138

Ac 13, 22-26 : La prédication de Paul devant les juifs.

Lc 1, 57-66.80 : Naissance de Jean-Baptiste.

 

La nativité de Saint Jean-Baptiste est l’une des rares fêtes dans l'Eglise qui comporte une messe, la veille au soir (comme par exemple, la Pentecôte) et ça nous permet d'accueillir toute la richesse de la mission de Jean-Baptiste dans l'histoire du Salut.

Jean-Baptiste a un rôle tout à fait charnière et comme toutes les charnières, on a du mal à le situer.

Son père, Zacharie est clairement un homme de la Loi, un homme du temple, un homme de cette Alliance ancienne, un homme des prophètes ; d'abord, il est prêtre.

Sa mère, vous savez que sa mère est de la parenté de Jésus puisque Elisabeth est nommée ‘la cousine de Marie’.

 

Mais Jean-Baptiste est désigné par Jésus lui-même plus tard, comme celui qui est grand et c'est celui qui a annoncé, dans tous les Évangiles, la venue du Messie et devant lequel, il se sentait justement petit, même pas digne de délier la courroie de ses sandales.

 

Alors, Jean-Baptiste est-il ou n'est-il pas de ce temps de la Loi et des prophètes ou est-il ou n'est-il pas du temps de Jésus lui-même, (ce temps de l'Alliance renouvelée) ?

 Et Jean-Baptiste ne nous aiderait-il pas à passer à ce troisième temps, celui dans lequel nous sommes depuis la Pentecôte (après l'Ascension de Jésus), le temps de l'Esprit et de l'Eglise ?

 Alors, dans l'Évangile de Luc, Jésus dit de Jean-Baptiste (c'est juste après quelques enseignements sur l'argent et juste avant cette parabole, propre à Luc, de ‘Lazare et du mauvais riche’) ; il va dire : la Loi et les prophètes vont jusqu'à Jean ; depuis lors, la bonne nouvelle du Royaume de Dieu est annoncée.

Et, en d'autres fois, il va reprocher aux pharisiens et aux scribes et à tous ceux qui l'écoutent de peut-être, ne pas avoir fait grand cas de Jean-Baptiste, alors que pourtant, ils sont allés l'écouter, ils sont allés se faire baptiser par lui, dans les eaux du Jourdain.

 

Je pense que Jean-Baptiste et en tout cas son père (et nous avons cela dans l'Évangile d’aujourd'hui), nous aident vraiment à tourner des pages, à la fois dans la vie de notre Eglise et dans notre vie personnelle.

Je ne sais pas si ça vous est déjà arrivé d'avoir du mal à tourner les pages d'un livre, du journal, le matin, avec votre café et des croissants, les pages se collent, (pareil pour la Bible, notre missel quotidien) ; on veut tourner les pages et puis on saute 10 pages d'un coup, on a du mal à les séparer et dans notre vie c'est parfois ainsi ; déjà on a du mal à faire le geste : tourner une page et passer à la suivante, mais dès qu'on tourne une page pour passer à la suivante, ça s'emballe, on est un peu perdu, parce qu’on a perdu la ligne, le fil.

Et ce n'est pas rien parce que le passage de l'ancienne Alliance à la nouvelle Alliance, le passage que nous fait faire Jésus, celui qui renouvelle à l'intérieur même de l'Alliance unique de Dieu avec les hommes, qui réinsuffle de l'amour, ce lien vital qui est né dès la création, ce pacte même; eh bien nous, (et tout homme et toute femme avant nous et malheureusement encore après nous), nous la dévitalisons, nous la fixons, nous en gardons la coquille et nous perdons la substance, nous sommes attachés à la lettre, nous en perdons l'esprit.

 

Zacharie, il est comme chacun d'entre nous, il est prêtre dans ce temple, un homme de son temps ; ne nous y trompons pas, parce que Zacharie et Elisabeth sont désignés comme des hommes et des femmes justes, (justes, ce ne sont pas des affreux), ils sont aussi justes qu'Abraham et Sarah, justes comme Elkana, Anne, les parents de Samuel ; ils sont justes, très justes.

Mais voilà qu'il va être l'instrument, Zacharie, à la naissance de son fils, de cette promesse que l'Alliance va se revitaliser, on va retrouver l'esprit, que l'amour va repasser à l'intérieur, comme toute alliance de l'homme et de la femme : vous savez que dans chaque mariage à l'Eglise, les prières qui sont dites, les bénédictions redisent sans cesse que ces unions sont le signe de l'Alliance du Christ et de son Eglise et que cette Alliance-là, elle trouve une image dans l'alliance de l'homme et de la femme mais aussi dans l'acte créateur de Dieu lui-même, cet amour qui, sans lequel une alliance est comme morte : si cet amour part, on peut avoir une alliance au doigt, on peut se dire éventuellement ‘je t'aime’ (encore que ça peut paraître hypocrite, s’il n’y a plus d'amour), mais l'union formée devient vite quelque chose de très dur à vivre.

 

Cette Alliance qui est revitalisée par Jésus-Christ, c'est Jean-Baptiste qui va en être, nous disons le précurseur, celui qui va l'annoncer ; mais tout ceci trouve comme une sorte d'acte prémonitoire, d'anticipation dans la vie même de Zacharie : on veut appeler l'enfant comme son père, il est l'homme du temple, prêtre, il ne s'attendait plus tellement à avoir un enfant, sa femme est stérile, âgée et voici que, comme pour Abraham et Sarah, comme pour Elkana et Anne, l’enfant arrive, c'est la grosse surprise et cette question du nom, ‘ne pas prendre le nom du père mais en prendre un autre’, est déjà rupture et préparation de cette Alliance nouvelle qui vient redonner vie à cette Alliance ancienne.

Quand il va dire : "Jean est son nom", il va retrouver la parole.  

 

Un prophète qui est muet et ça arrive (notamment Daniel, dans l'Ancien Testament) ; et un prophète muet, c'est un prophète qui a été dépositaire d'une prophétie immense : il en perd la voix et Zacharie a été dépositaire de cette prophétie ; et le simple fait de donner un autre nom à son fils est déjà le top départ de tout ce qui va produire la venue du Messie.

 

Vous n'êtes pas sans savoir que, à partir de maintenant, progressivement, les jours vont raccourcir (ouaih ! super !) et que nous sommes très dépendants, très dépendants des phénomènes cosmiques : nous sommes incarnés, comme Dieu lui-même s'est incarné ; et avec cette fête de la nativité, bien que toujours dans le temps de l'Esprit et pour toujours, depuis la Pentecôte, nous inaugurons un nouveau rapport à nous-mêmes, aux autres et au temps, pour mieux rester fidèles au Seigneur ; parce que, des journées qui raccourcissent, des existences moins exposées, la tendance à se recroqueviller comme pour se protéger, ça peut avoir du bon comme quand on conserve du bon vin dans une cave, mais ça peut aussi se transformer en pourriture.

Préparons-nous à celui qui doit naître, renaître et toujours renaître en nous.

Ça, ça va être la venue de la lumière à Noël.

 

Jean-Baptiste, en permanence, nous le désigne et Zacharie est comme cette vieille cave qui s'est ouverte à la lumière du soleil et qui laisse s'envoler quelques impuretés.

 

Que ce soit ainsi pour nous, dans nos vies, chaque jour, pas simplement à l'approche de l'hiver et même à chaque instant, notamment, aujourd'hui.

 

Amen. 


Vendredi 23 juin : le Sacré-Cœur de Jésus

Dt 7, 6-11 : L’élection et la faveur divine.

Ps 102

Mt 11, 25-30 : L’Evangile révélé aux tout-petits. Jésus, Maître au fardeau léger.

 

Nous avons peut-être en mémoire les représentations du Sacré-Cœur de Jésus et forcément, les représentations assez contemporaines (XIXe siècle beaucoup, d'ailleurs) qui, en fait, parce que l'on n’avait pas inventé l'image animée, montrent une statue, une peinture, un vitrail où Jésus est avec son cœur sanguinolent.

On a l'impression que l'on peut limiter ce don que Jésus fait de lui-même à un instant, comme une statue qui est toute fixe, alors que le don que Jésus fait de lui-même, son amour, c'est une affaire de tout le temps, c'est permanent, c’est permanent.

 Quand on est en train de faire mémoire du Coeur de Jésus, on ne fait pas mémoire d'un moment, c’est une action absolument permanente comme l'eucharistie : l'eucharistie ne fait pas mémoire d'une fois, un jour, comme ça mais c'est le renouvellement permanent de ce don que Dieu fait de lui-même en Jésus, dans l'Esprit Saint, à chacun de nous.

 

Ce texte de l'Évangile est le seul de tout de l'Evangile où Jésus parle de son cœur : "prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples car je suis doux et humble de cœur".

Et le texte original ne dit pas "devenez mes disciples" mais "apprenez de moi, parce que, car je suis doux, parce que…apprenez de moi parce que je suis doux et humble de cœur".

 

Pour entrer dans ce don que Jésus fait de lui-même, on est donc invité à le regarder,  à nous identifier à lui et à nous laisser rejoindre et peut-être que nous trouverons notre place à ses côtés, comme tant d'hommes et de femmes de l'Évangile, dans l'Évangile et après l'Évangile, ont pris leur place à ses côtés.

 

Peut-être que notre misère, à un moment donné, nous oserons l'offrir à Jésus, mais dans sa totalité, pas un petit bout ; l'offrir totalement à la mesure de l'amour que lui nous offre en retour, mais lui, totalement.

 

Alors, je ne sais pas si ça vous est déjà arrivé, mais je me connais moi-même et je connais plusieurs personnes pour qui ça arrive : l'amour n'est pas une chose aisée et si nous avons les yeux ouverts, nous nous rendons compte qu'il y a plus souvent des agacements, des insatisfactions, (des tas de petits soucis de tout ordre), des nostalgies, des impatiences qui nous traversent (alors , au départ, c'est souvent à cause des autres ; à un moment donné, c'est à cause de nous : ‘ah, la faute à l'âge qui vient, etc.’) mais tout bien regardé, tout cela n'est pas présent chez Jésus pourtant, il était complètement et Dieu et homme.

Nous savons qu'il était (et nous le confessons comme tel) sans péché.

 

Notre misère, notre péché, ce qui vient diviser notre cœur, le Mâlin produit en nous ces agacements, ces insatisfactions, ces ‘c'était mieux avant, et on arrivera jamais à faire mieux après etc. etc’.

 

Contemplant Jésus, nous voyons que chez lui, c'est inexistant ; osons, dans cette contemplation, déposer sur lui, cela ; déposer sur lui, cela : c'est notre fardeau, il le porte avec nous.

Alors, son amour pourra porter du fruit,  être efficace en nous-mêmes.

Il est important, dans ces cas-là, que nous accompagnons notre attachement à Jésus de quelques petits outils :

    d'abord il y a notre propre pratique de la foi, qui passe par la puissance des sacrements avec la prière,

    il y a l'accompagnement (c'est un deuxième outil important, sur lequel il est nécessaire de s'appuyer : un accompagnement de conseil et de discernement par un frère chrétien, une sœur chrétienne, formés, prêtre, pour nous aider, pour que nous voyons notre fardeau, non pas pour en être écrasés mais pour s'en libérer et le déposer sur les épaules du Christ.

    Le troisième outil (alors tout ça, je n'instrumentalise pas ; un outil, vous mettrez d'autres mots si vous voulez), le troisième outil c'est la charité, c'est-à-dire ce que je vais donner concrètement de moi-même à des frères, à des sœurs jusqu'à ce que ça me coûte un peu, quand même.

 

Et alors, tout ça ensemble, aidera à vivre dans l'amour les relations qui font notre quotidien ; mais Jésus, son cœur, lui qui est tout tourné vers le Père et qui est sans péché et qui, avec le Père, nous donne l'Esprit Saint, peut produire ça, en nous : notre pratique, notre accompagnement et puis la pratique de la charité.

 

Reconnaissons que nous faisons partie de ces petits-là : notre misère, il la porte et il nous en libère.

 

Amen.


Jeudi 22 juin : St Paulin de Nole

2Co 11, 1-11 : Paul se voit contraint de faire son propre éloge.

Ps 110

Mt 6, 7-15 : La prière du Notre Père.

 

Voilà cette prière du Notre Père qui est sans doute plus développée dans cet Évangile selon Matthieu que chez Luc, vous savez, nous l'avons lue hier à la messe, cette prière est insérée à l'intérieur de ces trois préceptes : aumône, prière et jeûne.

 

Dans la tradition de l'Eglise, cette prière on l'appelle : l'oraison dominicale ou la prière du Seigneur et pour les Pères de l'Eglise, cette prière récapitule tout.

 Et si on dit que Jésus est celui qui récapitule ou qui accomplit tout, (toute la Loi, tous les prophètes, toute l'Ecriture : il est lui-même la Parole) ; eh bien, on va dire que la prière du Notre Père récapitule tout Jésus et pas simplement tout Jésus dans notre tête ou tout Jésus comme une image, mais tout Jésus dans sa relation avec le Père.

 

Il nous faut apprendre à demander à Dieu et c'est comme cela qu'il introduit la prière du Notre Père : il nous demande de ne pas rabâcher comme des païens.

Et pour Thomas d'Aquin, cette prière du Notre Père a un avantage : elle nous enseigne à demander, elle nous apprend la posture juste devant notre Père du Ciel et elle vient informer notre affectivité, elle vient créer les dispositions nécessaires en nous-mêmes pour que les mots qui vont jaillir vers le Père soient les mots qu'il attend ou qu'il peut entendre et auxquels  il peut répondre.

Cette prière du Notre Père, certainement, qu'elle a en premier lieu, dans l'Esprit Saint, (cet Esprit dont Paul parle dans sa lettre aux Galates qui vient en nous dire et faire susciter ce mot, jaillir ce mot : Abba, Père), cette prière vient ajuster l'image qu'on peut avoir de Dieu et du Père (et tout le temps), car nous sommes tous profondément attachés à une image très particulière de la paternité, de la maternité, par l'expérience que nous en avons faite.

Et on a beau se dire : "oui mais Dieu n'est pas pareil", c'est une conversion permanente ; sinon, effectivement, notre Dieu finit par être un petit peu notre nombril, c'est-à-dire que l'on se prie soi-même ; cette prière à cet intérêt de convertir l'image que nous avons de Dieu.

 

Ce Père, d'abord il est "notre", (ce n'est pas moi tout seul), même si Jésus, quand il parle, vise un enseignement personnel ; il donne des mots pour une prière qui va être, par excellence, communautaire et qui nous rappelle que ce Dieu-là n'est pas le Dieu d'un seul mais le Dieu de tous et qui, en Jésus-Christ, sont des frères et des sœurs, tous fils et filles.

Et s'il est dans les Cieux, c'est bien pour nous rappeler que ce Père, plus  que jamais, a besoin d'être compris pour ce qu'il est et pas pour ce que l'on voudrait qu'il soit, mais il nous tire et nous fait grandir, plus grands que notre propre condition mortelle de pécheurs.

 

Alors, nous avons dans cette prière, 7 demandes : trois qui s'adressent à cette gloire même de Dieu :

            que ton nom soit sanctifié,

            que ton règne vienne

            et que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel ;

et quatre autres demandes, qui en fait, demandent au Seigneur de faire descendre sa grâce dans notre misère ou bien notre misère, nous la remettons entre ses mains gracieuses ; notre misère, notre condition d'hommes et de femmes qui avons faim, qui sommes tentés et qui avons du mal à pardonner.

 

Lorsque nous allons dire cette prière tout à l'heure, dans cette eucharistie, rappelons-nous qu'elle va précéder de peu, la communion.

Nous lui avons dit ou nous lui disons, dans cette messe, combien il est grand, combien il est tout Autre, mais en même temps, il vient se faire nourriture, il vient se faire tout proche.

Demandons-lui la grâce de toujours nous laisser informer, transformer par son Esprit Saint et d'être toujours davantage fils et filles de Dieu.

 

Amen.


Mercredi 21 juin : St Louis de Gonzague

2Co 9, 6-11 : Bienfaits qui résulteront de la collecte.

Ps 111

Mt 6, 1-6.16-18 : Faire l’aumône en secret. Prier en secret. Jeûner en secret.

 

Nous poursuivons cette lecture de ce discours de Jésus sur la montagne dans l'Évangile de Matthieu.

Nous reconnaissons sans doute, cet extrait (un peu tronqué, d'ailleurs) qui est lu le jour du mercredi des Cendres.

 

On voit un trépied apparaître, (ce fameux trépied qui est assez familier de Jésus) :

le prochain,

Dieu

et nous-mêmes ;

associant à chacune des pattes de ce trépied, un impératif :

le prochain, nous allons avoir l'aumône ;

Dieu, nous allons avoir la prière ;

et pour ce qui est soi-même, nous allons avoir le jeûne.

 

Et puis Jésus, dans le prochain, s'adresse, (quand il s'agit de l'aumône), à quelqu'un seul : l'aumône est personnelle ; tandis que pour la prière et pour le jeûne, il est question d’une réalité plus collective, plus communautaire.

Dans tous les cas, Jésus, quand il parle, s'adresse à une personne : "toi, tu".

 

 Je me suis intéressé au mot qui revient souvent, le mot "caché", "secret" ;

"enferme-toi dans ta chambre"

"ton Père qui est dans le secret sait ce dont tu as besoin"

"il voit dans le secret"

"il voit dans le secret"

"ton Père voit au plus secret, te le rendra".

 

Alors, "secret","caché", apparaît plusieurs fois dans l'Évangile.

 Jésus, par exemple, va se cacher un jour, où il va monter pour la fête des Tentes, à Jérusalem.

Ses frères voudraient qu'il se manifeste par ses œuvres, notamment, en faisant un détour par la Judée.

Il s'y refuse : le moment n'est pas encore venu.

Il va à la fête des Tentes et, bien que, voulant se cacher (il ne se cachera pas tellement à l'intérieur du temple, il va enseigner), sa volonté de dissimuler quelque peu son origine, (tout en enseignant dans le temple), va quand même faire naître une intrigue chez les pharisiens et ils vont commencer à se douter de qui il vient : du Père du Ciel.

Cela va mal se passer pour lui et les pharisiens (les juifs, comme c'est dit dans l'Évangile de Jean) vont vouloir le lapider ; et il va se cacher à nouveau, il va se dérober.

Ici "caché" a le sens de la protection : se protéger du danger et en même temps, faire un peu attendre ; le moment n'est pas encore venu.

Ça fait penser à une parabole de cet homme qui part en voyage et distribue des talents et le troisième serviteur n'en reçoit qu'un seul ; il va cacher son talent et le rendre intact au retour du Maître : il a caché son talent parce qu'il avait peur, lui aussi.

Mais, tout secret ne signifie pas avoir peur, toute action de cacher ne signifie pas nécessairement, vouloir se protéger.

  

Il y a d'autres paraboles dans l'Évangile, où il est question du "secret" et du "caché" mais ce sont des paraboles qui mettent davantage en avant, le temps qu'il faut, le temps qu'il faut pour que ça fasse son chemin, pour que ça mûrisse, ça grandisse, ça se manifeste, ça se révèle ; alors, un peu à l'image du grain de blé, évidemment.

Il n'est pas tellement question qu'il soit caché, mais enfin, quand on dit qu'il tombe en terre, on devine qu'il meurt dans la terre ; mais il y a cette parabole de cette femme qui va cacher du levain dans la pâte ;

il va y avoir cette autre parabole de cet homme qui a trouvé un trésor dans son champ ; il va le cacher, le temps qu'il faut pour lui pour acheter ce champ et puis, une fois que ce temps est terminé, il va pouvoir l'acheter ce champ et bénéficier de son trésor.

Et puis, il y a cet Évangile, qui est caché aux sages et aux savants et que le Père du Ciel a révélé aux tout-petits.

Je crois que l'on peut dire que dans ce cas-là, ce qui est caché n'est pas protégé, ni même perdu, ni même caché par peur, mais caché pour faire grandir, patienter peut-être, susciter le désir.

 

Et puis, il y a une troisième notion du " caché", dans l'Évangile, dans la bouche de Jésus c'est le "caché" qui ne doit pas l'être : on ne met pas une lumière sous un boisseau (elle est faite pour éclairer), une ville au sommet d'une montagne est faite pour être vue, inutile de la cacher.

 

Alors, ces trois perspectives nous aident, peut-être, à comprendre cette intériorité dont Jésus parle, quand il nous parle du secret de notre cœur ou de notre chambre, pour mieux faire grandir le désir de l'amour du Père et du Fils dans l'Esprit dans notre cœur, pour mieux se préparer à ce que se manifeste ce trésor que nous avons dans notre cœur : cette empreinte du Père et du Fils et de l'Esprit.

Et puis, ce n'est pas parce que, au plus profond du cœur nous avons ce trésor, que nous devons avoir peur de ce trésor ou de le perdre.

 

Mais n'ayons crainte, plus ce trésor sera bien caché dans notre cœur (et bien conscient !), plus il produira de fruit, éclairera et se révélera.

Alors, n'ayons pas peur de cette marque de fabrique du Père dans nos cœurs, laissons-nous entraîner par cette croissance qu'il nous propose et préparons-nous à être manifestés à nos frères et sœurs.

 

Amen.


Lundi 19 juin

2Co 6, 1-10 : L’exercice du ministère apostolique

Ps 97

Mt 5, 38-42 : La loi du Talion

 

Nous avançons dans ce discours sur la montagne, progressivement ; plus nous arriverons vers le chapitre sept, plus apparaîtra à la fois une centralité dans le cœur du disciple et en même temps cette orientation vers le Père du Ciel.

 

Il n'est pas souhaitable de craindre et Jésus invite ses disciples à la confiance puisque de toutes les façons, le Père du Ciel sait de quoi nous avons besoin, nous protège et nous avons en nous-mêmes, notre âme, bien plus précieuse que notre corps.

Nous n'avons pas à craindre ceux qui peuvent tuer notre corps mais plutôt ceux qui peuvent tuer notre âme (nous a-t-il dit) donc, à la fois ce trésor très précieux qui est au fond de nous-mêmes et en même temps celui qui est au sommet et dans le ciel est celui-là seul de qui nous recevons notre confiance et que nous devons craindre : le Père.

Alors, c'est vraiment à la confiance qu'il nous exhorte devant l'adversité.

Néanmoins, l'adversité peut survenir, bien entendu, et parfois il faut la fuir ; il va donner comme consigne à ses disciples lorsqu'il les envoie en mission il va leur dire : si jamais on vous chasse, eh bien, allez dans une autre ville ; et si on vous chasse encore, allez encore dans une autre ville.

Mais par ailleurs, tous ceux qui sont promis à la persécution, il est vrai et  dès le début des Béatitudes, n’ont rien à craindre, surtout si c'est en son nom.

 

Dans ce texte, je ne résiste pas à faire quelques comparaisons avec le visage même de celui qui va être crucifié, au moment de son jugement.

Il ne va pas être souffleté mais il va être frappé à la tête plusieurs fois, on va lui remettre ce grand manteau ; cette évocation de la gifle sur la joue comme cette évocation du manteau dans l'Évangile, que nous venons d'entendre, m'évoque cela.

Au plus profond de sa déréliction, sa fidélité n'a pas failli, demeure pour nous un mystère : la façon dont elle a été vivante dans le fond de son cœur lorsqu'il était sur la croix : « mon Dieu mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? »

Mais puisqu'il est ressuscité, nous savons que cette fidélité du Père envers son fils a été effectivement solide jusqu'au bout.

 

Alors, n'ayons pas de crainte pour nous-mêmes.

 

Amen.


Vendredi 16 juin

2Co 4, 7-15 : Tribulations et espérances du ministère.

Ps 115

Mt 5, 27-32 : La justice nouvelle supérieure à l’ancienne.

 

Aujourd'hui, Jésus nous invite à parler de l'œil ; c'était un spécialiste des yeux, il en parle beaucoup.

Il ne fait pas qu'en parler d'ailleurs car il va jusqu'à guérir des aveugles : Jésus est spécialiste du regard et il a des mots parfois assez durs sur les yeux, qui ne donnent pas tellement envie de les ouvrir, le matin.

Il va dire que l’œil est la lampe du corps et que, si jamais cet œil est dans la ténèbre, alors le corps tout entier va l'être ; il vaut mieux qu'il soit dans la lumière.

Et puis, il va jusqu'à préconiser parfois, de l'arracher car cet œil peut être source de bien de convoitises et de troubles.

On a aussi cet épisode célèbre de cet œil qui peut susciter jalousie ou bien déformation de la réalité jusqu'à l'envie : c'est le fameux épisode de la paille et de la poutre (on est toujours d'ailleurs, dans le discours sur la montagne) ; un épisode, c’est une sentence de Jésus.

 

Mais Jésus va plus loin, parce qu'il pourrait nous laisser penser que l'œil est le seul responsable de ces pensées troubles, de ces convoitises et de ces jalousies ; il creuse un petit peu plus profond et il dit dans  un autre endroit de l'Évangile, que c'est le cœur : c'est du cœur de l'homme que sortent un certain nombre de débauches, jalousies, perversités, conduites tordues et œil mauvais ou bien œil jaloux.

Au fond, on pourrait presque dire que l'œil jaloux est presque comme un symptôme qui trouverait sa source quelque part dans le cœur.

Mais peut-être que le cœur nous est inaccessible ; alors, celui-là seul qui pourrait y aller, celui-là seul qui pourrait y aller pour le soigner et le guérir, c'est Jésus lui-même et Jésus peut parvenir jusqu'à nous par nos oreilles ; il peut parvenir jusqu'à nous par notre bouche (notamment dans cette eucharistie), mais il peut aussi parvenir jusqu'à notre cœur par nos yeux, notre volonté (déjà, pour commencer) de le regarder, de le regarder.

 

Je vous propose une autre parabole de l'Évangile, un petit peu plus loin, chez Matthieu, ce sont les ouvriers de la dernière heure.

Un homme, qui est propriétaire d'une vigne, va sortir toutes les 3 heures à partir du petit matin pour embaucher des ouvriers à sa vigne ; (vous connaissez cette parabole) je vous rappelle la fin : à la fin, le patron décide de payer tout le monde de la même façon.

Alors, les premiers ont l'impression d'être lésés : ‘eh ! moi j'ai travaillé toute la journée!’

Et le patron va s'en défendre : pourquoi réagis-tu ainsi, n'étais-tu pas d'accord avec moi pour ce salaire ? ne puis-je faire ce que je veux de mon bien ? ton œil est-il mauvais parce que je suis bon?

Alors, à œil mauvais, lumière puisque Jésus guérit les aveugles ; Jésus rapporte la vue et la lumière à ceux qui sont dans les ténèbres : « ceux qui sont dans les ténèbres ont vu se lever une grande lumière ». (C'est un texte que nous lisons, un texte d'Isaïe que nous lisons à l'époque de Noël).

Et puisque Jésus est le Maître des yeux, guérit et met la lumière qui pénètre pour envahir notre cœur, que nos yeux mauvais, peut-être d'ouvriers de la première heure, nous, habitués  des communautés chrétiennes, des rassemblements eucharistiques, nous qui peut-être pouvons penser être des justes devant le Seigneur ; ne croyons pas non plus que nous sommes les premiers.

 

Alors, au lieu de regarder notre mérite, (Paul aime bien dire qu'il n'est pas jugé sur le mérite), eh bien regardons plutôt le Christ ; continuons à le regarder, parce que c'était la raison pour laquelle nous nous sommes mis en route par notre baptême, jadis, chacun.

Continuons à le regarder et alors, du coup, nos yeux ne s'enfermeront pas dans la jalousie, cupidité, etc. etc.

J'ai admirablement évité la question de l'adultère !

 

Amen.


Mercredi 14 juin :

2Co 3, 4-11 : Le ministère apostolique.

Ps 98

Mt 5, 17-19 : Jésus et les deux Torah.

 

"Amen, je vous le dis" ; c'est la première fois que Jésus  dit cela dans l'Évangile, il va le prononcer plus de 110 fois dans les 4 Evangiles ; "Amen", ou "Amen, amen", souvent accompagné par" je vous le dis" ; parfois c'est traduit par "en vérité, en vérité".

Le mot utilisé "amen", vient de l'hébreu, qui peut donc effectivement traduire l'idée de vérité, de solidité, de stabilité, de foi ; la racine elle-même de ce mot veut dire : foi.

 

Cette autorité du Maître qui est manifestée à travers ce mot "amen, je vous le dis" est peut-être la touche la plus personnelle de Jésus, que l'on retrouve à travers tous ces textes.

On peut imaginer, l'intonation, et la touche vraiment personnelle, la marque de fabrique de Jésus, à travers ce mot.

 

 Il va donc le dire pour la première fois à cet endroit, Jésus qui vient comme déverrouiller ou s'autoriser à dire cela et il le dit d'une façon particulière, à un moment où il réaffirme la supériorité de la loi de Moïse ; mais en même temps, il est celui qui, le plus, dans les versets et chapitres qui vont suivre, va accomplir, (comme il dit, alors qu'il va au fond, peut-être dans le texte même, rajouter ou modifier), mais il va accomplir cette loi de Moïse : "On vous a dit… mais moi je vous dis" ; "vous savez ou vous pratiquez… moi je vous dis" ; "Amen, amen...moi je vous dis" : l'autorité du Maître, sa singularité, sa force.

 

Celui qui étudie Jésus-Christ, qui cherche à le retrouver et à l'aimer, chaque fois qu'il trouve dans ces pages ce "amen, je vous dis" et qu’il médite ce qui suit immédiatement ces deux mots, alors sans doute, il pourra là, communier au plus près de Jésus lui-même.

 

J'ai été attiré par un passage de l'Evangile où il est question de ce "amen, je vous dis", mais bien plus tardif : c'est juste après l'expulsion des vendeurs du temple et cette expulsion  dans Matthieu, Marc et Luc a lieu après que Jésus soit entré dans Jérusalem sous les acclamations.

Jésus maudit un figuier et les disciples n'ont pas vu la malédiction du figuier mais ils en ont vu le résultat : le figuier est desséché.

Alors, ils s'étonnent : "Maître, comment se fait-il que ce figuier, si rapidement soit desséché ?"

Amen, je vous dis, si jamais vous hésitez et si vous ne croyez pas, (mais, effectivement le figuier, vous ne pouvez pas comprendre), mais si vous n'avez pas d'hésitation en vous et si vous croyez, vous pouvez obtenir la même chose et même une chose plus grande encore : si vous commandiez à une montagne de se jeter dans la mer ou un arbre, il le ferait.

 

Si le mot "amen" signifie quelque chose de l'ordre de la foi et de la confiance dans le Maître, le plus grand danger qui puisse nous guetter, c'est que nous perdions cette confiance dans le Maître ; alors ses propres mots perdent leur valeur et ils se dessèchent comme ce figuier.

À nous alors, de laisser l'Esprit raviver notre confiance dans les mots du Maître ; alors nous pourrons communier à sa puissance.

 

Le dernier "amen, je vous dis" a été adressé à Simon Pierre et il a vite vu les effets de ce "amen je te dis" ; alors que Pierre voulait suivre Jésus partout : "amen, je te le dis, avant que le coq ne chante trois fois, tu ne m'auras renié".  

C'est une invitation à laisser la puissance des mots de Jésus, son autorité dans sa façon de faire du neuf dans nos vies et dans la vie de l'Eglise et du monde, c'est une façon de nous laisser pétrir par cette autorité et de ne pas perdre confiance dans la puissance de ses mots.

 

Cherchons à mieux le connaître, à mieux l'aimer et demandons à l'Esprit Saint de raviver en nous, notre foi en lui.

 

Amen.


Mardi 13 juin : St Antoine de Padoue

2Co 1, 18-22 : Pourquoi Paul a modifié son plan de voyage.

Ps 118

Mt 5, 13-16 : Sel de la terre et lumière du monde.

 

Il y a du sel dans le ministère de Jésus.

Le sel, c'est (je pense que l'on peut dire) que c'est l'Esprit Saint qu’il a reçu au baptême et tous les fruits de cet Esprit-là, comme par exemple son autorité qui est reconnue par les gens ou bien encore toutes ces rumeurs qui s'étendent et  se répandent à chaque fois qu'il va traverser un village, ses miracles encore sont l'un des fruits de l'Esprit Saint dans la vie de Jésus et nous pouvons comparer surtout cela au sel et mieux comprendre d'ailleurs, comment il y a du sel dans notre propre vie.

Un épisode de la vie de Jésus a attiré mon attention car, dans ce petit verset que j'ai lu avant l'Évangile, il est rapporté ce qui est dit à la fin de l'extrait de chez Matthieu : voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père ; c'est à propos de la lumière.

Je me suis demandé si lumière et sel, (en particulier le sel) étaient toujours quelque chose qui était de l'ordre d'un bien objectif, tout de suite mesurable.

Et alors, un épisode de la vie de Jésus a attiré mon attention : il rentre à Nazareth, il est grand, (c'est au chapitre quatre); il déroule le rouleau de la Torah et il lit ce fameux passage où il est question, justement, de cet Esprit Saint ; il fait l'homélie la plus courte de l'histoire : "cette parole que vous entendez aujourd'hui, s'accomplit " et tout le monde est émerveillé.

Première réaction de tous : "oh ! C'est extraordinaire".

Les gens sont émerveillés par son autorité et cet enseignement nouveau.

 

Puis tout de suite après, sans transition aucune, dans la même synagogue, on commence à murmurer à son propos : "mais n'est-t-il pas le fils de Joseph, le charpentier ?" et Jésus va leur dire : "sûrement, vous allez me dire : pourquoi tous ces miracles qui ont été accomplis à Capharnaüm, tu ne les fais pas aujourd'hui? et il va rajouter : "aucun prophète n'est bien accueilli dans son pays" et il va citer les exploits que le Seigneur a faits dans l'ancienne Alliance pour des païens.

Et alors là, la colère gronde et cette fois-ci, ça n'est plus l'admiration mais c’est le rejet.

Quel était le sel dans la vie de Jésus à ce moment-là ?

Dans le tout dernier verset de ce passage, alors qu'il est au bord d'un escarpement dans lequel on veut le précipiter, "il passe son chemin au milieu d'eux".

 

Je ne sais pas si l'on peut tout de suite dire que c'est un bien, comme un miracle accompli dans une personne qui en a besoin ; on voit le Fils de Dieu traverser au milieu de ceux qui lui sont hostiles : Voilà le sel, à ce moment-là, dans sa vie.

 

Alors, nous sommes amenés à en avoir, du sel et l'Esprit Saint saura bien en chaque circonstance nous en donner, dans notre propre vie, si on le lui demande.

 

 Mais si Jésus parle du sel, c'est pour tout de suite pour nous mettre en garde car ce sel peut perdre de sa saveur.

Et oui, comment faire pour qu'il ne perde pas de sa saveur ?

Peut-être, choisir chaque jour, à nouveau, Jésus, comme si c'était la première fois.

 

Amen.


Dimanche 11 juin : La sainte Trinité (premières communions)

Ex 34, 4b-6.8-9 : Les tables de la Loi. Apparition divine.

Cantique Dn 3

2Co 13, 11-13 : Recommandations. Salutations.
Jn 3, 16-18 : L’entretien avec Nicodème.

 

Les tout premiers disciples qui ont rencontré Jésus étaient ses amis, qui ont marché avec lui, qui ont été appelé d'abord, au bord du lac, qui ont bénéficié de ses enseignements, qui ont vu un certain nombre de ses miracles, ses disciples, ils ont pu manger avec lui et c'est grâce à ces repas que vous-mêmes, vous allez communier aujourd'hui.

Ses disciples, ils ont retenu de Jésus, après qu'il soit parti, ils ont retenu dans leur mémoire des odeurs, des gestes, des paroles et ils l'ont communiqué à d'autres, après eux : ils ont rapporté à ceux qui n'avaient pas vu Jésus, ce que, ont vu, entendu, senti.

Par exemple, à Jéricho, vous vous souvenez les enfants à Jéricho, Jésus rencontre l'aveugle qui s'appelle Bartimée et les disciples se souviennent : ah ! cet aveugle Bartimée , il était au bord de la route, on se souvient de l'odeur qu'il y avait sur cette route (peut-être quelques figuiers), on sait qu'il y avait un sycomore à Jéricho parce qu'il y avait aussi un petit homme qui voulait rencontrer Jésus et qui s'était perché dans ce sycomore et qui s'appelait Zachée ; donc, des odeurs, des souvenirs visuels, des paroles.

Ils ont peut-être aussi en mémoire cet aveugle Bartimée bondissant, joyeux, après avoir retrouvé la vue.

 

Il se trouve, ce n'est pas très gai, mais c'est comme ça, il se trouve que ces mêmes apôtres, ils ont vieilli, ils ont fini par mourir. Ce sont les suivants, qui n'ont pas vu du tout Jésus et qui ont accueilli la parole de ceux qui l'ont vu, ils disent : on a raconté de Jésus que c'est un homme qui faisait ci, qui faisait ça.

Alors, ils vont commencer petit à petit, c'est un peu comme le jeu du téléphone arabe (vous avez déjà joué au téléphone arabe ? On raconte un message et puis on se le passe et le message se transforme un peu), sauf que, à la différence de ce jeu, c'est qu'à la fin, là, le message, il est encore plus beau, il est plus résumé. I

Ils se sont dit de Jésus : il y avait un homme Jésus qui nous a parlé de Dieu son Père, même que lui était Dieu et il nous a parlé de l'Esprit Saint et puis on sait qu'il est mort et qu'il est ressuscité.

Il nous a beaucoup parlé de son Père ; on raconte qu'il priait son Père la nuit, qu'il allait dans la montagne.

On raconte d'ailleurs, qu'il a même enseigné à ses disciples à prier, eux aussi.

Et quand il priait au lieu de s'adresser à des nuages, il leur a dit : mais quand vous  parlez à Dieu, dites : notre Père qui es aux cieux.

Et puis alors, Jésus, il a aussi parlé de Dieu, autrement : il leur en a parlé à travers le pardon ; Dieu est aussi là, quand deux personnes qui se font la guerre, finissent par se pardonner et Dieu, il est aussi là, quand deux personnes n'arrivent pas à se pardonner, chaque fois qu'elles essayent ; et puis Dieu, il est là, chaque fois quelqu'un qui, dans sa main n'a rien et demande, quelqu'un d'autre lui donne;  Dieu est là.

Jésus a parlé de Dieu encore quand il a pris son dernier repas avec ses disciples : il prend du pain, du vin et il dit merci parce que tout ce que je reçois dans ma vie, (même si parfois c'est le fruit de mon travail, même si parfois je l’ai payé), tout ce que je reçois, ça m'est aussi donné par celui qui est plus grand que moi, que je ne vois pas.

Et pendant son dernier repas, Jésus souhaitait que ses disciples fasse de toute leur vie comme un repas, que toute leur vie, ce soit comme une communauté ou une famille qui vive unie et qui, à l'occasion d'un repas est capable de se réunir, capable de faire la fête et puis capable parfois de mettre de côté ce qui n'est pas toujours très beau.

Et puis Jésus, nous a parlé de Dieu quand il a promis son Esprit Saint, il a dit : ce sera l'Esprit que vous enverra mon Père et moi quand je ne serai plus là.

 

 Ce dernier repas, on va le vivre ensemble, les enfants.

 Pour vous, c'est hyper important et c'est une étape hyper importante pour vos parents, vos familles.

Ils vous voient grandir, ils ont souhaité, pour la plupart, que vous veniez au KT, et certains d'entre vous, c'est vous qui avez voulu et cette communion au Corps et au Sang de Jésus, pour eux, c'est le signe que vous grandissez et ils sont très contents.

Et pour vous, c'est un des premiers moments dans votre vie où vous sentez comme de la pression et vous sentez que c'est important.

Plusieurs parmi les enfants ont parlé tout à l'heure, dehors, et plusieurs ont réalisé que ce n'était pas une journée comme les autres.

Voilà, première étape.

 

Est-ce que quelqu'un parmi vous aurait dans sa poche un hand-spinner et pourrait m'en prêter un, parmi les plus jeunes : Anne-Sophie, tu as amené le tien ?

Ce n'est pas un piège, celui qui en a un, il me le prête, je lui rends, ça dure deux secondes : un hand-spinner.

Personne ?

Bien, tu as le tien ?

Non ? Ou vous n'osez pas ?

On a fait une retraite de foi où il y avait plus de Hand-spinner qu'il n'y avait de jeunes et là, il n'y en a pas un seul ?

Eh bien, c'est bien dommage car ça aurait été utile pour parler de la Trinité.

Eh bien, il n'y a pas.

 

En cette communion, les enfants, quand vous allez recevoir l'hostie, vous allez recevoir le corps du Christ, vous allez recevoir l'amour de Dieu pour vous et vous allez aussi recevoir beaucoup d'admiration et de confiance, à travers cette communion, de toutes les grandes personnes qui sont autour de vous ; parce que, dans ces grandes personnes, il y en a au moins deux pour chacun, qui ont voulu que vous soyez baptisés : normalement c'est papa, maman, pour chacun d'entre vous et vous avez été baptisés quand vous étiez tout petits, à part deux ou trois exceptions.

 

Ils ont voulu beaucoup pour vous, ils ont voulu que vous deveniez des trésors, des trésors divins; et aujourd'hui, ça se renouvelle à leurs yeux et ils ne sont pas peu fiers.

Sauf que cette fois-ci on ne vous plonge pas dans l'eau, aujourd'hui, c'est à table.

 

 Amen.


Jeudi 8 juin 2017

Tb 6, 10-11 ; 7, 9-17 ; 8, 4-9a : Le poisson, Ragouël, la tombe.

Ps 127

 

Mc 12, 28b-34 : Le premier commandement.

 

A propos de la place de la loi dans la vie de Jésus il y aurait fort à dire. L’Evangile nous rapporte quelques épisodes importants de sa vie où explicitement la loi est mise en scène. Quand Jésus a huit jours et qu’il est, conformément à la loi de Moïse, présenté au temple de Jérusalem par ses parents, en offrande et avec l’offrande pour la purification.

La loi, Jésus va s’en faire l’interprète et c’est tout son discours sur la montagne, dans l’Evangile de Matthieu, et dans l’Evangile de Matthieu en particulier, il semblerait que chaque fois que Jésus est sur la montagne il incarne Moïse, le Nouveau Moïse, et que ses mots, ses enseignements vont avoir valeur juridique, ou du moins d’interprétation de la loi. Il va dire explicitement : « Je ne suis pas venu abolir la loi mais l’accomplir ; pas un seul trait de la loi ne disparaîtra ». Tout ce discours sur la montagne c’est une succession d’interprétations, on pourrait dire, de cette loi de Moïse : « …On vous a dit…et moi je vous dis… » et très souvent, d’ailleurs, Jésus pousse à son extrême cette loi de Moïse, son interprétation. Et il va jusqu’à la résumer : on voit le sommet de son enseignement sur la montagne : « Tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux ».

 

A un moment donné, Jésus va se mettre sous l’autorité de la loi de Moïse. Alors il va y avoir, comme une référence explicite à la loi, dans l’Evangile que l’on a entendu hier, ce cas d’école, cette femme qui a sept maris, et puis à un autre moment, lorsqu’il est accusé au chapitre 12 de manger avec ses disciples un jour de sabbat où ils arrachent les épis, Jésus va faire à nouveau référence à la loi de Moïse.

 

Il est intéressant de se rendre compte, vous savez, au moment où Jean-Baptiste est enfermé en prison et où on lui rapporte ce qui se passe autour de Jésus. Il est très curieux. Evidemment il ne peut pas aller voir lui-même. Il envoie ses disciples auprès de Jésus et lui fait demander : « Es-tu celui qui doit venir ? Celui que nous attendons ? » Est-ce que nous nous souvenons de ce que répond Jésus à ce moment ? « Rapportez à Jean-Baptiste ce que vous voyez », à savoir un certain nombre de signes messianiques : « Les aveugles voient, les boiteux marchent les sourds entendent… » Et Jésus va poursuivre en parlant de Jean-Baptiste à tous ceux qui sont là : Jean-Baptiste est un prophète, de la loi de Moïse, un de ceux de l’Ancien Testament. Jean-Baptiste, c’est un grand et pourtant il y a encore plus grand que lui ! Rapportez ce que vous voyez. Cette allusion nous fait dire que pour Jésus, la loi, elle est, d’abord et avant tout un exercice d’écoute de Dieu lui-même. Nous avons à écouter, comme Jésus va le dire dans l’Evangile, quels sont les plus grands commandements. Il va dire le fameux sh’ma Israël, tout est en ordre : Ecoute Israël le Seigneur ton Dieu. Cette loi doit être entendue, comme un prêtre qui parle. Pour Jésus, le plus important, c’est de faire la volonté de son père qui est aux cieux (Mt 7). Faire cette volonté ; l’entendre et la mettre en pratique. C’est ce qui garantit la solidité de notre vie, de notre maison. C’est la conclusion de son grand discours sur la montagne.

 

Mais que cette loi ne devienne pas l’incarnation d’une résistance et une projection de nos combats personnels. Qu’elle soit d’abord écoute amoureuse, relation avec le Père du ciel. Si la relation avec le Père du ciel est toute amoureuse, elle sera au service des frères. Et je pense que la réciproque est vraie : si on s’efforce d’être dans le service des frères, notre relation à Dieu va devenir écoute amoureuse du Père. Sinon, effectivement, cette loi est instrumentalisée et on va entrer dans les excès des pharisiens avec Jésus, ces noises qu’ils cherchent en permanence, autour des affaires du sabbat, par exemple. Mais jusqu’à l’extrême, si l’on veut bien regarder ce qui se passera sur la Croix Jésus aime. Alors, cette question qui lui est posée : quel est le plus grand commandement ? Jésus en cite deux. Son interlocuteur est d’accord, et il ajoute : « tout cela vaut plus que les sacrifices. Réponse de Jésus : « Tu as fait une remarque judicieuse, tu n’es pas loin du Royaume. Je pense qu’on peut retenir que les sacrifices dont parle Jésus, c’est cette loi qui ne nous tourne pas vers le frère et qui nous enferme sur nos combats personnels, quand notre vie religieuse, notre vie tout court, devient un sacrifice permanent, une vie nécrosée. Au contraire, ce qui va prévaloir dans la réponse et du scribe et de Jésus, c’est l’écoute et l’attachement à ce Père du ciel. Alors retenons-le plutôt comme un appel à une sorte de réévaluation peut-être, je crois qu’on en a toujours besoin, et de notre vie de prière et de notre obéissance à la parole de Dieu. Le meilleur moyen de réévaluer sereinement tout cela, c’est de chercher à connaître toujours plus Jésus-Christ.

Amen.


Mercredi 7 juin

Tb 3, 1-11.16-17a : L’aveugle.

Ps 24

Mc 12,18-27 : La résurrection des morts.

 

Nous sommes dans l'exacte suite de l'Évangile d'hier : Jésus, qui est en prise avec tes détracteurs, qui veulent lui tendre un piège et le faire tomber dedans. 

Hier, c'était la pièce de monnaie : "à qui doit-on verser l'impôt ?"

Aujourd'hui, c'est ce cas d'école ; je l'avais un petit peu anticipé hier.

Si on a suivi l'histoire, effectivement ça fait du monde au Ciel et alors, qui, cette femme va-t-elle rencontrer ?

Aura-t-elle un mari par jour ? (l'imaginaire des saducéens).

Les saducéens ne croient pas en la résurrection et ils veulent montrer à Jésus que c'est stupide de croire en la résurrection ; ils sont contre les pharisiens qui eux, y croient.

C'est compliqué.

 

Entendez ce cas qu'ils soumettent à Jésus ; c'est de l'humour sarcastique, c'est-à-dire ils veulent piéger Jésus, certes, mais lui montrer, lui prouver la stupidité de la foi en la résurrection, parce que, dans leur imaginaire, (qui n'est parfois pas très éloigné du nôtre, si on regarde bien), dans leur imaginaire, la résurrection c'est la chambre d'à côté, dans laquelle on met tout ceux qui sont morts et ça s'accumule, ça s'accumule, ça s'accumule.

Et dès qu'il s'agit de se demander : comment cela va faire, comment ces gens s'entendent etc. ?

Eh bien, on ne sait pas trop ; on n'ose pas trop d'ailleurs se poser la question parce que, déjà que sur terre, ce n'est pas tellement évident de savoir alors, dans la chambre d'à côté, je ne vous explique pas !

 

Mais c'est là que la réponse de Jésus est intéressante, car il va leur montrer que, certes, il a bien compris leur sarcasme, mais il a bien compris qu'ils n'ont pas compris que la résurrection n'est pas le prolongement des désirs terrestres, non plus ; la résurrection n'est pas le prolongement des désirs terrestres.

Dans la résurrection, il y a cette affirmation selon laquelle nos corps restent intègres (ou sont réintégrés d'une certaine façon), et en même temps, ils sont glorifiés, c'est-à-dire que la partie la plus épaisse et obscure des désirs humains, a comme disparu.

La façon dont, effectivement,  nous pouvons vivre avec des désirs obscurs, comment ces désirs peuvent-ils disparaître, on ne sait pas trop puisque précisément, notre condition mortelle nous fait vivre avec ; c'est un petit peu comme Thomas Pesquet qui a fait l'expérience du ciel mais il a vite fait l'expérience de nouveau de la terre et il s'est rendu compte combien il a été configuré, à sa naissance, pour vivre dans l'attraction terrestre.

 

L'attraction terrestre serait pour nous, cette partie épaisse, cette partie ténébreuse de nos désirs qui sont toujours, toujours (et on a beau être âgé, c'est pareil que si on était jeune : oh vous savez, mon Père, à mon âge on ne pèche plus ; eh bien ce n'est pas tellement vrai en réalité ! Ça se situe peut-être ailleurs, mais toujours).

Comment peut-on être séparé de ces désirs-là?

Eh bien rendez-vous au Ciel, hein ?

On s'en causera, quand on n'y sera.

 

Mais ce qui est intéressant, c'est que Jésus, lui, son ministère est un ministère qui élève, c'est un ministère qui élève : il prend les personnes telles qu'elles sont et là où elles en sont, avec leurs désirs et leurs faims (et donc il ne faut pas faire semblant entre nous) et devant Jésus, on est comme on est, avec nos désirs et nos faims ; et Jésus va les élever, c'est magnifique et on a cet épisode de Jésus qui rencontre la Samaritaine : ce n'est ni plus ni moins cela.

 Il est question d'une soif, ce n'est pas d'une faim, c'est l'image de l'eau, du puits dans le désert et de cette femme qui a une vie un peu compliquée, qui a plusieurs maris et Jésus va détricoter cela sans, à aucun moment, juger ni piéger la femme et il va l'élever.

 Et la femme l'aura compris et peu à peu, elle va le suivre dans son dialogue et son dialogue qu'est-ce que c'est ?

Lui révéler le Père.

Alors elle, elle en est à un niveau : ras des pâquerettes (mais comme moi et vous) et il va l'élever vers le Père.

D'une certaine façon, cette femme va être déjà au Ciel, tout en étant avec ces cruches d'eau et ses cinq maris (et je ne sais pas ce qu'elle en fera, l'histoire ne le dit pas, mais peut-être qu'elle va en lâcher quatre, c'est peut-être intéressant pour elle).

Alors Jésus va faire cela et il fait cela.

 

On a cet autre épisode extraordinaire de Jésus qui est ému de compassion, épris de compassion pour ces foules sans berger et qui ont faim, dans le désert.

C'est un autre signe que Jésus produit : mais là, cette fois-ci, ce n'est plus de l'eau, c'est de la nourriture solide (il est question de pains et de poissons : il va les multiplier) et il va nourrir ; et l'eucharistie n'est ni plus ni moins Dieu qui vient nous rejoindre dans nos faims et dans nos désirs, tels qu'ils sont ; et plus je communie à Jésus, plus j'écoute sa parole, plus ces désirs se purifient et se purifiant, s'élèvent : Jésus est le maître de la décantation, en fait.

 

Donc, nous nous préparons au Ciel ; alors on comprend mieux (du moins, je l'espère) que les saducéens exagéraient (mais je ne sais pas s'ils savaient qu'ils exagéraient, en fait ; qu’ils étaient sarcastiques ça, ils le savaient mais qu'ils exagéraient, je ne sais pas s'ils le savaient) et on comprend peut-être aussi mieux qu'elle est notre foi en la résurrection.

 

Ce que nous serons au ciel, n'est pas seulement un amoncellement de corps dans la chambre d'à côté, ce sont des corps glorieux ; nous serons glorieux et nous rejoindrons des êtres glorieux qui sont libérés de cette partie la plus obscure et épaisse du cœur.

 

Alors, si vous l'ignoriez, je vous le révèle : il y a deux épisodes dans l'Evangile qui nous parlent de cette partie la plus épaisse du cœur (tout d'ailleurs, nous en parle), mais il y a deux épisodes assez célèbres ; le premier épisode c'est quand Jésus marche sur l'eau et marchant sur l'eau, il révèle, il montre (en tout cas, on voit que les disciples ont peur) qu’il y a de la peur.

D'ailleurs, il va marcher sur l'eau tout de suite après avoir multiplié les pains.

Il y a de la peur en nous et ça, on n'y peut pas grand-chose : on ne fait pas exprès d'avoir peur.

Il y a de la peur.

Et puis, il y a de la médisance, de la cupidité, de la colère etc. etc. ; il va le dire à un moment donné où il y a une controverse entre lui et ses détracteurs : ce n'est pas ce qui rentre dans le cœur de l'homme qui rend l'homme impur, c'est ce qui sort de son cœur par sa bouche : c'est cela qui le rend impur.

Ça vient de notre cœur, le même cœur ; donc on voit bien que dans le cœur il y a déjà au moins et de la peur (donc quelque chose qui est de l'ordre du fantasme et de l'illusion ; d'ailleurs ils pensent que Jésus est un fantôme sur l'eau, au départ) et puis il y a de la méchanceté, il y a du mal : c'est le siège de ces passions (les auteurs anciens parlent de passions).

Eh bien, on a besoin d'en être libéré ; et ce n'est pas la peine de faire l'ange car la bête n'est pas loin derrière.

Amen


Mardi 6 juin : 9ème semaine du temps ordinaire

Tb 2, 9-14 : L’aveugle.

Ps 111

Mc 12, 13-17 : L’impôt dû à César.

 

Jésus est souvent confronté à des interlocuteurs pas toujours bardés de bonnes intentions ; il n'y a pas que ce passage-là, dans l'Evangile, mais ce passage-là semble récapituler deux stratégies d'interlocuteurs qui s'adressent à Jésus.

Alors, il y a les flatteurs et parmi les plus flatteurs, on a un passage que l'on pourrait qualifier quand même de franchement positif, c'est cet homme riche que l'on dit être jeune qui s'approche de Jésus : "bon Maître..."et puis nous avons également, ces scribes et ces pharisiens qui viennent vers lui et qui lui posent une question sur : quel est le plus grand commandement?

 Ils arrivent avec toute une sorte de préambule, très flatteur.

 

Et puis nous avons les alternatives absolument impossibles, c'est-à-dire un peu comme celle-là : des alternatives tranchées et c'est difficile de s'en dépatouiller et d'emblée l'interlocuteur, qui est Jésus, se trouve pris au piège.

Nous avons un célèbre passage ; vous savez c'est le moment où on pose une question à Jésus au sujet du mariage ; et alors, c'est un cas d'école qui lui ai présenté de telle façon qui n'est pas d'ailleurs très étranger au livre de Tobie (que nous avons lu en première lecture), parce que une pauvre femme perd tous ses maris, et la question c'est : de qui va-t-elle être l'épouse au Ciel?

Ça tombe bien parce que Sarra, c'est une femme que Tobie va rencontrer, dans le livre de Tobie, Tobie fils (c’est Tobias, on pourrait dire).

 

 J'ouvre une parenthèse : dans le livre de Tobie, deux familles apparentées, en plein  exil, quelque part en Mésopotamie ; nous avons la famille de Monsieur Tobit et nous avons l'autre famille. Elles sont dans deux localités différentes et Monsieur Tobit père, va envoyer Tobie fils récupérer une somme d'argent qu'il a placée jadis, ailleurs ; et il va rencontrer, ce Tobie fils, une belle Sarra qui n'a pas de chance, cette belle Sarra, parce qu'elle est accompagnée d'un démon qui fait qu'à chaque fois qu'elle se marie, ses tout nouveaux-maris meurent.

 Ça fait repenser à cet Évangile dont je vous parlais ; ce cas d'école, qui est adressé à Jésus et alors : de qui est tel être l'épouse au ciel ?

 C'est une alternative impossible. Jésus s'en sort assez brillamment.

 

Dans ce texte que nous venons de lire à l'instant, il y a les deux : il y a la flatterie et l'alternative impossible.

D'ailleurs, dans la flatterie, entre nous soit dit, on pourrait imaginer qu'en vrai (enfin c'est comme ça que j'accueille Jésus) : "nous savons que tu es toujours vrai ; tu ne te laisses influencer par personne, car ce n'est pas selon l'apparence que tu considères les gens, mais tu enseignes le chemin de Dieu selon la vérité", j'ai envie de penser que c'est vrai, ce n'est pas une fausseté qui apparaît sous une apparence de vérité.

 

Il y a beaucoup de questions posées à Jésus, dans l'Évangile, où il est poussé dans ses retranchements autour du thème du sabbat (souvenez-vous en) ; mais aussi sur d'autres questions, sur son autorité, par exemple.

 

Alors, Jésus va aussi employer ces alternatives impossibles, un peu comme si c'était une sorte d'art oratoire, à l'époque de Jésus ; et dans ces alternatives impossibles, il y a un moment où on lui présente un paralytique qui est descendu par le plafond de la maison ; il va regarder ses détracteurs, qui en eux-mêmes sont remplis de questions et en même temps déjà de colère : quel est le plus facile de dire : lève-toi ou tu es guéri de tes péchés ?  

Une alternative impossible devant laquelle Jésus met ses interlocuteurs ; évidemment, il n'y a rien à dire, tout est impossible et en même temps Jésus va faire les deux.

 

J'en viens à ce texte : la réponse pour Jésus, c'est la distinction : distinguons les plans, distinguons les genres, et c'est ce qui viendra le mieux guérir la maladie de l'âme dont sont victimes, au fond, les interlocuteurs de Jésus ; parce que, pour être à ce point dans la fausseté, c'est qu'ils sont victimes d'une maladie et cette maladie de l'âme c'est la confusion des plans.

 

Le Verbe, le Seigneur, commence sa création en distinguant : la nuit, le jour ; le ciel et la terre ; etc. ; eh bien, distinguons ou laissons le Seigneur, par sa grâce et par toutes les mises en œuvre qu'il nous suggère dans nos vies, laissons-le distinguer dans notre cœur : ciel-terre; ténèbres-lumière pour être plus libérés de ces maladies de l'âme qui produisent ce que l'on voit dans l'Évangile.

 

À plusieurs endroits, dans l'Évangile, Jésus met en avant les pauvres, les petits : "laissez venir à moi les petits enfants" ou malheur à ceux qui les feront tomber.

Eh bien, ceux qui sont guéris de cette maladie de l'âme, sont ceux qui laissent venir les petits enfants à Jésus.

 

Amen


Dimanche 4 juin : La Pentecôte, (professions de foi)

Ac 2, 1-11 : La Pentecôte.

Ps 103

1Co 12, 3b-7. 12-13 : Diversité et unité des charismes. Comparaison du corps.

Jn 20, 19-23 : Apparition aux disciples.

 

Chers amis, nous sommes soumis en permanence, chacun, (que nous soyons petits ou grands), à une contrariété, contrariété permanente entre vouloir recommencer quelque chose dans nos vies (un peu obnubilés par les commencements et les recommencements) ou par la fin, (vouloir la fin, anticiper une fin ou au contraire, vouloir l'éviter) ; une sorte de tension et puis, parfois, de choc intérieur.

Et ce qui fait que l'humain est humain et qu'il est parfois très agité ou soumis à du stress ou à de la violence ou à du mensonge (tout ce qu'on voudra), c'est qu'il est tendu entre les deux : commencement et fin, recommencement et fin.

Alors, c'est une des raisons pour laquelle on a super peur de tout ce qui correspondrait, dans nos vies à la fin de notre vie.

 

Mais, sachez que dans la foi chrétienne, il n'y a ni commencement ni recommencement ni fin : dans la foi chrétienne, il n'y a pas de ça.

Il n'y a pas d'éternel recommencement, il n'y a pas de réincarnation, il n'y a pas de 'on revient au début', il n'y a rien de tout ça ; dans la foi chrétienne il n'y a que des passages, que des passages, des transitions.

Tout, dans la foi chrétienne n'est que transitions et passages à l'image de ce que les disciples vivent dans l'Évangile : (vous n'avez peut-être pas fait attention), mais les disciples sont à un seuil dans leur vie, un seuil.

Et au lieu d'être brutalisés, ils reçoivent un léger souffle : Jésus qui souffle sur eux "recevez l'Esprit Saint".

 

Tout ceci devient super concret pour les parents des enfants là, parce que (on n'en a déjà parlé un peu hier), vos braves-là sont comme un peu comme une sorte (une sorte, mais ça n'est pas) une sorte de fin de quelque chose, mais vous avec, surtout quand ce sont les derniers de la tribu, de la fratrie.

Et en même temps, ils sont comme dans une sorte de commencement : au collège, ils y sont depuis un an, le poil au menton qui pousse, ce ne sont déjà plus les mêmes, quoi!

Et vous, pareil ; vous vous sentez un petit peu vieillir quand vous regardez vos cheveux, le matin dans la glace (alors, pas tout le monde, pas tout le monde).

Vous voyez bien, c'est très concret, ces affaires de commencement et de fin et c'est vrai pour toute chose et toute aventure humaine, pour toute aventure humaine.

 

Moi je sais que ces garçons et ces filles qui sont devant nous, eux, ils pensent (pour une part), parce qu’on en a parlé,  ils pensent àla fin,  la fin de leur KT et pour certains, c'est assez joyeux ; mais il y en a d'autres qui pensent (et ils sont nombreux) que ça va être le début des 12-15 et ils sont super contents, le suite, la suite.

Et ils ne pouvaient pas commencer les 12 15 tant qu'ils n'avaient pas fini le KT.

Alors, ça veut dire que la tentation sera grande, (un peu comme quand on reçoit un diplôme dans les universités américaines), d'aller envoyer tout balader, tout à l'heure, dans 1h30 : on envoie notre chapeau en l'air et c'est fini.

Si on est dans l'Esprit de la Pentecôte, si on reçoit l'Esprit Saint, ce n'est ni commencement ni fin, c'est transition et passage ; tout doucement, vos enfants et vous avec, et nous et toute la communauté, on passe d'une ère à une autre ère.

Je pense aux catéchistes qui les ont portés, comme ça, à bout de bras, elles vont passer à autre chose joliment, tranquillement, sans stress ni colère ni déception ni le sentiment d'avoir perdu quelque chose.

Et ça, c'est une grâce de l'Esprit Saint, c'est précisément ce que produit l'Esprit Saint dans nos vies, on l'a chanté juste avant l'Évangile : tous les dons de l'Esprit Saint (viens Esprit Saint consolateur).

 

Combien de fois nos larmes coulent à cause d'une perte ou d'une peur ?

Les passages ne sont jamais faciles mais la foi chrétienne, c'est à cet endroit-là qu'elle apparaît, du moins qu'elle nous touche.

 

 Esprit Saint, souffle léger de Dieu, fais-nous vivre tous les passages que nous avons à vivre.

Permets-nous d’ouvrir les mains pour lâcher ce que nous ne pouvons plus retenir et pour mieux accueillir ce qui vient de neuf dans notre vie.

 

Et vous parents, c'est un vrai cadeau, car vos enfants vous obligent à cela.

Vous verrez, le jour où ils ne sont plus à la maison, ça ne sera peut-être plus pareil, il n'y aura plus ces enfants qui vous aideront à vivre des passages (il y aura peut-être les petits-enfants et les arrière-petits-enfants).

 

Demandons l'Esprit Saint pour chacun d'entre nous.

Je vais vous relire les dons de l'Esprit Saint tels que Paul, dans sa lettre au Galates, les énumère.

Et peut-être que chacun d'entre nous peut en retenir au moins un; il le chope au vol, il le garde pour lui : moi, j'aimerais bien ce dont pour moi, j'en ai besoin.

Vous allez voir.

Les trois premiers, vous allez me dire : on est d'accord, tout le monde est d'accord ; enfin bon, on en a peut-être besoin quand même.

L'amour, (c'est un don de l'Esprit Saint), la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance, la foi, l'unité  et la maîtrise de soi.

 

"Celui qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende".


Vendredi 2 juin : Saints Pierre et Marcellin

Ac 25, 13-21 : Paul comparaît devant le roi Agrippa.

Ps 102

Jn 21, 15-19 : Apparition au bord du lac de Tibériade.

 

Les jours qui ont précédé, la Parole de Dieu nous a révélé l'intime de Jésus dans sa prière adressée à son Père au chapitre 17 ; l'intime de Jésus dans sa prière adressée à son Père. 

 

Aujourd'hui, nous sommes dans toute autre chose ; c'est toujours l'intime de Jésus mais dans sa relation avec un de ses disciples.

L'intime se manifeste par cette affection qui est démontrée sous forme d'une question, trois fois, à Pierre ; le même Pierre qui a renié Jésus, trois fois.

Et vous le savez peut-être déjà, ce verbe aimer: par deux fois, Jésus utilise le verbe aimer d'agapê (l'amour parfait, l'amour qui dit Dieu dans la Bible) ; et Pierre répond par un autre amour, l'amour d'amitié.

Certes, vous direz : Pierre aime Jésus, Jésus aime Pierre et c'est formidable, mais ils sont en décalage l'un, l'autre ; jusqu'à ce que Jésus, dans la troisième question, rétrograde (d'une certaine façon) son affection et passe de l'amour d'agapê à l'amour d'amitié.

 

En réalité, Jésus aime Pierre et c'est tout, mais c'est la question qu'il pose à Pierre : et nous voyons qu'il y a une distance entre les deux, infiniment petite, certes, mais il y a une distance entre Pierre et Jésus.

Cette distance a été infiniment grande par le reniement, elle est désormais infiniment petite, mais elle est là.

 

Entre Jésus et ceux qui l’aiment, il y a des distances ; et entre Jésus et ceux qui attendent quelque chose de lui, il y a des distances.

Voyez par exemple, Marie-Madeleine, peu de temps avant, à la résurrection de Jésus : Marie veut accaparer Jésus et Jésus lui répond : "ne me retiens pas". Je dois aller vers mon Père;  toi, va voir mes frères.

 

Dans cette scène avec Pierre, n'oublions pas que Jésus va partir auprès du Père.

Heureuse distance finalement, pour que Jésus puisse partir et que Pierre puisse être le berger du troupeau ; sans quoi, Pierre ne peut pas prendre de responsabilités, trop attaché qu'il est à Jésus ! (il aurait tellement envie de partir avec lui au Ciel !).

Vous vous souvenez que Pierre, comme nous tous, a la furieuse tentation de s'approprier Jésus.

Sur la montagne de la transfiguration, il veut bâtir une tente, pour que ce qu'il a plus de Jésus demeure pour toujours.

Mais non, il faut redescendre !

"Je te suivrai partout" ; oui mais ! Ce n'est pas ce que tu feras.

 

 

Une autre affaire de distance encore : souvenez-vous de cette femme qui touche Jésus, (enfin, qui touche son vêtement) ; cette femme Hémorroïsse.

L'intime de Jésus se révèle dans cet Évangile de la femme Hémorroïsse : Jésus allait guérir la fille de Jaïre ; une femme, qui connaît des écoulements de sang depuis des années, se dit : "mais si seulement je pouvais toucher le vêtement de Jésus", seulement cela ; si ça pouvait être plus, mais seulement son vêtement ; d'abord, il y a tellement de monde !

Elle touche son vêtement, Jésus sent une force qui sort de lui.

 

Et là, Jésus nous a préparés pendant tout ce temps, après la résurrection, à ne plus pouvoir le toucher et même à le laisser partir.

Qu'est-ce qui est en jeu, finalement ?

Eh bien, il est en jeu, le don de l'Esprit Saint.

Plus il y aura de la place entre nous et Jésus, plus l'Esprit Saint pourra venir.

Alors, il faut le laisser partir vers le Père et alors l'Esprit Saint pourra venir.

 

Nous aimons Jésus, aimons-le, il faut l'aimer, l’aimer et le connaître, mais l'aimer de cet amour divin qui n'accapare pas mais qui laisse respirer, respirer, la respiration divine, l'Esprit Saint.

 

Amen.


Jeudi 1er juin 2017

 

Jésus poursuit sa grande prière à son père alors qu’il se prépare, tout du moins dans l’Evangile de Jean, à quitter ce monde par sa mort. Avant son arrestation, avant sa résurrection, il guide ses disciples. Dans sa grande prière au Père dont nous avons déjà commencé la lecture hier et, souvenez-vous, dimanche également. Et là, il est question de l’unité de ses disciples, l’unité de Jésus avec son Père et de la gloire. Nous sommes vraiment dans l’intimité de Jésus et cette intimité peut nous paraître assez abstraite.

Mais en fait elle est très concrète cette intimité. Il y a beaucoup de passages dans l’Evangile où ce qui est dit là est révélé par des images très précises. Par exemple quand Jésus emmène avec lui Pierre, Jacques et Jean sur une haute montagne et qu’il est transfiguré. Pierre, Jacques et Jean voient la Gloire, la Gloire de Jésus et l’unité dont il est question, dans le cœur même de Dieu, du Père et du Fils, elle apparaît, assez particulièrement, par cette unité que Jésus va former avec Moïse et Elie. Tout le projet de Dieu dans l’histoire du peuple apparaît là sur le sommet de la montagne, et ils contemplent dans cette lumière cette unité de Jésus, Moïse et Elie, et cela dit l’unité de Dieu. Ce n’est pas le Père et le Fils, mais ils en voient quelque chose.

Les mêmes, Pierre, Jacques et Jean vont être conduits par Jésus, plus tard, à Gethsémani, le Jardin des Oliviers. Juste avant son arrestation. Alors là, c’est tout autre chose. Ils ne voient pas de grande lumière, ils voient une image tout à fait inversée de Jésus. Ce n’est pas une gloire lumineuse et triomphale mais c’est un Jésus agonisant déjà. Il prie son Père. C’est une unité aussi du Père et du Fils. Mais alors là, dans la tension de l’événement : il est à deux doigts de se faire arrêter.

Il y a aussi une gloire de Jésus qu’on peut voir, une sorte de beauté de Jésus qui peut se révéler dans bien des aspects, par exemple chaque fois qu’il va rencontrer quelqu’un de pécheur, quelqu’un de malade, quelqu’un de possédé, et à chaque fois qu’il les rencontre et qu’il les guérit, les libère, leur pardonne. Cela produit quoi ? Cela produit de la joie chez la personne qui a été guérie, libérée ou pardonnée. Cela produit de l’unité parce que ces personnes guéries, libérées ou pardonnées, elles quittent le bord de la route ou l’endroit où elles se trouvaient pour être réintégrées dans le grand groupe, on va dire la communauté, si on veut. Et cela va produire un élan, parce que la plupart de ces personnes se mettent en route pour dire qui est Jésus. C’est également un fruit de l’unité du Père et du Fils ou de la gloire.

Ce qui nous est promis, dans cette prière que Jésus fait à son Père, c’est que, d’une façon ou d’une autre, nous, dans notre prière, et dans tout ce que nous allons connaître de Jésus, nous allons avoir le don, le Don de percevoir cette unité. Et cela va avoir un fruit dans notre vie. Ce que nous allons faire et dire, cela va produire de l’unité. Par exemple, toi, …, si dans ton cœur il y a de l’unité, parce que tu pries Jésus, tu vas produire de l’unité autour de toi. Et sans doute c’est ce que tu fais un petit peu. Par exemple tu t’occupes de ton mari, de ton fiston qui est à la maison, et chaque fois qu’il y a dans le village des choses pas bien qui divisent les gens cela ne te plaît pas. C’est le fruit de ta prière. Parce que tu pries Jésus. Note bien que si tu priais le démon (il y a des gens qui ont un cœur tout explosé tout divisé) ce serait tout l’inverse qui se produirait : ils prennent plaisir et se réjouissent de ce qui est divisé. Quand nous communions à Jésus dans cette Eucharistie, nous ne pouvons, comme fruit, qu’être ferments d’unité. Et cela c’est concret, non ? C’est ce que nous pouvons percevoir de cet Evangile.

 

Amen.


Mercredi 31 mai : la Visitation

So 3,14-18 : Psaumes d’allégresse à Sion.

Ct Is 12

Lc 1, 39-56 : La Visitation.

 

Dans cette rencontre entre ces deux femmes, nous pouvons accueillir plusieurs mystères, le premier c'est : comment, dans l'action de l'Esprit Saint, le Seigneur continue-t-il à écrire des pages nouvelles dans l'histoire de sa création ?

Elisabeth, qui porte en elle le dernier des prophètes de l'Ancien Testament et qui accueille, remplie de l'Esprit Saint, celle qui, dans sa matrice, accueille le Sauveur et celui qui tournera la page, d'une certaine façon.

Et ceci est une prérogative divine, grâce également à la foi toute particulière de Marie ; mais c'est aussi quelque chose qui se produit en chacun d'entre nous, quand nous sommes des instruments de l'Esprit Saint.

 

La deuxième chose que l'on peut accueillir, c'est précisément comment ces deux femmes sont instruments de l'Esprit Saint : Marie qui est couverte par cet Esprit et Elisabeth qui est remplie par cet Esprit Saint ; pour nous, c'est la possibilité de nous préparer à vivre cette Pentecôte comme véritables disciples, comme Marie l'est elle-même.

Elle l'est parce qu'elle a écouté la Parole et qu'elle a cru et Jésus n'attend rien d'autre de ses disciples : il l'avait dit dans l'Évangile de Jean au chapitre 14 : écouter ses commandements et l'aimer.

Il n'en faut pas plus pour qu'il nous envoie un autre défenseur, le Paraclet.

 

Et puis, je vous suggère comme une figure, ni d’Elisabeth, ni de Marie mais une figure qui nous aide à nous conformer à ces femmes, (en particulier à Marie), c'est celle de ce mystérieux sourd-bègue de l'Évangile de Marc (il n'apparaît que là).

Et pour le guérir, Jésus va toucher ses oreilles, comme il va faire aussi pour un aveugle à  Bethsaïde, mais il va gémir, il va laisser s'échapper l'Esprit, l'Esprit qui vient délier nos oreilles : "heureuse es-tu toi qui a cru à l'accomplissement des paroles".

Pour tout véritable disciple, il y a d'abord une écoute.

 

Que le Seigneur nous fasse cette grâce dans l'Esprit.

 

Amen.


Mardi 30 mai : Ste Jeanne d’Arc, seconde patronne de la France

Ac 20, 17-27 : Adieux aux anciens d’Ephèse.

Ps 67

Jn 17, 1-11a : La prière de Jésus.

 

Cette grande prière que Jésus adresse son Père, dans l'Évangile de Jean, nous l'avons évoquée dimanche déjà, où nous en avons lu un extrait au chapitre 17.

Jésus a prononcé ces mots, avant sa Passion et nous les lisons, là, dans cette période, où il est à la droite du Père et nous savons, (du moins nous croyons), que cette prière se poursuit toujours, aujourd'hui et qu'elle se poursuivra demain, même si Jésus est à la droite du Père.

Nous sommes dans l'attente, également, de l'Esprit Saint.

 

Cette glorification, cette façon dont Jésus, ayant accompli sa mission jusqu'au bout, se prépare à retourner au Père, a été magnifiquement incarnée par le geste d'une femme dans l'Évangile : c'est cette femme à Bethanie (qui, pour l'Évangile de Luc, est pécheresse ; pour les trois autres évangiles, ne l'est pas et pour Saint-Jean s'appelle Marie, sœur de Marthe et de Lazare), Béthanie.

À Béthanie, cette femme qui accomplit l'onction sur la tête ou sur les pieds, d'un parfum très très précieux, (nous sommes bien avant la Passion de Jésus et elle le fait pour son ensevelissement), elle anticipe le moment où Jésus, effectivement, ce sera glorifié ; dans l'Évangile de Jean on dit : le moment où il sera élevé de terre, non pas pour aller à la droite du Père mais pour être étendu sur la croix ; élevé de terre comme le serpent d’airain est élevé de terre dans le désert.

Cette femme a tout compris par anticipation.

 

On ne cesse de dire combien les disciples sont  plus timorés et lents à croire et qu’il leur faudra presque attendre quelques minutes avant l'Ascension de Jésus pour que tout soit clair, pour eux.

Cette femme, par avance, a accompli un geste qui peut faire penser à la glorification de Jésus, comme si à travers elle, c'est le Père qui glorifiait le Fils et le Fils qui glorifiait le Père.

C'est pour nous une image ou un témoignage, Jésus disant à la fin d'ailleurs : on fera mémoire d'elle partout où on proclamera l'Évangile.

 

C'est un impératif pour nous, également, de continuer à glorifier Jésus par nos actes et notre vie; ça n'est pas que le Père qui glorifie Jésus et Jésus qui glorifie le Père.

Le don de nous-mêmes, le don de nous-mêmes équivaut à cette onction de parfum très pur que la femme fit sur Jésus.

Nous nous donnons nous-mêmes chaque fois que nous allons à l'eucharistie : nous nous offrons.

Mais nous savons très bien par quelle voie il nous faut nous donner nous-mêmes, inutile que ceci soit rabâché.

 

 Alors demandons au Seigneur, à l'avant-veille de la Pentecôte, qu’il nous aide à nous donner nous-mêmes.

 

 Amen.


Dimanche 28  mai : 7ème dimanche de Pâques

Ac 1, 12-14 : Le groupe des apôtres.

Ps 26

1P 4, 13-16 : Heureux ceux qui souffrent avec le Christ.

 Jn 17, 1b-11a : La prière de Jésus.

 

Donc nous sommes dans cet intervalle entre l'Ascension, fêtée jeudi et puis le don de l'Esprit Saint à la Pentecôte, la semaine prochaine, puisque (alors, c'est une affaire de logique), puisque  nous disons dans la foi que le Christ est désormais à la droite du Père : après l'avoir fêté à l'Ascension, la liturgie nous offre aujourd'hui, dans ce dimanche qui est au milieu, cette très très belle prière de Jésus qu'il adresse, au chapitre 17 de l'Évangile de Jean, (un monologue) ; cette fois-ci, il ne parle pas à ses disciples, il ne fait pas d'enseignement et juste avant cette prière, il avait livré son testament à ses disciples ; il avait livré une grande quantité de recommandations.

Cette fois-ci dans cette prière donc, comme toute prière, il s'adresse à son Père.

Alors, voilà l'Évangile que nous avons reçu aujourd'hui ; il est donc normal (même si nous sommes en cette fête des mères), il est normal que la Parole de Dieu braque le projecteur sur le Père, cette première personne de la Trinité.

 

J'ai tourné les pages de l'Évangile pour vous et je vous inviterai à le faire vous aussi, chez vous, (si vous le voulez bien, si vous voulez vous donner la peine de vous libérer pour cela) et j'ai regardé toutes les fois où il est question de son Père.

Alors, de plusieurs façons, soit, parce qu'on dit de lui qu'il est Fils (et il y a quelque chose du Père) ou soit qu'il parle de "votre Père" ou "du Père" ou de "notre Père" ou il parle à son Père et c'est assez instructif.

 

 Vous savez que dans la vie de Jésus, il y a deux grandes balises et puis au milieu il y a une perle : la première balise c'est le baptême de Jésus, où il est question à son baptême de cette voix accompagnée de l'Esprit Saint qui arrive comme cette colombe, planant et cette voix qui désigne Jésus comme le Fils (et c'est ainsi que l'on comprend que c'est le Père qui parle).

 Et puis l'autre balise, c'est la transfiguration ; pareil, une voix qui désigne cette fois-ci Jésus accompagné de Moïse et d'Elie et qui parle du Fils et qui dit : "celui-ci est mon fils bien-aimé, écoutez-le" (par conséquent, cette voix, c'est le Père aussi).

 

Mais Jésus parle de son Père et assez précocement d'ailleurs, quand il a 12 ans ; vous savez, vous qui priez le chapelet, un mystère joyeux, (c'est d'ailleurs le dernier), le recouvrement de Jésus au temple : les parents de Jésus partent en pèlerinage à Jérusalem et puis en revenant chez eux,  ils le perdent et ils le retrouvent dans le temple au milieu des docteurs de la Loi (les sages, les savants) et Marie dit : ‘Mais que fais-tu là?’

 "Mais ne saviez-vous pas qu'il me faut être dans la maison de mon Père ?"  

Marie garde toutes ces paroles, médite tout ça dans son cœur (l'Évangile de Luc nous le dit par deux fois).

Et cette affirmation, elle va mettre du temps à pénétrer dans le cœur de ceux qui ont été témoins de cela, déjà présents aux 12 ans de Jésus.

Mais même après, ce baptême de Jésus, cette voix qui vient du ciel qui le désigne comme le Fils, pour que ceci produise son fruit dans le cœur des témoins, il leur faudra attendre longtemps.

 

Vous savez que Jésus a été inculpé précisément pour cette raison de sa filiation divine ; donc il y a déjà des gens qui étaient contre cela.

 Et puis, les apôtres n'étaient ni pour ni contre mais ils ont eu du mal à entrer là-dedans ; il leur a fallu beaucoup de temps et en fait, pour la plupart, (mis à part Pierre dans sa proclamation de foi où  il va parler du Fils du Dieu vivant), pour tous, il va leur falloir attendre au-delà de la résurrection de Jésus et au fond, quasiment à la veille de l'Ascension, qu'ils finissent par rentrer dans une foi aux trois dimensions : ne pas seulement rester à Jésus, ce merveilleux personnage avec lequel ils ont fait route et pour que Jésus ouvre le rideau, d’une certaine façon et qu'il dévoile ce qu'il y a dans les coulisses de sa propre vie et que du coup, ça ouvre le rideau dans leur propre cœur de disciple, cette relation avec le Père.

C'est une foi en trois dimensions à laquelle nous sommes appelés, ce n'est pas simplement une foi soit, en une divinité quelconque, soit en Jésus tout seul mais c'est dans la relation du Père et du Fils.

Donc voilà plusieurs manifestations dans l'Évangile.

 

 Mais Jésus va parler de "votre Père" à plusieurs endroits.

 Vous savez qu'il a fallu qu'il gère des problèmes domestiques, Jésus, avec ses disciples.

 Un des premiers problèmes aura été de correction fraternelle, le pardon ; le pardon à l'intérieur du groupe des disciples et à l'extérieur.

C'est à ce moment-là, (après le grand discours sur la montagne que Jésus va faire dans l'Évangile de Matthieu), il va parler de "votre Père" qui est dans les Cieux et ce "votre Père"-là commande le pardon et le pardon jusqu'à 70 × 7 fois.

Et à ses disciples, (là encore, problème domestique), ses disciples qui sont pétrifiés par le souci (les disciples, ils étaient comme nous : ils étaient stressés), là encore, il va parler de "votre Père" : "vous valez bien plus que tous les oiseaux du ciel" ; "votre Père sait bien de quoi vous avez besoin".

Aux disciples préoccupés de bien faire et notamment, de montrer qu'ils prient, il va leur dire : "enfermez-vous dans votre chambre" ; "votre Père qui est dans les Cieux, sait de quoi vous avez besoin, inutile que vous rabâchiez inutilement".

Vous savez c’est ce petit texte que l'on entend le mercredi des Cendres, au début du Carême.

Il va y avoir encore d'autres allusions au "votre Père", notamment lorsqu'il va être question de la patience, de la patience dans nos prières.

 Vous savez, Jésus va utiliser une parabole : le juge inique et la veuve qui ne va pas perdre patience et frapper longtemps à la porte du juge : "rends-moi justice, rends-moi justice, rends-moi justice".

 "Cette femme me fatigue je vais donc lui rendre justice", pour parler de la persévérance de la prière à "votre Père".

 

Alors, j'ouvre une petite parenthèse pour vous dire que : vous savez, quels sont ceux qui assez tôt, ont pigé que Jésus était Fils de Dieu ?

 Mis à part ceux qui étaient autour de Jésus au baptême, ce sont les démons ; les démons savaient qui il était et Jésus leur enjoint de se taire, de ne rien dire.

Je ferme la parenthèse.

 

 Jésus va parler de "notre Père", pas en de nombreux endroits, mais on a un endroit célèbre, vous le connaissez : c'est quand ses disciples viennent le voir et lui demandent : "apprends-nous à prier".

"Quand vous priez, dites : notre Père".

C'est cette prière que nous faisons nôtre à chaque fois que nous prions, comme tout à l'heure.

 

Enfin Jésus (et c'est précieux) va parler à son Père.

Il va le faire par exemple, en cette perle dont je vous ai parlé tout à l'heure : c'est quand il va s'adresser à son Père au retour des disciples, les 72 qui sont partis en mission.

Sous l'action de l'Esprit Saint : "je te bénis Père, Seigneur du ciel et de la terre, d'avoir caché tout cela aux sages et aux savants et de l'avoir révélé aux tout- petits. "

Mais cette grande prière du chapitre 17 de l'Évangile de Jean  dont je vous ai parlé dans l'introduction et que nous avons entendue dans l'Évangile, c'est sans doute la plus belle fois où Jésus s'adresse à son Père : c'est son intimité dévoilée.

 

 Alors, ce que je vous invite à faire, pour entrer dans la connaissance de Jésus et de l'aimer, (connaître et aimer Jésus), pour mieux recevoir l'Esprit Saint à la Pentecôte, c'est (si vous le voulez bien), ouvrir les pages de votre Évangile et, à défaut d'en faire plus, lire le chapitre 17 de l'Évangile de Jean.

Et, sans faire semblant, mais en s'y préparant, se réjouir avec Jésus car tout le désir de Jésus était d'accomplir la mission que son Père lui avait confiée.

Et, au moment où il rejoint son Père, à l'Ascension, il ne peut être que dans la joie : il l'a rejoint, sa mission est accomplie.

Et la joie, la joie des disciples, c'est aussi de savoir que Jésus est auprès de son Père.

Alors, en lisant cette prière du chapitre 17, que nous puissions nous-mêmes nous réjouir un tout petit peu.

 Ce Jésus qui a prié dans ce chapitre 17, là, tout de suite, maintenant, il est auprès de son Père.

 

 Eh bien, si on a un tout petit début de quelque chose qui ressemble à de la joie, alors on est pur, très pur pour recevoir l'Esprit Saint.

 

Amen. 


Jeudi de l’Ascension :

Ac 1, 1-11 : L’Ascension.

Ps 46

Ep 1, 17-23 : Triomphe et suprématie du Christ.

Mt 28, 16-20 : Apparition en Galilée et mission universelle.

 

Chers amis, je vous disais en introduction tout à l'heure, que la joie des disciples c'est de savoir le Fils proche de son Père ; donc l'Ascension, cet événement, très matériellement, situe Jésus proche de son Père.

Mais la joie du Fils c'est que les disciples soient désormais heureux, joyeux et joyeux d'être partis, envoyés en mission : c'est-à-dire mûrs, prêts, qu'ils soient prêts ; voilà, ça c'est la joie du Fils.

 

Voyez, une joie engendre l'autre, ce qui nous permet de dire que l'Ascension, c'était un double événement.

 Le premier événement c'est Jésus qui monte (c'est dans le mot Ascension), le deuxième événement c'est les disciples qui lâchent la main du Maître et qui partent, qui sont envoyés : eux qui ont été engendrés par Jésus, leur Maître, à leur tour, ils peuvent engendrer ; à leur tour, ça y est, les voilà partis, ils vont faire à leur tour, des disciples, ils vont devenir des premier de cordée en pleine confiance.

 

Et ce basculement de l'un à l'autre, (de : nous sommes encore engendrés par Jésus à à notre tour nous allons engendrer),  ce basculement-là est un basculement qui ne va pas de soi.

Vous pouvez prendre l'image d'un petit enfant qui n'a pas encore marché et qui, pour la première fois, va faire ses premiers pas : vous voyez bien, toutes les mamans et les papas qui ont fait cette expérience avec leur petit, vous voyez bien que, il y a à la fois un désir pour l'enfant et en même temps une sorte de réticences ; pareil pour les grands : ah je vais faire le pas, je ne le fais pas, finalement je le fais, ah il bascule et non, il y va ; voilà !

Eh bien donc, c'est pareil pour nous

                   et c'est pareil pour les disciples

                   et c'est pareil pour la vie de l'Eglise.

C'est une sorte de tension entre : ça y est on est mûr, on y va, on est prêt (une Eglise qui se met en route, qui est prête à partir sur les places et les parvis) et en même temps quelques réticences, résistances : ah ! on n'est pas prêt, on se tâte encore le pouls, on hésite.

Eh bien ça, c'est le temps de l'Eglise depuis les commencements.

L'Esprit Saint, dans 10 jours, à la Pentecôte, va achever, va couper les derniers petits liens qui produisent en nous des résistances.

 

Jésus a passé son temps à préparer ses disciples à devenir mûrs et grands ; il a passé son temps.

Quand il a commencé son ministère, tout de suite après son baptême, qu'est-ce qu'il dit ?

Il reprend pratiquement les mots de Jean-Baptiste : "convertissez-vous, le Royaume des Cieux est proche".

 Rappelez-vous ce qu'on disait dimanche dernier : le Royaume des cieux, c'est précisément cette disposition du cœur du disciple qui est prêt et mûr (ce n'est pas simplement ce qui se passera après notre mort dans le Ciel) ; le Royaume des cieux c'est ici et maintenant, investi de la puissance de l'Esprit.

Alors il dit aux disciples : préparez-vous, le Royaume des Cieux, il est proche et donc, il les prépare,  il les prépare,  il les prépare: tout son enseignement, ses miracles, ses exemples préparent les disciples.

 À un moment donné, Jésus se prépare lui-même ; il sent que, petit à petit, il marche vers sa Passion ; il sent.  

Et donc, quand il sort de Jéricho, après avoir guéri l'aveugle Bartimée, le texte de l'Evangile nous dit : "il se prépare et il durcit sa face" au moment où il commence l'ascension vers Jérusalem.

Et puis, une fois à Jérusalem, il va citer plusieurs paraboles qui vont exhorter les disciples à la vigilance, à la veille : maintenant, les disciples, il faut que vous vous prépariez à accueillir le moment de votre maturité, cette fois-ci cela va vous tomber dessus sans que vous sachiez quand, alors soyez comme des intendants fidèles, soyez comme des veilleurs.

Sans que vous sachiez quand, à un moment donné, le Fils va partir et vous serez envoyés.

Ça a été repris dans la première lecture, Jésus va dire à ses disciples, (là encore, pendant cette marche vers Jérusalem, il va dire) : il ne vous appartient pas de savoir quand est-ce que ça va arriver, seul le Père le sait ; même le Fils et les anges ne le savent pas.

Ce moment où vous allez être prêt, personne ne le sait sauf le Père, même pas moi Jésus, je ne le sais pas (ça a été repris dans la première lecture).

C'est pour dire que : comment préparer quelqu'un à lâcher la main sans qu'on sache précisément la seconde à laquelle il doit lâcher la main ?

C'est-à-dire que Jésus lui-même ne le sait pas pour lui.

 

Et puis commence cette longue marche vers la Passion.

Alors, il y en a qui se préparent à cela : vous allez avoir, par exemple, les chefs des prêtres qui se préparent à livrer Jésus,  

vous allez avoir Jésus qui prépare son dernier repas,       

vous allez avoir Judas qui se prépare à livrer Jésus, aussi              

et vous allez avoir cette belle figure de la femme de Béthanie qui va, elle aussi, préparer ce temps, ce moment, où enfin, la maturité de la foi arrivera.

Qu'est-ce qu'elle fait ?

Elle fait une onction d'huile sur la tête et sur les pieds de Jésus.

Et Jésus dit : on se souviendra de son geste tous les jours jusqu'à la fin des temps, on se souviendra de ce qu'elle a fait pour moi

Voyez, donc elle, elle a préparé, elle aussi, ce moment.

 

 La mort et la résurrection de Jésus, mais les disciples n'étaient toujours pas prêts : il leur a fallu 40 jours, qu'il apparaisse ressuscité auprès des disciples pour continuer à leur faire comprendre ce qu'ils auraient dû comprendre depuis longtemps, 40 jours.

 

Et voilà l'Évangile que l'on a entendu : les disciples sont là au bon moment.

Le bon endroit, ce n'était pas compliqué, Jésus l'avait dit, il avait dit : c'est sur cette montagne ; donc, ils y sont.

Mais ils se retrouvent au bon moment, ils sont là au moment où, précisément, Jésus les quitte ; donc, bon rendez-vous au bon moment.

Ils étaient mûrs, ils sont prêts.

Eh bien, cet événement-là, c'est ce qui habite notre vie de baptisés : nous sommes perpétuellement des hommes et des femmes en préparation à être envoyés : soyons vigilants, tenons-nous près, c'est à l'instant où on ne s'y attend pas que l'on devient des témoins.

Et c'est souvent un notre corps défendant.  

Je ne vais pas être avec mon petit texte dans la main ; ah oui, mais si je rencontre quelqu'un dans la rue, il faut que je lui dise ça, ça, ça, ça, ça ; non, non ce n'est pas ça !

 C'est quand on ne s'y attend pas que, toc, je suis témoin, vraiment, de ce Christ et Seigneur.

 

Alors, une façon de nous préparer, très concrètement, pour nous, vous savez, c'est d'aimer et de connaître Jésus.

 Et aimer et connaître Jésus, je vous le répète, ça ne s'infuse pas en nous comme un sachet de thé le matin dans l'eau chaude, dans nos vies ; il faut lire l'Évangile,

 il faut devenir familier des gestes de Jésus, de ses paroles,

 il faut devenir familier de son rythme,

on pourrait presque dire familier de sa voix (mais bon, on ne l'a pas enregistré),

familier de tout ce que l'Évangile peut nous dire de lui.

 Et plus je le connais, plus je l'aime, plus je suis prêt, plus je suis prêt.

C'est une façon de faire comme la femme de Béthanie : cette onction sur sa tête et sur ses pieds.

Nous sommes proches du Christ et nous ne manifestons par à notre disposition et notre amour, notre volonté d'être toujours prêts, le moment venu.

Eh bien voilà, l'Ascension, c'est ça : on est prêt, Seigneur.

 

Dans dix jours, l’Esprit Saint viendra confirmer en nous, cet élan qui naît par notre baptême.

 

Chers amis, stimulons-nous par ces habitudes que nous mettons progressivement dans nos vies de toujours mieux connaître et toujours mieux aimer le Christ.

Amen. 

 


Mercredi 24 mai

Ac 17, 15.22-18, 1 : Paul à Athènes. Discours de Paul à l’aréopage.

Ps 148

Jn 16, 12-15 : la venue du paraclet.

 

C'est le temps de la séparation d’avec Jésus, c'est le temps de l'envoi en mission, c'est le temps de l'Esprit, le temps de l'Eglise, le temps où, les uns et les autres que nous sommes par notre baptême ou par le don de l'Esprit Saint, nous sommes conduits à nous laisser guider par l'Esprit et les événements, les événements et l'Esprit.

 

Cette fois-ci, bien que nous savons que le Christ est devant nous, il n'est plus notre Maître mais il devient le Fils et c'est nous qui sommes projetés comme ça, dans le monde, sans que ce soit lui qui, à notre place, prend des initiatives, à notre place, suscite les événements et les rencontres : c'est nous qui sommes projetés dans ces événements.

Alors, il nous promet le don de l'Esprit Saint, celui qui va, pour chacun d'entre nous, éclairer et guider et tracer dans notre cœur le chemin.

 

Alors, la rencontre de Paul à l'aréopage, est une sorte de cas d'école et souvent l'Eglise réutilise cet événement de la rencontre à Athènes, de Paul à l'aréopage, en se disant : au fond, aujourd'hui, nous sommes tous dans des aréopages modernes en fait, c'est-à-dire que nous avons affaire à des personnes qui, dans le meilleur des cas, veulent bien nous entendre mais pour lesquelles la résurrection ne veut rien dire et avec le sentiment, là encore d'être dans un aréopage comme Paul parce que notre parole peut sembler ne pas rencontrer beaucoup d'audience.

Pourtant, il y en a quelques-uns qui l’accueillent et puis, se convertissent.

 

Qu'est-ce qui nous est adressé aujourd'hui, dans cet Évangile, la veille de l'Ascension ?

 Nous sommes enjoints plus que jamais, alors que nous savons que Christ va remonter à la droite du Père, nous sommes enjoints plus que jamais à faire de Jésus un modèle et notre trésor : tellement le connaître, tellement le connaître et tellement l'aimer que tout ce que nous serons amenés à vivre, dès aujourd'hui, ne pourra en nous, que susciter toujours la bonne réponse et la bonne attitude parce que nous connaissons Jésus et nous l'aimons.

 

Il ne peut pas y avoir de vide, il ne peut pas y avoir d'inconnu, il ne peut pas y avoir de piège dans ce que nous allons vivre, (dans ce que nous vivons) parce que nous connaissons le Christ et qu'au fond, ce monde et son histoire, (puisque nous connaissons tellement Jésus), ce monde et son histoire nous disent quelque chose de Jésus.

 

Et nous savons que Jésus n'est pas allé à sa perte : l'histoire de Jésus est une victoire.

Alors, du coup, nous avons suffisamment en nous, (dans notre trésor), nous avons suffisamment d'éléments pour décrypter et discerner ce que nous avons à dire et à faire.

 Et cette activité de discernement, c'est l'Esprit Saint.

 

Je vous invite à retourner à deux paroles de Jésus, dans sa vie publique qui peuvent nous stimuler à toujours plus le connaître et toujours plus l'aimer.

Alors, vous savez, il n'y a pas de mystère : on ne connaît pas Jésus comme ça, (j'allais dire par l'opération du Saint Esprit), on le connaît parce que on l'étudie.

 On l'étudie Jésus, il ne vient pas, il n'est pas infusé en nous comme le thé du matin ; il faut aller le chercher dans l'Évangile, il faut le chercher dans l'Évangile.

Ce qui est spirituel c'est le désir en nous et c'est ce qui va sortir de nos lèvres et ce qui va sortir de nos cœurs, mais s'il n'y a rien à sortir, on est vide effectivement : on est comme des vieilles serviettes.

Donc, il faut aller l'étudier.

 

Deux paroles qui peuvent nous stimuler : la première dans l'Évangile de Luc, (je l'ai cherchée pour vous, au chapitre 12) on réclame des signes à Jésus.

Mais il dit : quand vous voyez un nuage c'est levé au matin, vous savez qu'il fera beau ; quand vous voyez le vent, vous savez qu'il fera chaud ; eh bien alors, pourquoi est-ce que vous n'êtes pas capable de discerner les signes, si vous êtes vraiment attachés ? Pourquoi ne discernez-vous pas ce temps-ci ?

C'est la question qu'il adresse à ses disciples.

Or maintenant, ses disciples le connaissent, nous le connaissons, nous n'avons plus besoin de signes : tout dans l'histoire nous dit Jésus ; tout dans notre temps nous dit Jésus.

 

Et la deuxième parole, l'exhortation aux disciples un petit peu inquiets, pleins de soucis : mais vendez donc vos biens, en aumône, faites-vous des bourses avec les richesses du Ciel, car là où sera votre trésor, là sera votre cœur.

Ne thésaurisez pas avec ce qui va être mangé par les mites.

Or tout ce que l'on connaît de Jésus ne peut pas être mangé par les mites, c'est éternel, c'est une valeur sûre, c'est un placement vers lequel il faut courir tout de suite.

Eh bien, que notre cœur soit tellement rempli de Jésus-Christ que, en toute chose et en toute occasion ce soit Christ qui transpire en nous.

 

Faites-vous des trésors dans le Ciel que les mites ne peuvent pas atteindre ; là où est votre cœur, là est votre trésor et réciproquement : ça c'est la deuxième parole.

Et la première parole : on est capable de discerner les signes des temps, nous sommes de bons météorologues ; alors, pourquoi ne sommes-nous pas capables de distinguer Jésus ?

Mais si, nous le sommes puisque nous connaissons Jésus, enfin tout du moins, me semble-t-il !

Voilà, donc nous sommes invités à la veille de l'Ascension à réviser  notre connaissance de Jésus.

 

Amen.


Mardi 23 mai

Ac 16 , 22-34 : Délivrance merveilleuse des missionnaires.

Ps 137

Jn 16, 5-11 : la venue du Paraclet.

 

Dans ce chapitre 16, nous sommes dans un grand discours, déjà commencé hier, où Jésus inaugure le discours par toutes les tribulations que vous connaître les disciples, après son départ : ils vont connaître la persécution, ils vont être livrés aux tribunaux.

Et puis, son discours se transforme progressivement et nous sommes sur la charnière, aujourd'hui : il va annoncer la joie, la joie promise à tous ceux et à toutes celles qui vont recevoir l'Esprit Saint et accepter de laisser partir Jésus et de prendre, à leur tour, leur rôle, leur rôle d'envoyés.

 

Il annonce également qu'il va y avoir une sorte de discrimination, une sorte de décantation.

Les disciples, comme Jésus, vont connaître à leur tour la culpabilité du monde en matière de péché, de justice et de jugement : une sorte de trois piliers ou trois pierres d'achoppement que le Christ aura connus durant son itinéraire terrestre.

 

Alors, en matière de péché, nous pourrions, par exemple, relire toutes les rencontres que Jésus a eues avec des pécheurs ;

en matière de justice, tout ce qu'il aura connu, toutes les controverses qu'il aura eues autour du sabbat

et en matière de jugement, toutes les controverses qu'il aura eues en relation avec son autorité.

Il y a ceux qui vont reconnaître son autorité et s'en réjouir et ceux qui vont soupçonner que Jésus agit par le doigt de Béelzéboul.

Eh bien, ces trois piliers, ces trois controverses, ces trois pierres d'achoppement, les disciples les connaîtront à leur tour ; ils ne pourront pas y échapper.

C'est comme une sorte de mystères qui habitent notre monde.

 

Et ça n'est pas parce que nous les rencontrons que nous allons faillir ; et ça n'est pas parce que nous les rencontrons que Dieu est impuissant.

C'est une sorte de réalité très incarnée qui fait partie de notre humanité.

Et au contraire, tous ceux et toutes celles qui vont être confrontés à ces trois piliers, qu'ils sachent qu'ils peuvent s'appuyer sur l'Esprit Saint, lui, qui fera le moment voulu, nous ressouvenir de toutes les paroles de Jésus.

 

Souvenez-vous de ce que Jésus dit, à un moment donné, dans l'Évangile de Matthieu, il rapporte ou il dit à ses disciples : "ce n'est pas parce que vous me direz, "Seigneur, Seigneur" que vous pourrez rentrer dans le Royaume des Cieux" ou bien encore que vous me direz que vous avez expulsé des démons en mon nom.

Ça ne suffit pas, il faut faire la volonté de mon Père.

Et la volonté du Père c'est de porter à notre tour, la croix.

C'est ça peut-être, la partie la moins heureuse du discours de Jésus : c'est le porter à notre tour la croix et d'être livrés à notre tour à ces trois mystères dont Jésus nous parle : péché, justice et jugement.

 

Mais la résurrection nous est promise à nous aussi.

Le Maître, le premier, a été ressuscité ; pourquoi alors douterions-nous de notre propre succès puisque nous sommes dans l'Esprit Saint ?

Alors, nous sommes acculés à nous positionner : croyons-nous ou ne croyons-nous pas ?

Si vous communiez à Jésus, peut-être, vous croyez !

 

Amen.


Dimanche 21 mai : 6ème dimanche de Pâques

Ac 8, 5-8. 14-17 : Philippe en Samarie.

Ps 65

1 P 3, 15-18 : Obligations des chrétiens dans la persécution.

Jn 14, 15-21 :   Les adieux

 

Chers amis, nous sommes pendant ce temps d'attente de l'Ascension de Jésus.

Déjà, les textes de l'Ecriture nous promettent ce don de l'Esprit Saint et dès dimanche prochain, nous pourrons nous identifier à Marie et les autres apôtres, qui, dans la chambre haute, priaient et attendaient ce don.

 

Mais, nous allons donc nous laisser instruire par cette promesse de cet autre défenseur qui nous est donnée par Jésus.

Nous savons que, dans le récit de la création, l'Esprit Saint plane sur les eaux ("l'esprit plane sur les eaux") ; cet esprit qui est donné par le Créateur et qui traverse toute sa création et toutes ses créatures : c'est le désir de Dieu lui-même.

 Et nous savons que (en tout cas, c'est dans notre foi), qu’avec ce qu’on appelle la faute originelle, ce désir de Dieu qui traverse chaque créature est comme divisé dans le cœur de chacun d'entre nous ; et comme il nous a été rappelé dans cette deuxième lecture : c'est bel et bien la mort et la résurrection de Jésus qui vient réconcilier cet esprit en chacun, qui fait que ce désir que Dieu a mis en chacun d'entre nous, retrouve son unité originelle.

Et tant qu'il n'a pas retrouvé son unité originelle, ce désir se transforme en violence, peur, impatience etc.

C'est le Christ, lui-même, qui vient produire cette unification de nos cœurs.

 

Alors, l'Esprit Saint descend lui aussi sur Jésus et nous le voyons, dès son baptême, planer sur Jésus, cette fois-ci non pas sur les eaux, mais sur celui qui sort des eaux : Jésus ; nous entendons cette voix qui descend du ciel : "celui-ci est mon fils bien-aimé" et nous voyons cette colombe arriver sur lui.

 

 Il est intéressant de regarder comment cet Esprit Saint traverse la vie même de Jésus : il est à son baptême celui qui va rappeler à tous qu'il est configuré au Père et qu'il vient porter le désir même de Dieu.

 Ce même Esprit Saint va conduire Jésus, tout de suite après, dans le désert des tentations, ce lieu de l'humanisation la plus extrême de Jésus, ce lieu qui rappelle que nous-mêmes, nous avons un esprit qui, dans nos cœurs est divisé et justement, nous succombons à la tentation.

Jésus lui, n'y succombe pas.

Tout de suite après les tentations, Jésus va poursuivre son chemin en Galilée et va manifester, rempli de l'Esprit Saint, toute sa puissance de Fils et son œuvre de réconciliateur, pour nous.

 

 Il est intéressant, chers frères et sœurs, de faire une petite différence dans l'Ecriture : dans l'Évangile selon saint Jean, quand Jean l'évangéliste se rappelle les paroles de Jésus, il va nous parler de la Trinité : celui qui aime et qui connaît Jésus est celui qui va être investi, habité du Père, du Fils et qui va recevoir en lui, l'Esprit Saint.

 C'est ce que nous avons entendu.

Dans l'Évangile de Matthieu, Marc et Luc, ce que les évangélistes ont retenu de Jésus, c'est quelque chose qui est dit différemment mais dont les fruits sont les mêmes : celui qui aime et qui connaît Jésus, va vivre du royaume et ce royaume est l'amour même de Dieu, vécu ici et maintenant et aussi promis pour demain.

Royaume, habitation du Père et du Fils dans nos cœurs, produisent les mêmes fruits : l'amour.

Dans les deux cas, comme en Matthieu, Marc, Luc et comme en Jean, ce que Jésus attend et ce qui produit sa joie c'est que le disciple, les disciples, chacun d'entre nous, nous connaissions et nous aimions Jésus et puis donc, la connaissance produit l'amour mais l'amour appelle à une meilleure connaissance de ce Fils.

 

 Alors justement, pour nous préparer à vivre la Pentecôte (puisque nous sommes dans ce temps de préparation) eh bien, je vous propose de regarder, avec plus de précisions, ce que l'Ecriture nous dit de l'Esprit Saint dans la vie de Jésus.

Après son baptême et après les tentations au désert, Jésus qui traverse la Galilée jusqu'à la montagne de Jérusalem, (le lieu de sa mort et de sa résurrection), on va voir cet Esprit agir en Jésus.

Par exemple : l'Esprit Saint, en Jésus, va produire une grande identification de Jésus avec le prophète Isaïe (ça, c'est juste au moment où Jésus va rentrer dans la synagogue de Nazareth ; vous savez, il va dire : l'Esprit du Seigneur est sur moi et il m'a conféré l'onction).

Nous savons également que l'Esprit Saint va produire en Jésus, une identification de Jésus au Serviteur (c'est juste après la guérison de l'homme à la main sèche, dans la synagogue, cette fois-ci, de Capharnaüm).

Si nous continuons à regarder Jésus et l'Esprit Saint, nous allons voir à un moment donné qu'au retour des 72 apôtres, qui reviennent tout joyeux de mission, Jésus, dans l'Esprit exulte ; il va dire : "je te bénis Père, Seigneur du ciel et de la terre d'avoir caché tout cela aux sages et aux savants et de l'avoir révélé aux tout-petits".

Encore l'action de l'Esprit Saint en Jésus, dans un moment redoutable : c'est le moment où l'on va croire que Jésus n'agit pas avec la force de Dieu mais avec la force du diable ; un peu par jalousie et par envie de chercher des noises à Jésus, ses détracteurs vont lui dire : "c'est par Béelzéboul que tu chasses les démons".

C'est terrible !

Une remise en question très très grande de son autorité et de son identité.

Jésus, qu'est-ce qu'il va répondre ?

 "C'est par l'Esprit de Dieu que je chasse les démons".

Nous pouvons ensuite continuer à regarder la façon dont l'Esprit Saint traverse la vie de Jésus : assurément il est présent au moment de l'institution de l'eucharistie, mais il est aussi celui qui est donné sur la croix (chez Saint-Jean, discrète allusion au don de l'Esprit, cette fois-ci sur la croix, au moment où Jésus expire).

Voilà, le désir de Dieu traverse la vie de Jésus ; il traverse ; un désir pur, unifié.

 

Rappelons-nous : en nous-mêmes, ce désir a besoin d'être purifié.

Nous avons reçu l'Esprit à notre baptême mais c'est en nous approchant de Jésus, en l'aimant, en le connaissant que cet Esprit que nous avons en nous, vient unifier nos cœurs.

 

Alors en conclusion, je vous propose de faire un petit travail chez vous : de regarder l'Évangile (et je vous ai mis quelques références dans vos feuilles, en bas, à l'édito), pour que chacun d'entre vous puisse tirer tous les outils qu'il voudrait tirer, tous les fruits qu'il aurait envie de cueillir pour mieux connaître et aimer Jésus si c’est la condition par laquelle Jésus donne son Esprit.

Le petit travail, c'est de regarder comment dans la vie de Jésus, cet Esprit Saint a affleuré, a jailli et il a jailli toutes les fois où Jésus a manifesté ses émotions, ses propres désirs, ses propres sentiments.

Est-ce que nous connaissons Jésus au point de connaître cela : quelles sont ses émotions, ses sentiments ?

C'est peut-être le moment où il nous ressemble le plus et nous, nous lui ressemblons le plus et c'est peut-être par cette porte-là que nous pouvons mieux le connaître et mieux l’aimer et c'est peut-être de cette façon que l'Esprit Saint peut faire une demeure en nous.

 

Alors, à la fin de cet édito, vous trouverez les moments où Jésus a eu soif,

                                                                    les moments où Jésus a eu faim,

                                                                   vous trouverez les moments où Jésus a eu beaucoup de compassion,

                                                                    les moments où Jésus a été joyeux (il n'y en a pas eu 36 !),                                                       

                                                                    les moments où Jésus a été en colère, navré,

                                                                    les moments où Jésus a été troublé dans son esprit,

                                                                    les moments où Jésus a aimé,

                                                                    les moments où Jésus a été triste ;

C’est bien toutes ces fois-là que Jésus nous ressemble le plus et nous, le plus à lui ;

et par ces portes-là que nous pouvons le plus l’aimer : ainsi, le désir de Dieu peut pénétrer en nous et purifier notre propre désir : il n'y a pas d'autres façons qu'en connaissant davantage Jésus, en approchant de lui.

 

Alors, vous prendrez cette feuille, vous le faites si vous voulez, prenez une loupe si c'est écrit trop petit, vos bibles  et vous avez les références pour tourner les pages de l'Évangile.

Que Jésus devienne pour chacun, plus familier encore et que de cette façon-là, il nous permette de recevoir son Esprit Saint.

Amen.


Vendredi 19 mai 2017

 

Nous savons que tous les propos que Jésus va délivrer durant l’Evangile pendant tout son itinéraire entre la Galilée et Jérusalem s’adresse à tous dans une forme d’universalité. Certains s’adressent avec force aux pharisiens, mais sinon, la grande majorité de ces propos s’adresse aux disciples, qu’ils fassent partie du groupe des douze ou d’un groupe plus large.  

 

Nous savons que les disciples ne sont pas simplement les douze que Jésus appelle. Nous en avons déjà au moins soixante-dix qu’il envoie en mission, et se rajoutent à ceux-là les femmes, les pauvres, ceux qui vont vivre une expérience avec lui sur la route, ce qui va susciter chez eux une profonde conversion. Tous les propos concernant la charité fraternelle, la justice, les questions de préséance etc… (je ne vais pas redire tout l’Evangile pendant une homélie) s’adressent à chacun et ont pour motif d’inviter les uns et les autres à entrer dans une plus grande unité et un amour fraternel.                                                         

 

Il y  a néanmoins plusieurs passages qui sont, de mon point de vue, significatifs de la façon dont le maître s’y est pris pour faire entrer les disciples dans cette expérience de la charité. Je mets de côté le lavement des pieds dont j’ai parlé il y a quelque temps. Il y a d’abord l’expérience des traversées sur le lac. Imaginez le groupe des douze. Ils sont dans une barque. Ils ne peuvent pas s’échapper. Leurs différences, leurs manières variées de réagir face au danger, quelques-uns ont apparemment le pied marin puisqu’il y a au moins Pierre, pêcheur, eh bien sur cette barque ils vont vivre l’expérience de l’effroi, de la peur. Pas de bol puisque dans un cas il y a une tempête et dans l’autre ils voient un fantôme sur l’eau ! Vraiment pas de chance ! Nous savons que les Pères de l’Eglise ont relu ces épisodes des traversées comme étant l’expérience, à leurs yeux, des débuts de l’Eglise, la barque représentant l’Eglise.

 

Et puis la pêche, quand elle intervient, dit quelque chose de la mission. En tout cas cette expérience sur l’eau va être pour les disciples une expérience cohésive, une expérience de création d’une communauté et d’une communauté de disciples. Ils vont, peut-être avec peur, aux forceps, entrer dans le commandement de l’amour. Souvenez-vous, dans l’épisode où Jésus est dans la barque, sur cette barque, ils vont chercher où est le maître, qui dort paisiblement sur un coussin à l’arrière ! Où est le maître ? Eh bien, mine rien, chercher à ce point tous ensemble où est le maître, c’est entrer dans une expérience d’obéissance au commandement. C’est exactement ce que Jésus demande. Dans l’autre épisode, Jésus marche sur l’eau cette fois-ci. Mais cela revient au même parce que ce fantôme va se convertir en maître, ils vont reconnaître le Christ. Et Pierre va vouloir nager… Donc expérience privilégiée, dans la barque, sur l’eau.

D’autres moments : ce sont les repas. Repas que Jésus prend avec ses disciples. Il y a la Cène bien sûr, mais aussi bien avant, les repas qu’il prend avec eux, qui sont souvent, si ce n’est pas toujours, des repas avec des contradicteurs, notamment avec l’exemple de ce repas pris chez un pharisien. Occasion pour Jésus de dire que lui, il est le médecin pour les malades. Il n’a pas peur de fréquenter les pécheurs. Les disciples en prennent peut-être plein les yeux, plein la figure  parce que les pécheurs, ce sont eux, pas des poissons mais des pécheurs, et cela va être l’occasion pour Jésus de redire que ceux-là ont l’époux parmi eux, c’est la raison pour laquelle ils ne jeûnent pas.  Donc les expériences de repas sont aussi des expériences privilégiées pour les disciples d’entrer dans la découverte de celui qui est le maître.        

 

Ils vont faire aussi l’expérience de ceux qui sont les derniers et qui vont être avancés, alors que généralement Jésus critique les pharisiens pour être ceux qui prennent les premières places. Nous sommes pareils, car, en communauté, nous faisons l’expérience d’être dans une barque commune, la communauté qu’est l’Eglise, mais nous sommes aussi autour de la table pour le repas. Alors vous savez que le Ressuscité fait bien les choses, il y a toujours des happy end dans l’Evangile, c’est formidable ! Dans l’Evangile de Jean au chapitre 21 vous avez une barque et un repas. Voilà, il y a les deux en même temps. Les disciples sont retournés sur la mer, cette fois-ci ils n’ont peur de rien, ils sont revenus à leurs filets, et Pierre, qui avait sombré dans l’eau lamentablement voulant marcher sur l’eau avec Jésus, va plonger, pour rejoindre Jésus rapidement sur le bord du lac. Que fait Jésus ? Il prépare le repas.

Tout cela pour vous dire que nous entrons dans l’obéissance au commandement de l’amour en le pratiquant. Voilà. Vous êtes des pratiquants si vous êtes là. Les chrétiens qui ne pratiquent pas, c’est un autre problème. En pratiquant. Et notre expérience de la communauté est tout à la fois l’expérience de la navigation, parfois sur des eaux agitées, et l’expérience du repas où nous fréquentons, les uns et les autres, des pécheurs, occasion d’ailleurs de découvrir que nous le sommes. Mais le Seigneur nous a choisis comme des instruments. Il nous nourrit, mais nous sommes les instruments de sa mission puisque malgré tout, si nous jetons les filets dans l’eau, nous pourrons tirer une pêche abondante.

Amen.


Jeudi 18 mai 2017

 

Dans plusieurs endroits de l’Evangile, pas très fréquents mais quand même, il est question des sentiments de Jésus ou de ses émotions, explicitement, pas ce qu’on imaginerait. Explicitement il est dit qu’à tel endroit il va avoir de la compassion, qu’à tel endroit il va éprouver de la colère, ou une émotion profonde dont on ne sait pas trop la nature, ou de la joie.

 

La joie, en deux endroits. Il y a cet endroit-là où il évoque sa joie à lui, la joie qui d’ailleurs est dans ses disciples, et puis il y a cette joie qui apparaît dans l’Evangile de Luc au retour de mission des soixante-dix. Ils reviennent de mission et ils sont eux-mêmes heureux et ils le disent à Jésus. « Et même, Seigneur, nous avons chassé des démons ! – Réjouissez-vous plutôt que vos noms soient inscrits dans les cieux ». Et Jésus exulte sous l’action de l’Esprit Saint : Je te bénis, Père du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux savants mais de l’avoir révélé aux tout-petits, oui, Père, dans ta grande bonté, etc… Nous avons une manifestation trinitaire : ce que le Père a voulu, ce que le Fils a voulu.

 

Eh bien nous sommes dans le même grand mouvement que cette joie dont il est question dans l’Evangile de Jean. Quel est ce mouvement ? La joie du Fils, c’est que ceux qu’il instruit, ceux qui sont à ses côtés et qui sont là pour découvrir son secret à lui, eh bien que ceux-là vivent de son secret, qu’ils s’ouvrent et soient des témoins, des ambassadeurs du Royaume dans leurs relations, dans leur envoi auprès de ceux vers lesquels ils vont, et qu’ils vivent du Royaume. Eh bien cela, ça produit beaucoup de joie pour le Fils.

Au fond nous nous préparons à vivre la Pentecôte, et la Pentecôte c’est pour nous notre vrai envoi. Nous sommes, d’une certaine façon, lâchés : Allez, allez-y, n’ayez pas peur, l’Esprit est avec vous ! Et, pourvu que nous en éprouvions de la joie, au quotidien, pas simplement ce jour-là, tous les jours, cette joie sera aussi celle du Fils.

 

Une autre façon de dire les choses : Jésus se réjouit et se réjouira chaque fois que nous éprouvons notre relation à lui. Quand un apprenti découvre un métier, un art,  et commence à l’exercer, à le pratiquer de plus en plus seul, c’est dans les situations d’inconnu, d’inédit, qu’il va se référer à son maître. Ah ! Qu’est-ce qu’il m’avait appris qu’il fallait faire si …? Petit à petit il va éprouver de l’aisance et de la liberté, non pas pour s’affranchir de son maître, mais pour créer à son tour et en se réjouissant d’avoir appris de son maître. C’est pareil pour nous.

Que cette liberté que nous pourrions à notre tour éprouver soit la joie du Fils et réciproquement. Attachons-nous à ce que notre maître nous a enseigné.

 

Amen.


Mercredi 17 mai 2017

 

« Tout sarment qui porte du fruit, mon Père le purifie en le taillant pour qu’il en porte davantage ». Cette affirmation est à la fois pleine de beauté et elle est en même temps douloureuse parce qu’elle nous rappelle que, qui que nous soyons et quoi qu’il en soit, nous allons subir des retranchements et des incisions dans notre vie, par le Père lui-même, des obligations de nous remettre en question. Et nous pouvons donner sens à cette parole par ce que Jésus, une fois de plus, a vécu lui-même.   

 

Quand nous regardons Jésus, nous voyons qu’il commence sa mission et que sa mission se déploie dans un contexte de pression très grande. Les foules sont nombreuses ; on vient à lui le jour comme la nuit ; les foules se pressent autour de lui. Ayant en même temps à la foi une reconnaissance et une gloire importantes autour de son autorité qui attire à lui et en même temps un soupçon qui naît et qui va susciter le drame que l’on connaît. Il va devoir se situer au milieu de cela. Et très tôt, pour que lui-même puisse continuer à porter du fruit, vont apparaître en lui deux dimensions.

La première dimension, c’est que va se creuser sa prière à son Père et ce n’est pas un hasard si l’on voit, au tout début de sa mission, alors que les foules viennent à lui en quantité et qu’il est même obligé de procéder à des guérisons et à des libérations en pleine nuit, ce n’est pas un hasard si c’est dans ce contexte-là que sa prière au Père va grandir, va apparaître, va se manifester. Jésus qui, de nuit, part à l’écart pour prier son Père, ou bien, qui prie son Père avant de faire des choix importants.

La deuxième dimension c’est que Jésus va chercher la juste place, la juste distance. Regardez par exemple la façon dont, alors qu’il est pressé par les foules, il va aller sur une barque, pour s’éloigner un petit peu. On va donner des explications en disant que c’est parce que l’eau porte la voix et de mieux s’adresser aux gens etc… il s’éloigne un peu, non pas pour aller sur l’autre rive, mais pour pouvoir parler à ces gens-là. Il va trouver, il va trouver la juste place pour ne pas être écrasé et ne pas être dispersé par les personnes.

 

Et puis, je vous avais annoncé deux dimensions mais il y en a une troisième, il va mettre en œuvre des outils missionnaires pour l’aider. Il appuie qui il veut, qui il veut. Pas ceux qui s’imposent, mais qui il veut. Ce n’est pas un groupe de parfaits, on n’arrête pas de le dire : il y a des prêtres, des bras cassés etc, etc…

 

Il les associe à sa tâche en leur confiant l’apprentissage sur le terrain. Par exemple au moment de la multiplication des pains : « Donnez-leur vous-mêmes à manger, rassemblez les gens par groupes de cinquante, ramassez ce qu’il reste »… ce n’est pas lui qui le fait. On a d’autres exemples comme cela de la façon dont il associe ses disciples et il les forme sur ce terrain-là. Un autre exemple : alors qu’ils descendent de la montagne de la Transfiguration, ses disciples rencontrent une famille qui leur fait une demande. La famille leur demande de guérir leur fils qui apparemment est épileptique. Ils n’y arrivent pas. Seule la prière peut sauver de cette maladie. Alors il les enseigne et là, c’est un enseignement sur la prière.

 

Voilà pour Jésus une façon d’être émondé par son Père à travers tous les événements qu’il rencontre sur le terrain qui est le sien. Et en même temps sa façon à lui de porter du fruit. Il n’aurait pas été attaché à son Père, qu’est-ce cela aurait produit ? On n’en sait rien puisqu’il était attaché à son Père, mais on a des exemples dans l’Evangile de personnages qui n’ont pas été attachés. C’est l’exemple de Judas, l’exemple par excellence. Pourquoi n’a-t-il pas été attaché ? Nous n’en savons rien non plus. Mais il ne l’a pas été. Cela l’a conduit à sa perte.

 

Pierre, lui, a été attaché car il s’est laissé, plusieurs fois, pardonner. Et quel est le résultat ? Le plus beau résultat, la vigne qui porte du fruit, ce n’est pas par tout ce qu’il a mis en œuvre. Le plus beau résultat, c’est l’efficacité de la prière. Et c’est cela qui nous est promis à chacun. Celui qui reste attaché au Christ, sa prière devient efficace. « Demandez ce que vous voulez en mon nom, mon Père vous l’accordera ». Celui qui est émondé dans sa vie a peur d’une seule chose c’est de perdre la vie, mais s’il reste attaché au Christ tout ce qui va l’émonder ne va pas produire de la poudre mais va produire du fruit.                  

 

L’efficacité de la prière… La prière n’a jamais été aussi efficace qu’en contexte de mort et en contexte de dépendance : Père, j’ai besoin de toi ! On en a un très bel exemple : je reviens à Simon-Pierre. Très curieusement ce n’est pas un exemple de la fin de l’Evangile, mais un exemple du début : vous savez, le moment où Jésus appelle Pierre. Un peu après il est sur sa barque avec lui. Jésus donne l’ordre de jeter les filets. Pierre, il en a ras-le-bol ! « Mais maître, on a peiné toute la nuit hein ! Mais sur ta parole je vais jeter les filets ». Vous allez dire que ce n’est pas une prière. Eh bien si, c’est une prière quand même. Ce n’est peut-être pas une prière de demande mais c’est une prière d’abandon, l’abandon à la Providence. J’en ai ras-le-bol mais je vais écouter ta Parole.

 

Amen.


Mardi 16 mai 2017

 

Les Actes des Apôtres que nous lisons de manière suivie nous montrent Paul et Barnabé investis ou habités par cette puissance que Jésus promet à ses disciples dans l’Evangile, cette paix, cette présence qui va les protéger du « prince du monde ».                           

 

En écoutant les paroles de Jésus on peut méditer, si vous le voulez, sur d’autres passages de l’Evangile où l’on voit Jésus en prise avec ce fameux « prince de ce monde », mais en même temps, complètement attaché ou soutenu par son père. Je pense tout particulièrement aux tentations dans le désert, ces quarante jours et quarante nuits que Jésus passe dans le désert où nous savons que le « prince du monde » va suggérer des tentations à Jésus, mais que Jésus, par la parole de Dieu, de son Père, qu’il a faite sienne, va être victorieux de ces tentations. Il ne va pas faire semblant d’être tenté, il va l’être complètement. Il va être victorieux.                                    

 

Et cet itinéraire de Jésus dans le désert peut nous faire penser à notre propre vocation de baptisés. Non pas que nous soyons dans des déserts, mais notre vie est celle-là, attachés à la Parole, fidèlement et loyalement, et de l’autre côté, ce « prince du monde » que Jésus évoque aussi d’une autre façon à ses disciples en en parlant en termes de « loup » lorsqu’il envoie ses disciples dans le monde « comme des brebis au milieu des loups ».                                                                     

 

J’avais aussi en tête un autre passage plus rapide où il est plutôt question de l’ange qui apparaît à Marie au moment de l’Annonciation. Il invite Marie à être dans la paix, en tout cas à ne pas craindre, un peu comme Jésus nous propose sa paix. Nous savons que, ressuscité, quand il apparaît à ses disciples, il leur donne la paix. Cette paix, c’est une paix dynamique, qui est en construction, et qui, à aucun moment, ne préserve de quoi que ce soit.                                                  

 

Et peut-être aussi que nous pourrions entendre ce passage de l’Evangile un peu à la façon des Béatitudes. « Bienheureux êtes-vous pauvres de cœur, les affamés et les assoiffés de justice, ceux qui pleurent etc »…                                             

 

Donc cette tension dans une réalité toute humaine vécue par chacun. Et ce que Jésus promet comme étant déjà réalisé maintenant dans ces mêmes existences. Bienheureux, dit-il, c’est une invitation à rester très lié à Jésus. Très lié à sa Parole, invitation à le contempler dans son chemin parce que nous-mêmes, lorsque viennent les adversités, quand nous avons besoin que cette paix produise son fruit dans nos vies, eh bien que véritablement nous en vivions parce que nous avons dans notre cœur l’image de Jésus.

 

Amen.


Vendredi 12 mai 2017

 

Nous avons déjà entendu ce texte le mercredi 3 mai. Nous le réentendons. Prendre sa place, avoir sa place, c’est tout une affaire. Si Jésus nous promet que nous aurons la nôtre dans la maison du Père, eh bien c’est déjà une très belle affaire. Mais ce qui déjà nous occupe sur terre c’est de prendre notre place dans un monde où on peut s’accuser les uns les autres qu’un tel ne nous laisse pas notre place, que d’autres prennent trop de place, que telle autre personne n’ose pas prendre sa place etc…

A bien y réfléchir, avoir sa place est une question récurrente dans la vie personnelle de chacun mais aussi dans une communauté, a fortiori.  

 

Jésus, il a plusieurs fois donné leur place à l’un ou l’autre qui sur sa route ne l’avaient pas. Il y a cet épisode extraordinaire, rempli de symbole d’ailleurs, de cet homme paralytique, qui est amené par ses compagnons par le toit de la maison où se trouvait Jésus. Il ne pouvait pas passer par la porte tellement il y avait de monde. Vous vous souvenez, ceux qui étaient à l’intérieur de cette maison étaient, en particulier, des pharisiens, qui récriminaient contre Jésus. Ils avaient pris toute la place. Et cet homme va la trouver sa place. Mais il aura fallu qu’il soit porté par ses compagnons, qu’il passe par le toit de la maison et qu’il porte son brancard. Si cet homme n’avait pas sa place, c’est peut-être aussi parce qu’il ne la prenait pas, allez savoir ! Comme il était paralysé il ne pouvait pas la prendre. Mais il ressort avec la trace de sa paralysie, sous le bras !                     

 

Puis nous avons cet autre épisode fameux de l’aveugle. Là encore, il ne pouvait pas prendre sa place, il ne voyait pas clair, le brave, sur la route qui allait de Jéricho à Jérusalem. Et puis la foule l’empêchait de rencontrer Jésus par le brouhaha et par la barrière que cela constituait. C’est parce qu’il va se mettre à crier que le Seigneur va l’entendre. « Amenez-le vers moi ». Et cet homme, Bartimée, va être conduit vers Jésus, et va retrouver sa place, ou peut-être la trouver, pour la première fois. Joyeusement il va se mettre en route.   

 

Alors, déjà dans l’Evangile Jésus a pu donner leur place à des personnes qui ne l’avaient pas. On pourrait multiplier les exemples, les pécheurs etc… C’est bien notre secrète espérance. Nous qui sommes baptisés, nous savons que nous sommes engendrés par le Père. Nous sommes enfants de Dieu et nous le devenons chaque jour davantage comme nous l’avons chanté dans le refrain du psaume « de mon sein je t’ai engendré ». Mais c’est un chemin, c’est dynamique, tout n’est pas donné, il faut avancer. Et puis dans la Prière Eucharistique nous allons prier pour le retour du Fils, comme nous le faisons à chaque messe, ce Fils qui monte à la droite du Père à l’Ascension. Nous savons qu’à la fin des temps, au moment, à l’heure que le Seigneur aura choisie, chacun aura sa place.

 

Amen.


Jeudi 11 mai 2017

 

Nous sommes passés par-dessus l’épisode du lavement des pieds, hier nous avons vu un passage qui était avant et là nous sommes après, et ce qui s’impose à nous dans les propos de Jésus, c’est la référence à sa condition de serviteur, ce que le célèbre extrait de l’épître de Saint Paul aux Philippiens nous rappelle : « Lui qui était à l’égal de Dieu, a renoncé et s’est fait serviteur. »

 

Tous ces épisodes de l’itinéraire de Jésus, nous redisent combien il est le serviteur. Il est né comme un pauvre, dans cette mangeoire de Bethléem, il a laissé venir à lui les enfants, il est allé à la rencontre de nombreux pauvres, possédés, malades et pécheurs. Il a été pris aux entrailles par la faim de nombreuses foules, et il a, bien entendu, lavé les pieds des disciples.                          

 

Tout cela pour redire que même si, aux yeux des foules, son itinéraire a été nimbé de gloire et de pouvoir, il ne s’est pas laissé aller à cette gloire et à ce pouvoir.    

C’est le sens des tentations qu’il a vécues au début de son ministère, dans le désert. C’est le sens de ce geste du lavement des pieds. Ce qu’il a vécu toute sa vie en est un exemple, pas seulement le geste de laver les pieds, et il invite ses disciples à faire de même.         

A prendre cette forme du serviteur, Jésus n’a pas été plus grand que son Père. Il a une grande liberté et un grand pouvoir, que lui a confié son Père. Nous avons entendu cela quand nous étions à la messe à Bayel lundi. Mais ce pouvoir ne fait pas de lui quelqu’un de supérieur à son Père. Il continue à recevoir ceux que son Père attire à lui, et la mission qui est la sienne.     

 

Alors ceux qui se réclament du Christ sont invités à entrer dans cette même posture. Et même d’ailleurs, jusqu’à un certain point qui peut apparaître comme une ligne rouge pour nous : c’est la ligne rouge de l’adversité, de l’opposition et de la remise en question.  

 

Bien entendu, au milieu d’eux il y a cette figure de Judas, cette citation du psaume que fait Jésus, « celui qui mange du pain avec moi m’a frappé du talon » jusqu’au bout dans sa condition de serviteur, Jésus aura vécu avec ces adversités. Comme autant d’éléments qui entrent dans son itinéraire d’envoyé. Et nous-mêmes, que ferons-nous ?

 

Amen.


Mercredi 10 mai 2017

 

Hier, j’avais parlé des mains de Jésus, aujourd’hui, contre toute attente, je parlerai de ses pieds. Ce texte que nous avons lu au chapitre 12 de l’évangile de Saint Jean est enclavé entre l’onction de Béthanie et ensuite le départ et l’entrée de Jésus à Jérusalem triomphalement, c’est ce que nous fêtons aux Rameaux.    

Cette onction à Béthanie est faite par Marie, la sœur de Lazare, un peu après que Lazare a été sorti du tombeau. Cette sœur de Lazare oint les pieds de Jésus d’un parfum très précieux et les essuie de ses cheveux. 

 

Un peu après ce passage que nous venons d’entendre il y a le lavement des pieds, au chapitre 13. Les pieds des disciples, cette fois-ci. L’évangile d’aujourd’hui, que je viens de lire, est comme un grand récapitulatif de tout ce que Jésus va dire de lui dans cette partie de l’évangile de Jean. Il commence par l’appel des premiers disciples ou du moins l’accueil des premiers disciples, jusqu’à ce moment-là. Ces mêmes disciples, tout de suite après, Jésus va leur apprendre à se laver les pieds les uns aux autres, à être au service les uns des autres. Evidemment il n’est pas question de pieds dans ce passage, mais nous avons, à travers les pieds, un symbole de la mission : les pieds de l’envoyé, dans l’Ancien Testament, de celui qui vient annoncer la nouvelle, les envoyés du roi, les émissaires, et là, c’est l’envoyé même du Père : Jésus, le Fils.   

 

Sa mission, il l’a reçue. Il ne cesse de le dire et de le clamer, il vient du Père et il retourne au Père, et tous ceux qu’il reçoit, c’est le Père qui les attire vers lui. Nous le voyons beaucoup dans les autres évangiles, Marc, Luc, Matthieu, marcher, marcher, marcher… de la Galilée jusqu’à Jérusalem. Il fait des tours, il monte et il invite ses disciples à faire de même, il les envoie en mission. Et lorsque dans une maison ils ne sont pas accueillis, il leur donne la consigne de secouer la poussière de leurs pieds. C’est une petite image pour rappeler que Jésus est l’envoyé et qu’ils ont à entrer dans cette foi, qui est d’abord un don, nous l’avons dit hier, et à se rappeler qu’il y a du mouvement. Il y a beaucoup de  déplacement dans le cœur de Dieu, ce déplacement qu’il faut pour venir à la rencontre de chacun. Il y a beaucoup de patience, la patience qu’il faut pour pouvoir atteindre chacun.      

Dieu se déplace, comme le Père envoie son Fils, et c’est dans cette contemplation-là que nous sommes appelés à demeurer, et à regarder, contempler, aimer ce Fils envoyé par le Père, ce Fils qui lui remet tout.

 


Mardi 9 mai 2017

 

Ceux du peuple juif qui sont autour de Jésus dans le temple, ou bien ne sont pas les mêmes que ceux qui étaient autour de Jésus quand il avait douze ans, ou bien ils ont la mémoire courte, ou bien ils ont vraiment de la mauvaise volonté. Car à ce moment, quand Jésus avait douze ans, les gens qui l’écoutaient, les docteurs de la loi étaient en admiration devant ce petit prodige et puis les mêmes font cercle autour de lui encore, quelques années plus tard, et d’autres aussi. Mais cette fois-ci ils ont à la main une pierre pour le lapider, nous le savons au verset d’après, que je n’ai pas lu.

 

Ils sont aveugles, ils l’avouent eux-mêmes dans le chapitre précédent, vous savez, c’est ce chapitre où Jésus a guéri cet aveugle de Siloë, on l’a entendu pendant le carême, au terme de tout un enseignement où l’aveugle finit par ne plus l’être. Et ceux qui sont à écouter Jésus et qui en même temps sont contre lui finissent par dire avec un peu d’ironie : « c’est peut-être nous qui sommes aveugles ». Ah oui, eh bien oui, c’est vous, peut-être. En tout cas, c’est ce qui semble se passer. Ceux qui sont là autour de Jésus ne reconnaissent pas son identité divine : « Le Père et moi nous sommes un ». C’est l’affirmation de Jésus la plus atroce à leurs oreilles, qui signe sa condamnation à mort.

 

J’ai beaucoup médité sur les mains de Jésus ce matin en regardant cet évangile. Je me suis dit que, après avoir été dans ce temple à l’âge de douze ans, Jésus a travaillé dans l’atelier de son père, varlope et rabot à la main, et, peu à peu, il a lâché ses outils pour accueillir dans sa mains ceux que son père lui donne, ses brebis : « c’est mon Père qui me les a données et personne ne pourra les arracher de ma main » dit-il. Cet échange entre le père et le fils, non pas entre Joseph et Jésus, mais entre le Père du ciel et le Fils. Ce n’est plus un échange d’outils mais un échange de brebis. Le fils accueille tous ceux que le Père attire vers lui et lui donne. Ce Fils ne cesse pas de révéler la profondeur et la beauté de cette relation qui le lie à son Père.

Et c’est ce que les auditeurs du temple ne veulent pas entendre. Ils sont peut-être restés à un âge perdu de Jésus, à ce qu’ils en avaient vu, ils en sont peut-être encore au fils du charpentier, alors qu’il est, qu’il a toujours été le Fils du Père. Alors, dans ce petit passage d’évangile, ils posent une question, ces fameux juifs : combien de temps vas-tu nous tenir en haleine ? Le texte grec dit : « combien de temps vas-tu tenir notre âme en suspens ? » Je pense que Jésus ne tient rien du tout pour le coup à ce moment-là, surtout pas leur âme. Il tient les brebis que le Père lui donne. Et c’est peut-être eux-mêmes, pour une raison mystérieuse, qui maintiennent leurs propres âmes en suspens, dans un autre temps, mais peut-être pas dans l’actualité de Dieu.

 

Croire est un don, demandons-le pour nous.

Amen.


 

Dimanche 7 mai 2017

 

Chers amis,

 

Depuis le temps de Pâques jusqu’à la Pentecôte, nous sommes sur un chemin, qui nous est proposé à chaque messe, un chemin sur lequel nous sommes ravis, où nous nous laissons ravir par la beauté de Jésus, par la beauté de Jésus ressuscité, une beauté qui nous touche, une beauté qui crée en nous une émotion, un sentiment ; et cette émotion, ce sentiment produisent en nous  confiance, joie, espérance, audace.

On peut le dire plus clairement encore en prenant les mots de Saint Paul, non pas dans la lecture que nous avons faite mais dans une autre, la lettre aux Ephésiens, où il va dire qu’il a connu et qu’il voudrait faire connaître la longueur, la largeur, la profondeur, la hauteur, la puissance de l’amour du Christ.                  

Ce qui est la Pâque en nous, ce sentiment, cette émotion devant la beauté du Ressuscité c’est l’amour. L’amour, mais pas notre amour à nous tout seuls, un amour plus grand que l’on reçoit et qui vient vraiment nous toucher. Pour le dire encore autrement, une image nous vient de Saint Jean, là, je viens de la lire à l’instant dans l’Evangile. Quand Saint Jean se souvient des paroles de Jésus, il va se souvenir de son discours et de cette image qu’il utilise, une image pastorale : un berger, des brebis. N’en restons pas à la vision très horizontale et grégaire des moutons. Berger-brebis, ce qui va compter au fond, c’est la relation. Il insiste beaucoup Jésus dans son Evangile sur la relation d’amour et de confiance, d’espérance qu’il peut y avoir dans cette image pastorale entre les brebis et le berger et les brebis entre elles.

Ces brebis connaissent la voix et lui connaît chacune par son nom.   

 

Cela peut nous faire penser à la façon dont Jésus a appelé ses disciples, au bord du lac, au guichet de collecteur d’impôt, sous le figuier, par leur nom, il les appelle, même, après une nuit de prière sur la montagne, il les appelle, les douze, pour être avec lui, comme les brebis. Cela peut nous faire aussi penser, cette voix du berger qui conduit le troupeau, à la façon dont Jésus va enseigner, il va pardonner, il va libérer des démons, il va guérir. Nous pouvons être touchés par la façon dont Jésus va rassembler. Jésus va aussi, un peu, mettre de l’ordre dans le troupeau de  ses disciples, par exemple il va essayer de rabaisser, de calmer les prétentions de Jacques et Jean qui veulent être les premiers, ils pensent déjà à être à la droite. Non, non… Il va aussi essayer de ne pas donner trop d’importance à la trahison d’un seul. Car ce berger, celui qui enseigne et qui conduit, a le souci du plus grand nombre. Du plus grand nombre,  pas simplement de quelques brebis trop véhémentes. Il n’exclut pas, jamais. D’ailleurs vous avez repéré dans son image, ce berger n’a ni fusil ni couteau. Il n’est pas le mur, il est la voix et il connaît chacune par son prénom. Ce berger est là pour protéger, pour conduire. Vous avez repéré que les brebis dans ce texte ne sont pas parquées. Elles circulent. Elles se rassemblent en un lieu et puis il les fait sortir. Elles le suivent. Elles bougent les brebis et le berger est là pour faire l’unité et protéger et conduire parce qu’il y a des voleurs et des loups. Il n’entre pas dans le détail. 

 

On sait que pendant tout son chemin de Galilée jusqu’à Jérusalem Jésus a dû faire attention à un certain nombre de ses disciples qui pouvaient  devenir un petit peu démunis et puis il va essayer de protéger les brebis les plus faibles, vous savez lesquelles elles sont, et peut-être que nous en sommes. Dans l’Evangile ça va être femme adultère pardonnée, veuves sur le bord de la route, ça va être ce groupe d’hommes et de femmes affamés, ça va être tous ces pécheurs et ces possédés, brebis blessées qu’il va soigner, un peu comme ce bon samaritain qui va soigner celui qui est comme mort sur le côté de la route, et il va les remettre debout sur pattes  et les laisser prendre leur liberté sauf que leur liberté va consister à suivre celui qui les a soignées. Nous sommes de ce troupeau de pattes brisées, de brebis blessées mais guéries, soignées, accompagnées et, avec sécurité, guidées par ce pasteur.   

Mais attention, dans cette image que Jésus emploie, le seul berger c’est lui. C’est lui le berger, c’est lui le maître. Et nous avons peut-être été tous touchés par ce maître-là, d’une façon ou d’une autre. Il s’est manifesté à nous de plein de façons.

 

Sœur Anne-Christine était sans doute l’un des visages de ce berger. Car aujourd’hui les vocations religieuses et ceux qui ont reçu l’onction pour devenir diacres, prêtres, sont celles et ceux qui sont les porte-voix de ce berger. C’est lui la voix, eux sont les porte-voix. C’est lui la porte et eux sont les portiers. Et il est heureux que par exemple beaucoup puissent reconnaître en sœur Anne-Christine un visage de l’amour de Dieu. Et s’ils ont été touchés, ils ont été touchés par une qualité de sœur Anne-Christine. Et sœur Anne-Christine c’était une femme de prière, une femme de foi, une femme qui avait ses lieux sources. Certains d’entre vous se souviennent des nombreuses fois où elle allait à la fontaine Saint Bernard. Elle n’y allait ni voir l’eau, ni se recueillir exclusivement sur Saint Bernard, sa source, c’était son baptême, le Christ. Si sœur Anne-Christine était touchée par la pauvreté de l’Eglise c’est qu’elle était prête à être visage du trésor. Quel trésor y a-t-il dans l’Eglise ? L’unique maître et berger, le Christ et en même temps, les pauvres. Voilà les deux trésors de l’Eglise. Cela veut dire que c’était une femme qui était habitée par l’Esprit. Elle était porte-voix et portier.

 

Aujourd’hui on prie beaucoup, en ce quatrième dimanche, pour les vocations, toutes les vocations, puis on rétrécit un peu les vocations dans l’Eglise, puis on rétrécit et on dit les vocations de religieuses et de religieux. Il y a plusieurs religieuses parmi vous, sœur Elisabeth est une assistante, sœur Elisabeth, provinciale, qui est sœur du Très Saint Sauveur, dont était sœur Anne-Christine et les sœurs qui sont aujourd’hui Yvette, Pierrette, Blandine, puis les sœurs de Notre-Dame de Bon Secours de Troyes qui sont à Bar-sur-Aube ; on prie pour les religieuses et les religieux, pour Frère Pierre-Marie ; et puis on rétrécit encore et on va prier pour ceux qui ont reçu l’onction pour leur ordination. Notre diacre Maurice : ce matin, comme tous les dimanches matin il va porter la communion aux personnes malades. Pendant que la messe est à la télévision ils reçoivent la communion. Il était avec nous à la messe hier soir à Bar-sur-Aube et il sera avec nous à la messe demain matin à Bayel, le 8 mai. Et puis on prie pour les prêtres, tous les prêtres, on prie pour les évêques, parce qu’à travers l’Eucharistie, ou le service de la parole, ou de la communion, dans une communauté, comme ils peuvent, ils essaient d’être portiers et porte-voix. Mais portiers et porte-voix de l’unique berger. L’unique, c’est Jésus. Alors prions pour ceux et celles qui nous ont touchés, l’abbé Ponjarlet ici par exemple, que certains ont bien connu. Pour ces visages de prêtres qui nous ont marqués rendons grâce au Seigneur que le Seigneur nous ait rejoints à travers ces visages qui nous ont marqués. Prions pour ces sœurs qui nous ont marqués remercions le Seigneur qui vient nous rejoindre à travers ces visages ; et prions pour les diacres qui nous ont marqués etc…

 

Mais c’est l’Unique. C’est la beauté du Ressuscité qui nous ravit le cœur,  Profondeur, hauteur, largeur, puissance de l’amour de Dieu.


Vendredi 5 mai

Ac 9,1-20 : La vocation de Saul.

Ps 116

Jn 6, 52-59 : Le pain de Vie.

 

Nous sommes dans cet enseignement de Jésus sur le pain de vie qui a commencé hier, qui se poursuit.

 

Nous pouvons retenir déjà le souci de réalisme de Jésus : si, le plus possible, il souhaite ne pas en rester au symbole, en insistant très très fort sur la réalité de la chair, du sang, de la mastication, de la bibition (du verbe boire), c'est pour nous dire, qu'au fond, la proximité ou le lien qui nous relie à Jésus n'est pas que symbolique, non plus.

Il est de l'ordre de l'identification.

 

Sa vie nous regarde et nous regardons sa vie ; nous sommes dans cette relation du disciple qui regarde son Maître, le Maître qui renvoie au disciple.

Sa vie (de Jésus), est un exemple pour nous et un exemple, non pas à reproduire dans les belles choses qui nous attireraient, mais elle est aussi un exemple dans le sens où nos propres passions, nos propres passages, nos propres souffrances ont leur place à l'intérieur de sa vie.

Nous ne sommes pas en train de suivre un programme, nous sommes avec Jésus dans une relation de disciple, de marche ensemble, d'accompagnement, compagnonnage.

L'image des disciples d'Emmaüs convient bien : cette route que les deux disciples font avec celui qui se révèle peu à peu.

 

En ce sens d'ailleurs, l'allusion à la vocation de Saul est intéressante, dans cette première lecture ; car là encore, sur la route, (la route de celui qui devient Paul), le Maître se révèle.

‘Chair et sang’ n'est donc pas à prendre exclusivement au sens du symbole mais au sens du réalisme : toute notre vie de chair et de sang est regardée ainsi qu'elle regarde celle de Jésus.

 

 Le deuxième aspect c'est : de même que Jésus est tout tourné vers son Père, il reçoit sa mission de lui et il redonne tout au Père (c'est ce que nous célébrons dans l'eucharistie), de même pour nous, avec le Fils : il en est pour nous avec Jésus (et ça je viens de le développer) comme il en est entre Jésus et son Père.

 

Et en conclusion, cette identification que nous avons avec Jésus ne peut pas aller jusqu'à prendre la place de Jésus.

Ça arrive parfois, une espèce de fantasme spirituel, de prendre la place de celui qui est sur la croix ou s'offrir à sa place sur l'autel, dans des formes d'excès, d'idéal.

Mais ça n'est pas possible car nous nous laissons regarder par sa vie, sa vie n'est pas la nôtre, nous sommes des disciples.

Ce qui peut parfois, contribuer à nous alléger, car ce n'est pas nous la source du salut, nous la recevons et c'est le sens de notre eucharistie, là encore.

 

Amen.


Jeudi 4 mai :

Ac 8, 26-40 : Philippe baptise un eunuque.

Ps 65

Jn 6, 44-51 : Discours dans la synagogue de Caphanaüm.

 

"Je vous le dis, il a la vie éternelle, celui qui croit".

C'est un discours prononcé bien avant la Passion et la Résurrection de Jésus ; mais nous savons que tous les signes, miracles qui peuvent être accomplis par Jésus (surtout dans l'Évangile de Jean) évoquent le mystère de Pâques.

 Ils évoquent la puissance de la foi en Jésus ressuscité ; ils évoquent les fruits produits par la foi en la résurrection, dans notre vie.

 

Celui qui croit, c'est celui qui mange de ce pain, qui accepte d’en manger ; et en mangeant ce pain, il mange le crucifié.

Il ne mange pas seulement le Ressuscité, il mange le crucifié ; il mange celui qui s'offre en nourriture, qui s'offre pour l'Alliance nouvelle et éternelle ainsi que celui qui lave les pieds de ses disciples.

Il mange ce chemin qui va de la vie à la mort et de la mort à la vie ; il mange, il fait sien ce passage, dans la foi.

 

"Celui donc qui mange de ce pain, vivra éternellement"; il traversera de nombreux obstacles dans sa vie, il aura une forme de hauteur de vue, capable de prendre distance avec ces flots tempétueux.

Celui qui mange de ce pain traverse la mer agitée ; celui qui mange de ce pain, même s'il tombe, la main puissante du Seigneur vient le rejoindre.

 

"Personne n'a jamais vu le Père sinon celui qui vient de Dieu".

Celui qui a ce sens de l'amour du Fils pour lui, celui qui se laisse aimer, toucher, celui-là est attiré et celui-là vit sa Pâque avec Jésus.

Peu à peu, nous cheminons vers une découverte ou une redécouverte du pain eucharistique, jour après jour, dimanche après dimanche.

 

Amen. 


Mercredi 3 mai : Sts Philippe et Jacques, apôtres.
1 Co 15, 1-8 : le fait de la résurrection.

Ps 18a

Jn 14, 6-14 : Les adieux.

 

"Comment peux-tu dire : montre-nous le Père ?

Tu ne crois donc pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ?"

Cette absolue unité du Père et du Fils, difficile à reconnaître pour les apôtres, nécessite beaucoup de temps : Jésus déploie beaucoup de pédagogie, de patience pour expliquer, révéler ce qui, dans la vie de ses apôtres est en réalité le fruit d'un don, comme dans notre propre vie : le don de la foi.

 

Cette relation de Jésus, Fils, avec le Père est une relation d'amour et une relation de foi et qui, analogiquement, dit la relation qui nous unit, nous, avec le Fils et entre nous.

Nous savons dans la foi, que nous sommes des frères, des sœurs à l'image de ce Fils, tous tournés vers le même Père parce que nous sommes attirés par le Père vers Jésus ; que Jésus est pour nous l'image de Dieu, Dieu lui-même qui se révèle à chacun.

 

Mais ça vient alimenter ou en permanence réajuster la nature des liens qui demeurent entre nous, entre les baptisés.

Ce sont des liens de charité et de foi, en même temps ; ce ne sont pas des liens d'obligation ni des liens d'ignorance.

Nous sommes frères, sœurs et nous sommes amenés à grandir dans la foi.

Ce chemin parfois long, parfois coûteux de ces relations les uns avec les autres ne peut pas être mû par un autre objectif que celui de répondre à cet impératif de la charité.

 

Et si de temps à autre, cela peut paraître périlleux, si cela peut paraître fatigant, si cela peut paraître presque crucifiant, c'est là que la foi doit absolument réajuster notre manière de nous situer vis-à-vis des autres.

Sommes-nous dans de bonnes relations et de bonnes dispositions intérieures vis-à-vis de nos frères et sœurs, d'une part et d'autre part, qu'est-ce qu'il y aurait en moi, qui à ce point, peut finir par produire un sentiment de crucifixion et de douleur ?

Est-ce que peut-être je n'attends pas de trop de mon frère, de ma sœur ?

Et cette réflexion, le frère, la sœur est invité à la faire lui aussi, elle aussi.

Le Père est en moi, vient éclairer la façon dont chacun est fils, fille et se tourne vers ce Père, révélé en Jésus.

 

Alors, c'est la grâce des apôtres, ces apôtres qui ont été ceux qui ont porté cette puissance du Ressuscité dans ses gestes et ses paroles qui sont devenus des sacrements et qui se sont transmis dans la vie de l'Eglise ; des sacrements qui viennent sanctifier nos relations justement, les bénir, les réconcilier, les élever par l'eucharistie, la confession : tous ces sacrements de la vie chrétienne qui restaurent, réajustent, éclairent la nature de nos liens.

 

Béni sois-tu Seigneur de nous révéler le visage du Père.

N'oublions pas de nous adresser à ce Seigneur, de confier nos frères et de lui demander, en son Nom, qu'il nous permette d'être une vraie famille.

Amen.

 


Dimanche 30 avril : 3ème dimanche de Pâques

Ac 2, 14-33 : Discours de Pierre à la foule.

Ps 15

1P 1, 17-22 : Exigence de la vie nouvelle.

Lc 24, 13-35 : Les deux disciples d’Emmaüs.

 

Chers amis, la liturgie, dimanche après dimanche, entre Pâques jusqu'à la Pentecôte nous invite à avancer très prudemment, lentement et à assurer, (pour nous, assemblée, pour chacun, personnellement), à assurer la naissance d'une conscience d'Eglise ; d'une conscience d'Eglise.

 C'est long, il faut ce temps-là, le temps qu'il faut jusqu'à l'Ascension et ensuite ces quelques jours jusqu'à la Pentecôte.

L'Esprit Saint nous sera donné, ce sera d’une certaine façon,  notre mise en orbite comme Eglise.

Alors, au lieu de nous dire tout de suite : qu'est-ce que l'Eglise ?

Nous allons repartir du foyer ardent de la résurrection.

 

Et que s'est-il passé ?

 « Le Maître et Seigneur, Jésus-Christ, celui que vous avez crucifié, Dieu l’a ressuscité ».

Et nous savons, nous avons un mélange de peine et de joie : peine parce qu'il y a eu sa mort et la joie parce qu'il y a la résurrection ; nous sommes au petit matin de Pâques.

C'est une bonne nouvelle, parce qu’au fond, celui que l’on croyait perdu, ne l'est pas.

 

Et très très vite, c'est le deuxième dimanche de Pâques, nous nous rendons compte que c'est une bonne nouvelle, pour une deuxième raison : sa mort et sa résurrection sont aussi une réconciliation pour nous-mêmes, à l'image de Thomas.

Celui que nous croyions perdu est ressuscité mais  nous-mêmes, nous-mêmes, nous sommes réconciliés en nous et entre nous par sa mort et sa résurrection.

 

Le troisième pas : cette réconciliation en nous-mêmes devient peu à peu, un cœur qui bat.

Comment ?

Nous avons tous des petites misères en nous-mêmes, nous avons tous des petites misères qui deviennent parfois des immenses montagnes.

Il est plaisant de savoir que Jésus, il est mort pour nous et sa résurrection vient nous rassurer dans nos petites misères ; mais  peu à peu, le chemin que nous faisons vers l'Ascension et la Pentecôte, nous dégage de nos petites misères.

Elles ne disparaissent pas, nous avons toujours un cœur fêlé, mais ces petites misères, nous les tournons dans la prière et dans l'action de grâce, dans l'eucharistie, nous les tournons vers le Père.

 Nous ne sommes plus tout seuls à porter ces petites misères.

 

Marie est ce symbole-là.

Vous vous souvenez que, juste après la résurrection de Jésus, Marie, nous la présentons comme ‘celle qui porte dans son cœur et qui médite tous ces événements’ ; eh bien, nous devenons nous-mêmes peu à peu, une Eglise mariale et nous la verrons à la veille de la Pentecôte priant, cette Marie.

 

Une Eglise au cœur palpitant c'est une Eglise qui a conscience de la souffrance, du péché, de la misère de chacun de ses enfants et du monde entier ; mais au lieu de se recroqueviller sur elle-même, parce que cette misère et cette souffrance lui font mal, cette Eglise l'offre.

 Du coup, elle n'est plus fermée sur elle mais elle devient un instrument ; un instrument pour que circule l'amour de Dieu.

 

Oui, chacun d'entre nous, nous avons des raisons de nous fermer, nous avons des raisons, peut-être, de toujours être fixés sur un point dans le passé ; tous, personne n'échappe à ça, cela fait partie de notre nature.

 

Et puisque nous croyons en la résurrection (pas seuls mais en Eglise), nous savons que nous ne sommes plus des hommes du passé (des hommes et des femmes) mais nous sommes des instruments de la communication de l'amour de Dieu, à tous.

Et comment faisons-nous ?

Eh bien, nous le faisons à l'image de cet Évangile : nous avons l'Ecriture vers laquelle nous sommes toujours appelés à revenir ; et même si nous sommes hyper savants dans l'Ecriture, nous ne l’épuiserons jamais.

Et puis, nous avons l'eucharistie ; alors, on peut faire des grandes descriptions de l'eucharistie, mais il faut d'abord la vivre.

Et l'un et l'autre, ensemble, (pour personnellement et toujours pour nos communautés), nous sortent de notre coque, de notre gangue et permettent que nous devenions un cœur palpitant, non pas un cœur souffrant mais un cœur palpitant qui aime et qui diffuse.

Et c'est ce que nous voyons naître aujourd'hui, ce troisième dimanche de Pâques, comme Marie : elle attendait avec les autres apôtres, elle priait que l'Esprit Saint vienne.

Alors nous sommes dans cette attente, dans cette avant-veille du don de l'Esprit Saint mais c'est ce que nous sommes, comme Eglise.

Alors c'est lent parce qu'un cœur meurtri, ne repart pas tout de suite, comme ça ; il faut du temps, mais ne perdons pas cet horizon, ne perdons pas cet horizon.

 

Raison de plus : si nous avons des raisons d'être fermés en nous-mêmes, ça veut dire que nous sommes capables de porter dans notre prière et dans notre service de la Parole et de la charité, nous sommes capables de porter les situations les plus difficiles, précisément parce que nous avons cette capacité à souffrir.

Et un amour n'est pas fait pour être toujours dans cette retenue, mais pour se communiquer et c’est ce dont nous avons besoin et c'est la mission que nous donne l'Esprit Saint.

 

 Ne quittons jamais l'Ecriture et l'eucharistie et ainsi, peu à peu, nous allons être ce cœur palpitant qui aime et qui aime, qui diffuse et qui diffuse comme c'est le cas pour ces nouveaux apôtres du lendemain de la résurrection : Pierre par exemple (deuxième lecture) et puis pour Cléophas et son compagnon, dans l'Évangile.

Soyons une Eglise mariale, soyons une Eglise mariale.

Amen.


Jeudi 27 avril :

Ac 5, 27-33 : Comparution devant le Sanhédrin.

Ps 33

Jn 3, 31-36 : Ministère de Jésus en Judée. Ultime témoignage de Jean.

 

Un des fruits de la résurrection, c'est la vie de l'Esprit.

Dans la suite de cette rencontre que Jésus fait, de nuit, avec Nicodème, nous avons cette affirmation :"Celui qui vient d'En-Haut est au-dessus de tous.

Celui qui vient du Ciel est au-dessus de tous".

 

Celui-là, c'est d'abord Jésus qui est le Fils.

Les tout premiers chrétiens, après la résurrection, (un peu après, d'ailleurs, l'affirmation du centurion au pied de la croix : "vraiment cet homme était le Fils de Dieu"), pour eux, ce Jésus de Nazareth devenu Christ et Seigneur dans leur foi, (à la découverte du tombeau vide), va devenir de plus en plus le Fils, celui qui va s'asseoir à la droite du Père mais aussi ce Fils qui nous fait devenir fils.

"Celui qui vient d'En-Haut est au-dessus de tous", il s'agit d'abord de Jésus ; mais il s'agit ensuite dans l'Esprit Saint de nous-mêmes.

Nous venons d'En-Haut, nous renaissons d'En-Haut et nous sommes des fils et filles de Dieu par notre témoignage, notre cœur, nos décisions, notre manière de nous situer.

 

Le premier fruit, le plus général et le plus particulier en même temps, c'est l'amour.

Mais concrètement, la vie dans l'Esprit, la résurrection dans notre cœur, c'est notre manière de nous abandonner à Dieu lui-même, pour dépasser toute différence et toute barrière en nous-mêmes.

C'est le Christ qui les brise.

Comme il a fait tomber le mur de la haine entre juifs et païens, il fait tomber en nous ces murs, ces barrières et ces peurs de la différence.

 

 Quand nous ne sommes pas dans la vie selon l'Esprit, nous sommes toujours à apprécier les priorités, à apprécier les situations uniquement à partir de nous-mêmes ; quand nous sommes dans la vie de l'Esprit, apparaît l'intérêt général, ce que l'on appelle le tout, supérieur à la partie.

Et je vais donc pouvoir me situer, m'orienter, me positionner dans l'amour, en ayant toujours cette réalité supérieure qui est le Ciel, certes, mais qui est le rassemblement de tous.

Et c'est ce que Jésus-Christ produit : il rassemble une humanité qui a été déchirée par le péché et à travers son Eglise et dans le temps, cette humanité se reconstitue et reforme un Corps dans la diversité de ses membres.

 

Celui qui juge à partir de lui-même seulement, va défendre un membre de ce Corps, au risque de l'arracher du Corps ;  celui qui renaît de l'Esprit Saint va soigner chacun de ses membres par ce qui va être supérieur, pour lui : c'est l'intégrité et le soin de tout le Corps à travers chacun de ses membres.

 C'est un fruit de la résurrection dans l'Esprit Saint.

 

Donc le premier à venir du Ciel et être au-dessus de tous, c'est le Christ ; ensuite il nous donne de l’être à notre tour, non pas parce que nous volerions en l'air mais parce que nous aurions cette considération haute, celle qui est au-dessus de tout : l'intérêt général, le soin de tous.

 

Demandons au Seigneur de nous faire renaître de cette façon-là : c'est la voie la plus difficile mais la plus prometteuse, car ainsi, la maison que nous bâtissons, qu'il y ait vent, tempête, pluie, grêle ou tremblement de terre,  cette maison demeure.

 

 Amen.


Dimanche 23 avril : Dimanche de la divine Miséricorde

Ac 2, 42-47 : La première communauté chrétienne.

Ps 117

1 P 1, 3-9 : L’héritage accordé par le Père.

Jn 20, 19-31 : Apparition aux disciples.

 

Hier, les enfants, vous vous êtes préparés à recevoir pour la première fois, le pardon de Dieu : vous avez rencontré un prêtre et vous avez donc fait l'expérience de confesser vos péchés et vous avez essayé de découvrir ce qui était un péché et ce qui était une bêtise.

Il se trouve que tous les péchés sont des bêtises mais toutes les bêtises ne sont pas des péchés.

Imaginez un gros péché, péché immense, immense, immense qui produit tristesse, lourdeur, larmes et que ce péché, une fois qu'il est confessé, pardonné par Dieu;  eh bien, ça produit tout le contraire : beaucoup de joie et une libération.

 Alors en fait, plus on grandit, plus on est capable de faire des péchés gigantesques ; quand on est plus jeune, ces péchés, ils sont grands pour nous mais parfois ils sont bien plus petits que ceux des grandes personnes; la joie est combien plus importante.

 

Eh bien les apôtres, quand ils se sont mis à découvrir que Jésus était ressuscité, ça a produit dans leur vie une libération comme si, pour eux, Dieu avait pardonné leurs péchés.

D'ailleurs, ils le disent.

Juste après s'être mis à croire en la résurrection de Jésus, au lieu d'aller voir les autres et dire : 'tu sais, Jésus, il est ressuscité, le tombeau est vide et puis on a vu Jésus se redresser'.

Non ! Ils disent : 'le Seigneur a ressuscité Jésus et il a pardonné nos péchés'; voilà ce qu'ils disent, les apôtres.

 

D'ailleurs, si vous vous souvenez, les enfants (mais c'est vrai pour les grandes personnes) quand vous allez voir un prêtre, qu'il vous donne le pardon de Dieu ; que dit-il ?

 "Que Dieu te montre sa miséricorde.

Par la mort et la résurrection de son Fils, il a réconcilié le monde avec lui" : on reprend cette idée que la résurrection de Jésus, ça réconcilie.

Alors, ça vient réparer quelque chose qui est blessé en nous ; et c’est le réparant, le cicatrisant que ça porte de la douceur et de la joie.

Bon, ça c'était pour les apôtres qui ont vu Jésus et ces apôtres du coup, ils avaient le feu de Dieu en eux ; et pendant quelques années, ce feu de Dieu s'auto-alimentait et ils ont porté plein plein plein de fruits, ils ont pu communiqué ce feu à d'autres : la joie était rayonnante, un foyer ardent.

Eh bien, les apôtres ont fini par disparaître un jour : ils ont vieilli et puis ils sont morts.

Alors comment est-ce qu'on a fait pour les autres ?

 Ce feu ardent, cette joie de la résurrection et de la réconciliation, comment ce sont-elles communiquées, après ?

Parce que ce qui ont vu Jésus, ils n'étaient plus là ; après, ça a été : le baptême.

C'est-à-dire que le baptême a été pratiqué (le baptême, alors le vôtre, il y en a eu dimanche dernier, il y en a eu dans la nuit de samedi à dimanche), le baptême ça a été comme le petit matin de Pâques mais sans avoir été là, à côté du tombeau.

Et cette joie de la résurrection et de la réconciliation est donnée par le baptême.

 

Mais il y a une petite différence avec les apôtres (une autre différence avec les apôtres, en plus du baptême) : c'est que toute cette joie et toute cette réconciliation (chez les apôtres, elles étaient toutes données comme ça : paf !d'un bloc), pour ceux qui reçoivent le baptême, elles sont données comme ça paf !d'un bloc, mais il faut qu'elles se déploient, qu'elles poussent, qu'elles grandissent, il faut que ça innerve toutes les parties de la vie ; c'est la raison pour laquelle, quelqu'un qui est baptisé, doit y apporter beaucoup du sien pour que les fruits de la résurrection poussent dans sa vie.

 Il faut que celui qui est baptisé soit comme un jardinier : il cultive, il cultive, il cultive ce don qui lui est fait, le don de la foi.

Alors les enfants, vous, ce don a été fait à votre baptême ; la prochaine étape, la prochaine saison pour vous, ça va être la première communion ; et il y aura encore une autre saison (on ne vous en a encore pas parlé), beaucoup plus tard : la confirmation, un peu comme pour hop! faire grandir plus encore tout ce don qui vous a été fait à votre baptême.

 

 Le brave Thomas, dont on parle dans cet Évangile, on lui met sur les épaules tous les maux de la terre : 'oh, l'incrédule, il est lent à croire, ce n'est pas bien de ne pas croire comme ça'.

 Enfin, le brave Thomas, il nous ressemble parce qu'il n'a pas vu, au départ ; eh bien nous non plus, nous n'avons pas vu, nous n'étions pas au tombeau, nous n'y étions pas.

Et puis Thomas finit par voir et nous, toujours pas.

 Parce que Thomas a vu, il s'est mis à croire ; que lui dit Jésus ?

 ‘Toi, tu as cru parce que tu as vu ; heureux ceux qui croient sans avoir vu’ ; heureux tous les baptisés, ceux qui n'ont pas vu Jésus en train de ressusciter.

Eh bien, heureux tous les baptisés qui vont faire grandir et laisser grandir en eux, cette foi.

Donc, Thomas est un peu notre symbole à tous, notre image, notre Saint Patron; tous ceux qui n'ont pas vu, c'est-à-dire nous (nous sommes de ceux qui n'ont pas vu) mais qui croyons.

 

Dernier petit message par rapport à Thomas : Thomas, il n'était pas là avec les autres au départ.

 Que faisait-il ?

L'Evangile ne le dit pas, il était ailleurs pour certainement de bonnes raisons.

Et comme il n'était pas avec les autres, il n'a pas pu voir Jésus.

 Et puis ensuite, revenu avec les autres, il a pu voir et croire.

 

La communauté chrétienne le groupe, le groupe que nous formons (comme les apôtres formaient ce groupe, au début) est un lieu important pour que naisse et grandisse la foi.

 Étant dans cette communauté, nous pouvons voir et croire.

N'y étant pas, c'est plus difficile ; et en même temps, cette communauté, parce qu'elle s'ouvre et qu'elle diffuse, elle peut communiquer sa foi.

Mais, nous avons besoin les uns des autres et de beaucoup de miséricorde, pour que d'abord, nous nous y sentions bien dans cette communauté, dans ce groupe et pour que puisse naître et grandir et se consolider notre foi.

Thomas, il a dû passer par son groupe ; pour nous aussi, la communauté est un lieu important ; et par exemple, (pas uniquement pour se tenir chaud, le dimanche), mais la communauté est importante pour célébrer l'eucharistie.

 

Comment feriez-vous pour recevoir Jésus dans l'eucharistie, s'il n'y avait pas de communauté ?

Bien sûr, il y a des malades qui reçoivent l'eucharistie à domicile parce qu'on la leur apporte ; mais cette eucharistie, elle vient bien d'une communauté qui s'est rassemblée.

 C'est nécessaire ; c'est nécessaire pour que cette foi naisse et grandisse.

 

Ayons beaucoup de miséricorde et de tendresse (c'est le dimanche de la miséricorde, aujourd'hui, d’ailleurs, parce que Thomas s'est mis à croire en ayant conscience de son péché : il s'est laissé réconcilier), ayons beaucoup de miséricorde ; laissons-nous réconcilier les uns les autres, dans notre communauté, pour que nous fassions l'expérience du Ressuscité et que nous naissions à la joie.

 

Amen


Vendredi 21 avril :

Ac 4, 1-12 : Pierre et Jean devant le Sanhédrin.

Ps 117

Jn 21, 1-14 :Apparition au bord du lac de Tibériade.

 

Nous apprenons à croire en la résurrection, pendant les jours qui suivent la fête de la résurrection, tous ces jours de l’Octave, les 8 jours qui suivent ; et puis jusqu’à l’Ascension.

Nous essayons de nous enraciner dans la foi en la résurrection ; nous laissons la résurrection s’enraciner en nous.

Alors déjà, dans le texte d’hier, (pareil pour celui d’aujourd’hui), pour bien marquer le réalisme de cette foi, il nous est montré Jésus en train de manger et Jésus mangeant avec ses disciples.

 

Souvenez-vous l’expression d’hier : « un esprit n’a ni chair ni os.

Regardez-moi, j’en ai, touchez »; c’est ce qu’on va entendre dimanche dans la rencontre entre Jésus et Thomas, de sorte que nous ne nous laissions pas aller à une forme d’évasion.

La foi en la résurrection n’est pas une sorte d’évasion dans un autre monde.

Jésus ne nous promet pas que tout se passera plus tard et ailleurs ; c’est aujourd’hui, dans nos vies et donc, il est important qu’il apparaisse en chair et en os (d’une certaine façon) ; ça nous renvoie à notre aujourd’hui, à chacun.

Il y a un appel à l’unification de nos cœurs et la foi en la résurrection, ça ne peut pas être un cœur divisé qui se laisse aller à une espérance vague qu’il aura ailleurs.

Là, on le voit, Jésus mange et il fait manger ses disciples.

 

La deuxième chose qui apparaissait un petit peu moins hier, c’est que Jésus apparaît dans la vie quotidienne de ses disciples.

On peut se demander : tiens ! comment ça se fait qu’ils sont redevenus pêcheurs ?

On ne les a pas vus faire pendant tout l’Evangile : ils l’étaient au début et puis, ils se sont mis à suivre Jésus.

Et puis, hop ! pof ! ils le sont redevenus de nouveau à la fin.

Mais, ce qui compte (à la limite !), c’est que là, c’est dans leur quotidien : ils sont nés pêcheurs de poissons, ils le sont toujours et Jésus les rejoints, là.

 

Il y a un troisième aspect qui est assez beau, je trouve, dans ce texte, c’est que la vie quotidienne de ses disciples se confond avec la mission, la mission.

Bien entendu, on sait (et on sait beaucoup par les Actes de Apôtres), que les disciples qui sont devenus des envoyés, (des apôtres), ne vont plus exercer leur activité quotidienne, même St Paul : qui va être un fabriquant de tentes, ne va plus (enfin, tout du moins, il n’en parle guère), pendant son activité apostolique, fabriquer des tentes.

Il va dire dans ses lettres qu’il n’a pas été redevable de ses communautés pour vivre etc… mais il ne raconte pas son activité professionnelle, comme s’il avait tout quitté.

Mais néanmoins, là, il y a quelque chose de la mission dans cette activité des disciples : cette affaire du filet jeté dans la mer et qui tire quantité de poissons : 153, ça fait causer beaucoup.

On s’est demandé ce que cela pouvait signifier : il y a plein d’explications (entre autres, le nombre de peuples connus à cette époque), mais ce qui peut retenir notre attention, là encore, c’est que ce filet, ne se brise pas, il ne se déchire pas.

Dans un autre Evangile, je pense à Luc et au début de l’Evangile de Luc, ce filet se brise ; là, il ne se brise pas.

 Au fond, ça dit quelque chose de la mission, la mission, vécue dans la foi en la résurrection, dans la confiance, c’est que ce filet de l’Eglise reste intègre et il peut accueillir quantité, quantité de  poissons ; quantité, quantité de personnes différentes, on pourrait dire.

Voilà, c’est sans doute, un des fruits du Ressuscité, dans nos vies.

 

En tout cas, retenons que nous sommes vraiment nés de cette foi en la résurrection mais qu’elle ne va pas de soi.

Ça n’est pas qu’une affaire (et ce n’est pas rien, ce n’est pas rien ce que je vous dis), ce n’est pas qu’une affaire de résurrection après les morts, c’est aussi une profonde espérance  aujourd’hui.

Avec un peu d’humour (c’est de l’humour ce que je vais dire), Dieu ne fait pas de politique.

Ce n’est pas parce qu’il faut jeter à droite ses filets qu’il faut faire pareil ! C’est de l’humour !


Dimanche 16 avril :  Pâques

Ac 10, 34a. 37-43 : Pierre raconte l’histoire de Jésus à Corneille.

Ps 117

Col 3, 1-4 : L’union au Christ céleste, principe de la vie nouvelle.

Jn 20, 1-9 :Le tombeau vide.

 

Vous savez qu’en ces fêtes de Pâques, nous ne sommes pas en train de reproduire un événement qui est unique.

Il est unique, nous ne le reproduisons pas, nous le commémorons ; on fait mémoire, (une sorte d'anniversaire, si vous voulez), de la résurrection de Jésus.

 Or, je vous le rappelle, l'aventure chrétienne, l'Eglise, la foi, naissent de Pâques ; ça naît de Pâques ; c'est aussi un petit peu notre anniversaire, comme communauté de croyants.

 

 Nous sommes devant un événement qui nous a été raconté par nos parents, grands-parents, arrière-grands-parents, le curé, les catéchistes, une culture : Jésus, il est ressuscité ; d'où nos traditions, des cloches, la chasse aux œufs.

Pâques nous a été d'abord raconté.

Personne parmi nous, ne s'est trouvé, au petit matin de Pâques devant le tombeau ouvert ; personne, vous seriez très vieux !

Donc, ça nous a été raconté et cet élan qui est né à Pâques, a été entretenu, nourri, alimenté par ce qu’on en a dit et par l'Esprit Saint.

D'ailleurs, on fêtera l'Esprit Saint à la Pentecôte, plus particulièrement ; il y a de l'Esprit Saint tous les jours et dans le baptême que nous allons célébrer, il y a de l'Esprit Saint : le baptême d'eau et d'esprit ; ça a été alimenté, entretenu.

 

Nous avons dans l'Évangile, que le diacre Étienne nous a lu, trois manières de se situer devant cet événement lointain, durant lequel personne parmi nous, n'était ; trois façons.

La première façon, c'est la façon de Pierre.

 

Alors, vous avez repéré : je vous redis un peu l'histoire, rapidos !

Donc, Marie-Madeleine, le petit matin de Pâques, pof! Le tombeau est ouvert.

Elle est un petit peu comme sidérée : mélange de peur et de surprise ; toc ! elle court voir Pierre et Jean et Pierre et Jean arrivent en courant l'un et l'autre.

Je ne sais pas si vous avez remarqué, il y a comme une course : il y en a un qui court plus vite que l'autre, néanmoins il ne rentre pas tout de suite ; c'est l'autre qui rentre, ensuite le deuxième ; ils sortent ; il y en a un qui voit et l'autre qui croit et puis, ils repartent.

Ça y est, vous vous souvenez de ça ?

Je devrais rajouter une petite suite qui n'a pas été lue, juste après: Marie-Madeleine, elle est encore au tombeau et puis, elle attend, elle pleure : "Où est mon Seigneur ? Son corps n'est pas là ! "

Et puis, elle va le voir ressuscité.

 

Donc je reviens: 3 façons de se situer.

 Pierre ; Pierre c'est l'exemple même, vous savez, c'est celui qui rentre pour constater que tout a bien été plié et rangé dans le sépulcre ; l'exemple même du raisonneur, l'intellectuel, de l'homme qui doit passer tout à la moulinette de sa raison.

Il faut pour lui, constater et puis, parvenir à des conclusions froides : ‘oui, ce qui a été annoncé dans l'Ecriture s'est bien réalisé, je l'ai vu’, mais à partir de preuves.

Et puis, vous avez Jean, celui qui va plus vite et qui va aussi plus vite dans la déduction ; on ne dit pas qu'il raisonne, lui, on dit qu'il croit : c'est l'exemple même de l'amour, mais l'amour dans sa vélocité, dans sa vitesse.

L'un et l'autre fonctionnent ensemble, Pierre et Jean, le raisonneur et l'aimant, celui qui va vite et celui qui ne va pas vite, celui qui passe tout à la moulinette de sa raison et celui qui se laisse aller par la pulsion de son cœur qui aime.

Déjà deux façons.

 

La troisième façon, c'est Marie-Madeleine.

 Marie-Madeleine, c'est la seule qui reste ; les autres, ils repartent.

 Alors, qu'est-ce que ça veut dire ? Ils repartent d'où ils étaient, ils ne demeurent pas près du tombeau.

 Ils ne sont encore pas nés à la foi de la résurrection ; ils en sont restés au stade des preuves.

Marie-Madeleine elle, va se mettre, progressivement, à passer au deuil, et du deuil à la foi en Jésus ressuscité.

Et ça, c'est nous, c'est nous aujourd'hui ; c'est nous, parce qu'aucun d'entre nous ne peut voir ce qu'il y a dans le tombeau, nous n'y sommes plus.

Alors, il y a de la raison, du raisonneur, chez nous et puis il y a de la vélocité peut-être, mais nous, nous sommes tous convoqués à patiemment, patiemment, passer de la tristesse à la consolation, de la déception à la foi, comme nous sommes aujourd'hui, là où nous en sommes, comme on est, chacun.

 

Alors, ces trois 'petits bouts' qui vont être baptisés dans quelques instants, ils vous disent à vous, les parents, que leur baptême ça renouvelle un peu le vôtre, ça vous réengage, ça vous engage à être comme des Marie-Madeleine : de passer à la foi en Jésus ressuscité et ne pas être uniquement des calculateurs, ou pas être uniquement des fugaces ; mais vous êtes appelés comme parents et comme parents chrétiens pour des enfants que vous voulez faire chrétiens, vous êtes appelés à entrer dans une stabilité et à y demeurer, et à demeurer dans l'espérance malgré vos vies comme elles sont.

Il y a peut-être des fins de mois compliquées, il y a peut-être des incertitudes de toute nature, vos vies comme elles sont, avec les deuils difficiles à faire, avec les échecs que vous ne digérez pas et vos doutes, et vos doutes.

Vous êtes appelés à demeurer.

 Là est la différence, là est la différence.

 

 

Une fois que le baptême est passé, ne faites pas comme Pierre et Jean, ne rentrez pas chez vous comme si de rien n'était ; demeurez, demeurez dans cette espérance et stabilité.


Samedi 15 avril : Veillée Pascale

Gn 1, 1-2, 2 : L’œuvre des 6 jours.

Ps 103

Ex 14, 15-15, 1a : Le miracle de la mer.

Ct Ex15 : chant de victoire

Is 55, 1-11 : Invitation finale.

Ct Is 12

Rm 6, 3b-11 : La vie avec le Christ.

Ps 117

Mt 28, 1-10 : Le tombeau vide. Message d l’Ange. L’apparition aux saintes femmes.

 

Pour rentrer dans l'intelligence de cette célébration, ce soir, il faut se remémorer le chemin que nous avons parcouru ces dernières semaines et en particulier, cette semaine qui s'achève.

Cette semaine qui s'achève, nous avons progressivement déposé toute espérance.

Nous nous sommes identifiés à Marie, la Mère des douleurs.

Nous sommes devant le tombeau, dans lequel nous venons de déposer le corps sans vie de notre Maître et Seigneur et nous avons vécu le silence, nous avons vécu la nuit, la nuit de la foi : aujourd'hui, samedi Saint, c'était le jour du grand silence.

 

Oui, par notre foi, nous savons que c'est aussi le début ; germait dans la terre ou germait dans le tombeau, cette espérance : Christ est ressuscité, Christ va ressusciter.

Mais nous nous sommes identifiés à cette Mère des douleurs, comme il nous arrive dans nos vies de passer par des morts et passer par des renoncements, des échecs cuisants, des moments difficiles, parfois (et souvent même) inattendus, causés par la perte d'un proche, par un échec cuisant, par une trahison, par une violence de toute nature et nos vies, qui sont des équilibres permanents, connaissent comme une ruine.

 

Ce que les tout premiers témoins ont vécu au tombeau, c'est ce que nous pouvons vivre plusieurs fois, dans une vie : le silence ; nous sommes partis de là.

Et si nous sommes entrés dans cette église réduite à l'obscurité, c'était pour nous rappeler d'où nous venons : toute existence, (et surtout pour les grandes personnes), passe par ces nuits.

 

Mais voilà que nous sommes entrés avec une lumière qui brillait, allumée au feu, qui, dehors, a été béni et nous rappelait cette espérance, cet événement que nous ne reproduisons pas mais que nous ne faisons que commémorer : Jésus est ressuscité une fois pour toutes.

Cette lumière, dans cette obscurité, a éclairé notre église.

 

Nous avons écouté la Parole de Dieu.

Quand nos vies sont réduites à une toute petite flamme dans la nuit, quand nos vies sont dans la nuit, tout simplement, eh bien, que pouvons-nous faire ?

 

Revenir à nos bases, à nos fondamentaux, creuser pour savoir sur quoi nous sommes bâtis : l'Eglise fait mémoire de toute son histoire, l'histoire qui la précède, ces textes que nous venons de lire en sont le signe (nous n'en avons seulement que quelques-uns).

Nous avons vu à travers ces textes, que, aucun échec n'est définitif, qu'aucun obstacle n'est infranchissable : la mer Rouge s'ouvre, le désert de la soif se transforme en une fontaine d'eau et nous nous sommes rappelés la résurrection du Seigneur.

 

C'est à présent que les baptêmes, à venir, de ces enfants et de ces adultes prennent sens : vous allez être baptisés, mes chers amis, Emeline, Tiphaine (avec Tiphaine, Zoé) et nous avons aussi Victor, Louise et Lucie; vous allez être baptisés.

Victor, Louise et Lucie, vous êtes au KT ; à votre demande ou à celle des parents, vous n'étiez pas baptisés, vous vous préparez à vivre la première des communions cette année, il était donc normal que vous commenciez par le baptême.

Emeline, Tiphaine, (grandes personnes), vous avez à un moment donné, repéré que quelqu'un s'était introduit par effraction dans vos vies ; vous ne saviez pas son nom : Christ, vous l'avez découvert.

Et vous avez découvert aussi que votre vie était passée par des nuits  (la perte d'un proche, une main à lâcher) et vous vous êtes dit, très curieusement : j'ai été rejointe à ce moment-là, par celui qui me faisait signe, sur ma route ; je demande le baptême.

Comme Victor, Louise et Lucie, Emeline, Tiphaine et Zoé, vous allez, en étant baptisés (en recevant l'eau sur vos fronts), vous allez mourir avec le Christ pour ressusciter avec lui : votre vie ancienne va mourir pour renaître avec lui.

 

Il va vous falloir accepter deux conditions, deux conditions (et vous vous y êtes préparés depuis un an, plus, justement, pour les accepter, ces deux conditions).

Tout va être donné dans ce baptême, tout, tout, tout d'un coup, tout, mais il va vous falloir devenir ce que vous êtes : vous êtes enfants de Dieu, eh bien, il va falloir le devenir.

Tout est donné mais il faut que ça pousse, il faut que ça mûrisse, il faut que ça grandisse.

Et la deuxième condition, c'est : tout ce que vous avez reçu, il va falloir le développer et ce sera à vous de le développer.

Tout ce que vous aurez reçu dans ce baptême, il va vous falloir le développer.

Si vous ne vous mettez pas du vôtre, il ne se passera pas grand-chose.

 

Première condition, ce que vous êtes, il va falloir que ça le devienne ; ce que vous avez reçu, il va falloir le faire grandir et pousser.

C'est à ces conditions que vous pourrez naître dans la joie de Pâques, que la joie de votre baptême se renouvellera.

 

Un dernier point : vous avez repéré que le tombeau pascal s'était ouvert (c'est l'Évangile qu’a lu le diacre Etienne)  et on ne peut plus le refermer, c'est fini : il est vide.

Ce jour très important, (ce soir très important) va sans doute marquer vos vies : je vous le souhaite.

Vous ne pourrez jamais le reproduire : ce qui sera vécu ce soir, ne sera vécu qu'une seule fois.

Les autres moments dans votre vie, de résurrection avec Jésus, seront des moments tout neufs.

Une brèche est ouverte, vous ne pourrez pas la refermer.

 

Amen.


Vendredi 14 avril : vendredi Saint

Is 52, 13-53, 12 : Quatrième chant du Serviteur.

Ps 30

He 4, 14-16 ; 5, 7-9 : Le sacerdoce du Christ. Sacrifice terrestre : au jour de sa chair.

Jn 18, 1-19, 42 : La Passion.

 

C'est en ce jour que nous mesurons jusqu'à quel point nous entraîne le mystère de l'Amour.

 

Nous avons trois visages qui se dessinent devant nous.

Dans la première lecture, le visage du Serviteur souffrant ; un personnage mystérieux décrit dans l'Ancien Testament qui préfigure, qui annonce le Christ.

Ce serviteur qui, des siècles avant Jésus, désigne Jésus : LE Serviteur souffrant qui donne sa vie pour nous, pour nous.

 

Dans la deuxième lecture, la lettre aux Hébreux, dans le Nouveau Testament, nous avons cette figure du grand prêtre ; non plus comme ce grand prêtre de l'Ancien Testament ou comme ce grand prêtre qui condamne Jésus, mais ce grand prêtre qui, au lieu de sacrifier des animaux, se donne lui-même, pour nous.

 

Et, troisième figure, ce roi ; ce roi de l'Évangile, la Passion dans St Jean : le Roi des juifs, notre Roi ; un Roi pour nous.

 

Mystère de l'Amour qui s'offre jusqu'au bout, pour nous.

J'insiste sur le : pour nous.

La Passion de Jésus est pour tous, mais aussi, pour nous.

Ne nous refusons pas nous-mêmes, ce don que Dieu fait pour nous.

Dans notre grande générosité, nous voudrions tellement qu'il s'offre pour les autres; il s'offre aussi pour nous, car nous sommes aussi de ceux qui l'ont condamné.

 

Cette dernière scène, dans la Passion, est belle : de même qu'hier, Jésus confiait les disciples les uns aux autres comme des frères à servir, auxquels il convenait de laver les pieds ; Jésus ne pouvant guère aller plus loin que la Croix, sentant sa fin proche, cette fois-ci, livre sa mère au disciple bien-aimé et le disciple bien-aimé à sa mère.

Nous devenons des dons les uns pour les autres, depuis le lavement des pieds et jusqu'à la Croix, offerts par Jésus les uns aux autres : des cadeaux.

 

 

Serviteur souffrant, grand prêtre, Roi, il s'offre pour nous.


Jeudi 13 avril : Jeudi Saint

Ex 12,1-8.11-14 : La Pâque.

Ps115

1 Co 11, 23-26 : Le ‘Repas du Seigneur’

Jn 13, 1-15 : Le lavement des pieds.

 

Chers amis, je ne vous apprends peut-être pas grand-chose, si je vous dis que nous sommes dans un monde en mouvement, perpétuel changement : c'est souvent à l'image de nos corps qui changent, les uns et les autres, après les années qui passent ; mais c'est vrai aussi pour l'organisation de nos sociétés, notre environnement dans lequel nous évoluons ; et ce n'est jamais très agréable, en fait.

 

Dans cette première lecture, il est rappelé que le peuple de Dieu est un peuple qui doit toujours se tenir prêt, toujours ; il ne doit jamais se considérer installé, jamais.

Jamais, il ne doit rentrer dans une forme d'habitude multiséculaire qui inscrirait dans le marbre, sa présence ou un style ; d'ailleurs, si on fait un petit peu d'histoire et qu'on lève le nez et qu'on regarde ce qu'ont vécu nos aïeux, (il y a 100 ans, 200 ans, 300 ans, 1000 ans et plus), nous nous rendons compte que l'histoire de notre Eglise a été, toujours, un changement ; et c'est vrai pour nous, aujourd'hui.

C'est une vocation du chrétien, c'est une vocation : être dans ce mouvement, jamais installé.

Nos aïeux dans la foi, (ça remonte bien avant Jésus, c'est le peuple d'Israël), devaient toujours se rappeler qu'ils sont nomades et que les tout premiers à avoir fait Alliance avec Dieu : Abraham, étaient nomades dans le désert.

 

Pour être toujours en route, il faut de la nourriture, il faut un viatique, de la force, quelque chose qui nous alimente pour que nous ne nous éteignions pas, nous ne tombions pas, morts de faim.

Dieu a souvent donné de la nourriture à son peuple : il a donné, par exemple, la manne dans le désert ; il a donné à boire dans le désert ; et puis, de manière excellente,il a donné une nourriture plus grande encore : c'est son Fils.

 

Jésus qui se donne, c'est Dieu, en Jésus, qui se donne tout entier pour nous alimenter : ça nourrit notre cœur, notre existence ; une nourriture bien particulière.

C'est une nourriture qui ne nous invite pas à nous asseoir pour faire la sieste et digérer, sinon on redeviendrait des gens qui ne bougent plus ; or, notre vocation c'est de bouger.

Alors, cette nourriture, ce n'est pas une nourriture à faire la sieste, c'est une nourriture à nous mettre en route.

Alors, elle a une exigence, c'est que : ce que Dieu donne, nous puissions, à notre tour, le donner.

 

Dieu, il est tout entier Amour ; dans l'Évangile de Jean, Dieu est Amour.

Alors, il n'est pas simplement, pain, il est corps et un corps qui aime.

Cette exigence de l'Amour c'est que nous nous aimions, nous entrions dans cette dynamique de l'Amour.

 

On a coutume de dire que le jeudi Saint, c'est la toute première messe ;c'est surtout l'institution de la messe et la fête de ceux qui la célèbrent et qui consacrent le pain et le vin et qui deviennent corps et sang : les prêtres.

Ça ne fait pas d'eux des grands, grands,pères Foura ou des grands, grands, magiciens ;ça fait d'eux, des serviteurs.

Le prêtre n'est pas là pour être une autorité qui ménage les sensibilités ; il est là pour servir les sensibilités : c'est le sens du lavement des pieds que nous avons entendu dans l'Évangile et que nous allons faire.

 

Le Christ nous invite très concrètement à ce que nous entrions toujours, dans cette dynamique du 'jamais installé', dynamique du mouvement et dans la dynamique du service, de l'amour fraternel.

 

Une communauté d'amis de Jésus, comme on est ce soir, qui n serait là uniquement pour écouter, communier et partir à la fin, serait une communauté prête à mourir parce que ce qui lui manquerait, c'est l'amour, concrètement.

Si nous sommes une communauté, c'est parce que nous sommes donnés les uns aux autres.

 

Alors, nous allons laver les pieds de 12 personnes qui ont été choisies, c'est pour faire comme Jésus nous a demandé de faire, dans l'Évangile.

C'est un exemple, c'est une image ; il y a 1000 façons de laver les pieds des personnes.

Je peux vous donner quelques idées ; une manière de laver les pieds, ça peut être : aller porter la feuille de messe à une voisine qui ne peut pas venir à la messe.

C'est une manière de servir ; on ne lui lave pas les pieds, mais on lui rend service.

Ça peut être : aider concrètement dans la paroisse, faire de l'accueil, par exemple ; (voilà, un service) ;aider à des tâches matérielles (un service) ;

ça peut être visiter à la prison, par exemple ou dans les maisons de retraite (un service) ; et puis, il y a des chrétiens qui sont engagés, au nom de leur foi, dans les conseils municipaux, dans nos villages : c'est aussi une façon de laver les pieds de ses frères.

Il y en a qui font, qui rendent service, sans que jamais ça ne se voit : c'est beau, ils rendent service.

 

Alors, ce qui est bien avec Jésus, c'est qu'il n'est pas utile de montrer à tout le monde qu'on lave les pieds, qu'on rend service; ce n'est pas utile, le tout, c'est de le faire.

En célébrant donc cette eucharistie, nous nous rappelons que nous sommes toujours un peuple en marche, en mouvement.

Soyons prêts à nous mettre en route.

Jésus nous donne sa force pour cette marche et sa force nous contraint, nous oblige à faire comme lui.

 

Amen.


Mercredi 12 avril : mercredi Saint

Is 50, 4-9a : Troisième chant du Serviteur.

Ps 68

Mt 26, 14-25 : Préparatifs du repas pascal. Annonce de la trahison de Judas.

 

Nous avons eu hier, si nous avons feuilleté nos ‘Prions en Eglise’, nos missels ou si nous avons assisté à une eucharistie, nous avons eu un texte presque semblable, une scène semblable, dans l’Evangile de Jean.

Là, cette fois-ci, nous sommes chez Matthieu, ça nous redit peut-être des choses que nous avons entendues dimanche, lors de la lecture la Passion.

 

Dans l’Evangile de Jean, hier, le contenu de cette rencontre, à l’occasion du dernier repas, (rencontre durant laquelle Jésus annonce que quelqu’un va le livrer), était parasitée, si j’ose dire, par la présence du disciple que Jésus aimait ; le disciple que Jésus aimait, était proche de Jésus, (on se le dit) et Simon Pierre s’interroge : « Serait-ce moi Seigneur, qui vais te livrer ? » Et puis, il dit : «Mais je te suivrai partout » etc.

 

Là, il y a quelque chose de plus radical, dans la version que rapporte Matthieu : point de disciple que Jésus aimait, point d’interrogation explicite des autres disciples mais Jésus va droit au but : « Quelqu’un va me livrer », malheur à lui ; une sorte d’invective, (malédiction si on veut), ce n’est pas tellement évident, d’ailleurs, que ce soit une malédiction du même ordre que celles que Jésus prononce, par exemple, quand il s’adresse aux villes qui ne l’accueillent pas.

Mais nous avons là, dans le propos de Jésus, une forte conscience de la gravité de l’acte posé par Judas ; peut-être que les paroles dures que Jésus prononce, montrent que Jésus a bien conscience de qui le livre, et il invite ceux qui sont autour de lui, à avoir vivement conscience de la gravité de ce qui se passe.

Nous ne sommes pas devant un Jésus qui va dire « Of ! c’est pas grave, Dieu aime tout le monde ; de toute façon, celui qui a fait ça est déjà pardonné » ; ce n’est pas la question.

Il y a une sorte de gravité qui pousse, qui monte, qui monte, qui monte.

 

Deux choses encore, que je voudrais vous partager, dans ce texte : c’est que Jésus a l’absolue maîtrise de l’événement.

Il donne des consignes à ses disciples : « allez voir un tel », « préparez la Pâque » etc…

Et la deuxième chose, c’est qu’il est bien question de la Pâque de Jésus et nous sentons que s’ouvre-là, dans le souvenir qu’en a Matthieu, ce qui sera le propre passage de Jésus.

Nous sommes dans la Pâque juive, et qui déjà, reçoit une signification nouvelle dans la bouche de Jésus, sa Pâque à lui : non seulement, la commémoration de la sortie d’Egypte mais surtout, un passage pour le Fils lui-même et qui va consister déjà, par commencer à accepter la trahison de l’un des siens et puis ensuite, progressivement, le passage jusqu’à la Croix et de la Croix à la Résurrection.

 

Maintenant, je voudrais attirer votre attention sur un point qui me semble significatif pour aujourd’hui ; aujourd’hui, la veille du jeudi Saint.

Une fois que nous écartons tout pacifisme de la part de Jésus, (nous ne sommes pas dans une sorte de pacifisme de la part de Jésus, du genre : Dieu aime tout le monde, Il pardonne tout le monde, (c’est sans doute vrai, mais en tout cas, ce n’est pas la question, aujourd’hui) et Jésus n’est pas là pour témoigner d’une non-violence ( ça pourrait peut-être, être vrai, au moment où l’un de ses disciples tranche l’oreille d’un serviteur et que Jésus va, là, se prononcer en défaveur de l’usage du glaive), mais ça n’est pas le cas) ; une fois que nous écartons tout pacifisme, tout amour mièvre de la part du Seigneur, regardons en face l’épaisseur de cette trahison.

Jésus a conscience de qui le livre ; il a conscience et il invite les autres à avoir conscience de la gravité de l’acte.

Il est en face de Judas : « Rabbi, serait-ce moi ? ».

Réponse : « C’est toi-même qui l’a dit. »

 

Que ferions-nous, à la limite, nous-mêmes ?

Voudrions-nous, par exemple, si nous étions à la place de Jésus, nous répandre en justifications et en jugements, profiter de la fenêtre qui s’ouvre pour en remettre une couche ?

Peut-être.

Si ce n’est pas par des paroles, par des gestes, éventuellement une bagarre (ou je ne sais pas quoi) : « arrière Satan », comme il a pu dire à Simon-Pierre.

Si nous étions à la place de Judas, que ferions-nous ou qu’aurions-nous dit de plus ou de moins ?

 

Et les choses étant ainsi posées, demandons- nous si, Jésus aujourd’hui, ne nous invite pas à accueillir tout ce qui va se passer à partir de demain et vendredi, comme un événement qui va faire la vérité ou discriminer nos cœurs ; comme si l’acte de Judas, devant Jésus, renvoyait à toute sorte d’événements ou de moments dans nos vies, où la Parole,(ou la foi en Jésus, en tout cas), nous invite à nous laisser regarder, (on pourrait dire juger, mais pas au sens de condamner), nous laisser regarder ; et pour éviter toute confusion, tous ces événements tels qu’ils sont et tels qu’ils peuvent être parfois (des agressions ou des occasions peut-être pour nous, de chutes, que sais-je ?), laisser ces événements se regarder eux-mêmes.

Enfin, en tout cas, cette rencontre entre Judas et Jésus est une rencontre qui nous invite à faire la vérité et peut-être, commencer à poser quelques distances (avec tout ce qui pourrait entre nous et les autres, nous et n’importe quel événement autour de nous), poser quelques distances pour que règnent, au fond, effectivement, liberté et charité.

 

Jésus se serait répandu en justification, Jésus aurait cherché à faire justice lui-même, l’événement aurait raté, d’une certaine façon.

Judas en aurait rajouté une couche, peut-être que nous ne serions pas allés plus loin.

Or ni l’un ni l’autre n’en rajoute.

Ça montre l’absolue liberté de Jésus et ça le renvoie (et ça le renvoie à nos yeux) à sa condition de Fils ; ça renvoie Judas à sa condition de pécheur ; notez, que ça ne le condamne pas, (notez, que ça ne le condamne pas) : « C’est toi qui le dis ».

Judas, à cet instant, à cet instant effectivement, après cette parole de Jésus, aurait pu éventuellement, ne pas aller au-delà.

Il l’a fait.

Etant allé au-delà, il aurait éventuellement pu, (que sais-je?), ne pas se sentir condamné et anéanti par le Seigneur.

Mais, c’est ce qu’il a fait et il s’est pendu.

Mais notez l’absolue condition du Fils, révélée, là, dans cette scène ; la condition de pécheur, dans sa liberté aussi ; le reste, ça nous renvoie à chacun d’entre nous, à notre absolue liberté, à ce que la Passion de Jésus suscite en nous, de conversion.

 

Demandons au Seigneur, demandons à son Esprit, de ne pas avoir peur de sa miséricorde, de ne pas avoir peur de ce qu’il nous renvoie à chacun d’entre nous et qu’Il fasse naître une plus grande liberté, plus grande que celle de Judas.

Amen.


Dimanche 9 avril : les Rameaux

Entrée à Jérusalem : Mt 21, 1-11

Messe de la Passion :

Is 50, 4-7 : Troisième chant du Serviteur.

Ps 21

Ph 2, 6-11 : Abaissement et relèvement du Christ.

Mt 26, 14-27, 66 : La Passion de notre Seigneur Jésus-Christ.

 

Chers amis, cette fête est pleine d'émotions pour l'Eglise entière, en tout cas, pour moi : d'abord je la trouve belle, non pas parce que nous sommes en face d'un événement plein de douleurs mais parce que nous sommes en face de ce qui est la source de notre salut, de notre foi et qui exprime, au fond, ce que nous sommes, sans masque.

Chacun peut se retrouver dans ce texte, sans masque, peut se trouver, trouver sa place dans l'Eglise, l'Eglise humaine, l'Eglise toute humble qui ne prétend pas faire partie des parfaits mais prétend trouver en Jésus son Sauveur, la source de son propre pardon.

 

Je vous propose de commencer cette semaine Sainte, à la suite de ce texte, et vous laisser conduire.

Vous pouvez vous identifier à l'un de ces personnages : ça peut être les femmes, les plus fidèles, depuis le début du ministère de Jésus en Galilée jusqu'à sa mort sur la croix ; elles vont être présentes aussi à sa résurrection.

Vous pouvez vous identifier à un disciple : prenez exemple, pourquoi pas, sur Pierre ; Pierre, celui qui a affirmé sa fidélité au Seigneur et qui l'a aussi renié, a pleuré amèrement au chant du coq et à qui Jésus a confié son Eglise.

Peut-être, en fonction de nos cœurs, pouvons-nous nous identifier à un grand prêtre, des scribes ou Pilate ; pourquoi pas sa femme, la femme de Pilate, avertie en songe par le Seigneur, elle qui était païenne, exhortant son mari à ne pas se mêler de ces choses-là.

Identifions-nous à l'un de ces personnages et osons entrer dans cette scène, osons prendre notre place : ne soyons pas seulement spectateurs mais entrons au plus près, dans cette scène, proches de Jésus.

 

Ainsi, nous vivrons cette semaine Sainte, non pas comme passifs mais vraiment comme des acteurs qui passons avec Jésus de la mort à la résurrection.

Chers amis, toute l'Eglise, nous-mêmes, pauvres et petits ou bien ambitieux, nous trouvons dans ce texte, le secret de notre cœur, capable des plus grandes choses (telle cette joie que nous avions pour acclamer le Seigneur à l'entrée de Jérusalem) et capable aussi du pire (telle cette foule qui réclame sa mise à mort).

Mais n'ayons pas peur, ne nous croyons pas jugés, croyons-nous aimés.

Celui-là que nous condamnons, nous relèvera à sa résurrection.

 

Amen.


Jeudi 6 avril

Gn 17, 3-9 :

Ps 104

Jn 8, 51-59 :

 

L'exultation d'Abraham peut faire penser à la signification du nom de son fils : Isaac, (qui rit, qui est dans la joie, qui exulte) et qui exulte à ce moment-là pour son fils mais il peut aussi exulter, par avance, pour la venue du Messie, c'est ce que suggère, en tout cas Jésus, dans cet Évangile.

Rappelez-vous l'invitation depuis deux jours, de Jésus, dans ce chapitre huit à demeurer dans sa parole, devenir familier de Jésus-Christ par une fréquentation, une méditation, une traversée, une appropriation, par tous les moyens, de la Parole de Dieu.

Nous pouvons commencer par ce qui peut être le plus simple, au fond, si cette œuvre titanesque vous effraie, au lieu de vous faire rire comme Abraham : ce serait de regarder les paraboles de Jésus, certaines rencontres brèves, dans les Évangiles et puis peu à peu, sortir des sentiers battus et s'attaquer à la grande montagne de la Parole pour y découvrir, non pas un texte mais une personne vivante, le Christ lui-même.

La particularité de notre lecture de l'Ecriture c'est qu'il ne s'agit pas uniquement de regarder Jésus-Christ dans le texte où on parle de Jésus Christ, c'est que toute l'Ecriture nous parle de Jésus Christ, dès la création du monde, même lorsque l'on parle d'Abraham dans la Genèse.

Nous savons que Jésus apparaît bien plus tard ; mais une fréquentation de l'Ecriture, dans l'Esprit, nous permet d'y voir dès cet instant et dès l’origine, Jésus-Christ.

Dans notre foi, nous savons, nous disons, nous proclamons, qu'il était avant toute chose.

Dans l'Ecriture, tout nous parle du Christ, tout nous parle du Christ.

Alors, nous allons, pendant le temps de la Passion, voir que, par exemple, le serviteur souffrant nous parle de Jésus dans sa mort, mais le principe de vie (car nous adorons un ressuscité), le principe de vie, le principe créateur et re-créateur traverse toute l'Ecriture ; et c'est une nourriture pour nous, c'est une nourriture.

Nous ne pouvons pas nous passer de cette nourriture.

"Amen, amen, je vous le dis, avant qu'Abraham fut, moi je suis" ; c'est-à-dire que Christ traverse toute l'Ecriture et si nous avons faim de lui, à la table de l'Ecriture, toute parole est de lui et parle de lui et lui rend témoignage.

Évidemment, il est probable que cet argument suffise à ce que les dents de ses adversaires grincent et que des pierres ne soient pas loin à lui tomber dessus ; mais nous ne sommes pas parmi ses détracteurs et ses ennemis, nous sommes ses disciples.

Cette affirmation de la divinité et de la grandeur de Jésus, cette invitation à demeurer en lui à travers l'Ecriture, accueillons-la à trois jours des Rameaux, avant que nous entrions dans cette grande semaine Sainte ; afin de bien vivre aussi ce jeudi Saint qui est pétri, pétri de l'ancienne Alliance et de la fête de la Pâque.

Déjà, en prémices, nous préparons notre Pâque, ce que nous allons célébrer dans cette eucharistie.

 

Amen.


Mercredi 5 avril

Dn 3, 14-20.91-92.95 : Dénonciation et condamnation des 3 jeunes juifs. Reconnaissance du miracle.

Cantique Dn 3

Jn 8, 31-42 : Jésus et Abraham.

 

Le peuple d'Israël ne sait pas et ne savait pas ce que signifie : demeurer, demeurer.

C'est un peuple de nomades à tous points de vue, issu de cette Alliance qui a été scellée et renouvelée plusieurs fois, dont Abraham est une figure principale, Abraham l'errant ; au milieu des tentes, l’autel était dressé ; des campements ; une terre promise durement acquise ; un temple bâti, l'arche d'Alliance à l'intérieur.

Seul Dieu est le lieu où est un cœur peut demeurer.

 

En Jésus-Christ, nous savons, (c'est la foi de notre baptême), ce que signifie : demeurer.

Mais, je ne sais pas si vous avez remarqué ?

Il est difficile de lier en nous, dans notre cœur, la stabilité et le mouvement ; nos origines et notre devenir ; ce que nous sommes et ce que les autres nous renvoient de nous, de différent : c'est difficile de faire cet alliage entre les deux.

 

Nous sommes en quête d'une demeure et quand nous préparons des obsèques, nous avons coutume de parler des demeures éternelles vers lesquelles tel ou tel défunt est promis.

Et pourtant, dès aujourd'hui, nous savons que nous avons une demeure, ici, maintenant, en Jésus.

Cette demeure, ce sont nos corps ; cette demeure, ce sont nos communautés ; cette demeure c'est la relation du croyant avec la Parole.

Et cette demeure se construit, se consolide, se fortifie, telle une maison sur du roc, à mesure où nous le laissons lui, demeurer en nous,demeurer en nous.

 

Dans cet Évangile que nous avons accueilli, il n'y a pas d'autres façons de demeurer et de nous laisser rejoindre par celui qui veut demeurer en nous, que d'écouter sa Parole ; mais alors, de manière très matérielle : l'écouter, s'en imprégner, la mémoriser, devenir un familier de Jésus-Christ, devenir un familier de Jésus-Christ.

Nous ne sommes pas des imitateurs de Jésus et nous ne sommes pas des auditeurs d'une loi ; nous ne sommes pas des copieurs ; nous sommes des disciples : nous écoutons la Parole ; et cette parole qui produit son fruit en chaque instant, à chaque moment.

 

‘Ne vous inquiétez pas’, dirait Jésus dans les Évangiles synoptiques (Matthieu, Marc, Luc), ‘ne vous inquiétez pas pour ce que vous avez à mettre sur vous, ce que vous avez à manger (sur votre nourriture et vos vêtements), vous valez beaucoup plus que tous ces moineaux, et tous ces oiseaux du ciel : Dieu vous donnera’ ; mais si nous écoutons sa Parole.

 

Un cœur qui écoute cette Parole c'est un cœur qui passe de l'angoisse, qui passe de l'inquiétude de sa demeure à chercher, à construire, à consolider ; c'est un cœur qui quitte cette inquiétude-là et qui, peu à peu, est séduit et ravi par la beauté de Jésus.

Rien d'autre ne compte que cela pour lui, la beauté de Jésus.

Une belle âme est reconnaissable à sa capacité à se laisser ravir par la beauté de Jésus : elle a trouvé alors, sa demeure ; elle a trouvé sa demeure ; elle ne se noie pas en polémiques ou en vaine gloire.

Donc, à la suite de cette rencontre violente de Jésus avec la femme adultère : ‘que le premier qui n'a jamais péché, parmi vous, lui jette la première pierre’ ; cette rencontre se termine donc par ce long discours de Jésus et par cette invitation à demeurer.

 

Amen.


Mardi 4 avril : St Isidore

Nb 21, 4-9 : le serpent d’airain.

Ps 101

Jn 8, 21-30 : Discussion du témoignage de Jésus sur lui-même.

 

La vérité advient, dans l'Évangile de Jean, par l'écoute de la Parole (Jésus qui est la Parole) et par la réponse à cette Parole (le chemin qui nous met en route, chemin de conversion, chemin vers cette Parole).

C'est cela qui fait naître la vérité, qui la fait, non pas la regarder comme dans cette première lecture, mais qui nous fait y adhérer et qui la fait rentrer et naître en nous-mêmes, qui nous convertit.

 

Quand nous allons regarder la croix, le jour de la Passion, nous allons regarder celui effectivement, qui a été élevé et celui qui a été chemin d'obéissance vers le Père ; mais nous pouvons contempler en même temps dans cette croix-là, nos propres conversions, nos propres morts (conversion au sens mort à soi-même, renoncement) ; ce qui fera naître en nous cette lumière, cette vérité que Jésus est venu apporter, dont il a témoigné.

 

Alors, il y a un chemin, il y a du délai : nous sommes chacun, avec des renoncements coûteux, nous sommes en route.

Ce délai, Dieu le porte aussi dans son cœur.

À chacun, son moment sur ce chemin-là ; mais entendons aussi qu'il n'y a pas d'autre possibilité que ce chemin-là.

Peut-être déjà, devons-nous anticiper la résurrection et cette douce parole à Marie-Madeleine : "ne me retiens pas."

Peut-être pouvons-nous entendre le : "N'ayez pas peur" dans ce renoncement-là.

 

Jésus, lui qui n'a pas craint d'être le Fils, le Fils qui, dans l'obéissance, s'est offert ; n'ayons pas peur de vivre ces renoncements car c'est à la vie que nous sommes promis.

 

Amen.


Dimanche 2 avril : 5e dimanche de Carême

EZ 37, 12-14 : Les ossements desséchés.

Ps 129

Rm 8, 8-11 : La vie de l’Esprit.

Jn 11, 3-7.17.20-27.33b-45 : la résurrection de Lazare.

 

Votre projet, chers amis qui vous préparez au baptême, (c'est vrai pour les grands, ça le deviendra pour les petits, quand ils seront plus grands) votre projet c'est que vous ayez la foi et que cette foi vous donne la vie, (cette foi vous fasse vivre) ; que ça ne soit pas simplement pour vous, une sorte de coquetterie spirituelle ou en tout cas qui soit passagère ; et que vraiment, ayant rencontrés Jésus Christ, vous entriez dans une relation qui vous fasse vivre.

Alors, comment ?

L'Evangile d'aujourd'hui donne une lumière supplémentaire sur le comment, le comment ça peut marcher.

 

Cette rencontre, je vous la résume rapidement, (étant très longue, peut-être qu'on en a oublié les points essentiels) : la rencontre de Jésus avec son ami Lazare.

Lazare a deux sœurs : Marthe et Marie ; ils sont donc trois frères et sœurs et ce sont des grands amis de Jésus.

Jésus aimait prendre son lundi de repos avec ses amis à Béthanie ; il allait leur rendre visite régulièrement ; une grande amitié les liait.

 

Voilà que Lazare tombe malade ; Jésus n'est pas là, car Jésus était très occupé, aussi.

Alors, on le fait dire à Jésus ; mais Jésus ne sera pas là, au chevet de Lazare.

Lazare va mourir.

Un grand temps de deuil commence ; tristesse, naturellement, dans la fratrie : Marthe et Marie ont perdu leur frère.

 

À cet instant, Jésus n'a pas l'air d'être très triste ; il n'est pas encore sur place et il se décide à aller à la rencontre de Marthe et de Marie et avec elles, s'approcher du tombeau.

On est déjà plusieurs jours après sa mise dans le tombeau et Jésus exprime beaucoup, beaucoup d'émotion, de la tristesse : une première fois il pleure ; une deuxième fois, on imagine qu'il pleure (le texte dit qu'il est pris d'une vive émotion) et il fait sortir de son tombeau, son ami Lazare.

Voilà l'histoire.

 

C'est l'occasion pour Jésus de faire du catéchisme : il explique à Marthe et à Marie.

Alors, on observe que Marthe et Marie ont les mots qu'il faut : elles sont déjà ‘balaise’ au catéchisme; elles connaissent bien la foi ; elles la disent.

 

L'occasion pour nous de repérer trois choses : cette rencontre entre Marthe-Marie et Jésus, Jésus et Lazare permettent de nous montrer comme une sorte de tresse ; quelque chose qui a été tressé avec trois fils.

Alors, comme toutes les tresses, si on enlève un fil, ça ne va pas.

Mais je vais quand même vous défaire 2,3 fils pour que vous compreniez ; après, l'Esprit Saint les maintient entrelacés dans votre cœur et ça produit (ou ça ne produit pas) le fruit attendu.

 

Alors le premier fil : nous avons la foi de Marthe et Marie ; elles ont les mots qu'il faut, seulement le problème, c'est qu'elles n'ont que les mots.

Apparemment, elles ne sont pas prêtes à vivre complètement de cette foi-là.

Pourquoi ?

Parce qu'elles reconnaissent que Jésus, effectivement, est celui qui donne la vie ; mais, pour elles, il vient en dernier : ‘ce sera pour plus tard, ce sera à la fin des temps, ce sera au-delà’.

Un peu comme quand, dans nos familles, nous vivons un deuil et que tout d'un coup on se dit : eh bien, le salut que Dieu peut nous donner, notre secrète espérance de quelque chose avec Dieu, eh bien ce sera pour après notre mort ou c'est pour tout de suite pour celui qui vient de mourir.

Alors j'espère quand même, que le salut que Dieu nous donne, nous concerne de notre vivant ; parce que sinon je ne vois pas l'intérêt.

 

Mais combien de fois, la foi sert uniquement lorsqu'il y a des deuils ; mais alors, de notre vivant, nous sommes beaucoup plus incrédules, beaucoup plus pessimistes.

Marthe et Marie ont l'air d'être un peu pareil : ‘oui, oui, tu nous sauveras, mais après’.

 

Et le deuxième indice, c'est qu'elles ne sont pas très prêtes à voir le tombeau s'ouvrir : "mais il sent déjà, ça fait déjà plusieurs jours qu'il est à l'intérieur".

Pourtant il va opérer un miracle, elles n’y sont pas prêtes.

Ce n'est pas tout d'avoir les mots de la foi, ce n'est pas tout d'être de bons pratiquants, encore faut-il que cette foi nous fasse vivre.

C'est le premier fil : Marthe-Marie et leur foi.

 

Le deuxième fil c'est l'émotion de Jésus.

Jésus, qui est homme et Dieu, a les émotions, l'affection, les sentiments d'un homme, d'un vrai homme ; en plus d'être vrai Dieu.

Alors, tout au début du texte, il dit à ses disciples : "je me réjouis de ne pas avoir été là".

Et après, une fois qu'il est sur place, on le voit pleurer et on le voit pris d’une vive émotion.

N'enlevez jamais de votre cœur que Dieu, quand il vient à votre rencontre, est capable de s'intéresser à vous jusqu'à en pleurer.

Permettez lui de pleurer pour vous et avec vous ; ne le laissez pas à distance ; ne faites pas de lui une sorte de figure impassible : ça n'est pas le Dieu des chrétiens.

 

Le troisième fil c'est le caractère extraordinaire de la résurrection de Lazare, le caractère étonnant, surprenant.

Pourquoi ?

Eh bien, parce que nous connaissons deux grandes, grandes résurrections dans le Nouveau Testament (alors il y a aussi le relèvement de la fille de Jaïre, il y a aussi le relèvement de cet esclave du centurion), mais il y a surtout la résurrection de Lazare et la première de toutes : celle de Jésus.

La résurrection de Jésus, on la verra dans 15 jours : le tombeau s'ouvre ; il est vide.

On ne voit pas Jésus ressusciter, on ne voit pas Jésus en train de ressusciter : le tombeau est vide.

Et quand Jésus apparaît ressuscité, il apparaît sans aucune trace de la mort, hormis les trous dans les mains, les pieds et la blessure de côté : il a un corps glorieux.

Lazare en revanche, ça fait penser à Halloween ; Lazare, il sent ; Lazare, il a ses bandelettes ; Lazare, il a ses pieds et poings liés ; le tombeau s'ouvre : ça fait peur, (ça peut faire peur).

Il y a un caractère extraordinaire à voir : un mort, devenir vivant, mort vivant ; et puis après, on ne sait pas, parce que le texte ne le raconte pas. Une fois qu'on a enlevé les bandelettes, dans quel état était Lazare, le texte ne le dit pas ; il y a un caractère extraordinaire.

Avec Jésus, on est frustré parce que la résurrection de Jésus, vous verrez, il n'y a rien à voir ; il n'y a rien à voir.

Lazare, il y a tout avoir et ça suscite notre curiosité.

Donc le troisième fils c'est le caractère extraordinaire de cette résurrection.

 

Vous reliez les trois fils, vous retrouver cette tresse : la foi, l'émotion, les sentiments de Jésus, (son humanité) et le caractère extraordinaire.

Vous refaites une belle tresse, vous mettez tous ces ingrédients dans un shaker et vous obtenez la chose suivante : Dieu est capable de nous rejoindre dans le plus extraordinaire et le plus incroyable de notre vie, le plus incroyable de notre vie ; l'endroit le plus caché,le plus loin, l'endroit que l'on cache nous-mêmes et duquel on se protège : il est capable de nous rejoindre jusque-là et il produit l'extraordinaire, l'incroyable et le stupéfiant de nous en libérer ou de nous sauver ; Il ouvre nos tombeaux, il ouvre nos tombeaux intérieurs.

Dieu est capable de nous rejoindre jusque-là.

 

Combien de catéchumènes, grandes personnes, (et je termine là) rencontrent Jésus-Christ et décident de se faire baptiser et disent : ‘Dieu, il est venu me rejoindre dans un endroit incroyable ; moi qui étais perdu, il a ouvert le tombeau de ma vie’.

Eh bien, je vous souhaite, que ce soit cela qui se produise pour vous.

 

Amen.


Vendredi 31 mars :

Sg 2, 1a. 12-21 : Chercher Dieu et fuir le péché.

Ps 33

Jn 7, 1-2.10.14.25-30 : Discussions du peuple sur l’origine du Christ.

 

Je vous propose de regarder cet extrait de l'Évangile de Jean, au chapitre 7, de deux façons.

La première façon (ce sera assez rapide), c'est, comme nous commençons à en avoir l’habitude (la première façon), une méprise sur l'identité de Jésus : nous savons d'où il est, alors entendons par-là, nous savons d'où il vient, nous savons qui sont son père et sa mère, nous savons où il a grandi, son origine géographique et on pourrait dire aussi, charnelle, d'une certaine façon ; nous le savons.

Or, ça n'est pas tellement ce qui pourrait être important pour rentrer dans la foi, mais connaître aussi sa filiation divine.

Or apparemment, à ce moment-là, ceux qui parlent, l'ignorent ou le rejettent.

C'est la première façon.

 

La deuxième façon, c'est comprendre ce que signifie pour Jésus, son heure.

Cet extrait de l'Évangile se termine de cette façon : "personne ne mit la main sur lui parce que son heure n'était pas encore venue" ; le moment favorable.

 

Aux noces de Cana, au chapitre 2, il dit à sa mère que son heure n'est pas encore venue ; et puis, son heure finit par venir.

Alors, c'est bien après ce passage, c'est au moment du lavement des pieds, au chapitre 13 : "l'heure de passer de ce monde à son Père".

Et vous savez que c'est la même heure, celle de se livrer sur la croix.

 

Pour Jésus, cette heure, c'est l'heure du don de lui-même et elle est indissociable d'une souffrance qui vient, qu'il voit venir ; même s'il est entièrement dans la confiance avec son Père, il ne peut pas ne pas être insensible à cette souffrance qui monte et qui est, en fait, corrélative, qui correspond à cette espèce d'hostilité grandissante autour de lui.

 

On a l'impression que Jésus traverse cette hostilité de manière tout à fait détachée, mais pas du tout, pas du tout.

D'ailleurs, l'Évangile nous le suggère : il ne veut pas aller en Judée et puis, il finit par y aller; il veut se cacher dans le temple mais finalement il ne se cache pas et il finit par crier dans le temple : s'écria (le verbe grec c’est : il crie ; il crie dans le temple), alors que l’Évangile que nous avons lu, commence par dire qu'il ne veut pas y aller par peur, puis il y va, mais il se cache, mais, finalement ça éclate en plein jour.

On sent qu'il y a comme une forme de combat chez lui, d'attente active du moment opportun, pour tout d'un coup, se livrer à la volonté du Père.

 

Alors, les messieurs, on ne sait pas forcément ce que cela veut dire, mais Mesdames, il paraît que vous savez ce que cela veut dire, celles qui parmi vous, ont connu l'enfantement.

Les douleurs de l'enfantement traversent le corps et culminent à un moment donné, à cet instant de l'accouchement.

Mais je ne sais pas si vous savez quel est cet instant,même si les médecins vous disent : ce sera tel jour ; néanmoins,ce moment arrive à la fois redouté et en même temps attendu car il correspond non seulement à un enfantement, mais en même temps à une délivrance.

Peut-être que nous pouvons comparer cette heure qui vient pour Jésus, à celle des douleurs d'un enfantement et d'une délivrance qui approchent : c'est le moment où il s'offre sur la croix.

 

Alors, suivons de près le Fils,dans le don de lui-même.

On cherche à l'arrêter, une hostilité grandit, mais ce n'est pas encore le moment, le moment du don total ; il faudra attendre le jeudi Saint : " quand l'heure fut venue de passer de ce monde à son Père", il va se ceindre d’un vêtement et se mettre à genoux pour laver les pieds de ses disciples.

 

Amen.


Jeudi 30 mars

Ex 32, 7-14 : Le Seigneur avertit Moïse. Prière de Moïse.

Ps 105

Jn 5, 31-47 : Discours sur l’œuvre du Fils.

 

Nous sommes toujours dans la suite de cette guérison de cet homme paralysé.

Tout de suite après le long dialogue avec cet homme et sa guérison, s'est amorcé, nous l'avons dit, un long enseignement de Jésus.

Nous en avons lu une partie hier, l'autre partie aujourd'hui, avec le mot témoignage qui revient très souvent ; le mot témoignage.

 

Il y a plusieurs choses qui rendent témoignage à Jésus, dans l'Évangile de Jean :

Jean-Baptiste rend témoignage à Jésus,

son Père rend témoignage à Jésus,

il y a l'Ecriture qui rend témoignage à Jésus

et les œuvres elles-mêmes, qu'il fait, qui rendent témoignage.

C'est-à-dire que ces différentes choses ou réalités ou personnes manifestent que Jésus, il a une profondeur : Jésus se reçoit d'un Autre ; on ne Le voit pas, certes, mais Jésus en est le visage, c'est le Père et par conséquent il est le Fils.

 

Mais rappelez-vous, on l'a vu hier, il y a des personnes qui refusent d'accueillir cela et Jésus parle d'eux : ceux qui refusent cela, ce sont ceux qui reçoivent le témoignage les uns des autres.

Il leur reproche par-là beaucoup d'idolâtries : au lieu de recevoir de plus grand qu'eux, à travers Jésus, ils reçoivent leur gloire d'eux-mêmes, ce qui est redoutable.

 

Alors, nous avons le droit de nous sentir concernés par cela et nous demander si, à travers cela, nous ne tombons pas sous le reproche biblique, reproche de l'Ancien Testament, le reproche de l'idolâtrie.

 

En tout cas, il faut sortir de soi-même, de cette espèce d'enfermement pour mieux recevoir Jésus comme Fils de Dieu, Fils du Père : 'me rendent témoignage Jean-Baptiste, le Père, les Ecritures, mes œuvres.

Préparons-nous, progressivement, à pénétrer vers Jérusalem, nous y entrerons triomphalement au moment des Rameaux, bientôt, dans une dizaine de jours.

En y entrant et en nous préparant à y entrer, vérifions combien nous avons besoin de sortir de nous-mêmes pour mieux accueillir Jésus, envoyé du Père.

 

Amen. 


Mercredi 29 mars

Is 49, 8-15 : La joie du retour.

Ps 144

Jn 5, 17-30 : Discours sur l’œuvre du Fils.

 

Nous poursuivons la lecture chez Saint Jean, la suite du texte que nous avons entendu hier.

Chez Saint Jean, beaucoup de dialogues se transforment en discours : c'est le cas, avec le texte d'aujourd'hui ; un discours.

Des dialogues autour d'un miracle ou d'une guérison et après, un très long discours, un enseignement de Jésus, un dévoilement de son identité, de ce qu'il y a dans son cœur, ou ce qu'il y a derrière lui ou plus grand que lui.

Et Jésus, dans ce discours, va ouvrir une perspective trinitaire ; il va dévoiler l'intimité de sa relation avec son Père ; et nous voyons dans ce long discours, le Père qui donne tout au Fils et le Fils qui reçoit tout de son Père : tout pouvoir.

 

Et on voit apparaître également, une notion qui peut nous paraître énigmatique : la notion de jugement et le pouvoir de la résurrection ; jugement et résurrection qui vont ensemble.

Nous pouvons être un petit peu perplexe parce que, quand on entend le mot jugement, on va peut-être évidemment, penser à la fois au jugement de Jésus, au moment de sa Passion, à la fois dans le sanhédrin et devant Pilate ; et puis corrélativement, on va penser à toute forme de jugement dans un tribunal, dont les journaux nous parlent tous les jours : un jugement pour faire la part des choses entre ce qui est vrai et ce qui est faux.

 

Mais en l'occurrence, là, le jugement, c'est tout autre chose.

Il nous faut revenir peut-être à cette notion extrêmement simple qui nous habite tous les jours : il est plus facile, pour chacun, de raconter ce qu'il a vécu hier, et puis, (s'il a une bonne mémoire) depuis sa naissance que de raconter ce qu'il va vivre demain, (et même s'il est perçant), jusqu'à sa mort. 

Demain nous échappe, hier en revanche, s'accumule dans notre mémoire personnelle.

Alors, plus nous avançons en âge, plus nous atteignons une forme de confiance et d'assurance, (quand c’est parfois pas une forme de résignation), parce que la vie nous a formés, d'une certaine façon : nous avons un acquis, nous avons une expérience, de laquelle nous pouvons nous prévaloir, ça nous donne de la stabilité.

N’empêche que, même si nous avançons en âge, nous échappe considérablement, l'avenir ; et même si l'avenir se rétrécit, il y a un avenir quand même.

 

Eh bien, le jugement, c'est la disposition de notre cœur à nous abandonner à Celui qui sait ce que nous, nous ne savons pas ; à Celui qui sait ce que nous ne savons pas.

Et ne se laissent pas juger, dans l'Evangile de Jean, ceux qui ne croient pas, ceux qui sont dans la ténèbre : alors, en l'occurrence, les détracteurs de Jésus, qui sont toujours qualifiés chez Saint Jean de juifs et derrière eux, les chefs des prêtres, les scribes, le grand prêtre, Caïphe.

Chez chacun de ces personnages, il y a une non-disposition, il n'y a pas d'envie, il y a un refus à se laisser regarder par Celui qui sait vers où nous allons ; et la foi, donc, chez Saint Jean consiste à se laisser regarder par Celui qui sait ; à savoir, Jésus.

Jésus, qui est le Fils du Père ; le Père aussi, il sait, mais ce sont les deux ensemble qui exercent le jugement ; et comme le Père, on ne le voit pas, en revanche, on voit, on peut s'approcher de celui qui est venu jusqu'à nous : la lumière, Jésus.

 

C'est une façon aussi de nous introduire à l'Évangile de dimanche prochain, une autre très grande rencontre de Jésus ; cette fois-ci, avec un personnage qui ne va rien dire du tout et que Jésus ne va rencontrer qu’à la fin du texte : c'est Lazare, le mort.

Car c'est bien ce qui nous guette (excusez-moi d'être plombant), la mort mais qui parfois, nous fait peur.

Eh bien pourtant, pourtant, sous le regard de Celui qui sait, le mort va retrouver la vie et les deux sœurs du mort : Marthe et Marie, elles, seront jugées au sens où elles disent ce qu'elles croient.

Mais peut-être qu'elles ne croient pas encore complètement bien ; ceci étant, je ne leur fais aucun procès car moi-même, la mort ne me fait peur.

 

Amen.


Mardi 28 mars

Ez 47, 1-9.12 : La source du temple.

Ps 45

Jn 5, 1-16 : Guérison d’un infirme à la piscine de Bethzatha.

 

Toute cette semaine et les semaines suivantes, nous serons dans l'Évangile de Jean, pendant chacune de ces eucharisties et nous rentrerons dans des réminiscences de ce que nous aurons vécu pendant le dimanche avec ces longues rencontres de Jésus ; alors, dimanche dernier, c'était avec l'aveugle de naissance.

Ces rencontres sont toujours aussi longues, mais plus ramassées néanmoins, permettant une lecture plus aisée.

 

Nous voyons là, toute la durée : cet homme a attendu très longtemps, 38 ans, avant de pouvoir vivre un salut ; 38 ans, car son infirmité l'empêchait de pouvoir bénéficier des bienfaits de cette eau bouillonnante.

 

Nous avons aussi une grande interrogation qui apparaît dans ce texte : quel est ce salut dont cet homme a été le bénéficiaire ?

Une guérison mais aussi un salut : à la fin du texte, Jésus lui dit : "te voilà guéri, ne pèche plus, il pourrait t’arriver quelque chose de pire".

Avec des questions adressées par des juifs, demandant ce qu'il s'est passé et qui est l'homme qui est à l'origine de cette guérison (un peu comme le texte de l'Évangile que nous avons entendu dimanche), l'homme qui a été guéri, progresse ; il va dire que c'est un homme et puis petit à petit, il va découvrir ou reconnaître que c'est Jésus.

 

Pour notre propre vie, ce texte nous renvoie à toute la durée qui est nécessaire pour que le baptême dont nous avons bénéficié, (baptême d'eau et d'Esprit Saint)porte tout son fruit.

Nous voyons que, peut-être, nous avons bénéficié des grâces qui nous viennent de Dieu par le baptême, mais qu’à l’image de cet homme, depuis 38 ans impotent, il nous faut peu à peu découvrir qui est l'origine du salut dans notre vie : le Christ, le Père que Jésus montre, présente ; et pouvoir en justifier autour de nous, être des témoins de ce salut.

Tout ceci n'est pas donné une fois pour toutes, il faut du délai, du temps, de la progression, de la gradualité : cet homme a attendu 38 ans.

 

Nous avons repéré que nous nous pouvons faire un lien avec le baptême, cette eau bouillonnante.

En vérité, on ne sait pas trop de quoi il s'agissait, nous savons que des fouilles archéologiques ont révélé une piscine, mais avec le lien que nous propose la liturgie, avec le livre du prophète Ezékiel, et l’approche des fêtes Pascales, nous pouvons nous-mêmes revisiter ce propre événement dans notre vie, ce propre salut, cette propre guérison qui était notre baptême.

 

Amen. 


Dimanche 26 mars : 4e dimanche de Carême, dimanche de ‘laetare’(la joie)

1S 16, 1b.6-7.10-13a : L’onction de David.

Ps 22

Ep 5, 8-14 : La vie nouvelle dans le Christ.

Jn 9, 1-41 : Guérison d’un aveugle-né.

 

Cette seconde rencontre, longue, de Jésus, dans l'Évangile de Jean, (après la première, la semaine dernière auprès de la Samaritaine), cette seconde rencontre avec cet aveugle-né, est là pour nous instruire, accompagner, ouvrir les yeux de chacun d'entre nous et de nos frères et sœurs catéchumènes, qui seront baptisés à la Veillée Pascale.

Si St Jean rapporte de longs propos que ses autres frères évangélistes ne rapportent pas de la même façon, nous pouvons, peut-être, y percevoir une pédagogie : peut-être que St Jean veut nous montrer le caractère progressif, graduel, de notre rencontre avec Jésus-Christ, à l'exemple de cet aveugle.

 

Nous n'avons peut-être pas fait très attention, (le texte étant long), mais l’aveugle est avec Jésus seulement deux fois : une fois au début, une fois à la fin; et dans l'intervalle, l'aveugle est avec des détracteurs de Jésus, des pharisiens qui ne sont pas d'accord avec Jésus.

Mais Jésus n'est pas là pour se défendre, Jésus s'est caché.

Alors que l'aveugle était parti à la piscine de Siloé, quand il revient, Jésus n'est plus là et l'aveugle est directement avec ceux qui ne sont pas d'accord avec Jésus ; cet aveugle va devoir batailler, se défendre, presque justifier, témoigner de sa foi.

Il doit dire qui est cet homme qui a fait cela dans sa vie ; alors il va commencer par dire : l'homme, "l'homme qui m'a ouvert les yeux", ensuite il va dire un peu plus tard : "le prophète" et puis il va finir par dire : Dieu, "l'homme de Dieu".

Mais c'est au prix d'un conflit, j'espère que vous l'avez aperçu dans ce texte.

 

Ce n'est pas simple d'avoir des yeux ouverts.

Cet homme a retrouvé la vue, (du moins, il l'a trouvée pour la première fois) : il est aveugle de naissance.

Il est né à la foi, mais la première chose qu'il voit, ce n'est pas la beauté d’un monde enchanté mais c'est le conflit des hommes, le conflit des hommes sur la question religieuse : ils ne sont pas d'accord avec Jésus, pas d'accord sur l'interprétation de la Loi.

Jésus va réapparaître à la fin du texte et à la fin du texte, à nouveau, l'homme va pouvoir dire sa foi.

 

Chez St Jean, (alors plus tard, dans le texte, au chapitre 20, vers la fin), pour St Jean, dans cet Évangile, l'objectif c'est d'avoir la vie lorsque l'on est avec Jésus.

Il ne suffit pas de professer sa foi,

il ne suffit pas de la réciter,

il ne suffit pas d'appartenir à une communauté par notre présence fidèle,

encore faut-il avoir la vie par la foi ; la raison pour laquelle tous les personnages chez St Jean, chaque fois qu'ils rencontrent Jésus et demeurent avec lui, ils sont dans la vie jusqu'à la résurrection; parce qu’à la résurrection, il faudra lâcher la main de Jésus.

Ça, c'est plus dur, quand Jésus dira à Marie-Madeleine : "ne me retiens pas, va voir mes frères".

Mais, pendant tout l'Évangile, c'est d'être avec Jésus qui donne la vie.

 

Alors, c'est une sérieuse leçon pour nous tous et je m'adresse en particulier à Tiphaine et à Emeline qui, donc, vont être baptisées à la Veillée Pascale.

Par votre baptême, vous serez en droit de dire et de dire à tous : "je suis chrétienne, je suis enfant de Dieu, j'ai ma place dans la communauté chrétienne" (alors, je l'avais déjà avant, mais je ne l'avais pas prise et pour une bonne cause, car je n'étais pas baptisée) ; mais là, j'ai ma place plus que jamais.

Mon baptême me confère beaucoup d'importance" et on vous en donne pendant cinq dimanches, jusqu'au baptême.

 

Par le baptême, vos yeux seront ouverts, comme l'aveugle-né, lorsqu'il a rencontré Jésus qui lui a appliqué de la salive et de la boue sur les yeux.

Ceci étant, rien n'est joué : il va vous falloir jouer des coudes, (batailler, je ne le vous souhaite pas), mais jouer des coudes ; un peu de ténacité pour prendre votre place dans la communauté.

Il va vous falloir batailler aussi, jouer des coudes dans votre environnement affectif, familial et amical : je suis chrétien, j'ai la vie (du moins, je crois l'avoir) et je peux être entouré d'hommes et de femmes qui vont prétendre la même chose et à ce titre-là, peut-être me rabrouer, me dire que je ne suis pas suffisamment parfait (parfaite),

 que je ne connais pas suffisamment Jésus :

il va vous falloir faire du chemin et permettre que les autres, autour de vous, en fassent un petit peu; car, même dans une communauté chrétienne de gens pratiquants, fidèles, il y a encore beaucoup de chemin à faire pour être dans l'amour même de Jésus, en vivre et en faire vivre autour de soi.

 

Vous avez peut-être remarqué, (vous tous) et c'est la conclusion : dans cet Évangile, ceux qui voyaient clair au début, c'étaient les pharisiens et c'est l'aveugle qui était aveugle ; à la fin, l'aveugle voit clair ; les pharisiens sont devenus aveugles, eux, qui se croyaient justes.

 

Amen.


Vendredi 24 mars

Os 14, 2-10 : Retour sincère d’Israël au Seigneur.

Ps 80

Mc 12, 28b-34 : Le premier commandement.

 

Ce passage est célèbre mais nous ne savons pas forcément toujours, en quoi il est novateur dans la bouche de Jésus, puisque Jésus rapporte des citations de notre Ancien Testament, donc de sa tradition et sa Torah, à lui.

 

La première citation, autour de l'Unité de Dieu et l'aimer de tout son cœur, de toute son âme, sa force et son esprit, provient de ce livre, le Deutéronome, qui fait parler Moïse ; Moïse qui parle au nom de Dieu et nous sommes juste après (alors longtemps après, en fait) la sortie de la terre d'Egypte.

Et il est question pour Moïse d'exhorter, d'exhorter le peuple à suivre les commandements du Seigneur : il n'est pas dans une forme d'impératif rigide, strict, sévère mais il est plutôt dans l'exhortation d'un cœur, d'un homme qui d'ailleurs, va laisser partir son peuple franchir seul le Jourdain et arriver en terre promise.

Ce sont comme des conseils qu'il fait au nom du Seigneur : c'est dans le même livre que vous avez, (toujours de la bouche de Moïse, de la part de Dieu) 'vois, je mets devant toi le bien et le mal, le bonheur et le malheur : à toi de choisir'; à toi de choisir, donc sur le style exhortatif, d’un conseil.

 

Dieu parle à travers la bouche de Moïse : 'Écoute Israël, entends donc, laisse pénétrer ces paroles jusque dans ton cœur.

Si tu veux bien, tu pourras découvrir combien Dieu est l'Unique, encore te faut-il l'aimer'.

Ça, c'est la première citation qui est en fait, fondamentale dans le cœur d'un juif ; fondamentale dans le cœur d'un juif.

 

Et la deuxième citation vient d'un autre livre, le Lévitique : "tu aimeras ton prochain comme toi-même".

C'est Jésus qui, donc, les extrait toutes les deux, ces citations, et les colle ensemble : c'est sans doute l'originalité de sa réponse.

Et cette originalité est reprise par son interlocuteur, le scribe, qui manifeste par-là, son accord : il est d'accord avec Jésus.

 

Alors, pourquoi c'est original, au fond ?

Et pourquoi c'est original pour nous, aujourd'hui ?

Eh bien, parce que Jésus met sur un plan d'égalité cette unité de Dieu (et ce cœur complètement tourné vers ce Dieu Unique), avec le frère, avec le frère ; l'écoute de Dieu, avec les appels du frère.

 

Accueillons cela pour nous, sur ce chemin du Carême.

Nous savons qu'à partir de la semaine prochaine, nous n'aurons plus de texte évangélique de Marc, Matthieu et Luc mais nous entrerons dans l'Évangile de Jean et nous nous préparerons encore davantage de cette façon, à la Passion.

C'est le dernier texte que nous accueillons cette semaine, pendant ce Carême, venant de Marc, Matthieu et Luc ; cette invitation de Jésus à mettre sur un plan d'égalité les appels du frère et cet amour du Père.

Amen.


Mercredi 22 mars

Dt 4, 1.5-9 : La vraie sagesse.

Ps 147

Mt 5, 17-19 : L’accomplissement de la Loi.

 

Nous poursuivons cette préparation à la Passion de Jésus.

Vraiment, accueillons ces textes et notamment les Évangiles, comme des clefs pour mieux rentrer dans l'intensité même du don du Fils de Dieu sur la croix ; pour dire autrement : comprendre pourquoi il s'est livré pour nous.

Bien rentrer dans cette intelligence pour que, au moment où nous célébrerons ensemble la Passion, (à la fois au moment des Rameaux mais surtout le vendredi Saint), nous puissions être complètement libérés de plein de questions et laisser le Fils s'offrir pour nous.

 

Alors, le texte d'aujourd'hui continue à nous ouvrir l'intelligence et nous savons que St Matthieu, la compréhension qu'il a eu de la mort de Jésus, de son procès, était quelque chose autour de la Loi, précisément.

Jésus maintenait qu'il était là pour accomplir la Loi et ses détracteurs, tels qu'ils sont mis en scène dans le procès de Jésus, eux aussi (je mets de côté Pilate, mais ses détracteurs juifs) prétendent également préserver, protéger, être de bons représentants de la Loi.

Alors, nous avons manifestement deux regards portés sur la Loi qui ne coïncident pas puisque l'un des deux a été condamné par les autres.

 

Comment donc essayer d'éclairer cette nuance majeure qu'il peut y avoir entre les détracteurs de Jésus et le Fils lui-même ?

Peut-être que, une façon d'entrer dans cette compréhension, c'est de se dire que Jésus, lui, avait (et a) mis beaucoup de durée et de temps pour (non pas en lui, pour qu’il comprenne) mais pour que la Loi puisse être appliquée, pour qu'elle puisse être accomplie par tous et notamment par les plus petits.

 

Les plus exigeants, (ceux qui étaient donc ses détracteurs), étaient ceux qui entendaient que la Loi doit être mise en application de suite ou pas du tout ; et si c'est le cas du 'pas du tout', alors, les gens ne sont pas des bons ; et ceux qui la mettent en application de suite, dans toute sa radicalité et son exigence font partie des bons, des bons, des purs, des excellents, des parfaits, ceux du sérail, d'une certaine façon.

Il y a une loi, il faut la mettre en application ; ceux qui la mettent en application sont parfaits, voyez un petit peu la logique.

 

Jésus est celui qui va introduire de la durée ; c'est-à-dire que cette Loi est mise en application, elle doit l'être par tous, selon le temps et les moments qui sont favorables à chacun :

il faut laisser à un petit, le temps d'être grand ;

il faut laisser à un pécheur, le temps de se convertir ;

il faut laisser à un cœur, le temps de s'ouvrir.

 

Et Jésus a été de ceux-là, dans son ministère auprès de celles et ceux qu'il rencontrait sur sa route, en allant vers Jérusalem : ces pauvres, ces pécheurs, ces possédés, étaient ceux qui n'étaient pas dans l'application, sur l'instant, de cette Loi.

Le moment favorable dans leur vie n'était pas du tout repéré, ni valorisé.

N'ayant pas mis en application de suite, ils étaient donc considérés comme 'de côté'.

 

Nous verrons dimanche, avec l'aveugle-né, que cet homme va retrouver la vue en plein milieu d'un débat sur la Loi, précisément.

Dans cette synagogue, cet homme, qui va retrouver la vue, va devoir se justifier ; il va devoir batailler et ses parents vont même s'effacer par peur des représailles parce que précisément, derrière, il était question d'avoir retrouvé la vue, un jour de sabbat.

Cet homme était aveugle de naissance et toute la durée qui aura été nécessaire pour cet homme pour retrouver la vue, cette durée-là, c'est la nouveauté même de Jésus : il y a des temps et des moments favorables pour qu'un cœur se convertisse,

qu'un cœur se tourne vers la lumière,

pour qu'un cœur s'ouvre, se tourne vers le Père.

 

Alors, repérons pour nous-mêmes que, toute la radicalité du projet de Dieu, la radicalité de son amour et de sa perfection, la surabondance même à laquelle nous sommes appelés (ce sont les versets qui n'ont pas été lus, mais les versets suivants de cet Évangile : le verset 20), nous sommes appelés à être surabondants comme le Père est surabondant; c'est exigeant, c’est même encore plus exigeant que la Loi de Moïse.

Cette surabondance, il nous faut la donner mais il nous faut aussi, la recevoir et nous ne pouvons la recevoir qu'à un seul prix : si nous reconnaissons qu'en nous-mêmes et surtout chez d'autres, il y a un temps et un moment favorables.

Accepter que l'autre ne soit pas parfait de suite, nécessite d'être surabondant dans l'amour.

 

Demandons au Seigneur cette grâce de la patience,

cette grâce de l'humilité

et cette grâce du dépouillement pour que nous acceptions, nous consentions au temps et au moment favorables chez les autres déjà, en nous-mêmes aussi.

D'ailleurs, Jésus avait son heure également et nous savons que chez St Jean, il souffrira lorsque l'heure sera venue.

 

Amen.


Dimanche 19 mars : 3e dimanche de Carême. Saint Joseph.

Ex 17, 3-7 : L’eau jaillie du rocher.

Ps 94

Rm 5, 1-2.5-8 : La justification gage du salut.

Jn 4, 5-42 : Jésus chez les Samaritains.

 

Chers amis, le Carême, à la différence du temps ordinaire, propose pour chacun d'entre nous un programme, une sorte de progression ; pas seulement le dimanche mais aussi, la semaine.

Je vous encourage vivement ; essayer de vous en donner les moyens, (si ce n'est pas trop compliqué pour vous à mettre en œuvre), de suivre jour après jour les textes proposés par la liturgie, dans un missel, sur Internet,en écoutant la radio parce que vous pouvez ainsi, suivre cette progression et ne pas subir le Carême ou la liturgie.

Si nous arrivons avec ce texte de la Samaritaine, aujourd'hui, c'est parce que les textes des jours qui ont précédé (non pas des dimanches, mais des jours de la semaine), progressivement, nous y ont préparés, à accueillir ce texte.

 

Que dire ?

 

La première chose, qui paraît éloignée de la Samaritaine, c'est l'affirmation suivante : dès l’origine de l'humanité, tel que la Genèse le conçoit, tel que nous le recevons dans l'Ecriture, il y a des querelles entre frères, il y a même des meurtres entre frères.

Les tous premiers frères, ce sont Caïn et Abel, issus d'Adam et Ève ; et l'humanité en son origine, est marquée par un combat de l'un contre l'autre : Abel meurt.

Et cette querelle fratricide va se poursuivre tout au long de l'histoire sainte.

 

Lorsque nous nous sommes préparés à vivre Noël, nous avons, dans les jours qui ont précédé, entendu la généalogie de Jésus.

Et si nous la suivons avec intérêt et dans le détail, nous voyons qu'il y a des problèmes entre frères, frères et sœurs, dans les fratries ; des problèmes parfois graves qui vont, comme Caïn et Abel, se traduire par la disparition de l’un ou l'autre.

 

Un autre passage fameux, c'est la querelle entre les fils de Jacob : Jacob a de nombreux enfants, plus d'une douzaine ; entre les garçons il y a une querelle, surtout par rapport à Joseph : vous avez entendu le sort de ce préféré de son père ; ses frères en sont jaloux et ils vont jusqu'à vouloir l'éliminer.

Et, in extremis, il est sauvé.

Ce frère est celui qui permettra à ses frères, des années et des années après, de pouvoir survivre à une famine, car ce brave Joseph, sauvé in extremis de la mort, deviendra grand intendant des richesses du royaume de pharaon, en Égypte.

Alors que la terre où demeuraient ses frères et son père Jacob, connaissait une sécheresse et une famine importante, il les accueillera, Joseph, dans sa terre d'adoption, l'Egypte.

 

On pourrait multiplier les exemples, mais Jésus, dans son enseignement tel que nous l'avons reçu cette semaine, montre que cette querelle entre frères, dure : il y a des fils, qui entre eux, ne s'aiment pas, à l'image par exemple, de la parabole du fils prodigue.

 

Et la mission même de Jésus, (telle qu'il explique la raison de sa présence et telle qu'il comprend aussi la Passion à venir pour lui), c'est de tout faire pour qu'il n'y ait plus des frères du dehors qui seraient rejetés par les frères du dedans ; car ce qui se passe depuis la nuit des temps et raconté dans l'Ancien Testament, se reproduit aujourd'hui encore dans notre monde, même si ce n'est pas dans l'Eglise, (ça peut être à l'extérieur) : nous avons un cœur qui a une sérieuse propension à mettre dehors des frères et à en conserver dedans, d'autres.

Il y a les préférés et il y a les autres.

 

Rappelons-nous, et c'est une adresse pour Emeline et Tiphaine en particulier, à partir du baptême, nous considérons que, (même si nous sommes avec des gens que nous ne connaissons pas), à partir du baptême, nous savons que nous sommes tous enfants d'un même Père, fils et filles d'un même Père qui est aux Cieux ; par conséquent nous sommes frères, frères et sœurs et qu’il ne doit pas, il ne se doit pas (ce n'est pas possible, c'est le ministère même du Christ), ce n'est pas possible que des frères rejettent d'autres frères car nous avons un seul Père.

 

Alors, cette propension, se traduit aussi dans notre Eglise, dans nos communautés, partout, à travers le monde : il y a toujours ceux que nous mettons dehors et ceux que nous préférons dedans.

Et le ministère du Christ c'est de réintégrer dedans, ceux que nous mettons dehors : la pécheresse, la femme adultère, l'aveugle-né, le collecteur d'impôts : Zachée par exemple ; tous ceux-là, il veut les remettre dans la fratrie alors que les frères du dedans les ont jetés dehors.

 

C'est pour cela que nous disons que Jésus, lui le Fils parmi les fils, est celui qui a pris sur ses épaules le péché du monde : c'est-à-dire, cette capacité à jeter dehors.

Il prend sur lui, pour mieux réintégrer dedans, ceux que nous, nous mettons dehors.

 

Maintenant, je peux arriver à la Samaritaine.

Puisque nous sommes fils de ce Père, nous devrions être blessés par (malheureusement) cette capacité que nous avons à ‘mettre dehors’.

Peut-être que nous pourrions considérer, que nous avons soif et faim de ne plus le faire ; faim et soif d'être (dans un langage très savant de la foi) être justifiés, c'est-à-dire ne plus avoir besoin de mettre dehors, même pas dans le secret de notre cœur ; plus besoin d'avoir à mettre dehors l'un ou l'autre qui ne nous plaît pas, parce que précisément, nous avons le même Père.

C'est comme une soif, c'est comme une faim, c'est un vif désir, un vif désir de ne plus penser à cela, de ne plus aller jusque-là.

Alors, nous aurions bien raison de vouloir le faire quand même, mais non ! ayons soif et faim de ne plus produire cela.

 

Saint Jean, lui, il croit, il pense, il veut que celles et ceux qui croient en Jésus, y croient à tel point, que ça leur donne la vie, que ça produise du fruit, qu'ils n'aient plus faim et soif ; il veut que ceux et celles qui ont rencontré le Christ soient complètement des hommes et des femmes de communion.

 

Avoir faim et soif du Christ c'est avoir faim et soif de celui qui est source jaillissante en vie éternelle ; dans notre foi, c'est celui qui vient éloigner le péché de notre cœur et qui éloigne de nous, la capacité à diviser et à exclure.

La Samaritaine est précisément de celles-là (ou de ceux-là ; ce n'est pas qu'une affaire de Samaritaine mais de tout homme et de toute femme).

 

Voyez la manière dont Jésus s'y prend pour rencontrer cette femme : il ne devrait pas la rencontrer parce qu'elle fait partie de ceux du dehors,ceux que les frères du dedans ont jetés dehors ; il va à sa rencontre; un long dialogue, un échange qui peut paraître un peu étranger, mais petit à petit, il fait la vérité dans la vie de cette femme, il s'impose comme celui qui peut lui apporter réponse à toutes ses soifs et toutes ses faims : il est la source, il est le Messie ; et en plus, il la réintègre ou il fait sauter toute barrière entre le dedans et le dehors.

Et même elle, d'ailleurs, elle va aller à la rencontre de ceux de sa ville qui savent très bien qu'elle a cinq maris qui vivent dans sa ville, (ça se trouve, dans le lot,il doit y avoir d’anciens de ses maris), mais elle n'a plus honte, d'une certaine façon, elle est réintégrée dans le grand Corps, elle va les chercher, elle va même les convertir, elle va créer de la communion.

Cette Samaritaine va créer de la communion.

 

Pour vous alors, et Emeline et Tiphaine, Victor, Lucie, Louise, prenez l'exemple de cette rencontre entre Jésus et la Samaritaine pour contempler la façon dont Jésus s'y prend, graduellement, lentement, pour faire peu à peu la vérité dans cette vie, lui qui est allé chercher cette femme bien loin et sur son propre terrain, à elle.

Jésus vient nous chercher dans des endroits extraordinairement inattendus pour, peu à peu, nous tirer vers lui.

Peu à peu, sans forcer la main, jusqu'à ce que nous-mêmes, finissions par en attirer d'autres vers lui.

 

C'est le sens de ce troisième dimanche : reconnaissez (nous reconnaissons avec vous) que Jésus est source de vie éternelle, source abondante.

Vous l'avez trouvé ainsi dans votre route, il y a plusieurs mois ou plusieurs années et vous voulez être plongés dans cette source pour renaître de la vie.

 

Eh bien, n'oubliez jamais que, pour ne plus avoir faim et soif, plus vous serez proches du Christ, plus vous serez en communion avec les autres et plus vous serez en communion avec les autres, plus vous serez proches du Christ.

C'est la raison pour laquelle un chrétien tout seul ne survit pas, mais c'est la raison pour laquelle un chrétien avec d'autres, qui fait la communion est un chrétien proche du Christ.

C'est dans cet esprit que vous allez vivre, à présent, vos premiers scrutins vers le baptême : Dieu qui vient scruter votre cœur.

 

 

Je vous invite Emeline et Tiphaine à vous approcher de l'autel avec vos accompagnateurs, les parrains, marraines, et j'invite Louise, Victor et Lucie à vous approcher derrière.


Vendredi 17 mars

Gn, 37, 3-4.12-13a. 17b-28 : Joseph vendu par ses frères.

Ps 104

Mt 21, 33-43. 45-46 : parabole des vignerons homicides.

 

Je vous rappelle que depuis au moins deux jours, nous sommes déjà tournés vers la Passion de Jésus ; nous avons basculé vers la deuxième étape du Carême et déjà sa fin ou l'avant-dernière étape avant la fin : la Passion.

Et ce texte transpire d'un certain nombre d'allusions à ce qui va se passer sur la croix.

 

Cette parabole que raconte Jésus évoque son propre rejet et sa propre exécution par ceux-là mêmes qui sont ses auditeurs, en vérité ; et d'ailleurs, Jésus ne se trompe pas, car les auditeurs fomentent contre lui, à la fin de cette parabole.

 

Alors, Saint Matthieu le traite avec énormément d'ironie dans tout son Évangile ; la liturgie apaise ou nivelle un peu cette ironie, tout simplement parce qu'elle nous propose en première lecture, ce récit du drame de Joseph avec ses frères,cette querelle fratricide : Joseph, néanmoins, sera épargné.

Mais dans cette première lecture, il n'y a rien d'ironique, il n'y a rien d'accusateur ; il y a un fait qui remonte aux origines des relations entre les différents fils de Jacob, tandis que dans l'Évangile de Matthieu, (ce que Jésus raconte et la façon dont Matthieu rapporte la Passion de Jésus), il y a beaucoup d'ironie, d'invectives tournées contre les chefs des prêtres, les scribes et les pharisiens.

 

Quand, à la fin de cette parabole, Jésus dit : "le Royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à une nation qui lui fera produire des fruits" et quand il est dit un petit peu plus tôt, que les vignerons vont se saisir du fils pour le jeter hors de la vigne et le tuer, nous voici directement projetés à ce moment où, dans la Passion, Jésus est conduit devant Pilate.

Après avoir été jugé par Pilate, tout du moins interrogé par Pilate,Pilate présente Jésus à la foule.

Pilate est très embêté parce que sa femme qui,comme lui, est une païenne, en songe a perçu qu'il ne fallait pas condamner Jésus.

Pourtant, Pilate, devant la foule, ne sait que penser, que faire et vous savez, (comme dans les autres Évangiles), il propose une alternative : (comme il est coutume dans l'Évangile,tout du moins) de présenter aussi d'autres coupables déjà emprisonnés, pour que si la foule le décide, choisisse de libérer l'un d'entre eux.

Pilate décide une sorte d'échange : ‘si vous le voulez, soit je vous libère Jésus soit je vous libère un autre ; mais si je vous libère un autre, donc j'accède à la demande des chefs des prêtres, des scribes et des pharisiens d'exécuter Jésus’.

 

Et que dit la foule ?

Qu'est-ce qu'on va dire à la Passion ?

Barabbas, Barabbas et chez Matthieu, la foule rajoute : "que le sang (de Jésus, cette fois-ci) retombe sur notre tête et sur celle de nos enfants", c'est-à-dire qu'il se passe précisément, en vrai, ce que Jésus a, comme prédit, dans sa parabole cinq chapitres plus tôt quand il s'adresse aux pharisiens.

Les pharisiens murmurent entre eux, ils sont profondément mécontents de ce que Jésus leur dit (clairement, Jésus les accuse), mais ils ne vont pas ostensiblement dire qu'ils sont d'accord avec lui de toutes les façons ; mais Jésus a obtenu quand même, de leur part, d'une part de pouvoir les dénoncer, les accuser et aussi montrer à tous qu'il a bien conscience de là où il va, c'est-à-dire la Passion.

Et c'est ce qui va se passer cinq chapitres plus tard, puisque ce sont les chefs des prêtres et les scribes qui demandent à la foule de crier : ‘Barabbas’ ; et la foule, un peu comme perdue, va dire : "que le sang de Jésus (ce Juste) retombe sur notre tête et celle de nos enfants".

 

Alors, c'est bien une querelle fratricide dont il s'agit, parce que ce sont des juifs qui accusent un juif, Jésus lui-même (Barabbas veut dire fils du père ; Jésus est accusé de s'être dénommé : fils de Dieu).

La foule décide de libérer un coupable et de condamner un juste.

 

Retenons cela, en tout cas, pour nous, qui nous préparons à vivre la Passion dans maintenant, deux semaines et demi ou trois semaines, non pas pour nous dire que les juifs sont des méchants et qu’ils ont accusé Jésus et tué le Fils de Dieu, mais pour nous demander si, dans notre propre histoire personnelle, parfois dans notre histoire à l'échelle de nos villages, ou à l'échelle de notre communauté chrétienne, il n'y a pas de querelle fratricide de la sorte (qui ressemble à celle qui est à l'origine de la mort de Jésus).

 

Alors, ne nous sentons pas, (néanmoins, à la différence peut-être des foules), comme avec un sang qui nous retombe sur la tête de génération en génération, mais laissons-nous convertir pour sortir de cela, pour sortir de cette logique de querelles.

 

Jésus, lorsqu'il célèbre son dernier repas, a quand même dit qu'il versait son propre sang pour le pardon des péchés de toute la multitude.

 

Eh bien, acceptons ce sang qui nous sauve contre ce sang qui nous culpabilise, sortons de nos querelles et laissons-nous purifier par cette miséricorde abondante, du Fils de Dieu, telle qu'elle nous est manifestée dans la croix.


Jeudi 16 mars :

Jr 17, 5-10 : Sentences de sagesse.

Ps 1

Lc 16, 19-31 : Le mauvais riche et le pauvre Lazare.

 

C'est précisément le texte de l'Evangile que le pape François a choisi pour son message introduisant au Carême : il a fait un commentaire de ce texte pour édifier les uns et les autres et nous éveiller à une conversion pour que l'autre devienne pour nous, un don, que nous puissions le recevoir comme un don qui nous est fait, l'autre, Tout Autre, les autres, chacun.

 

Alors, à l'image de ce que ce riche anonyme vivant tout près, tout près, tout près de cet homme qui s'appelle Lazare, donc que l'on connaît (ce n'est pas le Lazare qu'on a vu ce matin mais un autre) et qui lui, vit pauvrement ; d'ailleurs même, de manière indigne ; eh bien, la situation de l'un et l'autre, où Lazare n'est pas reçu comme un don par ce riche (et pourtant Lazare voulait rencontrer ce riche, le riche, non !Lazare n'existe pas) ; leur situation est inversée par la mort et ce riche, le voici donc dans les fameux enfers (et notre imaginaire chrétien des enfers vient de là, ce texte : la fournaise, cette souffrance atroce), tandis que Lazare se trouve dans le sein de Dieu.

Et cet inversement nous montre que la richesse ou toute forme de richesse conduisant à l'idolâtrie, non seulement nous ferme sur nous-mêmes, nous fait devenir aveugles et même anonymes aux yeux des autres et aux yeux de Dieu mais en plus, nous empêche d'accueillir quiconque comme un don, comme un don.

Et ce qui est la finalité ultime : pouvoir recevoir chacun dans la vie communautaire, dans la vie paroissiale, dans la vie familiale, (dans le village ce qui peut être encore pire encore), recevoir l'autre comme un don ; finalité ultime pour tous ceux et toutes celles qui se réclament du Christ mais surtout, se souviennent qu'ils sont enfants de Dieu, créés par lui : nous avons tous le même Père, va-t-on dire et nous avons reçu dans la liturgie, la semaine dernière cette prière : Notre Père, « pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés ».

Il y a une sorte de perversion absolue qui est, au fond, une sorte d'enfermement dans nos richesses qui ne nous permet pas de rentrer dans cette communauté, communauté de celles et ceux qui sont nés de Dieu.

Alors, nous pouvons nous identifier soit au pauvre Lazare, soit à ce riche (peut-être d'ailleurs, peut-être un petit peu à ce riche) et vérifier très humblement, quels sont nos besoins de conversion pour ne pas nous retrouver dans la même situation que lui.

 

Le pape François, dans son commentaire, identifie un chemin pour vivre la conversion ou faire la vérité.

À partir de la situation, (à la fin du texte), où ce riche dit du fond des enfers à Abraham (alors entre parenthèses il s'adresse à Abraham parce que dans l'imaginaire juif, dans lequel il se trouvait d'ailleurs, ça pouvait être un interlocuteur pour lui) ; bon, il dit à ce Abraham : ‘envoie quelqu'un’ ; mais alors, ils ont déjà eu des prophètes, mais ils ne les écoutent pas.

La pire (alors dans l'image, dans le texte que Jésus raconte), la pire des choses, après avoir oublié que l'autre est un don pour soi, c'est de devenir aussi, un anonyme pour Dieu ou Dieu lui-même, un anonyme pour nous (c’est ne plus l'écouter).

Il se trouve que la famille de ce riche n’écoute pas, n’écoute plus : Dieu parle dans le désert ; ils n'écoutent pas.

 

Vous avez entendu qu'à la fin, Jésus termine son récit en refusant que ce soit quelqu'un qui vienne des morts pour les aider à se convertir : ils n'ont qu'à écouter.

Ce qui fait dire au pape François, que c'est l'écoute de la Parole de Dieu qui est certainement le plus sûr chemin du réveil, de la conversion et du rétablissement dans notre dignité d’enfant de Dieu ; le plus sûr chemin.

 

Alors voilà, se pose la question de la manière dont nous écoutons réellement la Parole de Dieu et peut-être un petit peu plus au-delà que la simple lecture quotidienne, (qui n'est déjà pas mal mais plus encore du ‘prions en Eglise’.

Il ne faut pas être savant pour entrer dans la Parole de Dieu, quoi qu'on en dise.

Un verset me plaît, bon ; eh bien, il me plaît ; et ce verset ne peut pas me plaire si je ne vais pas le lire ; un verset me plaît, deux versets et puis trois et puis quatre, mais il faut bien aller les lire.

 

N’oublions jamais que la Parole de Dieu, elle est comme une femme : il faut encore que je la vois pour me laisser séduire parce que si je ne suis pas dans le champ perceptif de celle qui pourrait ravir mon cœur, il ne se passera pas grand-chose.

Mais me séduisant, une fois qu'elle m'a séduit, la Parole de Dieu va me conduire sur d'autres chemins, des chemins, précisément, de vérité et des chemins de purification.

Après m'avoir attiré vers elle, cette Parole, à l'image du prophète qui conduit sa femme au désert, (ça on ne l'a pas lu mais c'est dans l'Ancien Testament) la Parole de Dieu va peu à peu détricoter nos certitudes et faire tomber nos résistances, mais c'est un chemin de longue haleine.

Si nous ne sommes pas prêts à suivre ce chemin, ce n'est pas la peine d'écouter la Parole ; mais si nous souhaitons changer, alors, allons en direction de la Parole de Dieu.

 

On peut toujours en vouloir au curé parce qu’il ne dit pas ce qu'il faut dire ou il fait ce qu'il ne faut pas faire ;

on peut toujours en vouloir aux autres chrétiens parce qu'ils ne sont pas comme il faudrait qu'ils soient ou que ce n'est pas… ok ;mais je ne pourrai jamais en vouloir à la Parole de Dieu.

Si j'en veux, c'est grave ; mais c'est bien elle qui permettra alors, ces déplacements nécessaires pour éviter de tomber dans les mêmes ornières (et définitives !), qui sont celles de ce mauvais riche.

 

Donc, prions l'Esprit Saint pour qu’il nous donne goût de rentrer un tout petit peu plus dans cette Parole, pour que nous ne vivions pas notre vie d'enfant de Dieu par procuration.

On n’est pas là pour choisir, on ne fait pas son marché, on n’est pas là pour choisir le meilleur et mettre le pourri de côté.

Vivons tout, prenons tout.

 

Amen.


Mercredi 15 mars : Sainte louise de Marillac

Jr 18, 18-20 : A l’occasion d’un attentat contre Jérémie.

Ps 30

Mt 20, 17-28 : Demande de la mère des fils de Zébédée.

 

Laissons-nous conduire par cet Évangile qui donne sens à notre chemin vers Pâques ; nous nous tournons, comme je l'ai dit en introduction, (avec cette troisième annonce que Jésus fait de sa Passion, dans l'Évangile de Matthieu), nous nous tournons vers la Passion précisément, nous montons vers Jérusalem.

Nous nous tournons,donc nous nous préparons, (je vais vous dire tout à l'heure comment), mais déjà aussi, nous glanons quelques pistes pour mieux comprendre la raison pour laquelle Jésus est mort, car rappelez-vous que, avec les Rameaux et avec le vendredi Saint, nous serons plongés dans la Passion de Jésus.

Et pour bien entrer dans ce récit (dans ces récits) de la Passion de Jésus, il est bon de savoir ce que nous devons y trouver.

Et Jésus, (un petit peu comme le Petit Poucet, d'une certaine façon), met sur son chemin (non pas pour retrouver sa route mais pour que nous trouvions la nôtre), met sur son chemin quelques indices pour que nous puissions mieux vivre, mieux comprendre, mieux accueillir cette Passion.

« Le Fils de l'homme (il s'identifie à lui) n'est pas venu pour être servi mais pour servir et pour donner sa vie en rançon pour la multitude » ; il s'identifie, là, aussi, au Serviteur souffrant dans le livre d'Isaïe au chapitre 53, verset 10, ce don de sa vie, ce don en rançon, cette gratuité de sa vie donnée : c'est gratuit, et c'est pour offrir et racheter les péchés d'une multitude.

Jésus quand, à Getsémani, il va consentir à se laisser arrêter, il ne le fait pas pour laisser faire une erreur judiciaire ou parce qu'il en a marre de se battre ; il le fait parce qu'il donne sa vie : il la donne comme en réalisation des prophéties ; l'Ecriture, l'Ancien Testament est accompli à travers lui.

Et il le fait pour nos propres péchés ; c'est là que l'intention un petit peu travestie des deux disciples, des deux fils (alors la mère se fait porte-parole mais c'est bien l'intention des deux fils. Si on va dans un autre Évangile, nous voyons que c'est plutôt l'intention de la mère mais là, c'est plutôt vraiment, l'intention des deux fils, la mère est là pour intercéder en leur faveur) dit peut-être quelque chose de notre propre péché, de notre propre confusion : à la suite de Jésus, nous sommes vraiment là pour servir et non pas pour nous trouver dans des niches où nous nous ferions servir pour un quelconque agrément personnel ou mérite.

 Nous sommes là pour être plutôt des serviteurs et ces deux disciples se trompent en demandant de bénéficier de quelques privilèges que ce soit : ils ne se rendent pas compte de ce qu'ils demandent.

Nous pouvons anticiper la Passion et regarder ce qu'il sera des disciples ; les disciples vont tous déguerpir comme des lapins avec deux fameux : Pierre qui, à la fin de la comparution de Jésus devant Caïphe, va pleurer amèrement, après avoir renié Jésus trois fois ; et au moment où Jésus est accompagné chez Pilate, Judas se pend.

 

Alors, à nous de voir où nous nous situons : du côté des serviteurs ou de ceux qui veulent être servis.


Mardi 14 mars

Is 1, 10.16-20 : Contre un peuple ingrat. Contre l’hypocrisie.

Ps 49

Mt 23, 1-12 : Reproches aux scribes et aux pharisiens.

 

Les villes de Sodome et Gomorrhe se situent au sud de la mer Morte, elles sont frontalières avec les pays voisins et ces villes ont contre elles, d'avoir commis un péché énorme : leurs habitants se sont livrés à la perversion sexuelle et elles ont enfreint le devoir d'hospitalité envers l'étranger.

Ces villes ont donc subi un châtiment terrible et elles ont connu une destruction totale et ceux qui regardaient la destruction de ces villes étaient transformés en statue de sel (vous vous souvenez peut-être de ce récit).

En tout cas, ce qui arrive à Sodome et Gomorrhe est emblématique d'une faute suprême et pourtant, dans le livre d'Isaïe, le Seigneur invite à revenir vers Lui : malgré cette faute, il est possible de transformer le péché écarlate en la blancheur de la neige.

 

Et sans transition, je vais passer à l'Évangile.

Nous savons que toute la quête de la révélation et ce que Jésus a essayé de montrer de son Père dans la grande tradition juive (il n'a en même temps pas inventé grand-chose dans ce domaine), c'est de maintenir l'unité de Dieu : Dieu est Un.

Si Dieu est Un, alors, il faut faire attention à tout ce qui vient diviser le cœur et multiplier les dieux : car si les dieux se multiplient c'est à cause d'un cœur divisé.

Un Dieu Un, Unique, celui qui est le Créateur, le Libérateur, le Seigneur, c'est le Dieu d’un cœur un : toute l'épopée du salut consiste à unifier le cœur.

 

Alors, le Seigneur veut rassembler les cœurs divisés et c'est l'œuvre du Christ.

Ceux qu'il se choisit comme des instruments pour cela, en l'occurrence ici, les maîtres de la Loi, (en l'occurrence ici, les pharisiens, ceux qui enseignent dans la chaire de Moïse), doivent être exemplaires, irréprochables ; eux-mêmes, les premiers, avoir un cœur uni : si leur cœur est divisé, ils diviseront inévitablement les cœurs de tous ; c'est la raison pour laquelle le Seigneur veut être pour nous, d'abord un maître et non pas un père et que nous soyons les uns pour les autres des frères.

 

Nous sommes tous enjoints à rassembler notre cœur, à ce que le cœur de chacun soit uni à l'image d'une communauté qui l'est aussi, pour manifester l'unité de Dieu mais aussi surtout, pour que dans notre vie, la vie de chacun, la vie personnelle, la vie quotidienne, que nous puissions, le plus possible éviter de tomber dans l'idolâtrie et dans la fascination pour de multiples petits dieux qui viendraient nous faire prendre nous-mêmes pour un dieu.

 

 

Demandons au Seigneur,dans ce temps de Carême, d'épurer notre cœur, de le purifier, vraiment le purifier de sorte que nous chassions toute tentation, toute tentation à se prendre nous-mêmes pour un dieu, prendre des objets ou des personnes pour des dieux et tourner notre regard vers celui qui est l'Unique : le Père.


Dimanche 12 mars : 2e dimanche de Carême

Gn 12, 1-4a : Vocation d’Abraham.

Ps 32

2 Tim 1, 8b-10 : Les grâces reçues par Timothée.

Mt 17, 1-9 : La transfiguration.

 

Chers amis, nous poursuivons cette route de Carême ensemble, ce chemin jusqu'au Rameaux, comportant donc cinq dimanches.

La semaine dernière, comme il est coutume, nous avons commencé par ce récit des tentations de Jésus au désert et encore, comme il est coutume, le deuxième dimanche, aujourd'hui, la transfiguration du Seigneur.

Ces choix, qui sont faits par la liturgie, ne sont pas des choix qui viennent par hasard ; au contraire, ils nous permettent de mieux suivre le chemin de Jésus du début de sa vie publique jusqu'à l'événement de la croix.

 

On est cette année, dans l'Évangile de Matthieu et je voulais vous donner un petit repère.

Vous savez que la vie publique de Jésus commence par son baptême, non pas le baptême que vont recevoir Emeline, Tiphaine, Louise, Victor et Lucie ainsi que Zoé à la Veillée Pascale, (pas un baptême pour devenir enfant de Dieu, chrétien, à la suite de Jésus), mais Jésus a été baptisé de ce baptême de Jean-Baptiste, l'insérant au milieu des pécheurs qui attendent la venue du Messie : il est plongé dans les eaux du Jourdain.

Au moment où il est plongé dans les eaux du Jourdain, (tout au début de l'Évangile de Matthieu) Jésus a 30 ans.

Une voix vient, descend du ciel accompagnée d'une colombe : nous y distinguons le signe de l'Esprit Saint : "celui-ci est mon Fils bien-aimé" ; et puis tout de suite après, Jésus est conduit par ce même Esprit Saint au désert et il va vivre ce que nous avons dit dimanche dernier, ces trois tentations du démon dans le désert, tentations de puissance.

 

Ça commence ainsi la vie publique et une première partie de la vie publique de Jésus va se terminer de la façon suivante : plusieurs chapitres après, voici que Jésus demande à ses disciples : "pour les hommes, qui suis-je ?" Alors les disciples disent : ‘ben, on raconte ici ou là que tu es Jean-Baptiste, Elie ou un autre prophète’.

‘Bon eh bien très bien, et vous qu'est-ce que vous dites que je suis ?’

Et Pierre a cette réponse : "tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant".

Alors Jésus lui dit : ‘formidable, "ce n'est pas la chair et le sang qui t'ont révélé cela, mais c'est mon Père". Bonne réponse’ ; c'était la bonne réponse de Pierre.

Et puis tout de suite après, il en profite, Jésus, pour insérer ce que les disciples n'étaient pas prêts à entendre : ‘ce Messie, eh bien, il va mourir’.

Alors là, bon! ils n'y croient pas et Pierre lui dit : ‘non, non, non, non, non, il ne va pas mourir, ce n'est pas vrai, et puis de toutes les façons, je te suivrai partout, je te défendrai’.

Mais là, tout de suite après lui avoir dit qu’il était formidable, Pierre ; Jésus lui dit : "arrière Satan !"

Pierre se trompe et Pierre reçoit une volée de bois vert ; il s'est trompé dans sa deuxième réponse, il n'accueille pas cette annonce que lui fait Jésus de la Passion parce que la Passion de Jésus, ça va être le propre échec personnel de Pierre et il n'est pas prêt à l'entendre, ça.

Ça, c'est la première partie de la vie de Jésus, dans l'Évangile de Matthieu.

 

La deuxième partie, ça commence aujourd'hui, c'est-à-dire par ce récit : Jésus amène Pierre, Jacques et Jean sur une grande montagne.

Une voix (comme dans le baptême) dit : "celui-ci est mon Fils bien-aimé" et rajoute :"Écoutez-le".

Et cette partie va se poursuivre jusqu'à la croix et au pied de la croix, nous avons ce centurion, ce chef de 100, dans l'armée romaine qui, une fois que Jésus a expiré (il est au pied de la croix), qu'est-ce qu'il dit ?

On va l'entendre à la Passion, le vendredi Saint et le dimanche des Rameaux : "celui-ci était vraiment le Fils de Dieu", comme Simon Pierre avait dit : "tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant".

Et l'Évangile ne se termine pas là, puisqu'après, Jésus ressuscite mais voilà les deux grandes parties de la vie.

 

Alors, si je vous dis ça, c'est pour vous dire que le premier dimanche, nous étions dans la première partie de la vie de Jésus, une sorte d'enthousiasme sans avoir l'horizon de la croix : ‘allez hop! on démarre (la plus grande tentation d’ailleurs, est celle de la puissance, comme tous ceux qui commencent une route ; ils s'y croient, ils se croient déjà arrivés, d'ailleurs), et la deuxième partie de la vie de Jésus commence aujourd'hui et c'est le moment, où à l'horizon, il y a la croix (et ce ne sont plus les mêmes tentations).

 

Alors, pour vous en parler, je passe à la deuxième partie de mon propos.

Ça va vous tenez toujours ?

 

Il y a Moïse et Elie qui apparaissent autour de Jésus, Moïse et Elie.

 

Moïse, commençons par lui.

La Bible dit : 'l'homme le plus humble de la terre’, magnifique qualificatif de celui qui a donné la Loi au sommet de la montagne.

Alors, Moïse, vous savez, c'est celui qui a fait plusieurs rencontres du Seigneur et au terme de sa première rencontre avec le Seigneur, alors qu'il faisait paître les brebis du troupeau de son beau-père Jethro, il voit le Seigneur apparaître dans un buisson ardent.

Ça, c'est la première apparition.

 

Depuis, il va être celui qui va libérer le peuple qui était esclave chez les Égyptiens, ils vont traverser la mer rouge, qui va s'ouvrir en deux parts et ils vont arriver (ils ne vont pas arriver en terre promise tout de suite), ils vont arriver dans un désert pendant 40 ans.

Eh bien dans ce désert, Moïse, le grand chef, va recevoir les tables de la Loi et il va les donner au peuple.

Et puis, ça ne va pas se passer comme il veut, en fait, puisqu'il va redescendre de la montagne du Sinaï et là, il se rend compte que ceux qui l'attendaient en bas, ils étaient en train de se faire à veau d'or.

Ça vous dit quelque chose le veau d'or ?

Alors là, il est dépité,très en colère, mais aussi dépité ; sa tentation c'est de tout abandonner,ce n'est pas la tentation des commencements de : 'je m'y crois, tout va bien et j'arriverai au but'; c'est : ‘ça ne va pas comme je veux, les bras m'en tombent, je suis découragé’.

 

Qu'est-ce qu'il refait ?

Il remonte en haut de la montagne et il va se cacher dans une grotte pendant 40 jours et 40 nuits.

Il va dire : 'Seigneur, y en a marre ! (enfin, bref !) ; je veux te voir.

Et le Seigneur va lui dire : 'non tu ne peux pas me voir de face parce que sinon, tu mourrais;mais d'accord, je vais passer devant toi, mais je passerai de dos.

Tu ne verras que mon dos, parce que si tu me vois en face, tu meurs’.

Alors, il va voir le dos et puis ça va le revigorer, parce qu'il a vu le Seigneur et puis, il va devenir très éblouissant de lumière : c'est parce qu'il a vu le Seigneur de près (heureusement qu'il ne l'a pas vu complètement).

Du coup il va redescendre avec un voile sur le visage pour ne pas aveugler tous ceux et toutes celles qui vont le rencontrer, parce qu'il va devenir très rayonnant : ça, c'est Moïse.

 

Donc découragé, il monte dans la montagne, il s'enferme dans une grotte 40 jours, 40 nuits ; il voit le Seigneur ; hop ! ça va mieux, il redescend.

Le récit de Moïse, c'était : Exode; et puis le coup de la montagne, c'est chapitre 33.

 

Elie, (premier livre des Rois), prophète puissant en actes et en paroles ; il a fait des miracles extraordinaires, mais Elie, il a eu très très peur d'une femme (il n'avait pas peur des faux prophètes), il a eu très peur d'une femme, pas n'importe laquelle, la reine Jézabel.

Il la fuit pendant 40 jours et 40 nuits, il a couru dans le désert pour aller loin d'elle, il avait très peur d'elle.

Et à un moment donné d'ailleurs, il n'avait plus de force dans le désert, pof ! il tombe par terre.

Le Seigneur lui envoie un ange pour le remettre debout ; il continue sa marche.

 

Où est-ce qu'il va?

Eh bien, il va au sommet de la même montagne que Moïse alors qu'on est à quelques siècles d'écart.

Il va dans la même grotte et là il dit : 'Seigneur (je résume), j'en ai marre, je veux te voir (comme Moïse).

 

Et alors, qu'est-ce qu'il fait le Seigneur à ce moment-là ?

Eh bien, il ne va pas se montrer ; mais il est plus fin ; il a pris de l'expérience, le Seigneur.

Alors, il va faire un grand tremblement de terre, Elie va croire qu'il est dans le tremblement de terre : 'non non, je ne suis pas dans le tremblement de terre'.

Alors, il va faire une grande tempête : 'tu es dans la tempête’ (ça lui allait bien parce que ce prophète est tempétueux) mais il n'était pas dans la tempête non plus.

Il s'est mis à pleuvoir très fort : 'tu es dans la pluie'. Non plus.

Et Elie s'est fait avoir parce qu'il y a une brise légère, (il ne s'y attendait pas) et le Seigneur était dans la brise légère.

Et hop ! ça allait mieux ; tentation d'abandonner pour Elie.

 

Moïse et Elie, aussi puissants étaient-ils, ont eu la tentation d'abandonner.

C'est une autre tentation, c'est terrible : une sorte d'acédie, déprime, dépression, perte de goût ; ça peut nous arriver, (pas qu'à Moïse ni à Elie) ; manque de confiance en soi-même et dans le Seigneur.

 

Pierre, Jacques et Jean, au sommet de la montagne de la transfiguration, si vous voulez mon avis, ils vivent la même chose : n'oubliez pas qu'ils ont reçu une volée de bois vert de la part du Seigneur qui voulait leur annoncer qu'il allait mourir.

Ça les concerne de près parce qu’ils ont déjà tout quitté pour le suivre ; si en plus, celui qu’ils suivent, se rate, ça ne va pas.

 

 

Le Seigneur, au milieu de la route qui est la nôtre, aujourd'hui, quasiment, vers la Passion et la résurrection, vient se manifester et cette fois-ci, non pas dans la puissance, (non pas dans la puissance des orgueilleux qui sont sur la ligne de départ) mais vient se manifester dans la faiblesse de ceux qui vivent la fin du milieu du jour, la faiblesse de ceux qui connaissent les découragements : il vient se manifester là, une brise légère.

Alors, les chers candidats au baptême (alors, Victor, aujourd'hui, il n'est pas là, mais c'était prévu; par contre, il y a Lucie, il y a Louise sa petite sœur, il y a Tiphaine et Emeline, Zoé (j'ai parlé d’ une Zoé, c'est un petit bébé donc il sera là, pas tout de suite) eh bien, chers candidats au baptême, sur votre route qui est longue et qui sera bien plus longue après le baptême, ne vous découragez pas car le Seigneur saura toujours se manifester à vous ; si ça n'est pas en plein, c'est en creux, peut-être même dans le silence.

 

Amen.


Jeudi 9 mars

Est 4, 17 : La prière d’Esther.

Ps 137

Mt 7, 7-12 : Efficacité de la prière. La règle d’or.

 

Dans tout l'Évangile, il nous suffit de regarder l'itinéraire que Jésus fait emprunter à ses disciples pour mieux découvrir le chemin qui conduit vers le Père : chaque fois que Jésus, par exemple, encourage les disciples, chaque fois qu'il les tance, qu'il les corrige, chaque fois qu'il leur apporte un enseignement nouveau ou qu'il se montre en exemple ou qu'il prend d'autres personnes en exemple ; tout ceci trace un chemin pour les disciples, pour qu'ils découvrent le chemin du Père.

Mais, personne ne peut aller vers le Père sans passer par Jésus ; donc, le chemin de Jésus est le plus sûr chemin pour rejoindre le Père et c'est notre vocation à chacun.

 

Là, il s'agit d'un enseignement sur la prière ; nous avons eu hier, la prière du Notre-Père ; nous avons là un autre enseignement sur la prière qui peut renvoyer à un autre enseignement encore ou à un autre exemple, encore plus excellent, sur la prière et sur la prière qui s'adresse au Père : c'est la prière de Jésus dans le jardin des oliviers.

Il s'adresse à son Père, il y a quelques disciples.

Ses disciples, malheureusement, s'endorment au début et à la fin.

Ils ne sont pas témoins de cette belle prière que Jésus adresse à son Père ; ils n'en sont pas les témoins : ils dorment.

Pourtant ils ne sont pas très loin.

Jésus s'adresse à son Père dans l'adversité la plus grande : il souffre, ça c'est clair ; il sait ce qu'il va lui arriver et en même temps il aimerait bien que cela ne lui arrive pas.

"Cependant, non pas ce que je veux mais ce que tu veux, Père".

Et ceci est précieux pour mieux comprendre cet enseignement d'aujourd'hui, pour mieux comprendre l'extrait du livre d'Esther, (en première lecture) et pour mieux comprendre surtout comment Dieu répond.

 

Dieu Père, comment il répond à notre prière ?

Il répond par le silence mais il répond.

C'est le grand acteur de ce qui nous arrive dans notre vie ; c'est le grand acteur : il est à la manœuvre d'une certaine façon mais dans le silence, dans le silence.

Disons, qu'il parle à travers les événements (voilà, on va dire ça !) il parle à travers les événements.

 

Tandis que nous, nous sommes beaucoup des êtres de parole et nous sommes amenés à grandir pour que notre prière, adressée au Père devienne de plus en plus silence : non pas que nous ne nous adressions plus à lui, non pas que nous nous taisions, non pas que nous oublions le Père mais que notre prière soit d'abord consentement, consentement.

 

 Alors, c'est toujours facile de dire : 'ah oui, je veux, je veux, je voudrais', ça c'est Simon Pierre ; il faut plutôt être, c'est-à-dire avoir une disposition à être, à avoir une vie accordée (ce n'est pas simplement le dire, mais c’est l’être).

Et cela ne peut se dire, s’affirmer que par le silence et un accueil de ce qui advient : ça peut être notre prière.

Et l'action de Dieu n'est pas parole, l'action de Dieu est événement dans nos vies.

 

Alors, quand tout va bien, par exemple surtout au printemps, en fait ; nous sommes quand même des êtres de lumière, nous avons besoin de lumière.

Nous sommes des êtres de lumière et la lumière, on en parle à Noël, on n'en parle à Pâques, la lumière, nous sommes tendus vers la lumière.

Quand cette lumière advient, l'événement de Dieu dans nos vies est presque tout trouvé et notre regard et notre vie peuvent être contemplation de la nature qui s'ouvre, qui verdit, qui se déploie, qui chante.

 

Et quand il y a mal et violence ? ah, c'est plus difficile.

Dieu veut-il dire quelque chose dans ces événements ?

Chacun est renvoyé à son Père et notre Père : que veut-il me dire ?

En tout cas, Jésus ne fuit pas cette interpellation, il y va tout droit, il la traverse glorieusement et victorieusement.

Alors peut-être, c'est pour nous une invitation à, non seulement accueillir Dieu qui se fait événement dans nos vies, mais pas seulement à travers la lumière.

 

Amen. 


Mercredi 8 mars : St Jean de Dieu

Est 4, 17 : Prière d’Esther.

Ps 137

Mt 7, 7-12 : Efficacité de la prière. La règle d’or.

 

Parfois, la Parole de Dieu juge notre mauvaise connaissance de la Parole de Dieu.

Pendant certaines eucharisties, les textes proposés par la liturgie peuvent nous paraître incompréhensibles si nous ne partons pas à la chasse au trésor et comprendre un petit peu, rentrer dans un jeu de piste pour savoir finalement, où veut nous conduire le Christ.

Il parle de signes, Jonas, la reine de Saba (ou la reine de midi).

 

Alors, je vous propose d'abord, d'avoir recours au livre de Jonas.

C'est un livre que vous connaissez peut-être un petit peu, il est bref ; nous n'en avons qu'un très court extrait néanmoins, dans la première lecture.

Le prophète Jonas a deux parties dans son ministère, nous n'en avons entendu qu'un aspect de la seconde partie.

La première partie de son ministère, c'est qu'il va séjourner dans un monstre marin, dans un cétacé, pendant trois jours, avant d'être recraché.

Nous avons lu là, un Évangile qui est dans l'Évangile de Saint Luc ; il y a la même chose (enfin, quasiment) chez Saint Matthieu.

Les deux évangélistes ont retenu ces paroles de Jésus mais ils ne les ont pas retenues de la même façon.

 

Chez Saint Matthieu, l'allusion que fait Jésus à Jonas, c'est l'allusion à la première partie de son ministère ; Jonas qui va passer trois jours, trois nuits dans le monstre marin, et Saint Matthieu qui s'adresse à des judaïsants va dire : 'voyez c'est un signe pour expliquer la résurrection du Christ, il va passer trois jours dans la terre avant de ressusciter'.

 

Saint Luc s'adresse davantage à des païens ; quand il entend le mot Jonas, il ne retient pas ce premier aspect, il retient le deuxième : Jonas qui va à Ninive.

Alors certes, Jonas aura été fort récalcitrant et il aura fini par aller à Ninive.

Il va s'adresser aux païens et il va lui-même, d'ailleurs, être saisi par la promptitude avec laquelle les païens vont se convertir à l'appel du Seigneur à travers Jonas, alors qu'il avait très très peur d'être mangé tout cru, Jonas, dans cette grande ville de Ninive.

Quand Saint Luc rapporte ce passage du prophète Jonas, il retient ce deuxième aspect : Jonas qui s'adresse aux païens.

 

C'est ce que Luc veut faire également.

Donc, il leur rappelle Jonas et il leur rappelle la reine de Saba (premier livre des rois chapitre 10) cette fameuse reine de midi qui va voir le roi Salomon ; et le roi Salomon qui va l'impressionner.

Alors, le roi Salomon a impressionné plus de 70 autres femmes dans toute sa vie, mais cette femme de Saba était une femme extraordinaire de puissance et surtout c'était une païenne (remarquez encore, ce n'est pas la première qu'il rencontre, mais c’était une païenne).

Par sa sagesse, il va la convertir et non pas la séduire ; ce qui va, sans doute, marquer la différence avec toutes les autres femmes qu'il aura rencontrées, il va la convertir et c'est ce qui retient Saint Luc.

À travers ces deux extraits de Jonas et de la reine de Saba, sans doute alors, Saint Luc nous invite à nous laisser regarder et juger par les païens.

 

Qui sont les païens ?

Ce sont tous ceux qui sont censés être extérieurs à notre vie chrétienne et nous regarder.

Pourvu que, regardés par les païens, nous ayons envie nous aussi de nous convertir.

 

Amen. 


Mardi 7 mars : Saintes Perpétue et Félicité

Is 55, 10-11 : Une Parole efficace.

Ps 33

Mt 6, 7-15 : Lavraie prière,le Notre Père.

 

Le livre de l'Exode raconte la sortie d'Égypte du peuple hébreu, libéré par le Seigneur à travers le bras fort et vigoureux de Moïse et voici qu’il erre pendant 40 années dans le désert (ce qui nous rappelle lointainement les 40 jours de Jésus, depuis dimanche).

À un moment donné, ce peuple a faim, il récrimine, le Seigneur répond à son attente et fait donc pleuvoir, non pas de la pluie mais de la manne, d'abord des cailles, ensuite de la manne pendant 40 ans.

Le peuple peut donc dépendre de cette nourriture qui vient en temps voulu et à chacun selon ses capacités ou ses besoins, mais jamais plus : si quelqu'un en prend plus,comme par crainte de ne pas en avoir assez, eh bien, tout va périr dans sa réserve.

Ça, c'est le récit de ce don que le Seigneur fait, du pain quotidien.

 

Mais ce récit a été quelque peu transformé par le Nouveau Testament, parce que le Seigneur continue à donner sa nourriture en temps voulu, mais il pose comme une sorte de condition ou tout du moins, une dimension nouvelle : ça ne se passe plus entre le Seigneur et celui qui a faim, ça se passe entre le Seigneur, le peuple et celui qui a faim.

Nous avons l'exemple de la multiplication des pains par Jésus : le peuple a faim, Jésus les regarde avec compassion et Jésus dit aux disciples : "donnez-leur vous-mêmes à mange.

Alors, il va s'agir pour eux, de chercher leurs réserves cette fois-ci et non pas ramasser ce qui serait tombé du ciel : cinq pains, deux poissons, c'est bien peu de choses pour tant de personnes.

"Regroupez-les par groupe de cinquante".

Et bien sûr, Jésus produit le miracle que nous connaissons mais il faut distribuer, il faut servir le peuple, organiser cette distribution.

 

Eh bien, c'est bien l'esprit de la prière du Notre-Père: il y a à la fois "donne-nous ce pain quotidien" (donc, ce don de la manne) mais la dimension communautaire et fraternelle : "remets-nous nos dettes" ; je ne suis plus tout seul devant le Seigneur, il y en a d'autres autour de moi.

Cette prière du Notre-Père, nous pouvons la regarder dans deux directions.

La première direction, comme elle vient, de haut en bas : mon cœur est toujours enclin à être tourné vers ce qui est au-dessus de lui, la lumière, il s'adresse à son Seigneur, et puis ensuite, si jamais il pense, il va prier pour les autres.

Mais aussi, on peut lire cette prière à l'envers et commencer par ce qui nous empêche véritablement de reconnaître que le Seigneur est plus grand que nous et reconnaître que nous accueillons une nourriture qui n'est pas forcément celle que nous attendons, mais qui est bien meilleure encore.

Alors, il s'agit d'être délivré de toute tentation, d'être libéré de nos dettes, de recevoir notre pain; et après tout cela, oui, je peux reconnaître ce Dieu véritable que me révèle Jésus-Christ, non pas celui de mon nombril mais celui qui se révèle à moi, celui qui est sanctifié, celui dans le règne a besoin de venir.

 

Cette prière du Notre-Père est extrêmement précieuse parce qu'elle vient de la bouche de notre Seigneur.

Et, vous l'avez entendu, elle est vraiment au milieu de ce que nous avons lu, il y a 7 jours, au mercredi des Cendres : nous avons entendu l'appel de Jésus à la prière, au jeûne et au partage (et il y avait un trou on ne s'en est pas rendu compte), la liturgie avait enlevé quelque chose, une pièce du puzzle et la voici, c'est cette prière du Notre-Père.

Amen.


Dimanche 5 mars : 1° dimanche de Carême

Gn 2, 7-9 ; 3, 1-7a : le récit du paradis.

Ps 50

Rm 5, 12-19 : Adam et Jésus-Christ.

Mt 4, 1-11 : Les tentations de Jésus au désert.

 

Les enfants, une petite question : est-ce que vous savez ce qu'est une parabole ?

Non, c'est quoi une parabole ?

Ah voilà, très bien ; effectivement, cet objet qui sert à capter la télévision.

Ce n'est pas complètement faux, une parabole, c'est aussi une image de Jésus quand il raconte une histoire et c'est encore autre chose une parabole, (je vais être subtil, c'est-à-dire que je vais être un petit peu compliqué) ; une parabole, c'est un mot ancien qui veut dire : ni une histoire de Jésus, ni une antenne pour capter la télé, mais qui signifie : 'jeter autour'.

D'ailleurs, une antenne, pour capter la télé c'est tout rond, c'est peut-être pour ça qu'on appelle ça une parabole, d'ailleurs ; 'jeter autour'.

Alors, je peux vous poser une autre question, mais là, ça va être dur : une hyperbole.

C'est plutôt les adultes, une hyperbole ; alors, pareil aussi, c'est un terme technique pour les Français.

Si je reviens toujours à mon mot très ancien, très très ancien, ça veut dire : 'jeter par-dessus' ; autour, par-dessus (alors ce n'est pas l'histoire du petit lapin plein de poils par-dessus, par-dessous, par devant) ; 'jeter autour', parabole ; 'jeter dessus', hyperbole et alors 'jeter au travers', ça serait quoi ?

Jeter au travers, alors c'est un mot qui n'existe pas complètement, (mais, je ne sais pas si ça vous dit quelque chose) ; eh bien, un diabole, un diabolos, qui jette à travers : un diabolos ; le diable, celui qui jette à travers et en jetant à travers il sépare, il coupe.

C'était un petit exercice de jeu de mots : parabole, hyperbole, diabolos, le diable, celui qui sépare en jetant à travers.

 

Et on voit ça dans le livre de la Genèse, nous l'avons entendu en première lecture : deux personnes, Adam et Ève, ont été séparés l'un de l'autre, coupés en deux : "ils se découvrirent nus, pleins de honte" (je l'avais évoqué dimanche dernier, d'ailleurs) par l'action bizarroïde d'un drôle de serpent qui falsifie la Parole de Dieu, qui ment, qui dit que Dieu : 'eh bien ce qu'il a dit, ce n'est pas vrai'.

Et tout d'un coup, paf ! ça a séparé deux personnes et elles se découvrirent vraiment très différentes et plus très à l'aise l'une avec l'autre.

Eh bien, ce diabolos, ce diable, ce démon, (parfois on lui donne un autre nom : le Satan), c'est dans la Bible, celui qui existe dans le désert.

 

Le désert c'est le lieu du Satan, dans la Bible.

Chaque fois qu'il y a un désert, il y a du Satan; et chaque fois qu'il y a du Satan, il y a de la tentation, il y a de la tentation.

Alors la tentation, j'ai besoin de vous faire un dessin, les enfants ?

 Tentation : imaginez un pot de Nutella, imaginez l'interdiction des parents : 'il ne faut pas manger de Nutella'.

Le pot de Nutella est devant vous…

ou alors un téléphone portable avec une connexion illimitée ; 'tu n'iras pas sur le téléphone portable'.

Je suis tout seul ; Oh là là ! Oh là là !, on m'a dit de ne pas le faire : la tentation est là.

Eh bien, dans les déserts, le lieu du Satan, le lieu du diable, il y a de la tentation.

 

Ce petit préambule pour expliquer qu'à la suite de Jésus, les chrétiens comprennent, croient, que la vie de tous les baptisés c'est une vie (alors, vous allez trouver ça bizarre), c'est une vie (je m'adresse en particulier à Tiphaine et à Emeline) une vie de baptisé c'est une vie dans le désert ; non pas dans le désert de la faim ou dans le désert de l'errance mais dans le désert de la tentation.

Un baptisé c'est quelqu'un qui sait que dans sa vie, il va y avoir, il y a, et il y a eu de la tentation, il y a du cœur divisé, il y a du 'j'aimerais ne pas faire ça et je l'ai fait'et 'je n'ai pas fait quelque chose que j'aurais voulu faire', il y a de la tentation.

C'est le désert de nos vies.

 

Jésus, dans ce texte que nous avons entendu, (de l'Évangile), d'abord, il nous rappelle que nous ne pouvons pas évacuer la question du tentateur ; on ne peut pas dire : 'ça n'existe pas' et on ne peut pas dire : 'je vais être plus fort que lui en l'expliquant'.

Par exemple, vous pourriez faire tous les cours du monde de psychologie, eh bien vous ne seriez pas pour autant à l'abri du tentateur ;

vous pourriez faire toutes les retraites spirituelles de votre vie, vous ne seriez pas pour autant à l'abri du tentateur.

Rien ne peut nous prémunir de lui, sauf une chose : je vais vous le dire après.

 

Donc, ce fameux tentateur existe et comment nous en défaire ?

Eh bien, il suffit de regarder Jésus, dans l'Évangile.

Jésus nous donne les tactiques du diable ; et sachant les tactiques du diable, eh bien, on peut s'en défaire ou du moins, éviter de tomber dans ses pièges.

Et le diable, il a repéré qu'il y avait quelque chose qui marchait bien chez nous, (chez toutes les personnes), bien plus fort que le Nutella et le téléphone portable, bien plus fort, c'est : l'importance.

On aime bien, (j'aime bien) ; j'aime bien qu'on me dise des choses agréables sur moi ; c'est mieux que quand on me dit des choses désagréables.

Et quand on me dit des choses désagréables, à moi, je pense que, toujours un peu, que ce n'est pas tellement moi le problème, c'est quelqu'un d'autre ; mais on le dit à moi, donc ce n'est déjà pas si grave si ce n'est pas moi mais quelqu'un d'autre.

Mais je préfère qu'on me dise des choses bien : l'importance.

 

Le diable, il a repéré ça.

Et comme il a repéré ça, il a inventé trois péchés terribles dans lesquels on tombe, (mais toujours !) ; l'orgueil (je suis vachement important), la gloire et puis la puissance.

Et si vous regardez des personnes autour de vous, (c'est toujours plus facile de le voir chez d'autres), vous allez voir comment fonctionnent ces trois choses.

Mais l'idée, en regardant le texte de l'Évangile d'aujourd'hui, c'est de repérer comment ça marche dans notre cœur à nous, pas chez les autres, comment il y a de la tentation à la puissance, comment il y a de la tentation à l'importance, comment il y a de la tentation à la gloire.

 

Eh bien l'antidote, c'est de faire comme Jésus.

Lui Jésus, il a fait tout l'inverse : ça n'a pas été un homme de puissance.

Jésus, ça n'a pas été un homme de puissance, il n'a pas enlevé sa croix par exemple, il n'a pas évité de se faire crucifier.

C'est un homme qui a choisi la compagnie des pauvres, c'est un homme qui a choisi la compagnie des humbles.

Il n'a pas eu peur de choisir la difficulté.

Autant de chemins sûrs qui lui permettaient de ne pas tomber dans les pièges du tentateur.

 

Et nous, on se dit, comme baptisés : le baptême va me donner une force, il risque de me donner d’ailleurs,une importance.

Le baptême risque même de me donner un petit peu, une sorte de petite gloire personnelle.

Peut-être le baptême risque-t-il de me donner beaucoup de puissance.

Mais attention, parce que le tentateur m'attend au tournant et que je risque, un jour pas fait comme un autre, de me trouver dans mon cœur, tout triste, abandonné, seul : Dieu fait silence.

Eh bien, c'est à ce moment-là qu'il faut se souvenir que Dieu est là, même dans le silence.

 

Pour conclure, l'antidote qui marche à tous les coups pour nous, (chacun) : c'est la Parole de Dieu qui maintient en éveil nos cœurs.

Car il est toujours plus agréable de se remettre en route après avoir évité de tomber dans un grand piège, plutôt que de se remettre en route quand on est tombé lamentablement dans un piège du tentateur ; et la Parole de Dieu maintient nos cœurs en éveil, maintient nos cœurs en éveil.

 

Alors, Tiphaine, Emeline, ainsi que Lucie, Louise et Victor, vous allez recevoir chacun, ce dimanche, la force de Dieu pour que ce baptême, que vous allez recevoir à la Veillée Pascale, vous ne le viviez ni comme une puissance, ni comme une gloire ; vous le viviez comme un cadeau qui ne vous mette pas au-dessus de tous les autres mais qui vous mettent au milieu de tous les autres.

Et alors, c'est un vrai cadeau pour nous ; parce que nous, qui sommes déjà baptisés, on va se rappeler cette puissance qu'on a reçue le jour de notre baptême et ça va nous donner force et courage pour, à notre tour, ne pas tomber dans les mêmes pièges du tentateur.

On va se dire : 'tiens, il y a des jeunes petits frères, petites sœurs qui vont devenir chrétiens, ils vont tout faire pour ne pas tomber dans les pièges de l'orgueil et de la tentation' ; eh bien nous aussi, ça nous rappelle qu’il ne vaut mieux pas le faire ; il vaut mieux être prudent.

 

Amen. 


Jeudi 2 mars :

Dt 30, 15-20 : Les deux voies.

Ps 1

Lc 9, 22-25 : Conditions pour suivre Jésus.

 

Alors, Claude-Annie a eu du mal à dire le mot : Deutéronome.

Deutéronome, c'est l’un des cinq premiers livres de la Bible ; c'est un livre très important, le Deutéronome.

Il reprend tous les échecs du peuple d'Israël mais il les tourne en exhortations et en chances, en promesses, présentant en permanence au peuple d'Israël la possibilité de choisir, comme si tout ce qui avait été raconté dans le livre de l'Exode, était subi : ‘ça nous est arrivé ; on n’a pas réussi à anticiper ; ça nous est tombé dessus d'une certaine façon, toutes les tentations du désert.

Cette fois-ci, ça nous est présenté comme un choix possible : "vois, je mets devant toi la vie ou la mort ; choisis".

 

Quand Jésus rencontrera le démon dans le désert, on entendra ça dans l'Évangile, dimanche ; Jésus cite toujours le Deutéronome.

 

Maintenant, l'Évangile que nous avons entendu.

Première annonce de la Passion de Jésus ; il va l'annoncer trois fois.

 

C'est la première annonce, ça suit tout de suite après la profession de foi de Pierre :"tu es le Messie, le Fils de Dieu. "

Jésus pose la question : "pour les autres, qu'est-ce que je suis ?

Et pour vous qui suis-je ?"

Pierre, une grande envolée ; et tout de suite après : bim !

Ah ! mais attention, il faut que je meure.

 

Ensuite, ils vont sur la montagne de la Transfiguration et puis, ensuite Jésus va ré-annoncer une deuxième fois sa Passion.

 

Dans ce récit de l'Evangile : "Celui qui veut marcher à ma suite, qu'il renonce à lui-même, qu'il prenne sa croix chaque jour et qu'il me suive.

Celui qui veut sauver sa vie, la perdra mais celui qui perdra sa vie à cause de moi, la sauvera.

Quel avantage un homme aura-t-il à gagner le monde entier s'il se perd ou se ruine lui-même ?"

Ça revient à dire que Jésus est le Seigneur au sens du Deutéronome ; au sens du Deutéronome.

"Écoute Israël, le Seigneur ton Dieu est l’Unique.

Tu aimeras le Seigneur de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta puissance" :

Si je l'aime de tout mon cœur, de toute mon âme et de toute ma puissance, je renonce donc à ma vie, je prends ma croix, et je le suis.

À nous de choisir.

 

Amen.


Mercredi 1°mars : les Cendres

Jl 2, 12-18 : Appel à la pénitence.

Ps 50

2 Co 5,20 - 6, 2 : L’exercice du ministère apostolique.

Mt 6, 1-6. 16-18 : Faire l’aumône en secret. Prier en secret. Jeûner en secret.

 

La célébration des Cendres, chers amis, est pour nous, donc, un top départ; vraiment le top départ d'un long entraînement communautaire : projet, promesse pour vivre ensemble toute la fête de la résurrection, une fête non feinte mais une fête vraiment qui nous traverse du plus profond de nous-mêmes ; nous ressusciterons avec le Christ.

Et voici que s'ouvrent pour nous, 40 jours à partir de ce soir jusqu'au Rameaux, (jusqu'aux Rameaux et non pas jusqu'à Pâques), jusqu'aux Rameaux.

Et ces mêmes rameaux bénis l'année dernière, ils ont été brûlés et réduits en cendres ; et ce sont ces mêmes rameaux, en cendres, que nous allons recevoir sur nos fronts dans quelques instants.

 

40 jours pour vivre quoi, ensemble ?

Eh bien, pour que ce désir que l'Esprit Saint suscite en nous, monte peu à peu à travers toutes les parties et tous les pores de notre corps et de notre cœur.

Ce désir sans lequel notre vie tombe en ruine ; désir inspiré par l'Esprit Saint, comme la nature nous rappelle cette nécessité d'un désir qui remonte : la sève qui va traverser les rameaux de ces arbres, de ces vignes, qui paraissent aujourd'hui comme morts mais qui, peu à peu, vont ressusciter.

Un désir et non pas une envie, un désir suscité par le Christ pour que nos corps et nos vies reprennent vigueur, sortent de leur torpeur, quittent l'hiver et fassent tomber leurs masques et leurs coquilles et que nous soyons des vivants.

Un désir et non pas une envie, car une envie c'est furtif : ce matin, j'avais envie ; cet après-midi, je n'avais plus envie.

Par contre, un désir va traverser de nombreux obstacles et va relever de nombreux défis ; un désir c'est comme un torrent de montagne : rien ne l'arrête.

Un obstacle se présente, il le contournera ou il le détruira.

Et nous avons cinq dimanches devant nous, dans ces 40 jours ; cinq dimanches pour lever tous les obstacles pour que se contournent en nos vies tous les freins, toutes les barrières que nous avons besoin de dépasser. 

 

Premier dimanche, (dimanche qui vient) ce sera plus que tout l'orgueil ; l'orgueil : racine de tous les maux, de tous les péchés, (nous verrons dimanche), ce que le diable préfère.

 

Le dimanche suivant avec la Transfiguration du Seigneur, ce sera pour nous l'occasion d'avoir soif et l'occasion de creuser, de se demander si, au fond, il ne ferait pas bon croire ; ou de se demander si nous croyons vraiment.

Et alors nous serons mûrs pour les trois dimanches qui vont suivre, avec des épisodes célèbres des rencontres de Jésus, dans l'Évangile de Jean pour fortifier notre foi, pour la construire, la laisser s'édifier à nouveau en nous.

Bref, ce sont 40 jours et ce sont 5 dimanches pour que monte ce désir de la vie ; entraînement communautaire parce qu'il faut durer, il faut durer.

Finalement, c'est une conversion que nous ne pouvons pas vivre seuls : à plusieurs, c'est mieux ;entraînement communautaire.

 

Et pendant ces 40 jours, l'Eglise, inspirée par le Christ, nous donne des moyens ; et c'est le sens du mercredi, ces cendres, ce soir.

Moyens : jeûne, prière, aumône, vous l'avez entendu vous-même dans la bouche de Jésus, dans l'Évangile selon saint Matthieu, chapitre six ; Jésus est sur la montagne,pendant son discours, juste après les béatitudes.

Trois moyens qui ne sont pas des fins (attention, ce sont des moyens !) pour toujours maintenir éveillés en nous, cette recherche, cette quête, ce désir de la vie ; sans quoi, il se peut que nous nous ré-endormions,il se peut que nous retournions dans nos hivers et que nous ne parvenions pas au terme.

 

Nous allons recevoir les Cendres ; en les recevant, c'est de la poussière, c'est sale et ça se voit (il fait nuit ; donc, on va rentrer chez soi, on va se laver le front très vite, (voilà, des fois qu'on tache l'oreiller), c'est dommage ! mais, on le fait le soir, on pourrait le faire le matin), c'est une marque précieuse.

 

Les enfants, dans l'Ancien Testament, quand le peuple des Hébreux avait conscience d'avoir commis une faute très grave qui les éloignait de leur Seigneur, ils prenaient de la cendre dans un sac et ils le déchiraient, ce sac, au-dessus d'eux : alors, ils étaient tout noirs de cendres, pleins de poussière.

C'était un signe de deuil et de tristesse.

Alors ce soir, on n'est pas dans la tristesse et on n'est pas dans le deuil ; deuil, tristesse, pénitence ; par contre, on est dans la pénitence.

Donc, on est vraiment comme nos arrière grands-parents dans la foi, on fait pareil qu'eux.

 

Mais c'est aussi, et c'est d'abord le rappel que tout notre orgueil, tout notre péché nous montrent que nous sommes vraiment peu de choses.

Brisés sur le feu de l'amour de Dieu ; si c'est brûlé, notre vie, elle ne tient pas à nous-mêmes, notre vie tient au Christ.

Nus, nous sommes nés ; nus nous mourrons : "tu es poussière et tu redeviendras poussière", c'est ce que dira le prêtre avec les diacres, tout à l'heure.

‘Laisse tomber les masques, laisse tomber ton orgueil ; personne n'est pire que toi et personne n'est meilleur que toi.

Allez, vas-y, n'aie pas peur, sois dans la joie de la réconciliation avec Dieu, sois dans la joie de la résurrection promise ; mais il faut que tu te mettes en route, il n'y a pas à dire : il faut que tu te mettes en route.

Ce soir, chers amis, on se met en route.

Et peut-être que vous connaissez ce proverbe : "c'est pas tout d'y dire, encore faut-il y faire".

Eh bien ce soir on y fait, on y va.

Ce ne sont plus seulement des intentions, ce sont des actes.

C'est le top départ.

 

Je vous invite pendant ce temps de Carême à suivre : prière, jeûne et aumône comme des moyens, pourvu qu'ils nous rappellent que la direction, c'est Jésus-Christ.

Je vous invite à lire l'Ecriture ou à y retourner un petit peu plus : n’en restons pas qu’à RCF et à ‘Prions en Eglise’ ; si on peut ouvrir la Bible, c'est bien aussi ; et fixons notre regard sur le Christ.

 

Dans l'un des passages de l'Évangile, juste après la traversée de Jéricho, Jésus guérit un aveugle qui s'appelle Bartimée : les enfants, c'est le premier personnage qu'on a vu au début de l'année, Bartimée.

Sa vie elle était comment à Bartimée, les enfants, vous vous souvenez?

Elle était comment ?

Matéo, tu ne l'as pas vu toi ; toi, tu es en quatrième année.

Première, deuxième, troisième année...elle est comme un papier journal ; la vie de Bartimée, elle est toute chiffonnée.

 

Une fois que Jésus a traversé Jéricho, l’Evangile nous dit : "il durcit sa face et il prend résolument la route vers Jérusalem "; et il monte.

Eh bien c'est ce que nous faisons ce soir : nous prenons résolument la route vers Jérusalem ; nous joignons les actes aux paroles et nous décidons de faire de ce Carême, un temps de conversion.

En recevant ces cendres. Seigneur, je t'aime ; je sais que je peux avoir confiance en toi.

Je me tourne vers toi,je reconnais que, devant toi je suis petit et grand à la fois.

Je ne suis pas plus grand et pas plus petit que les autres et je cesse de les regarder pendant 40 jours, non pas pour être égoïste mais pour cesser de me comparer et je m'occupe de mon cœur.

Je veux ressusciter, je veux être beau devant toi ; avec ta grâce et ta parole, tout est possible.

Bonne route.

 

Amen. 


Dimanche 26 février

Is 49, 14-15 :

Ps 61

1 Co 4, 1-5 : Juger selon Dieu.

Mt 6, 24-34 : Dieu et l’argent. S’abandonner à la Providence.

 

L'Évangile que nous venons d'entendre, semble manifester une très très grande proximité de Jésus avec nous, avec nous dans notre vie quotidienne, notre vie domestique.

Lorsque l'on proclame que Dieu s'est fait homme et qu'il a habité au milieu des hommes, en Jésus ; eh bien, voilà une parfaite connaissance de ce qui fait notre quotidien : le mot ‘souci’ et le mot ‘inquiétude’ reviennent comme une litanie dans ce texte (je n'ai pas compté, mais au moins quatre ou cinq fois : souci, inquiétude).

Voilà, le Seigneur, manifestement, connaît ce qui fait notre vie.

 

Qui d'entre nous pourrait dire : moi je n'ai jamais de soucis ou je ne m'inquiète jamais ?

Alors, au premier abord, on peut dire : ce texte manifeste une grande proximité de Jésus, avec nous.

Alors, peut-être que nous pourrions nous sentir concernés par ce qu'il a à nous dire: le souci, l’inquiétude, cœur inquiet, cœur soucieux.

 

La deuxième chose que l'on pourrait dire en écoutant ce texte, c'est que Jésus ne nous appelle pas à nous déresponsabiliser et à ne pas nous préoccuper de ce que nous allons manger : il ne nous dit pas ça.

Nous avons une responsabilité dans la nourriture et dans la gestion de nos biens.

À d'autres endroits dans l'Évangile, il est question du partage, du don, qu'il n'appelle pas de notre part à n'avoir absolument rien du tout.

Notamment, si nous sommes en charge de famille,il faut bien nous préoccuper de nos familles ; si nous avons une charge d'autres personnes, il faut bien que nous nous préoccupions de ces autres personnes.

 

C'est un texte dont la portée est toute spirituelle : elle concerne nos âmes ;le souci et l'inquiétude des cœurs ou le souci et l'inquiétude des âmes.

Et alors parfois, un cœur soucieux, une âme inquiète, se reflètent sur nos visages, nos attitudes ; nous pouvons être alors très crispés, très tristes, très nerveux, très violents (enfin, tout ce que l'on voudra) à cause d'un cœur soucieux ou d'une âme triste, inquiète.

Alors, il nous propose dans ce texte un remède pour que notre âme, notre cœur ne soient pas si soucieux, si inquiets ; mais il part du constat que c'est ainsi.

 

Le troisième point, il n'est pas directement dans l'Évangile, mais je vous invite à faire un acte de mémoire et à vous souvenir de ce qu’il se passe dans le livre de la Genèse.

Au catéchisme, vous avez appris ou quand vous lisez la Parole de Dieu, vous lisez que la source de toute culpabilité et de toute honte se trouve dans le récit du péché des origines.

Après que Dieu eut créé l'humanité homme et femme, voici que le serpent ( être insidieux) vient produire doute et confusion dans le cœur d'Eve et la suite du récit c'est : Dieu nous a dit et, réponse de serpent : non ce n'est pas vrai, vous pouvez manger du fruit et ils mangent du fruit et voici que tout d'un coup, ils se découvrirent nus ; mais dans leur cœur, de la honte et de la culpabilité : ça c'est pour tout ce qui est autour du péché.

 

Mais le récit se poursuit, le récit se poursuit.

Vous souvenez-vous de ce qui se passe après ?

Après, ils sont expulsés du jardin des origines.

C'est terminé, ils n'y retourneront plus jamais : Adam et Eve, après avoir commis cette faute, après avoir connu qu'ils étaient nus, après avoir éprouvé de la honte et de la culpabilité, voici qu'ils sont chassés du jardin des origines.

Alors, un jardin où tout était à disposition,une sorte de self-service pour une consommation illimitée : à la création, Dieu avait proposé tout le règne animal et végétal, toute la création offerte à l'homme et lui avait dit : soumettez la création.

 

Mais voici qu'ils sont chassés du jardin, alors qu'en est-il de ce rapport avec la création ?

 Chassé du jardin, il est promis à Adam qu'il souffrirait, que sa vie deviendrait laborieuse : désormais, tout ce que tu avais à portée de main, tu ne l'auras plus, il te faudra souffrir et travailler la terre pour obtenir à manger, pour pouvoir survivre, pour pouvoir vivre.

 Tu vas connaître souci et inquiétude, tu vas connaître souffrance.

 Et puis à Eve, ce sont les souffrances de l'enfantement qui lui sont promises : désormais, quand tu vas enfanter, engendrer, tu vas souffrir ; ce que toutes les femmes ici sans doute, connaissent.

 

La sortie du jardin des origines est une sortie violente pour Adam et Ève, violente pour deux raisons :

 La première, c'est qu'ils vont connaître le souci et l’inquiétude pour lesquels ils n'étaient pas faits au départ

 et ensuite, parce que cette sortie est irréversible : ils ne retourneront pas dans le jardin, ça ne leur est absolument pas promis.

 Il n'est pas dit : si vous êtes gentils, vous y retournerez ou à la fin des temps vous y rentrerez ; ça n'est pas ça.

Et alors, Dieu appose deux créatures célestes à l'entrée de ce jardin, qui gardent l'entrée.

 

C'est donc maintenant, un univers perdu et pour le croyant qui va trouver une ressource dans ces textes de l'Ecriture, il y a donc, comme une forme d'explication à la raison pour laquelle, dans nos vies, nous éprouvons de l'inquiétude, du souci.

Ce n'est pas la peine de le nier à soi-même ou de faire semblant d'être paisible ou joyeux s’il y a souci qui traverse nos cœurs, nos âmes (inquiétude, souci), sachons que nous ne sommes pas les seuls et que c'est une affaire qui remonte à l'origine.

 

Je poursuis ; dans le long texte qui a été proclamé par Étienne, dans cet Évangile, il est question des ‘hommes de peu de foi’ : "Ne fera-t-il pas bien davantage pour vous, hommes de peu de foi".

Je me permets de vous dire quel est le mot originel qui a été employé, le grec ; un mot rare, très rare, une fois dans l'Évangile, une seule fois : ‘hommes de peu de foi’, mini-croyants.

C'est le mot mini-croyants que Jésus dit ; vous êtes des mini-croyants, c'est-à-dire que vous n'êtes pas encore complètement grands dans la foi.

Mini-croyants, vous êtes encore des tout petits devant le vaste monde, vous êtes un petit peu comme paniqués devant ce qui vous échappe; mini-croyants.

Et alors, Jésus ne dit pas : vous serez mini-croyants toute votre vie; mini-croyants, comme pour dire un état, aujourd'hui, mais qui est amené à grandir : l'arbre de la foi est appelé à grandir. 

Aujourd'hui vous êtes mini-croyants et c'est la raison pour laquelle vous éprouvez inquiétudes et soucis.

 

Bien entendu, Jésus est comme celui qui va apporter une sorte de remède à notre âme et va ôter ce qui produit cela dans nos vies.

Mais encore faut-il rentrer dans la vie même de Jésus et ne plus être des mini-croyants.

 

Alors, comment faire pour ne plus être des mini-croyants, pour rentrer dans la vie de Jésus ?

C'est le quatrième point : pour se rassurer, pour ne plus éprouver du souci dans nos vies, nous avons inventé un système (nous sommes intelligents), nous nous donnons confiance à nous-mêmes.

Alors, un grand croyant c'est celui qui reçoit la confiance,ce n'est pas celui qui se la donne ; mais les mini-croyants, ils ont inventé un système, ils se donnent à eux-mêmes confiance.

Et comment font-ils les mini-croyants pour se donner confiance, pour éviter de ne plus éprouver du souci et de l'inquiétude ?

Eh bien, ils ont besoin du regard des autres ; les mini-croyants, pour avoir confiance en eux-mêmes, ils dépendent du regard des autres ; alors ça les rassure.

 

Mais Jésus, dans tout son Évangile, (alors ça n'est pas dans celui-là, c'est dans ceux d'avant et ceux d'après) il va briser cela, Jésus.

Ça n'est pas le regard des autres qui va vous permettre de devenir des grands croyants ; tant que vous dépendrez du regard des autres, vous serez toujours des mini-croyants.

Mais vous allez voir, ce n'est pas ça qui va vous rajouter une année à votre vie, ce n'est pas ça qui va vous apaiser.

 

Toute la tradition spirituelle, en contemplant l'itinéraire de Jésus, (et c'est ce qu'on va faire pendant le Carême à partir de mercredi jusqu'à la Passion), toute la tradition spirituelle contemple Jésus et voit un itinéraire tout contraire : au lieu de devenir grand par lui-même, Jésus va être élevé par son Père, finalement, il va devenir petit.

Alors, pour résumer cette idée toute simple, ce que les pères et spirituels des premiers siècles jusqu'à aujourd'hui, disent : tu veux devenir grand croyant, alors devient petit (pas petit-croyant), mais ne dépends plus du regard des autres, devient comme un enfant.

L'Évangile qui a été lu hier, samedi : « Jésus prend un enfant et le met au milieu », c'est la voie de l'enfance, le chemin le plus sûr pour pouvoir devenir un grand croyant.

Cessez de dépendre du regard des autres, comme des païens et vous grandirez dans votre foi.

Regardez ce qu'a vécu le Fils de l'Homme : non seulement, pour son incarnation, il a quitté son Père, pour naître au milieu de nous ; mais sur la croix, il a vécu la déréliction, il a perdu la face, toute prétention est tombée, tout, par la croix.

Mais c'est ça qui l'a fait devenir, aux yeux de Dieu, le Christ et Seigneur.

 

Alors, ça, il nous faudra bien cinq semaines de Carême pour que ça puisse pénétrer dans nos cœurs mais c'est extraordinaire comment ce texte de l'Évangile nous y introduit déjà, un petit peu comme une sorte d'avant-goût.

 

Puis-je me permettre un dernier point en guise de conclusion ?

Ça va ? Vous tenez encore ?

Juste un dernier point, une conclusion.

 

On entendu une deuxième lecture qui était la première lettre de Paul aux Corinthiens.

Je vous ai dit et je vous redis que, Paul, s'il écrit des lettres, c'est qu'il n'était pas présent au milieu de sa communauté, il était à distance soit pour des raisons d'emprisonnement (pour les deux tiers de son temps), soit parce qu'il était dans une autre communauté (il ne pouvait pas être partout à la fois) ; il écrit des lettres.

Alors, il a maille à partir avec la communauté des Corinthiens ; sa communauté est divisée.

Et cette communauté remet en question le ministère de Paul et c'est très dur pour Paul, très dur ; ça, c'est la première lettre qu'on a lue et il y a aussi la deuxième lettre.

Dans les deux lettres il veut régler les problèmes à distance : il veut régler les conflits, les groupes qui ne s’intègrent pas les uns aux autres, qui se font la guerre pour des tas de raisons et puis la remise en question de son autorité : il essaie de se justifier auprès d’eux.

 

Mais c'est très beau parce que lui aussi, va perdre la face (alors je ne dis pas que c'est beau de perdre la face, ce n'est jamais très facile), mais il va dire : écoutez, au fond, je n'ai rien à perdre ; vous n'avez tout donné.

Je suis bien petit aussi devant vous ; si ce n'est pas moi que vous voulez accueillir, accueillez au moins le Christ à travers moi.

Paul a été remis en question dans son ministère et il n’a pas perdu.

Voilà un petit peu un itinéraire pour nous.

Demandons au Seigneur que vraiment, Il nous donne son Esprit Saint pour que nous devenions des grands, des grands dans la foi, donc des humbles aux yeux des autres.

 

Amen. 


Vendredi 24 février  

Si 6, 5-17 : L’amitié.

Ps 118

Mc 10, 1-12 : Question sur le divorce.

 

"La dureté du cœur", la dureté de vos cœurs, le mot grec, littéralement c'est : votre cœur sclérosé.

La sclérose du cœur, c'est une maladie spirituelle très très grave.

La sclérose du cœur, prenons garde à ne pas souffrir de cette maladie-là.

Alors, elle a une particularité la sclérose du cœur,c'est qu'elle nous fait voir les autres qui en souffrent.

Voilà, c'est-à-dire que quand on l'a, on voit d'abord que ce sont les autres qui en sont victimes : oh là là, lui, il a un cœur sclérosé !… oh et puis elle, elle n'est pas bien du cœur !

Mais c'est en fait, le symptôme que c'est nous qui en sommes les premiers à en souffrir.

C'est la particularité de cette maladie.

Et cette sclérose du cœur nous enferme (dureté du cœur), nous fait rentrer dans tout ce que Saint-Paul décrit dans ses lettres, dans les œuvres de la chair (débauche, impuretés, orgueil etc…etc…).

La sclérose du cœur.

 

Et le pari que fait Jésus c'est de remonter à l'acte créateur, il remonte jusqu'à la Genèse et il dit : "mais au commencement, il n'en était pas ainsi", ne désespérez pas.

D'ailleurs, au fond, on pourrait presque prendre le cœur sclérosé comme un cœur, non pas endurci mais un cœur qui s'enveloppe de quantité d'enveloppes, de pelures, comme un oignon ; et qu'au fond, il conviendrait de les enlever pour retrouver le cœur initial; puisque c'est ainsi que fait Jésus, il remonte vers l'acte créateur :"et à l'origine, il n'en était pas ainsi".

 

Et le cœur finit par se scléroser à cause d'un parasite, c'est comme dans certains fruits : il y a un parasite qui vient s'introduire dans le cœur et pof! il se sclérose : c'est le démon.

Le parasite, il divise le cœur ; il le divise.

 

"Mais ce que Dieu a uni, que l'homme ne le sépare pas", et le diviseur peut passer par l'œuvre de l'homme (l'homme ou la femme) et diviser.

Alors, pof ! réaction : le cœur s'enveloppe, ploup, ploup, ploup, ploup et alors il devient tatillon, les légaliste, jugeant et évidemment, tous les maux de la terre viennent des autres : la souffrance que j'endure, ça vient des autres.

"À l'origine il n'en était pas ainsi".

 

Alors,le pape saint Jean Paul II avait une formule très compliquée, je vous la dis (vous n'êtes pas obligés de la garder), c'est pour dire que ça a fait penser des papes, ce texte d'Evangile ; il disait : il faut retrouver dans nos vies nos dépendances ontico-causales.

Voilà, c'est de la philosophie, je pense que votre fille, Nathalie, ça lui plairait.

Mais autant dire que autant retrouver ce qui est à l'origine, ce que Dieu nous as donné, notre cœur, notre dimension de fils et filles de Dieu.

 

Retrouvons cette pureté de l'esprit et vivons une démarche de conversion.

Alors ça tombe bien, puisque c'est l'objectif du Carême qui va commencer la semaine prochaine et dont le but est, effectivement, d'enlever une après une, toutes ces pelures qui enveloppent le cœur et le sclérosent ; et à la fin de tout cela, enlever ce qui l'a divisé en deux et on est prêt pour célébrer Pâques.

 

Mais pour vous dire que parfois, notre cœur sclérosé peut franchement nous faire tomber dans des ornières très compliquées : pendant le carême, il nous est recommandé de vivre le jeûne, la prière et le partage.

Eh bien,ne soyons pas comme ces scribes et ces pharisiens qui s'adressent à Jésus : la Loi nous dit que …

Elle nous dit quoi ? Jeûner, partager, prier ; eh bien, ne faisons pas de cette Loi, dans nos vies, pendant le Carême, un motif d'orgueil : voyez, comme moi je jeûne ! voyez, comme moi je prie ! voyez, comme moi je partage ! et surtout voyez, ceux qui ne le font pas comme moi.

Ça tombe bien, puisque le mercredi des Cendres va nous prémunir de cette tentation.

 

Alors, il se peut que dans notre vie relationnelle, (c'est l'objectif de l'Évangile d'aujourd'hui), notre vie relationnelle, notre vie affective, comme dans le livre de Ben Sirac : il se peut que nous soyons un peu comme avec jeûne, prière et partage du mercredi des Cendres, un peu orgueilleux et malade du cœur.

 

Eh bien que, cette eucharistie aujourd'hui et ces 40 jours d'entraînement du Carême nous aident à quitter cette gangue du cœur et redevenir fils et filles de Dieu, tels que nous sommes, à l'origine.


Mercredi 22 février : Chaire de St Pierre

1 P 5, 1-4 : Avertissements : aux anciens.

Ps 22

Mt 16, 13-19 : Profession de foi et primauté de Pierre.

 

Il y aurait beaucoup de choses à partager par rapport à ces deux textes de l'Ecriture.

 

Par rapport à la première lettre de Pierre apôtre ; il parle des anciens : "Bien-aimés, les anciens en fonction parmi vous".

Les anciens, ce ne sont pas les vieilles personnes de la communauté.

Les anciens, nous en avons aujourd'hui encore dans nos communautés du Bar-sur-Aubois.

Qui sont-ils ? ou plutôt, j'aurais envie de dire : qui sont-elles, ces anciens, ces anciennes ?

 

Les deux ou trois premiers siècles de l'Eglise ont vu se forger petit à petit le clergé, tel que nous le connaissons, aujourd'hui.

Les apôtres ont désigné des anciens dans les communautés.

 

À peu de chose près, si vous voulez, (comparaison n'est pas raison, mais ça peut nous aider à imaginer ce que pouvait être ces anciens-là), c'étaient celles et ceux, dans nos communautés paroissiales, sur lesquels nous nous appuyions et moi, comme prêtre et pasteur, je m'appuie : tel relais-village, tel membre d'une équipe moisson ; des personnes de bon sens, de fidélité, de discernement et surtout d'attachement à l'Évangile et d'amour de l'Eglise : c'étaient ces anciens-là.

 

Une fois que les apôtres ont disparu eux-mêmes (les apôtres ce sont ceux qui ont connu Jésus), les successeurs des apôtres ont peu à peu établi ce que l'on a appelé les épiscopes.

Et les épiscopes, ce sont peu ou prou, aujourd'hui ça serait à la fois et l'évêque et le prêtre, quand les Eglises avaient une taille digeste et que les Eglises étaient essentiellement urbaines.

Eh bien, imaginez l'évêque de Troyes qui était en même temps le curé de Troyes : c'était un épiscope ; il n'avait pas de prêtres, il avait éventuellement des diacres.

 

Et puis, peu à peu, ces épiscopes ont créé des prêtres pour les représenter dans des endroits plus éloignés.

Mais c'est pour dire que ces anciens-là, ce ne sont pas en tant que tels des apôtres, puisque Pierre apôtre s'adresse à des anciens ; et ces anciens ce sont des personnes d'expérience et de fidélité, de soin du Corps (du corps du Christ, du grand Corps), chacun à sa mesure et chacun à sa place : ça c'est pour la première lettre.

 

Pour l'Évangile, il est célèbre pour nous.

L'extrait que nous en propose la liturgie est chez Matthieu, là où précisément Pierre ne rajoute pas, que jamais Jésus ne connaîtra la mort ; parce que dans les autres évangiles, après que Pierre ait dit sa foi, Jésus va faire l'annonce de sa Passion, comme nous l'avons entendu hier, et Pierre va rétorquer : "eh bien non, Seigneur".

Et "éloigne-toi de moi Satan" : après avoir dit que Pierre était la pierre sur laquelle il allait fonder son Eglise, Jésus va rajouter qu'il se laisse animer par le diable.

Là, c'est la foi de Pierre.

 

Notez que Jésus commence par poser la question : "pour les autres, qu'est-ce que je suis ?"

Pour les autres, c'est toujours plus facile de dire : "oh, eh bien, on raconte… On dit… Oh, eh bien j'ai entendu… On m'a dit que…"

" Bon d'accord, mais maintenant pour vous, qui suis-je ? "

Plus difficile, il n'y en a qu'un qui répond : Pierre.

 

Et ce ministère des clefs : lier et délier.

Ce qui est à lier ou à délier sur terre et dans le Ciel, c'est pour Pierre la même chose que ce que le Christ produit dans le cœur : il lie et délie.

Pierre ne peut pas exercer son ministère sans être d'abord lui-même travaillé par le ministère de Jésus dans son cœur : que Christ lie et délie dans ton cœur ce qui doit être lié et délié, et après seulement Pierre, tu pourras lier et délier ce qui a besoin de l'être sur terre comme au Ciel.

C'est le Christ d'abord qui a appelé Pierre, de pêcheur de poissons, à pécheur tout court pour après devenir, pêcheur d'hommes et pierre sur laquelle il allait fonder son Eglise.

Ce qui est premier c'est le ministère du Christ de lier et délier dans les cœurs.

 

Peut-être, on pourrait dire, que le pape, successeur de Pierre, est aux yeux de tous, le premier pêcheur.

En tout cas, le symbolisme du Serviteur, comme nous l'avons le jeudi Saint, ne dit pas autre chose : il est le premier des serviteurs.

Prions pour sa foi, pour l'unité de l'Eglise, pour sa fidélité et avec lui, celle de toute l'Eglise, fidélité à l'Esprit Saint. 

 

Amen.


Mardi 21 février : St Pierre Damien

Si 2, 1-11 : La crainte de Dieu dans l’épreuve.

Ps 36

Mc 9, 30-37 : Deuxième annonce de la passion. Qui est le plus grand ?

 

J'imagine que tous parmi vous, ou presque tous, vous connaissez Paris et ses grands boulevards.

Vous y êtes allés à pied, en voiture.

Qui s'y est risqué en vélo ?

Personne ? personne ne s’est risqué à faire du vélo sur les grands boulevards parisiens.

Peut-être avez-vous préféré le métro ou le taxi.

 

Parfois notre cœur c'est comme un grand boulevard ; nous croyons que c'est un avantage parce que plus c'est large, plus il peut y avoir de flux de circulation : la parole de Dieu peut s'engouffrer dans le grand boulevard du cœur.

Mais en fait, c'est un désavantage parce que c'est tellement dangereux, que même nous, on ne s'y aventurerait pas, voyez.

Il vaut mieux que le cœur soit un chemin, un petit chemin.

 

De quoi discutiez-vous en chemin ? demande Jésus à ses disciples.

Eh bien, les pauvres disciples étaient à côté de la plaque, peut-être parce que dans leur cœur, c'était un grand et trop large boulevard.

Alors que Jésus leur annonce pour la deuxième fois, qu'il va connaître la Passion, eux, sont en train de se toiser.

Ils n'ont pas compris, pas encore compris.

Alors, on peut comprendre une forme de reproche, chez Jésus, mais en fait, pas tellement ; Jésus va continuer à leur expliquer, parfois de manière un peu insistante mais va continuer à leur expliquer jusqu'à la croix. La croix elle-même, sera une leçon, un peu chère payée certes, mais une leçon pour qu'ils continuent à apprendre : c'est quoi le Royaume ?

En tout cas, là, c'est la deuxième fois que Jésus annonce sa Passion ; une première fois c'était avant la transfiguration, nous avons eu entre-temps la transfiguration, une guérison au pied de la montagne de la transfiguration et de nouveau une annonce de cette Passion ; et puis il y en aura une troisième.

 

Attention aux grands boulevards du cœur : on voudrait que tout aille vite, que le Royaume advienne tout de suite, que Dieu arrête de se taire, qu'il réponde à nos prières.

 Mais, préférons les petits chemins où on ne peut pas aller vite, on est obligé d'avancer en faisant attention.

Mais en même temps, l'avantage, c'est qu'on peut mieux écouter, on peut mieux écouter.

Allez vivre au bord d'un grand boulevard et vous verrez le problème : n'est-ce pas à Arsonval, c'est un peu le problème ?

 

Préférons les petits chemins du cœur.


Dimanche 12 février :

Si 15, 15-20 :

Ps 118

1 Co 2, 6-10 :

Mt 5, 17-37 : L’accomplissement de la Loi. La justice nouvelle supérieure à l’ancienne.

 

Aujourd'hui c'est un dimanche réservé à la pastorale de la santé : le dimanche de la santé, le dimanche qui est le plus proche de la fête de Notre-Dame de Lourdes ; c'était hier, 11 février.

C'est souvent dans les paroisses, l'occasion de mettre un peu sous la lumière celles et ceux qui ont reçu mission au nom du curé, au nom de l'évêque d'aller visiter dans les maisons de retraite, les hôpitaux, les personnes qui désirent recevoir un sacrement, être écoutées au nom de l'Eglise.

Et puis c'est aussi, pour ce dimanche-là,l'occasion aussi de mettre en lumière celles et ceux qui font parler d'eux ou pas, autour du service de la communion aux malades à domicile : ils le font aussi en ayant reçu mission ou avec l'accord du prêtre.

C'est un service précieux auprès de ces personnes souffrantes, pour témoigner que dans la souffrance, Christ vient nous témoigner de sa force dans notre faiblesse, Christ vient témoigner de sa force.

 

Et à la maison de retraite de Bayel et de celle de la Duys, cette semaine, il y a eu beaucoup beaucoup de personnes, soit résidentes, soit de notre communauté, qui se sont déplacées dans ces maisons de retraite, ce jour-là, pour recevoir le sacrement des malades.

Vous savez que le sacrement des malades (vous savez ou vous ne savez peut-être pas), le sacrement des malades que vos arrière-grand-pères et grand-mères appelaient l'extrême-onction n'est pas en fait, le visa pour la mort ou le paradis mais le sacrement des malades c'est la force du Christ dans notre faiblesse quelle que soit notre faiblesse : mal psychique, spirituel, corporel, transitoire ou pas.

Il est important ou pas qu'on soit malade ou presque à la limite pas malade, c'est une force qui peut se renouveler, d'ailleurs.

C'est un beau sacrement, très beau. 

Aujourd'hui, on n'en fera pas plus que te dire cela: c’est juste qu’il y a des personnes qui ont cette responsabilité dans nos trois maisons de retraite, Soulaines également.

 

Alors, revenons à cet Évangile.

Imaginez que vous ayez en face de vous un prédicateur qui vous dise : "mais aimez-vous bon sang de bonsoir !

Mais vous allez-vous aimez l'un et l'autre ?

Arrêtez donc de vous cracher dessus !

Arrêtez de baver comme vous le faites à la sortie des églises, toujours en train de dire du mal des uns des autres".

Imaginez un prédicateur qui voudrait faire grandir en chacun l'amour.

Et encore, je suis poli, parce qu'on pourrait être beaucoup plus vulgaire dans cette apostrophe.

 

Eh bien, Jésus a choisi de ne pas prendre ce chemin-là : pas le chemin "aimez-vous bon sang de bonsoir".

Et pourtant, il a choisi un chemin exigeant, un chemin vraiment assez corrosif parce que ses interlocuteurs, ces fameux scribes et pharisiens sont de ceux-là, les fameux : "aimez-vous !".

Mais ce qu'il leur reproche par ailleurs, à ces fameux scribes et pharisiens, c'est qu’eux-mêmes, ne peuvent pas porter le fardeau qu'ils imposent aux autres ; parce qu'ils peuvent reprocher aux autres de baver sur leurs voisins, mais ils font pareil, finalement.

 

L'intérêt du Christ, c'est de creuser patiemment, patiemment, comme un artisan remet sur sa table son ouvrage en permanence ; creuser, creuser et encore creuser pour atteindre la fine pointe du cœur.

D'ailleurs, il n'a pas peur d'en prendre plein la figure, Jésus lui-même, réservant pour lui-même ces propos véhéments au lieu de les exposer à la face des autres.

 

Vous savez que l'Eglise a été construite et continue à se construire sur un crucifié ; contrairement à la Loi descendue du ciel, reçue des mains de Moïse, renouvelée avec Noé, l'Eglise est construite sur un crucifié et non pas sur un code du permis et du défendu.

Et c'est ce qui fait toute la différence et qui dit la beauté attendue de l'aventure communautaire ou personnelle à la suite de Jésus.

 

Prenons un exemple, un témoignage : Simon Pierre, puisque dans sa lettre, que Xavier nous a lue, (la lettre de Paul, la première adressée aux Corinthiens), il s'agit de s'adresser à ceux qui sont adultes dans la foi.

Paul a pour mission de s'adresser à ceux qui sont adultes dans la foi.

Et si on regarde le parcours de Simon Pierre, on peut voir comment on fait pour devenir adulte dans la foi.

Simon Pierre a démarré de pas grand-chose pour terminer comme celui à qui Jésus a confié la responsabilité de la construction de l'édifice ; édifice construit sur la pierre angulaire qu'est le Christ crucifié.

 

Mais par où est passé Simon Pierre pour devenir adulte dans la foi ?

Simon Pierre est passé par bien des épreuves.

Vous savez Simon Pierre c'était tout le contraire du :" aimez-vous" ; Simon Pierre c'était : "je te suivrai partout Seigneur, tu es formidable.

Tu peux avoir confiance en moi, mes forces sont immenses, ma fidélité à toute épreuve".

Et Simon Pierre s'est lamentablement mangé trois fois, ses propres échecs : puisqu'il a renié Jésus.

Il a été pardonné trois fois comme pour bien montrer qu'il s'est vautré, Pierre.

Et puis vous savez aussi, il a voulu traverser la mer agitée pour rejoindre son Seigneur au cœur de la tempête et puis il ne l'a plus vu ; il est tombé.

Ce Simon Pierre, qui est l'aîné de tous les épiscopes, de tous ceux qui, à la suite de Jésus, sont comme une colonne vertébrale dans l'Eglise, Simon Pierre est un immense pécheur.

Avant de devenir pêcheur d'hommes et après avoir été pêcheur de poissons, il a été et il est, pécheur tout court.

Il se trouve que l'Eglise est faite de pauvres types ; et quand on est un pauvre type, on ne peut pas dire : "Seigneur, tu peux compter sur moi tout le temps" et on ne peut pas dire non plus : "mais aimez-vous bon sang de bonsoir".

On ne peut pas.

Alors, quelle est la voie médiane ? La voie que le Christ choisit, c'est celle du cœur : se laisser travailler par la Parole.

C'est la raison pour laquelle Jésus, dans son discours sur la montagne, dit : "vous avez entendu qu'il a été dit ...eh bien moi, je vous dis..." : ça n'est pas bien de tuer son frère; ah non, ça n'est pas bien du tout, mais se mettre en colère contre lui c'est pire.

Si vous voulez, je placerai un tribunal à la sortie de l'église, tout à l'heure, pour tous ceux qui vont se mettre en colère contre leurs frères et sœurs à la sortie de la messe.

Désirer une femme ou désirer un homme c'est aussi grave, eh bien, que de commettre l'adultère avec lui ou elle.

Quant aux serments, le problème voyez-vous, c'est dans nos discussions à l'intérieur de nous-mêmes, comme avec les autres, nous pouvons nous perdre en conjectures en auto-justifications pour se dire à soi-même et se convaincre que l'on a bien raison.

Jésus coupe court à ça : "Vous pensez ce que vous voulez, mais n'allez pas au-delà", "que votre oui soit oui, que votre non soit non", le reste, tout le reste, tout ce qui déborde du cœur de justifications en justifications, eh bien, ça vient du Mauvais.

 

Alors, que fait-il ?

Jésus fait apparaître cette dimension intime que nos amis grecs appellent le ‘thumos’, ce cœur, siège des passions et des sentiments, qui d'ailleurs est plus dangereux à la limite, que tout ce qui peut rentrer dans notre bouche et ne peut le souiller.

C'est de là que peut sortir, comme dirait Paul, lui-même : débauches, impuretés, souillures, du cœur.

Jésus, il le montre, il le révèle, il creuse pour l'extraire, pour que peu à peu, nous puissions apprendre à poser une garde sur ce cœur ; que nous puissions apprendre tout ce que, de bon et de mauvais,il peut sortir de ce cœur et nous en protéger.

 

Je m'achemine vers la fin parce que je ne souhaiterais pas vous impatienter, mais je voudrais vous partager ce qui a été dit à la prison hier, avec ce texte de l'Evangile.

On avait une image avec ce qu’était l'avarice, une image d'une prison, justement.

Une prison, ce sont des murs froids, durs, desquels on ne peut pas sortir et qui protègent autant ceux qui sont à l'extérieur que ceux qui sont à l'intérieur.

Et la loi, la loi, soit religieuse soit civile, elle peut être pour nous comme des murs : elle nous protège et elle protège les autres.

C'est nécessaire, les murs : par exemple, chez soi, on peut protéger son trésor ; il faut bien des murs pour le protéger.

On a besoin de se protéger.

Le problème des murs, c'est qu'ils peuvent être très très épais, on peut se choquer contre et se faire très mal et ça peut déborder aussi, parce que les murs peuvent empêcher de circuler.

 

À la différence d'une maison, nous-mêmes, nous avons besoin de mouvements, bouger ; et si jamais, nous érigeons des murs trop importants dans nos vies, nous finissons par être très élevés et c'est là qu’on bave ; et c'est là qu'on voudrait qu'on dise : "aimez-vous" et en même temps, on ne le supporterait pas.

Pour Jésus, ce qui va compter à sa suite, c'est que nous intégrions ses commandements, nous les intégrions en nous, de sorte que l'on n'ait plus besoin de murs et que tout seul, tout seul, on puisse savoir quelles sont nos limites, ce qui ne devrait pas déborder,ce de quoi il faut qu'on se protège, ce sur quoi il faut que je prenne du recul pour éviter de faire de nos frères un bouc émissaire.

C'est la fine pointe du commandement de Jésus sur la montagne : éviter de faire de nos frères un bouc émissaire ; d'abord parce que le frère va s'en lasser et puis il va finir par vous abandonner et parce que, à la fin, ce seront vos propres vies qui vont s'écrouler, comme il le dit au chapitre sept : « tous ceux qui écoutent mes paroles et les mettent en pratique, sont comme une maison solidement bâtie sur du roc; tempête, vent, torrent peuvent dévaler, cette maison demeure.

Mais si jamais, nous n'écoutons pas ses paroles et ne les mettons pas en pratique, c'est le contraire : la maison est bâtie sur le sable et elle s'écroule ; son écroulement est complet ».

Vos frères, il est vrai, peut-être, vous pouvez vous en passer, ça vous regarde ; mais votre vie, vous ne pouvez pas vous en passer : attention qu'elle ne s'écroule pas.

 

Amen.


Jeudi 9 février :

Gn 2, 18-25 : La formation de la femme.

Ps 127

Mc 7, 24-30 : Guérison de la fille d’un Syro-phénicienne.

 

C'est un texte particulièrement difficile, ce texte de l'Évangile, parce que sa traduction française efface toutes ses aspérités qui sont pleines d'enseignement.

 

Alors, on est tout de suite après un texte qui a été lu hier, juste avant dans l'Évangile, où Jésus remet en question, vient faire tomber, traverse le légalisme juif ; il est critiqué, et peut, être source d'enfermement, d'exclusion, de malveillance, contraire à ses yeux, au cœur même du Père.

On est tout de suite après et voici que Jésus se rend en territoire étranger ; il faut comprendre que Jésus est en territoire étranger avec une femme étrangère.

Donc, elle est en dehors des frontières et du domaine, pourrait-on dire, du domaine juif.

 

Alors, dans le texte, il est question de chiens et de petits chiens et d'enfants et de petits-enfants.

Si nous regardons le texte grec, ces fameux petits chiens sous la table, il faut les comprendre comme des chiens sous la table, dans la bouche de Jésus.

 Et ce sont assurément, par interprétation, les juifs dont il est question : au fond, Jésus et la promesse que Dieu fait dans son Alliance, sont pour le peuple de l'Alliance, le peuple qui est à l'intérieur des frontières du territoire dans lequel Jésus est.

Or là, il est hors frontière.

Qu'en est-il à l'extérieur des frontières, à l’extérieur de l'Alliance?

Et c'est dans le dialogue avec cette femme que les frontières vont bouger.

 

Il est question de la fille de cette femme et le mot grec utilisé, c'est la fille au sens généalogique : la fille de cette femme.

Cette femme est païenne, sa fille par généalogie, (puisque c'est sa fille) est païenne aussi.

Dans le dialogue, on va passer aux petits enfants sous la table.

Ce n'est plus le même mot, ça n'est plus le fils ou la fille de quelqu'un, ce sont ceux qui ont un jeune âge, (comme toi mon garçon), qui sont jeunes,qui sont de petite taille.

Mais en parlant de toi nous ne parlerons pas de ta maman, on parle de toi.

Voilà ceux dont la femme parle.

 

Et corrélativement, ces enfants-là, (dont elle fait allusion), vont devenir les enfants de Dieu, au sens universel.

Et les chiens vont devenir les petits chiens, les chiots.

Il faut qu'un chien soit suffisamment petit pour aller sous la table, mais on passe d'un chien, (un dogue : boum) à un petit chiot, quelque chose de beaucoup plus affectueux, mignon, gentil.

Dans le dialogue avec cette femme et Jésus, on va passer de quelque chose d'exclusif à quelque chose d'universel, large : on va passer d'une promesse pour un peuple particulier, (et par définition cette femme n'y a pas droit), à quelque chose qui dépasse les frontières d'un peuple, et tout d'un coup, la femme y a droit, (puisqu'elle n'est pas de ce peuple d'origine), elle y a droit.

 

Alors on va se dire : bon, c'est quand même des questions propres à Jésus, dans un territoire qui est loin du nôtre, peut-être on s'en fout un peu.

Ben non !

Pourquoi ?

Parce que nous qui sommes dans des villages, on sait bien ce que sont les questions de clochers et les querelles de clochers : ceux de Ville, ce ne sont pas ceux de Longchamp ; ceux de Bayel, ce ne sont pas ceux de Baroville ; il y a les châtelains de Lignol et il y a ceux du bas et puis on pourrait multiplier les exemples ; alors en ville, c'est pareil, il y a ceux de tel quartier et ceux de tel autre, bon ça c'est un exemple ; on en a plein d'autres : il y a les bons et les pas bons, il y a ceux qui sont les migrants et ceux qui ne sont pas migrants, bon voilà, plein d'exemples.

 

Eh bien, cette Alliance nouvelle scellée en Jésus,à la fois, elle est complètement la même et ancrée dans celle qui a été scellée avec Moïse (et avant lui Abraham) et en même temps cette Alliance s'accroît, s'élargit considérablement : d'exclusive elle devient large et universelle.

 

Alors, c'est très mystérieux parce que ça a beau être large et universel, quand quelqu'un ne nous revient pas, il ne nous revient pas ; raison pour laquelle, peut-être que désormais le pardon fait partie de l'Alliance.

 

Amen.


Mercredi 8 février :

Gn 2, 4b-9.15-17 : La formation de l’homme et de la femme.

Ps 103

Mc 7, 14-23 : Enseignement sur le pur et l’impur.

 

Il faut remettre ce passage de l'Évangile selon Saint Marc dans son contexte : Jésus oppose (il faut appeler les choses comme elles sont à 9h15 un mercredi matin), il oppose ce qui est anal à ce qui est oral, ce qui est le légal avec ce qui est le spirituel ; il va opposer le verbal à la Parole pour faire mieux resplendir une sorte d'accomplissement de la Loi et de la nouvelle Alliance qui est scellée en lui, autour de la question des prescriptions alimentaires.

Il fait tomber ce que le légalisme juif de son temps pouvait enfermer et les excès qu'il pouvait produire dans le cœur de sa communauté et dans le cœur de chacun.

 

Sous prétexte d'être de bons observants Jésus reproche que l'on peut être de mauvais disciples.

Sous prétexte que l'on peut être de bons observants, on peut être de mauvais partenaires de l'Alliance.

Et alors, il faut, remettre du coup, ce texte en lien, peut-être davantage, avec Saint Matthieu et le discours que Jésus fait sur la montagne (ce que l'on a entendu, par exemple, dimanche).

 

Qu'est-ce qui va faire que nous sommes lumière et sel ?

Ce n'est pas tant l'absolue observance de la prescription religieuse, ça va être notre capacité à mettre en œuvre de la bienveillance ; et il se peut parfois, que ce soit au prix d'un aménagement ou d'une mise à distance de ce légalisme (c'est-à-dire de ce qui viendrait un peu scléroser la pratique et le cœur du disciple). Alors, nous sommes sur le fil du rasoir parce que c'est une chose qui est bien complexe à déterminer et qui ne peut pas produire de code, de loi ou de collection de cas particuliers ; ça renvoie chacun à sa conscience : c'est tout l'objet du discours de Jésus sur la montagne, après les Béatitudes, que nous allons lire dimanche après dimanche jusqu'au chapitre 7.

Et Jésus va terminer ce discours en disant : celui qui observe mes paroles et les met en pratique,ressemble à une maison solidement bâtie sur le roc ; celui qui ne les observe pas ressemble à une maison qui va s'effondrer parce qu’elle est bâtie sur du sable.

 

La conscience de l'homme a besoin d'être formée, d’être éclairée et d'être éclairée par l'exemple même du Maître, son propre style, (au fond, la façon dont il va mettre en œuvre la miséricorde du Père).

Et en naviguant entre la Loi, (le permis et le défendu) d'une part et d'autre part la capacité à être saisi aux entrailles.

Jésus est plusieurs fois, dans l'Évangile, saisi vos entrailles, pris de compassion pour les foules sans berger, pour les personnes livrées à elles-mêmes etc...

Naviguant entre les deux, il y a une distance qui va apparaître par rapport à ce légalisme.

 

Alors là, nous sommes sur des questions alimentaires, mais vous comprenez qu'on peut l'élargir et Paul va l'élargir en proclamant que Christ a fait tomber ce mur qui séparait, alors cette fois-ci, non plus ceux qui mangeaient du porc et ceux qui n'en mangeaient pas (pour faire bref) et qui séparait juifs, grecs, hommes libres.

Christ fait tomber ces murs qui peuvent parfois être érigés, d’ailleurs, au nom de ce légalisme.

Demandons au Seigneur de nous donner son Esprit Saint, parce que nous sommes des hommes et des femmes de la Pentecôte et c'est cet Esprit qui nous permet de rendre notre conscience toute respirante, qui lui permet de s'adapter et d'accueillir, de savoir ce qu'il convient de faire au nom du Maître, en toute circonstance.

Amen.


Dimanche 5 février : 5° dimanche ordinaire

Is 58, 7-10 : Le jeûne agréable à Dieu.

Ps 111

1 Co 2, 1-5 : Sagesse du monde et sagesse chrétienne.

Mt 5, 13-16 : Sel de la terre et lumière du monde.

 

Je ne vous apprends rien si je vous dis que nous baignons dans une culture de la violence.

C'est triste mais c'est souvent le constat qui est fait, répété jour après jour, si vous ouvrez les yeux sur les informations qui nous parviennent: ça peut être une violence verbale, une violence dans des décisions et leurs brutalités, ça peut être une violence dans la manière d'accompagner et d'encadrer, d'entourer des populations, ça peut être une violence qui conduit jusqu'à la mort dans des actions belliqueuses, des violences affectives, des deals, des délits, des crimes ; enfin, on peut continuer la liste et ce qui intéresse souvent d’ailleurs, dans les informations, c'est de mettre en avant ces violences-là.

 

Alors, ce n'est pas un fait nouveau et certains de nos analystes ou philosophes vont dire que les violences ne sont pas pire aujourd'hui, qu'hier.

En tout cas, dans nos territoires (peut-être d'ailleurs sont-elles moins meurtrières, mais il y a de la violence).

Au temps de Jésus, il y en avait aussi ; avant lui également, si nous regardons le texte saint, pas celui que nous avons lu mais si nous ouvrons, nous lisons la Bible nous voyons des récits parfois extraordinairement violents qui pourraient même nous choquer.

 

Quand nous contemplons la croix, celle que nous avons autour du cou, celle qui est devant nos yeux à l'église, celle que nous avons dans nos chambres à coucher, les croix qui disent notre foi, c'est aussi un symbole qui porte en lui-même, dans une première lecture, de la violence: ça n'est jamais qu'un homme agonisant ou déjà mort, cloué sur une croix.

On les préférerait presque uniquement dans les cimetières, … la mort.

 

Jésus a été victime aussi de cette violence.

Entre nous, regardons Jésus dans son itinéraire vers Jérusalem, de la Galilée à Jérusalem, il peut y avoir de la violence vis-à-vis de lui dans les propos, des personnes qui cherchent par exemple à le pousser dans ses retranchements et puis le faire tomber dans des pièges (ça arrive, c'est raconté dans l'Évangile)

Il y a une réaction violente de Jésus, une fois, dans le temple, l'épisode fameux de la purification du temple.

Attention, je répète toute violence ne conduit pas forcément, heureusement d'ailleurs, à la mort.

 

Et puis, les tout premiers chrétiens ont été victimes de violences, de violences ou de violences conduisant vers la mort au nom de leur foi.

Alors c'est vrai pour les chrétiens, c'est aussi vrai hier comme aujourd'hui pour d'autres qu'on appelle parfois minorités religieuses.

La violence.

 

Pourtant, si on revient à la croix, nous la regardons aussi, non pas simplement dans une première lecture, nous la regardons avec nos yeux de la foi et ça n'est pas simplement un homme suspendu, mort ou en train de mourir, c'est aussi Dieu, non pas victime d'une violence, mais dans un acte d'immense bienveillance, ce qui est tout l'inverse : ce n'est pas de la violence, c'est Dieu dans un acte d'immense bienveillance : don de sa vie, liberté dans l'amour, celui qui prend sur lui, celui qui s'offre en sacrifice.

Et c'est ce que nous vivons au moment de l'eucharistie, donc, non pas de la violence mais de la bienveillance : il y a un renversement.

 

Quand les chrétiens, (je vais revenir uniquement à cet épisode-là) les tout premiers chrétiens ont été victimes de ce que l'on appelle le martyr, ils ont subi la violence, ils s'en sont aussi pour une part, plaint (ils ont cherché à se défendre) ; ce martyr, cette façon dont ils ont vécu cette violence qui leur ont été faits, ont été dépassés, de leur part, par un acte de bienveillance.

Ils ne disent pas que la violence était bienveillante, ils disent qu’ils ont cherché à témoigner ou à être présents au milieu de cette violence, ils ont cherché à témoigner de la bienveillance.

Et souvent d'ailleurs la violence qui leur a été faite était à cause de leur bienveillance, à cause de leur bienveillance.

 

Je vous ai reproduit dans l'édito que vous avez sur vos feuilles de chants, un des tout premiers textes que nous avons (donc, au deuxième siècle il y avait une quantité de textes que nous avons quand même de chrétiens : des apologies, des poèmes, des textes qu'on va dire dogmatiques, des prières ; deuxième siècle, c'est-à-dire ce sont les tout premiers textes après le Nouveau Testament, après le Nouveau Testament), et nous sommes dans une ère géographique et temporelle où il y a parfois de la violence et parfois, pas.

Et j'ai regardé dans ces textes, s'il y avait une référence à l'Évangile d'aujourd'hui.

 

Nous avons un chrétien, que je vous ai indiqué : Justin Naplouse.

Et ce Justin, il s'adresse à l'empereur qui, manifestement a l'air plus gentil que les autres : Antonin le Pieux (le suivant, Marc-Aurèle, il va décider la mort de ce fameux Justin Naplouse, qui finalement n'aura pas réussi à se défendre jusqu'au bout, le pauvre).

Mais sous l'empereur précédent, il va lui adresser un texte, Justin Naplouse et il va présenter la vie chrétienne, la foi, ce que sont les chrétiens.

Alors, il va d'abord dire ce qu'ils ne sont pas et qu'on leur reproche d'être quand même.

Et puis ensuite, il va dire : "nous prenions plaisir, autrefois à la débauche, nous n'aspirons plus aujourd'hui qu'à la chasteté.

Nous qui aspirions par-dessus tout, à nous procurer des biens et de la fortune, nous mettons aujourd'hui en commun ce qui nous appartient pour le partager avec quiconque se trouve dans le besoin.

Nous qui nous laissions aller les uns envers les autres à la haine et au crime et qui n'admettions point l'étranger dans nos foyers en raison de nos coutumes, nous partageons avec ces derniers, aujourd'hui, après la manifestation du Christ, le même genre de vie."

Et la référence avec l'Évangile de Matthieu vient après et je vous la raconte dans cet édito.

 

Ce témoignage est très intéressant pour dire ce qui fait la différence, d'une certaine façon, pour les chrétiens, dans un monde troublé (et qui à certains égards pourrait ressembler au nôtre), ce qui fait la différence pour les chrétiens, c'est cette identification au genre de vie du Christ.

Et ce qu'ils retiennent de lui c'est cette immense bonté, cette bienveillance du Christ, tout en étant fermement attachés à un commandement : (rappelons-nous que Jésus prononce cet Évangile d’aujourd'hui, au sommet de la montagne juste après les Béatitudes dans l'Évangile de Matthieu), tout en étant solidement attachés aux commandements.

Christ, lui-même, ces disciples, vont chercher à témoigner de ce qu'ils ont reçu des disciples : de la bienveillance, de la bienveillance.

 

Il peut être très violent d'être dans de l'exclusion, ou de l'exclusive ; il peut être très violent d'être dans le rejet ; très violent d'être dans le jugement, fut-il au nom d'une fidélité à Dieu.

La différence qu'ont remarqué nos aïeux dans la foi et dont nous avons, par exemple, le témoignage là ou ailleurs, c'est : (ce qui va compter, c’est ce que nous avons reçu), cette bienveillance et c'est dans cet esprit-là que ce texte de l'Évangile d'aujourd'hui peut nous rejoindre : "vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde".

Ne perdez pas ce qui vous a touché, ce qui vous a touché non pas comme une flèche qui tue mais comme un amour qui vous relève : là est la différence.

Dieu vous à touchés comme un amour qui vous relève et non pas comme une flèche qui tue.

 

Dans l'eucharistie, dans quelques instants, après la présentation des dons et juste avant ce que l'on appelle la préface, je vais vous dire :" le Seigneur soit avec vous"

 et vous me direz un peu automatiquement : "et avec votre esprit".

Ensuite je vous dirai : "élevons notre cœur"

et vous me direz : "nous le tournons vers le Seigneur"

Enfin je vous dirai : "rendons grâce au Seigneur notre Dieu" (entre parenthèses c'est le sens de notre célébration eucharistique)

et vous allez me répondre : "cela est juste et bon".

 Tout naît de l'amour, de cette certitude, de cette source de la bonté.

 

Christ a offert sa vie, ses bontés pour nous comme cela a été pour nos aïeux dans la foi, et cette bonté-là nous la reproduisons ou du moins nous nous y abreuvons aujourd'hui comme si c'était la première fois, c'est la raison pour laquelle nous sommes rassemblés ce matin.

Eh bien que cette bonté-là, ne s'effiloche pas ou ne se perde pas telle ville que l'on cacherait ou tel du sel qui perd de sa saveur.

 

Il est peut-être important d'être comme nos aïeux dans la foi à la suite de ces chrétiens du deuxième siècle, et tous les siècles qui ont suivi, d'être dans une culture de la bienveillance.

Alors, ça nous invite peut-être à revisiter nos façons de vivre dans nos villages, entre voisins, parfois entre familles, dans les familles, dans nos communautés paroissiales, nos manières de parler (vous savez, il y a des paroles qui tuent), dans nos manières de nous positionner (vous savez qu'il y a des positionnements que tuent aussi, comme des flèches : bim, pas les flèches de la St Valentin mais les flèches qui tuent).

Accrochons nous fortement à cette bonté qui nous touche et qui n'est pas une flèche, c'est l'amour du Seigneur.

 

Amen.


Jeudi 2 février : La présentation de Jésus au temple

Ml 3, 1- 4 : Le jour du Seigneur

Ps 23

Lc 2, 22-40 : La présentation de Jésus au Temple.

 

Ce passage de l'Évangile, il est très beau, d'abord, parce qu'il nous oblige à revisiter ce que nous avons vécu il y a 40 jours.

Mais il y a 40 jours, il ne faisait pas soleil, il y a 40 jours, il faisait un peu froid et nous étions peut-être accaparés, pour certains d'entre nous, à plein de choses : préparer le repas, accueillir des familles chez nous pour ceux qui accueillaient des petits-enfants en quantité (peut-être pour Nadine, par exemple), ceux qui étaient engagés dans la catéchèse : vite vite il faut préparer, (ou bien en liturgie), préparer les célébrations du 24 au soir ; enfin, en tous les cas, plus paisiblement aujourd'hui, nous sommes dans cette célébration qui nous replonge dans la venue de Dieu dans notre chair, en Jésus.

 

Alors, en même temps nous faisons un pas en avant : si nous regardons cet Évangile, nous pouvons contempler plusieurs petits aspects.

 

-Le premier aspect c'est l'obéissance de Marie et de Joseph : ils obéissent à la Loi.

La Loi prescrit, nous nous y conformons : il faut, 40 jours après la naissance de notre premier-né, le présenter au temple.

Donc, il y a cet aspect de l'obéissance que nous pouvons regarder : les parents de Jésus était une famille qui, manifestement, obéissait à la Loi ; en même temps, cette obéissance, n'est pas trop exacerbée, l'aspect légaliste de la Loi est un peu effacé : on ne parle pas des prêtres, le temple est dépouillé, Jésus est présenté, nous en restons à quelque chose de simple, bien loin de ce que nombre de représentations (peintures, vitraux) veulent nous montrer de l'offrande de Jésus au temple.

 

- L'autre aspect que nous pouvons contempler, c'est ce que le vieillard Siméon va

dire, ce fameux : ‘Nunc dimittis’ que nombre de chrétiens, notamment les personnes consacrées, prient chaque soir au moment d'aller se coucher :

"Maintenant, Ô Maître souverain,

tu peux laisser ton serviteur s'en aller en paix selon ta parole

car mes yeux ont vu ton salut,

lumière à la face des nations".

Ces paroles nous aident à faire ce passage entre, ce que nous appelons, la Loi de l'Ancienne Alliance, dans laquelle les parents de Jésus sont (ils font tout ce qu'elle dit : ils offrent leur premier-né) et le salut promis et offert en Jésus, tel que tout l'Evangile de Luc va nous l’apporter et même les Actes des Apôtres et les lettres de Paul.

Ce salut qui nous est offert en Jésus, nous sort de Jérusalem, nous sort du temple et élargit ou crée une assemblée, un groupe, une Eglise, un rassemblement universel bien plus large que les quelques-uns, fidèles à la Loi de Moïse, rassemblés dans le temple à Jérusalem : lumière pour éclairer les nations.

 

-Le troisième aspect que l'on peut regarder du vieillard Siméon c'est que l'Esprit

Saint est sur lui et qu'il attend la consolation.

La consolation c'est exactement l'adjectif qui est donné à l'Esprit Saint au moment de la Pentecôte : ‘l'Esprit Saint consolateur’ et nous croyons que c'est un don de Dieu, en Jésus.

 

Alors, à la question que l'on se posait tout à l'heure, quelques-uns parmi nous : la Nouvelle Alliance, elle commence quand ?

Elle commence à Noël ou elle commence plus tard ?

Qu’aurions-nous envie de répondre ?

Je vous invite à penser qu'elle va commencer sur l'autel dans quelques instants.

 

Amen.


Mercredi 1e février :

He 12, 4-7. 11-15 : L’éducation paternelle de Dieu.

Ps 102

Mc 6, 1-6 : Visite à Nazareth.

 

Comme nous l'avons rencontré un petit peu plus tôt dans l'Évangile de Marc, (au chapitre 1, si ma mémoire est bonne), il y a la mention du mot : frères, les frères de Jésus.

Et l'araméen et l'hébreu, nous avions dit, ignorent le mot : cousin.

Nous ne savons pas si l'auteur a voulu parler de cette parenté-là de Jésus, à l'échelle de ses cousins.

 

En tous les cas, voici qu'il est question de l'origine ; l'origine terrestre de Jésus, à la fois Nazareth où il a grandi, à la fois sa famille (famille de sang) et l'origine divine, la trace du Père dont il est le Fils (du Très-Haut).

Et à travers la question de l'origine, apparaît comme un écran, en tout cas dans cet Évangile, la question de l'affectivité.

 

Ce qui peut, dans la vie de Jésus, être relations affectives (puisqu'il est ‘être de chair’) il est comme chacun d'entre nous, mû par des relations affectives, nous ne sommes pas, nous ne pouvons pas être, (ce n’existe pas) insensibles aux relations et aux interactions entre les êtres.

À la fois, les nombreuses auditeurs qui font partis de ces êtres (frappés d'étonnement) comme également sa famille, qui n'est pas présente apparemment parmi les auditeurs mais dont il est fait mention (sa parenté, sa maison).

 

Il n'est pas dit que les relations affectives sont un problème, il est mentionné qu'elles peuvent être un écran pour que surgisse la véritable origine de ce Fils : Celui qui est l'horizon, Celui qui est le fond sans fond du cœur et qui n'est accessible pour nous que par le Christ, qui est le chemin étroit qu’Il nous fait emprunter : ce Père.

 

Il y a bien des façons de s'investir dans les relations avec les êtres, qui peuvent par conséquent, nous empêcher d'aller jusqu'au bout, ou empêcher les autres d'aller jusqu'au bout.

Le chemin de l'Évangile est un chemin long qui engage toute la vie et jusqu'au bout de la vie, pas uniquement la mort mais le bout de l'investissement de chacun.

Et nous pouvons nous résigner, ne pas aller jusqu'à ce bout-là, cela dépend de la liberté de chacun ; mais cela, en tout cas, n'est pas le projet de Dieu, à l'image de ce que cet Évangile nous propose : "il ne pouvait accomplir aucun miracle", "aucun prophète n’est accueilli dans son pays, un prophète n'est méprisé que dans son pays" (son origine, sa parenté et sa maison).

Alors, une invitation sans doute pour nous, à suivre le Maître et comme lui, à nous laisser sortir, sortir de nous, sortir de notre parenté, notre maison, sortir pour mieux être l'image bien-aimante de ce Père.

 

Amen.


Dimanche 29 janvier : 4e du temps ordinaire

So 2, 3 ; 3, 12-13 : L’humble reste d’Israël.

Ps 145

1Co 1, 26-31 : Sagesse du monde et sagesse chrétienne.

Mt 5, 1-12a : Les Béatitudes.

 

Chers amis, ce texte que nous venons d'entendre dans l'Évangile selon saint Matthieu, celui que l'on appelle : les Béatitudes, le discours que Jésus prononce au sommet d'une montagne, il en existe deux versions dans les Évangiles.

Le disciple évangéliste Luc se souvient aussi d'un pareil discours de Jésus ; donc il y a deux versions des Béatitudes.

Chez Luc, Jésus prononce ces Béatitudes dans une vallée, dans une plaine.

Si vous avez fait attention, chez Matthieu, Jésus est au sommet d'une montagne.

Je ne vais pas faire le jeu des sept différences, mais il y a une autre différence importante entre les deux : Matthieu se souvient très fort d'un discours qui commence par : "heureux les pauvres de cœur" ; Luc, dans tout ce qu'il rapporte de Jésus, va être sensible aux pauvres d'argent et Jésus s'adressera aux pauvres d'argent, dans ces Béatitudes adressées dans la plaine.

 

Mais, on va en rester à ce texte d'aujourd'hui chez Matthieu, donc voyez Jésus, au sommet de la montagne, tel un nouveau Moïse, Moïse au sommet d'une montagne qui reçoit les tables de la Loi pour ensuite les donner à son peuple ; Dieu qui fait alliance à travers ces tables de la Loi ; eh bien Jésus, tel un nouveau Moïse, au sommet de la montagne, vient graver une nouvelle Loi dans le cœur de ses disciples.

 

Très souvent, quand nous célébrons la fête de la Toussaint, (nous sommes le 1er novembre ; ça y est, c'est derrière nous), nous entendons ce texte et puis vous entendez cette prédication qui vous dit : « voilà, les Béatitudes c'est un chemin de vie, c'est un chemin de bonheur.

C'est quelque chose qui se situe devant vous.

N'ayez pas peur d'être des pauvres de cœur, n'ayez pas peur d'être miséricordieux, n'ayez pas peur d'être des hommes et des femmes qui souffrez pour la justice ou qui pleurez, n'ayez pas peur ; vous allez voir, c'est un chemin finalement de bonheur ; d'autres l'ont vécu avant vous, allez-y ».

Ça c'est la prédication du 1er novembre, la Toussaint.

 

Je vous propose de jeter un regard très différent sur ce texte et de l'accueillir comme un témoignage qui nous vient du fond des âges, un témoignage, (derrière nous) ; derrière nous, ça nous vient de derrière nous; (non pas un chemin devant, mais un témoignage qui nous vient de derrière).

 

Pourquoi ?

Eh bien, on va se remettre au temps de Jésus.

Nous connaissons l'Evangile et nous allons nous mettre dans les pas de ces hommes et de ces femmes qui ont croisé la route du Maître.

Alors, vous savez qu'il y a les fameux Douze que Jésus appelle, certains sont pêcheurs de poissons, (nous l'avons entendu la semaine dernière), au bord du lac ; en tout cas, il en choisit 12.

Et puis vous avez à un autre moment, c’est 72 : Jésus en choisit encore plus.

Vous les additionnez.

Et puis vous avez tous ces hommes et toutes ces femmes que Jésus croise sur sa route et qu'il va guérir, soigner, relever, pardonner ; telle femme, tel homme ; ça va être dans une synagogue ou ça va être au bord de la route ; ça va être cette foule immense d'hommes et de femmes affamés pour lesquels il va partager le pain et les poissons.

Vous additionnez tout ce monde-là, vous les rajoutez aux 12 plus aux 72.

Et puis vous allez avoir qui encore ?

Ces femmes qui suivent Jésus et qui l'aident de leurs propres ressources.

Et puis, vous allez avoir tous ces hommes, gardiens de la Loi, ces scribes, ces pharisiens, ces observants, ces justes qui vont ne rien attendre de Jésus sinon des enseignements ou des réponses à leurs controverses.

Certains d'entre eux vont se mettre en route : Nicodème, par exemple (dans l'Évangile de Jean), il va tellement se mettre en route qu'il va le faire de nuit, peut-être par peur.

Et puis, vous avez ce jeune homme riche : il vient vers Jésus rempli de ses convictions et cette grande connaissance de la Loi reçue de Moïse, au sommet de la montagne.

Et ce jeune homme riche, vous savez quel va être son sort ? : "va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres ; suis moi".

Et le jeune homme ne va pas le faire.

Il va être tout triste car, dit l'Évangile, il avait de grands biens.

Tout le monde ne suit pas Jésus, mais quand même, parmi ces sages pharisiens, il y en a quelques-uns.

Vous additionnez tout ce monde-là et ça fait tous ceux et toutes celles qui ont croisé Jésus, qui l'ont accompagné, qui l’ont suivi : ils ont suivi le Maître.

 

Qu'ont-ils vécu avec lui ?

Ils ont vécu deux choses : - la première d'abord, c'est qu'ils ont été rejoints sur leur propre terrain, eux qui, pour des tas de raisons, (liées quand même un peu à l'expérience du mal dans leur vie), vont devoir quitter leur zone de confort, leur zone de confort.

Ils vont devoir, à leur corps défendant,(et souvent sans l'avoir choisi), devoir se sentir parfois dans un péril, parfois dans un grand manque de confort personnel : cette femme pécheresse, ça va être cet homme pécheur, ce lépreux, cet aveugle, tous, à cause de l'expérience de la maladie, de l'arbitraire dans leur vie, vont être en dehors de leur zone de confort.

Le Maître les rejoint et vient leur apporter confort, dans leur vie : première chose.

 

- La deuxième chose qu'ils vivent, c'est qu'ils vont le suivre et s'identifier à lui jusqu'à la Croix : deuxième expérience de perte de confort personnel, puisqu'ils se seront tellement adossés à lui, que ce Maître qui tombe, va les ébranler une deuxième fois.

Et la résurrection, les 40 jours des apparitions du ressuscité, le don de l'Esprit Saint, vont finir de les conforter ou consolider une seconde fois ; ils vont donc vivre une expérience de foi : quittant leur zone de confort, ils se rendent compte qu'ils ne sont pas morts, ils demeurent des vivants.

Et dans le lot de tous ces gens-là, certainement il devait y avoir des pauvres de cœur,

certainement il devait y avoir des miséricordieux,

certainement il devait y avoir des affamés de justice, sans doute des cœurs purs, une paire d'artisans de paix, des gens qui pleurent, des doux, des gens insultés ou persécutés ; tous ceux-là faisaient partie de cette grande bande qui suit Jésus.

Peut-être d'ailleurs, qu'ils le sont devenus, des pauvres de cœur, des justes, des persécutés, des doux, passant de leur zone de confort à cette zone plus difficile de l'expérience du mal, de la souffrance, de l'arbitraire.

 

Ça, ce sont ceux qui ont connu Jésus ; et puis, il y a tous les autres après, après la résurrection de Jésus et son Ascension et le don de l'Esprit Saint, Jésus n'est plus présent en chair et en os.

Ceux qui ont connu Jésus, ces pauvres de cœur, ces doux, ceux qui pleurent etc..., ceux des Béatitudes sont devenus des témoins.

Ils ont croisé des hommes et des femmes qui étaient, soit dans leurs certitudes et leur confort personnel, soit ont été à leur tour ébranlés par l'expérience de l'arbitraire dans leur vie.

Eh bien, leur propre expérience du Maître leur a permis, à leur tour, d'être de bons hospitaliers, de bons témoins, des hommes et des femmes de réconfort, des hommes et des femmes de foi qui apportent confiance.

Vous sortez de votre zone de confort ?

N'ayez pas peur.

Ils se sont tellement identifiés à Jésus, de la Croix à la résurrection, qu'ils ont, par leur simple témoignage, apporté confiance, confiance et douceur.

Ces hommes et ces femmes des Béatitudes sont des hommes et des femmes de confiance et de douceur.

 

Quand on entend cette litanie des ‘heureux’ : "heureux les pauvres de cœur, heureux ceux qui pleurent, heureux les doux etc ", cette litanie du mot heureux (makarios en grec), entendez cette voix qui nous vient du fond des âges, de ceux qui se sont identifiés à Jésus, qui ont connu le Maître et sont passés de la peur à la confiance.

Entendez leurs propres mots, toute l'Eglise rassemblée, celle qui nous précède des catacombes jusqu'à hier, qui nous parle : "heureux, heureux !"

La substantifique moelle de leur foi, tout ce qu'ils extraient de leur alambic du cœur, tellement identifié à Jésus, ceux et celles qui sont passés avec lui, du manque de confiance à la confiance, qu'est-ce qu'ils nous disent ?

"Heureux, n'ayez pas peur, venez, voyez ; attachez-vous au Maître ; avec lui vous connaîtrez la confiance et la douceur.

Avancez ; cheminez avec lui ; quittez sans peur votre zone de confort ; avancez, vous verrez ; vous connaîtrez la joie".

 

Voilà ce que nous pouvons recevoir, aujourd'hui, de ce discours de Jésus sur la montagne, nouvelle Loi gravée dans notre cœur.

Ils étaient pauvres, certes, peut-être font-ils pâle figure à nos yeux, mais ils ont connu la joie qu'ils nous partagent.

 

Amen.


Vendredi 27 janvier :

He 10, 32-39 : Motifs de persévérer.

Ps 36

Mc 4, 26-34 : Parabole du grain qui pousse tout seul. Parabole du grain de sénevé.

 

Petite parabole toute simple de Jésus ; St Marc en rapporte une qui est unique à St Marc, les autres évangélistes ne s'en souviennent pas : c'est celle de la semence qui germe et grandit sans que le semeur ne sache comment, sans qu'il ne sache comment.

 

Ça nous arrive de nous poser des questions de : comment ? ou bien pourquoi ?

Pourquoi telle chose ? ou comment ça se fait que ?

Question du petit enfant qui découvre le monde avec curiosité, question de l'adulte qui parfois à travers cette formulation, cherche à exprimer de la colère, de l'incompréhension : mais pourquoi ?mais comment ?

Question aussi d'un esprit curieux, scrutateur.

 

Il n'y a pas de comment ni pourquoi devant Dieu sinon nous risquons de l’effacer ou de manquer notre cible, de perdre Dieu.

Alors, l'homme qui est avec plein de questions comme le comment et le pourquoi, est appelé à se convertir à ce qui est donné gratuitement sans que l'on sache comment : le semeur qui voit sa semence pousser sans qu'il ne sache comment ou bien cette toute petite graine, minuscule qui va devenir un arbuste sans qu'il ne sache que comment.

La gratuité du don de Dieu ne peut pas se comprendre et surtout pas, par des comment et des pourquoi.

La gratuité du don de Dieu se vit, ça s'appelle l'amour.

 

Amen.


Mardi 24 janvier : St François de Sales

He 10,1-10 : Inefficacité des sacrifices anciens.

Ps 39

Mc 3, 31-35 : La vraie parenté de Jésus.

 

Dans la langue du peuple de Jésus, on ne sait pas dire le mot 'cousin' ; le mot n’existe pas.

Alors, on va avoir des frères et des sœurs à tous les niveaux de l'échelle : ceci, pour éclairer peut-être, cette mention des frères.

 

En tout cas, dans cet Évangile, il y a deux cercles : le cercle de ceux qui sont dehors, le cercle de ceux qui sont dedans.

Et, comme dans un autre Évangile, (c'est chez St Jean), Jésus est au centre du cercle, du premier cercle, ceux du dedans.

Chez St Jean, c'est au moment où on amène une femme surprise en flagrant délit d'adultère.

Comme chez St Jean, Jésus, dans le cercle, balaie tout le monde du regard, il tourne son regard sur chacun d'entre eux.

On va voir aussi le même épisode lors de la guérison de cet homme qui a la main sèche, dans une synagogue : il y a des gens autour de Jésus et Jésus les regarde avec un regard scrutateur et aussi un peu, avec de la colère.

 

Il va mettre au centre dans cet Évangile, lui-même qui est situé à l'intérieur du cercle, il va mettre au centre la mise en pratique de la parole de Dieu.

Chez St Luc, il rajoute : "celui qui écoute" et qui met en pratique.

Là, il est question de la mise en pratique : "celui qui fait la volonté de mon Père".

 

Alors, on peut mettre certainement cet Evangile en correspondance avec ce texte qui est encore tout neuf, tout neuf, qui a été écrit par le pape François, dans cette exhortation du début de son pontificat : la joie de l'Évangile.

Vous savez, c'est cette allusion à : celui qui veut être centré sur le Christ, doit se décentrer de lui-même ; centré, décentré, c'est une affirmation qui revient souvent dans les propos du pape François et que l'on peut trouver dans cet Évangile ; car, faire la volonté du Père, c'est s'identifier à Jésus jusque dans le chemin Pascal, le passage de la mort à la résurrection ; toutes nos petites morts, tous nos renoncements, qui sont par définition, coûteux mais qui aussi, à la lumière de Jésus, sont des renoncements qui ne vont pas vers la mort mais vers une résurrection : quitter au profit d'autre chose, renoncer au profit d'un bien supérieur, se décentrer pour acquérir un bien supérieur.

Comme dirait Paul, dans l'une de ses lettres, cesser de s'aimer soi-même, en passant de la mort à la résurrection, pour être mieux aimé et aimer davantage ; se décentrer pour être mieux centré sur le Christ, être centré sur le Christ pour mieux se décentrer soi-même.

 

Voici donc, certainement, le propos de cet Évangile.

Cherchons à être à l'intérieur de ce cercle comme ceux qui faisons la volonté du Père.

 

Amen.


Jeudi 19 janvier : pèlerinage à Ste Germaine

Rm 8, 31-39 : Hymne à l’amour de Dieu.

Ps

 

Mt 13, 44-46 : La parabole du trésor et de la perle.

 

Un pèlerinage comme le nôtre, c'est une occasion pour nous, de nous mettre à l'école ; de nous mettre à l'école de ces petites voix, toute faibles, toute faibles qui remontent depuis la nuit des temps et qui viennent s'adresser à nous : ce sont nos frères, ceux qui ont aussi connu Jésus Christ, qui en ont vécu et qui en ont vécu totalement et que notre mémoire conserve.

C'est dire, c'est dire la place qu'ils ont eue dans la vie du peuple de Dieu.

Et ce sont des frères dont le nom ne figure pas dans la Bible mais qui figure dans les Cieux ; tous ceux qui, à la suite du Christ et de ses disciples et apôtres se sont mis en route, à l'annonce qui leur a été faite que, en Jésus, ils trouvent un roc solide.

Alors, aujourd'hui, nous faisons mémoire d'une de ces petites voix surgie du fond des âges et qui n'est pas éteinte, car ces voix, jamais, ne seront éteintes : c'est Germaine.

 

Alors, tout à l'heure, Françoise a essayé de nous narrer ce que quelques historiens ont réussi à glaner d'elle, avec parfois des incertitudes à 50 ans près : Germaine, jeune fille, (on est à peu près, peut-être, tous d'accord sur un lieu : ici) ; Germaine, nous savons qu'elle était vierge et martyre, c'est la raison pour laquelle je suis habillé de rouge.

Donc nous célébrons une jeune femme qui a donné sa vie à cause de sa foi : elle en est morte.

 

Mais qu'est-ce que nous pouvons retenir de cet exemple glorieux ?

D'abord, que nous sommes tous un peuple.

Nous savons que nous naissons dans la foi, non pas par généalogie, non pas parce que papa maman étaient chrétiens et que par conséquent nous le sommes : ça n'est pas le sang qui nous fait appartenir à ce peuple, c'est le témoignage ; témoignage des uns reçu par d'autres.

Donc, nous sommes nés dans la foi (alors certes, par notre baptême, dont, pour la plupart nous n'avons guère de souvenirs), mais nous sommes nés dans la foi aussi, après, parce que dans notre cheminement personnel, la grâce nous a été faite de croiser tel ou tel témoin de la foi qui nous a marqué à sa façon, en plein comme en creux, et qui a fait naître en nous ce feu ardent, ce feu ardent.

Ce feu ardent naissant, nous sommes allés puiser dans les Ecritures, nous sommes allés puiser dans une communauté, nous sommes allés puiser dans la prière, nous sommes allés puiser dans la charité pour que ce feu ardent s'entretienne.

Nous sommes allés, mais c'est l'Esprit qui nous a conduits, qui nous a propulsés à la suite de Jésus.

 

Et je voulais vous lire deux petites voix qui nous viennent du fond des âges, bien avant Germaine et tout de suite après le Nouveau Testament ; dans cet interstice, tout petit petit petit entre le Nouveau Testament et ces premiers témoins de la foi qui sont nés en Gaule, avec l'un des premiers : Irénée de Lyon, l'évêque Pothin et tous les martyrs de Vienne et de Lyon.

Ce sont tous ceux qui sont nés après eux ; nous estimons, nous sommes certains dans la foi que le diocèse de Troyes, (ou tout du moins le premier évêque de Troyes), date du troisième siècle : St Amateur.

On situe (on sait que Bar sur Aube dépendait de Langres), on situe Germaine au quatrième, mais deux siècles avant, au deuxième siècle, deux petites voix : Tassien le syrien ; il écrit (si vous avez écouté l'Évangile, vous verrez quelques petits rapprochements...alors, deuxième siècle hein ?) : "Ayant donc compris cela, je veux me mettre à nu comme les plus petits des nourrissons; car nous savons que la consistance du mal est semblable à celle des semences les plus petites en ce que celui-ci se fortifie à partir d'un faible point de départ, mais qu'inversement, il se dissoudra si nous obéissons au Verbe de Dieu, sans nous disperser nous-mêmes.

Le Verbe, en effet, s'est fait Maître de nos personnes au moyen d'un trésor caché.

En le déterrant, nous nous sommes recouverts de poussière mais nous lui avons procuré le point de départ nécessaire pour qu'il prenne consistance ; car la personne qui reçoit ce trésor dans son intégralité acquiert la possession d'une richesse plus précieuse encore".

Magnifique témoignage de la foi, petite voix surgie du fond des âges, deuxième siècle.

 

Aristide d'Athènes, deuxième siècle, il s'adresse à Adrien : "en tant qu'hommes qui connaissent Dieu, ils lui demandent les choses qui Lui est beau de donner et à eux de recevoir ; et c'est ainsi qu'ils passent le temps de leur vie ( il parle des chrétiens), et puisqu'ils connaissent les grâces de Dieu à leur égard, c'est grâce à eux que se répandent les bienfaits qu'il y a dans le monde ; et vraiment, ce sont eux qui ont trouvé la vérité dans leurs errances pour la chercher.

Et de ce que nous avons compris, nous avons saisi qu'ils sont les seuls à s'être approchés de la connaissance de la vérité.

Or les bienfaits qu'ils ont réalisés (alors, toujours les chrétiens), ils ne les prêchent pas aux oreilles des foules et ils prennent soin de n'être remarqués de personne, cachant leurs dons comme tel qui a trouvé un trésor, le cache.

Et ils s'efforcent de devenir justes comme tels qui attendent de voir leur Christ et de recevoir de lui, en grande gloire, ce qui leur a été promis".

 

Vous aurez peut-être vu l'allusion au trésor découvert dans un champ ou à cette perle précieuse.

Le Christ est ce trésor et nous l'avons saisi au point de monter par -5°C, -6°C, -7°C, un petit matin de janvier, du bas jusqu'en haut de la colline.

Qu'il en soit ainsi tous les jours dans notre vie.

 

Amen.


Mercredi 18 janvier :

He 7, 1-3.15-17 : Melchisédech. L’abrogation d’une prescription antérieure.

Ps 109

Mc 3, 1-6 : Guérison d’un homme à la main atrophiée.

 

De nouveau, il est question du sens du sabbat, jour du Seigneur pour nous, jour de repos et de repos du Seigneur devant sa création accomplie, devant notre propre recréation.

Voilà un homme à la main atrophiée et ce qui est en jeu, ce n'est finalement pas tellement cet homme, mais une mise en accusation ; finalement pas tellement celle de Jésus, mais de ses détracteurs eux-mêmes.

À la fin de cette scène, ceux qui seront accusés ce sont les pharisiens eux-mêmes.

Ils cherchent à faire périr Jésus, leur cœur est troublé, ils ne supportent pas cette guérison et la question que pose Jésus se tourne contre eux : "est-il permis de sauver une vie ou de tuer, le jour du sabbat ?"

 

Nous savons, par avance, que Jésus va être tué et qu'il va sauver par sa mort.

Nous savons que nous allons mourir pour ressusciter avec lui, grâce à la mort et la résurrection de Jésus.

Nous savons que, désormais, notre vie ne sera plus centrée sur nous-mêmes mais sur lui.

 

Encore faut-il passer par cet événement de la croix.

Par avance, se joue dans cette synagogue, ce qui va nous valoir, plus tard, le salut ; non pas la guérison d'une main, (main qui peut servir à tuer comme main qui peut servir à sauver), mais va se jouer la condamnation ou le jugement des cœurs, des cœurs tordus, des cœurs trop centrés sur eux.

Jésus va nous libérer de ces cœurs-là.

Il va nous donner un cœur de chair à la place de nos cœurs de pierre.

 

Oui, il est permis de sauver le jour du sabbat.

 

Chaque eucharistie est pour nous un jour du sabbat, un salut offert.


Mardi 17 janvier : Saint Antoine du désert

He 6, 10-20 : Paroles d’espérance et d’encouragement.

Ps 110

Mc 2, 23-28 : Les épis arrachés.

 

"N'avez-vous jamais lu ce que fit David, lorsqu'il fut dans le besoin et qu'il eut faim", voilà où vient nous rejoindre le Christ et là où nous pouvons le trouver ; non pas dans le plein de notre vie mais dans le creux de notre faim, de notre manque ; et c'est ce qui est bien le plus difficile et le plus douloureux.

Nous ne supportons pas les manques et nous parvenons (et heureusement !) à les colmater, parfois à les cacher pour ne pas souffrir de ce manque.

Et ce que reproche Jésus à ses détracteurs, c'est de faire de l'Alliance un écran au manque, une sorte de parade pour éviter que Dieu ne nous rejoigne là.

 

Alors, autour de la question du sabbat, Jésus va enfoncer le clou et utiliser l'exemple de David.

Lui, qui est notre père à tous, il a eu faim, il a été dans le manque.

Bien que l'élu du Seigneur, bien que le roi que nous adorons (adorer est excessif, le roi que nous apprécions), il a eu faim, il a été dans le manque.

 

Ne transformez pas la religion en un système qui consiste à se cacher : nous ne sommes pas au carnaval quand nous prions et quand nous venons à la messe.

Bas les masques, laissez le manque apparaître pour que le Verbe vous rejoigne là.

C'est de cette seule façon alors, que cette espérance, comme une ancre, permettra à notre âme de tenir ferme.

 

Saint Antoine l'avait découvert.

 

Amen.


Dimanche 15 janvier : fête des migrants

Is 49, 3.5-6 : Deuxième chant du Serviteur.

Ps 39

1Co 1, 1-3 : Adresse et salutation. Action de grâces

Jn 1, 29-34 : Le témoignage de Jean.

 

On a encore en mémoire ce que Serge nous a dit tout à l'heure pour ouvrir cette célébration : nous sommes aujourd'hui, cette fameuse journée mondiale des personnes réfugiées et migrantes, mais c'est surtout le tout début, tout début, tout début du temps ordinaire.

 

Et je vous propose que nous commencions ce temps ordinaire par une expérience que nous propose l'Évangile. 

Mais, l'Évangile, que l'on vient d'entendre, peut-être que nous l'avons entendu d'une manière distraite parce que si vous êtes allés à la messe ces dernières semaines, vous avez l'impression de l'avoir déjà entendu au moins quatre fois, le même : donc, "voici l'Agneau de Dieu", Jésus au moment de son baptême et le début de Saint Jean.

Alors, quand on entend les choses en quatre fois, on ne les écoute plus.

 

Mais il n'a pas été choisi par hasard, parce que nous sommes au début d'une année, au début d'un chemin.

Les loups, la vie à la suite de Jésus c'est un chemin, c'est une route.

On n'arrête pas de vous le dire quand vous êtes à l'école, vous commencez un parcours et puis vous allez aller vers le brevet et puis vers le bac : c'est un chemin.

Mais ne vous trompez pas ; après, c'est pareil, le chemin, il continue, il n'est pas fini après le bac.

Et la vie chrétienne, c'est pareil : ce n'est pas fini avec la première communion ni avec la profession de foi.

Les gens qui ont tout fait : communié, mariés, 'extrêmisés' même, ils ont encore des choses à vivre, ils ont encore des choses à vivre.

Tout n'est pas fini, c'est un chemin, la suite du Christ.

 

Et dans cet Évangile que nous avons entendu, on entend plusieurs fois Jean-Baptiste qui dit : " je ne le connaissais pas".

Alors, on va essayer de vivre une expérience : c'est qu'on commence cette année en fermant le rideau sur ce que l'on croit connaître de Jésus.

On ferme le rideau sur ce qu'on croit connaître de Jésus et on dit : 'eh bien on va se mettre en route pour le découvrir comme si c'était la première fois', mais on a toute l'année pour ça.

 

"Je ne le connaissais pas", dit-il ; et il le redit : "et je ne le connaissais pas" et en même temps, il le désigne : "voici l'Agneau de Dieu".

Alors ça veut dire : c'est notre horizon à nous, l'Agneau de Dieu.

Alors, c'est un grand mot : l'Agneau de Dieu.

Notre horizon, ça nous fait penser déjà un peu à Pâques, (alors ça va, on est mi-parcours) mais ce n'est pas parce que l'on arrivera à Pâques que l'on a tout fini ; ça nous fait penser aussi à la suite.

L'Agneau de Dieu c'est celui qu'on va voir sur l'autel dans quelques instants quand on va célébrer l'eucharistie.

 

C'est qui l'Agneau de Dieu, à quoi il sert ?

Alors là, c'est une parole aussi pour les grandes personnes, parce que si, les loups, vous êtes d'accord pour dire qu'on fait un chemin ensemble, demandez aux grandes personnes leur expérience de leur route.

Déjà, ils ont eu des ampoules aux pieds ; déjà, ils se sont fatigués ; déjà, ils ont eu la tentation peut-être, de ne plus avancer ou de revenir à leur point de départ.

C'est long la route, hein ! C'est long.

Il y a un humoriste qui disait : 'la vie éternelle, c'est très long'.

C'est long la route.

 

À quoi il sert, l'Agneau de Dieu ?

L'Agneau de Dieu, on l'a dit, c'est celui qui enlève le péché, c'est celui qui prend sur lui le péché.

 

Qu'est-ce que le péché ?

Le péché, ce sont toutes ces barrières, ces petits cailloux aussi, ces obstacles qui rendent notre chemin compliqué.

Le petit caillou dans la chaussure, Jean-Michel, quand on va à Saint-Jacques-de-Compostelle, c'est pénible, hein ?

Les barrières à contourner, ça serait tellement plus simple de franchir les Pyrénées par un tunnel que de passer par-dessus !

Ces obstacles, ces barrières, ces petits cailloux, ce sont des obstacles sur notre chemin, mais ce sont aussi des obstacles à l'amour.

Plus mon avancée sur la route est pénible, plus ma manière d'aimer est laborieuse.

Plus mon avancée sur la route est pénible, plus ma manière d'aimer est laborieuse.

 

L'Agneau de Dieu, il enlève le péché.

L'Agneau de Dieu, il ôte les obstacles et les petits cailloux.

Non seulement, il y a le plaisir de ne plus les avoir sur le chemin, mais il y a aussi l'effet non négligeable, d'avoir un amour beaucoup plus simple.

 

Il est heureux que Serge ait parlé plusieurs fois d'amour, tout à l'heure.

Alors, il est une heureuse coïncidence que ce temps, cette route, commence par ce que nous célébrons aujourd'hui : Jésus et cette attention toute particulière à l'accueil.

Car voilà un obstacle : si nous sommes en route, pourquoi bloquons-nous la route des autres ?

Nous sommes des migrants dans la vie, (vous comprenez que c'est une métaphore, mais) nous sommes des migrants dans la vie, si nous sommes des périgrinants, si nous sommes en chemin vers...

Eh bien, nous sommes heureux que l'Agneau de Dieu enlève nos obstacles.

Pourquoi alors, devons-nous être nous-mêmes des obstacles à d'autres ?

 

C'est la question toute crue que nous adresse l'Evangile, aujourd'hui : pourquoi devons-nous être des obstacles pour les autres, si nous sommes heureux que l'Agneau ôte nos propres obstacles dans notre vie.

Je vous laisse cette question.

Si vous communiez tout à l'heure, vous répondrez au Seigneur par le simple fait de communier et vous direz : "Seigneur, ôte les obstacles de mon cœur, que je ne sois pas un obstacle pour mes frères".

Amen.


Vendredi 13 janvier : St Hilaire

 

Nous tournons les pages de l'Évangile selon Saint Marc depuis le début de la semaine.

Nous avons vu Jésus aller sur le terrain des autres, notamment en entrant dans des maisons qui ne sont pas les siennes (la maison de Simon-Pierre), ou alors, dans une synagogue.

On a vu hier, Jésus qui se laisse toucher physiquement et toucher ; il touche : c'est avec un lépreux.

Mais cette fois-ci on entre chez Jésus, on est chez lui, sur son terrain.

 

Alors, on est dans l'Évangile de Marc ; dans l'Évangile de Luc, quand il raconte cette scène qu'il a en mémoire, lui, il évoque un toit avec des tuiles, un peu comme chez nous (le danger des toits qui s'envolent avec du vent, la nuit) ; mais lui, Marc, il évoque un toit plat, un toit oriental, un toit en terrasse, dans lequel un trou est fait pour qu'une personne entre en civière, allongée, portée par quatre autres.

L'image est belle parce qu’un chemin est ouvert pour entrer chez Jésus.

 

La foule fait barrage, c'est la première fois qu'on parle de la foule chez Marc ; et ça ne fait que commencer, la foule va devenir de plus en plus oppressante et embêtante.

La foule commence à paraître à la porte de Jésus.

 

Donc, un chemin s'ouvre pour entrer sur le terrain du Seigneur, le terrain même.

On pourrait même dire : le cœur ; car vous savez qu'une maison n'est pas qu'un habitat, une maison c'est aussi le lieu propre de chacun, sa maison, ma maison.

Quand on proclame, au moment de la naissance de Jésus, que le Verbe a pris chair et fait sa demeure parmi nous, il plante sa tente au milieu de nous ; il vient faire sa demeure, il vient entrer dans nos maisons.

Mais aujourd'hui, c'est nous qui rentrons dans la sienne, avec cet Évangile ; nous rentrons dans son cœur.

Et c'est beau que ce soit à l'occasion de la fête de Saint Hilaire qui proclame la divinité de Jésus, parce que Jésus ne fait pas qu'aller chez les autres ; nous sommes invités à rentrer chez lui, à rentrer.

 

Et qu'est-ce que ça produit cette entrée dans la vie même de Jésus ?

Ça produit ce qu'il se passe, deux choses :

d'abord, ça vient dénoncer les raisonnements qui tuent.

Dans les raisonnements qui sont dans le cœur des autres, (en l'occurrence là, les scribes, pharisiens), des raisonnements qui tuent l'Evangile.

Mais quand ça tue l'Évangile, ça finit toujours par tuer les gens, quand on commence à raisonner sur : 'ils auraient dû, pas dû etc... ' ; ce sont des raisonnements qui ne permettent pas d'entrer dans la beauté même du Christ.

Et on transforme l'Évangile en un livre sujet à polémique.

Mais on peut être ainsi avec l'Évangile, ou quand on le partage à plusieurs.

Accueillons l'Évangile comme une belle maison, avec un bel intérieur dans lequel il convient, alors, de se réjouir de l'agencement intérieur et de se dire : 'eh bien, celui qui habite là, j'apprends à le connaître en fonction de ce que je vois.

Inutile de me livrer à du raisonnement ou de la critique.

Je ne suis pas chez moi, je suis chez un autre.

J'accueille, je cherche à comprendre l'autre'.

 

Ce que ne font pas les scribes et les pharisiens : ils sont chez Jésus ; eux, ils sont passés par la porte, mais bien que chez lui, leur cœur n'est pas ajusté à la demeure dans laquelle ils se trouvent.

Alors, ils finissent par être tueurs, mais tueurs de qui ?

Du paralytique, parce que nous aurions suivi les raisonnements des scribes et des pharisiens, le paralytique serait resté paralytique ; tandis que le raisonnement de Jésus (alors c'est une chose que l'on connaît par cœur : la miséricorde), il restaure le paralytique.

Et le voici, sortant dignement, son grabat sous le bras ; il passe par la porte, réintégré dans la communauté, réintégré dans son propre corps.

Il passe devant tout le monde, il n'a pas besoin de repasser par le toit.

 

Mais encore faut-il que cette œuvre qui a été rendue possible pour le paralytique, advienne pour les pharisiens eux-mêmes, qu'ils changent leur cœur car eux, sont paralysés dans leur cœur.

Alors ce qui permettra ça, ce qui permettra vraiment que leur cœur, (aux pharisiens), soit délivré de leurs paralysies, ce sera un autre événement, une autre ouverture, non pas du toit de la maison de Jésus, mais l'ouverture du rideau du temple au moment de sa passion, le don de sa vie ; au moment où il sera livré par les hommes, là, les cœurs les plus récalcitrants seront ouverts et transformés.

 

Retenons que nous sommes invités à rentrer dans la vie même de Jésus, c'est ce que nous propose cette eucharistie : qu’en entrant dans sa vie, nous essuyions nos pieds (avant de rentrer dans sa maison), et nous apprenions à le connaître par ce qu'il nous offre de lui.

Amen.


Jeudi 12 janvier :

 

Dans les Évangiles, chez Saint Marc, que nous avons entendus les jours précédents, j'avais attiré l'attention sur des verbes, des mouvements : entrer, sortir, par exemple ; aujourd'hui vous pouvez être sensibles à tout ce qui tourne autour de la distance : la proximité, l'éloignement.

Jésus touche cet homme, comme Jésus sera touché lui-même, un petit peu plus tard dans l'Evangile (rappelez-vous) par une femme hémorroïsse qui lui touchera la frange de son manteau.

Jésus touche cet homme comme il le fait en d'autres Évangiles, lorsqu'il veut guérir l’aveugle, par exemple ; lorsqu'il veut purifier.

 

Il touche comme à notre baptême, nous avons été touchés ; il touche comme pour façonner, pour recréer ; mais un contact qui n'est pas sans évoquer notre sensibilité, notre dimension charnelle et la dimension aussi, charnelle, du Verbe de Dieu ; mais un contact qui se suit immédiatement par une mise à distance, une séparation,une coupure ; comme cette distance de la création, cette distance créatrice : l'homme par rapport à son Créateur, l'homme par rapport à père et mère, l'homme par rapport à sa femme (distance créatrice, non pas pour être dans la solitude ou l'éloignement mais pour laisser l'espace nécessaire à l'acte créateur).

La mission de Jésus n'est pas terminée, raison pour laquelle il convient que cet homme, non seulement s'éloigne, mais qu'il se taise.

 

Nous ne savons pas pourquoi cet homme avait contracté la lèpre ; mais nous savons que nous avons besoin, toujours, pour grandir, nous avons besoin toujours, pour nous redresser et nous avons toujours besoin pour être guéri d'être mis à distance, parfois, de nous-mêmes ; une distance salutaire pour grandir.

Cet homme a du mal à être à distance, il ne va pas respecter la consigne de Jésus : il va parler (il ne sera pas le seul ; dans plusieurs endroits de l'Évangile, le secret messianique est divulgué et les intéressés ne vont pas se taire).

Chez Saint Marc, c'est presque cela qui serait la cause de la mort de Jésus, d'une certaine façon, un emballement des événements qui créerait une équivoque autour de l'identité de Jésus.

 

Peu importe, pour retenir un deuxième aspect de cet Évangile, c'est Jésus qui est pris aux entrailles : une émotion profonde.

Une émotion profonde, comme on la retrouvera, par ailleurs, quand Jésus sera amené, là encore, dans l'Évangile de Matthieu (pas chez Marc) à guérir deux aveugles; et puis, une émotion profonde lorsqu’il sera amené à ‘produire’ la résurrection de son ami Lazare, cette résurrection profonde.

Jésus touche, (comme à l'intérieur de lui), il serait comme touché, comme nous avons l'habitude de dire : "tiens, ça me touche ; je suis touché par… "

C'est un événement mystérieux au fond de lui-même ; touché par l'émotion peut-être.

 

On pourrait imaginer également qu'il a été touché par son Père.

En tout cas, Saint Jean le suggère ainsi ; quand Jésus est touché (chez Saint Jean), c'est un événement trinitaire : Jésus est touché mais il produit l'Esprit ; le Fils est proche du Père et tous deux produisent l'Esprit.

Peut-être alors, que la vue de cet homme, avait créé ce semblable événement et que la guérison de cet homme, est un fruit de l'Esprit.

Mais retenons, les uns et les autres, que dans notre foi, le Verbe, en nous, vient produire son fruit, (événement de l'Esprit) par les sacrements, qui sont à chaque fois des réalités sensibles.

À l’eucharistie, nous ne sommes pas physiquement touchés par le prêtre (qui ne nous donne pas l'onction par exemple, comme c'est le cas dans le baptême), mais nous recevons le corps du Christ qui vient nous nourrir, comme si nous étions touchés par Jésus.

 

Amen.


Mercredi 11 janvier :

He 2, 14-18 : le sacerdoce du Christ.

Ps 104

Mc1, 29-39 : Guérison de la belle-mère de Simon. Guérisons multiples.

 

Hier, nous étions invités à être attentifs à quelques verbes : rentrer, sortir ; aujourd'hui, je vous invite à être attentifs au jour et à la nuit ainsi que, de nouveau, à deux verbes : coucher et lever.

Tout commence par ‘un jour’ et une rencontre se fait entre Jésus et une femme couchée.

Il lui tend la main, il la saisit et elle se lève.

Le soir arrive, le soleil est couché ; on lui amène beaucoup de gens malades.

Il va exercer une activité de ténèbres puisqu'il va être, en permanence, exposé à beaucoup de démons et à des maladies de toutes sortes.

Le lendemain, toujours pendant la nuit, Jésus se lève.

 

Soyez attentifs au fait que, Jésus qui se lève, c'est Jésus qui ressuscite et c'est déjà un avant-goût de ce que nous célébrons la nuit du samedi Saint au dimanche de Pâques :

la Veillée Pascale.

Jésus se lève, Jésus se redresse, Jésus ressuscite.

Il est plus fort que la mort, il marche sur la mer agitée de la mort.

Il est plus fort que tous les démons et toutes les maladies qui lui sont présentés, de nuit et son activité est contagieuse puisqu'il va redresser cette femme malade.

Elle va ressusciter avec lui.

 

Ça peut vous faire penser à d'autres résurrections de femmes ou du moins, d'autres saluts associés à la résurrection de Jésus.

Cela ne vous fait-il pas penser à Marie-Madeleine, par exemple ?

 

Jésus se lève, de nuit, bien avant l'aube.

Peut-être pourrions-nous vraiment penser à ce que nous célébrons pendant la nuit pascale : Jésus qui ressuscite !

De sorte que, au petit matin de Pâques, le tombeau est vide, le Maître est debout et que dit-il à Marie-Madeleine ?

"Ne me retiens pas, va voir mes frères" ; ce qu'il dit à la fin de l'Évangile :"Allons ailleurs, dans d'autres villages voisins".

"Ne me retiens pas, va voir mes frères".

 

Le Maître vient nous rejoindre dans nos nuits, nous qui sommes couchés, pour nous redresser,nous faire ressusciter avec lui.

C'est ça, sa bonne nouvelle.

Demandons au Seigneur qu'il nous fasse participer à sa résurrection.

 

Amen.


Mardi 10 janvier

He 2, 5-12 : Exégèse du Ps 8.

Ps 8

Mc 1, 21-28 : Jésus enseigne à Capharnaüm et guérit un démoniaque.

 

Je vous invite à entrer dans ce texte de l'Évangile selon Saint-Marc, en vous attachant aux détails, surtout aux verbes.

Et vous allez vous rendre compte que ce texte mais en valeur un demi verset.

 

La première moitié du texte, il s'agit d'entrer : entrer à Capharnaüm, entrer dans la synagogue; il s'agit d'être frappé par l'enseignement de Jésus

 et puis, petit à petit, la caméra pointe l'objectif sur cet homme à l'intérieur de la synagogue qui crie : "que nous veux-tu Jésus de Nazareth ?"

 

Et le demi verset : "es-tu venu pour nous perdre ?"

 

Deuxième moitié du texte, Jésus de Nazareth devient le Saint de Dieu, cet homme qui crie se voit enjoindre de se taire et ce n'est plus le verbe entrer mais le verbe sortir : "sors de cet homme".

Il sort de lui et Jésus sort de Capharnaüm et sa renommée se répand.

Avec au centre : "es-tu venu pour nous perdre ?", mais n'oublions pas celui qui nous parle, l'esprit mauvais.

 

Alors le Jésus de la crèche est maintenant celui de la croix qui, par sa passion et sa résurrection nous libère.

 

Amen.


Dimanche 8 janvier : l’Epiphanie

Is 60, 1-6 : Splendeur de Jérusalem.

Ps 71

Ep 3, 2-3a.5-6 : L’expérience chrétienne.

Mt 2, 1-12 : La visite des mages.

 

Nous sommes aujourd'hui, dans cet arc tendu entre la fête de la nuit du 24-25 et cette fête d'aujourd'hui, qui disent toutes deux, proclament la même chose : la naissance du Verbe, la venue de Dieu parmi les hommes.

 

Or, la fête du 24-25 qui, vraiment, traverse notre tradition locale, occidentale (enfin, en tout cas, pour ce qui est de l'Europe de l'Ouest), cette fête est toute entière pétrie, travaillée par ce que St Luc a retenu.

Nous en avons quelques images, sans forcément savoir que c'est typiquement du St Luc : les bergers, les anges dans le ciel, la nuit de Bethléem ; tandis que cette fête de l'Épiphanie proclame la même chose, est traversée et pétrie par d'autres souvenirs, cette fois-ci chez Matthieu : et on a quelque chose autour de l'Étoile et de ces gens venus d'Orient.

Et ce que ces gens venus d'Orient, disent, c'est d'abord une discussion avec Hérode et ce sont des cadeaux.

Ce qu'ils disent, c'est à travers leurs cadeaux, tandis que chez Saint Luc, il y a les anges qui parlent beaucoup et puis du silence.

En revanche, si vous me suivez toujours, chez Matthieu, aujourd'hui, ce que les mages disent à travers leurs cadeaux ; il faut aller regarder chez Luc, dans ce que disent Zacharie, Elisabeth , Marie à Elisabeth, Elisabeth à Marie, les anges à Marie ainsi que Siméon et Anne.

Tout ce qu'ils vont dire dans le temple, tout ce qu'ils vont dire au moment de la Visitation et de l'Annonciation, tout ce qui va se dire dans le ciel, c'est ce que les mages, eux, vont proclamer, mais silencieusement à travers leurs cadeaux : de l'or, de l'encens et de la myrrhe.

 

Vous savez que le fond de notre foi, au moment de la Nativité, c'est de reconnaître en Jésus, le Verbe fait chair : Dieu s'est fait homme.

Jésus, de sa chair est de la lignée de David, à travers Joseph ; dans l'Esprit, par Marie, il est Dieu lui-même, il est né d'une Vierge.

C'est ce qui est dit (je ne vous le répète pas), par tous ces protagonistes chez Luc ; chez Matthieu, c'est dit à travers ces cadeaux : or, encens et myrrhe.

 

À travers les siècles, la signification de ces cadeaux a un peu varié.

Les premiers chrétiens, les penseurs, les priants, qui ont médité sur la Parole de Dieu, ont donné des tonalités assez diverses au sens de cet or, au sens de cet encens et au sens de cette myrrhe, une sorte de parole sans mots, à travers ces cadeaux.

Mais une constante reste : l'or pour la royauté de Jésus ; l'encens pour celui qui s'offre tout entier comme Dieu ; la myrrhe, plutôt son humanité puisqu'il va mourir sur la croix.

Et vous voyez que cet homme-Dieu, auquel nous nous attachons comme à un roi ; eh bien, ce que proclament ces mages venus d'ailleurs, c'est exactement tout ce que ces protagonistes de Luc, eux, ont dit avec des mots.

Nous, nous adorons donc, ce Verbe fait chair.

 

Nous pouvons retenir quand même deux petits détails (pourrait-on dire), ou deux points d'importance en cette fête de L’Epiphanie,qui n'apparaissent pas du tout chez Luc :

 

 c'est la venue de gens qui viennent d'ailleurs, de loin, de très loin ; ils se déplacent de très loin.

 Et c'est la lumière, avec cette étoile qui guide et qui les oriente.

 

Ces gens venus de très loin, je vous l'ai dit en introduction tout à l'heure, ont beaucoup inspiré le XXe siècle (surtout au XXe siècle ! alors que, au XXe siècle, l'Europe s'ouvrait, surtout après-guerre, à la réalité du monde entier ; et puis, à travers les nouveaux moyens de communication, qui venaient de naître dans les années 50-60, ces gens venus d'ailleurs ont été synonymes, pour nous, dans nos églises, de l'ouverture au monde, de la fête des nations, de l'universalité.

Alors, il est vrai que l'universalité, c'est ce qui est aussi proclamé par Matthieu (au moment où il a écrit son Évangile), puisqu'il est promis à Jérusalem, capitale ruinée et capitale qui a perdu son autorité, sa suprématie, il est promis à Jérusalem qui est sous le joug des Perses, des Grecs et des Romains, il est promis à Jérusalem qu'elle retrouverait sa souveraineté ; et on a entendu ça dans la première lecture, l'extrait d'Isaïe : "Les peuples viendront vers toi, chargés de leur cadeau, de leur offrande".

Eh bien, c'est ce qui se passe avec ces mages.

 

Cette venue est un signe patent de la restauration de Jérusalem ; parce que, avant d'aller à Bethléem, ils vont où, les mages-là?(parce qu'ils ne savent pas), ils vont à Jérusalem.

Et cette universalité dit que : oui, cette Alliance promise à travers David, tous ceux qui l'ont précédé et ceux qui le suivent, non seulement elle est maintenue, elle est restaurée en Jésus.

Alors je vous dis, c'était l'occasion dans nos églises de faire des fêtes des peuples, autour de cette fête de l'Épiphanie.

C'est ce que nous allons vivre, nous, la semaine prochaine, avec cette messe, dimanche prochain, à l'espace Davot, la messe sans frontières.

C'est un peu cet esprit qui a été transformé progressivement en fête, en journée nationale des migrants.

La journée nationale des migrants a déjà une certaine histoire, puisqu'elle date d'avant la première guerre mondiale : elle a été initiée par le pape Benoît XV.

Mais cette fête des peuples est devenue la journée des migrants.

 

Mais que retenons-nous, aujourd'hui, à travers ces mages venus d'Orient? 

Deux choses : - la première c'est, dans cette eucharistie comme dans toute eucharistie, (vous allez voir), nous allons vivre le temps de l'offertoire.

C'est le moment où on donne à la quête (voyez-vous) ; alors, nous sommes assez distraits, parce qu'on le vit comme un entracte au cinéma.

On nous apporterait des cacahuètes, ça serait pareil ; un peu comme pour faire une pause.

Mais c'est un moment très important, qui mérite quand même, toute notre concentration, même si on est distrait (essayons de ne pas trop l'être).

On va faire un test tout à l'heure, je vous regarderai pour voir comment vous êtes : mais on fouille dans son sac, on s'éparpille et puis finalement, on est ailleurs.

Mais l'offertoire : on est dans cette démarche des mages, des mages qui viennent offrir leur présent ; et ce n'est pas uniquement pour faire vivre notre église ou faire plaisir à Monsieur le curé.

L'offertoire c'est pour s'offrir soi-même, s'offrir soi-même.

Alors, ça passe à travers deux-trois pièces, mais ce ne sont pas les deux-trois pièces qui comptent, c'est l'offrande que nous faisons de nous-mêmes.

Alors, on a tous des choses très diverses à offrir; ça n'est pas uniquement nos intentions de prière.

C'est : on s'offre tout entier, comme Jésus l'a fait lui-même, certes ; dans cette démarche des mages, de venir de très loin et d'apporter des cadeaux très précieux, qui coûtent, coûteux.

Ils sont dans une démarche d'adoration, ils ne viennent pas simplement régler leurs impôts, voyez-vous, ils sont dans une démarche d'adoration, ils s'offrent tout entier.

Cette offrande de nous-mêmes, elle est très très précieuse, nécessaire pour que l'eucharistie, elle apporte son fruit.

Nous souhaitons que l'eucharistie apporte du fruit dans nos vies, parce que si on risque de se prendre le premier platane sur la route à cause du verglas, il faut vraiment que l'eucharistie, ça compte pour nous.

D'accord ?

Donc si ça compte, c'est qu'on attend quelque chose.

Et on n'attend pas simplement le plaisir d'être ensemble, on attend que le Christ, par sa mort et sa résurrection,vienne transformer quelque chose en nous ; et ça, c'est possible uniquement, si on s'offre, parce que sinon on est très distant du mystère, il ne se passe rien ;

donc, la démarche d'offrande.

 

Notez, entre parenthèses, que si on proclame la royauté de Jésus, ce n'est pas uniquement pour dire sa suprématie sur toute chose ; c'est aussi pour dire, si Jésus est notre roi à travers cet or qui est offert par les mages, c'est pour dire qu'on l'aime très fort : il est tout pour nous.

Quand des personnes, surtout des dames, vont dire à des messieurs : "tu es mon roi", tu es tout pour moi ; il y a un amour, il y a quelque chose qui est de l'ordre de l'amour et d'un amour très très grand ; d'un amour auprès de quelqu'un, d'un être qui compte.

Alors Jésus ne transforme pas les amours des autres envers lui en amour aliénant, il ne fait pas ça.

Mais s'il est notre roi, il est central ; donc nous sommes dans une démarche d'offrande, d'amour, de son de soi.

 

 - La deuxième chose que je voulais vous proposer en cette compréhension du mystère de l'Incarnation, à travers la fête de l'Épiphanie, c'est de poursuivre sur ce fil de l'amour et de donner, pour le besoin de cette eucharistie, un sens un petit peu différent aux deux autres cadeaux, aux trois cadeaux qu'ils offrent.

 

Non plus tellement dire : l'or pour sa royauté, l'encens pour sa divinité, la myrrhe pour son humanité ; mais pour dire l'or pour l'amour : il est notre roi, on l'aime.

L'or, on se donne, bon ! l'amour; l'amour c'est quand même une réalité qui nous traverse de part en part.

Nous ne sommes pas qu'un cerveau qui pense ou un corps qu'on a besoin d'entretenir, on est traversé par l'amour ; et c'est ça qui a place dans l'eucharistie.

Dans l'eucharistie, ce ne sont pas des concepts que l'on offre, ce ne sont pas des intentions extérieures à nous-mêmes, on s'offre.

Si on a déjà été amoureux, on sait ce que ça veut dire ; donc on s'offre.

 

Les deux autres cadeaux : l'encens, la myrrhe.

 

L'encens, pour suggérer notre nostalgie, car l'amour, voyez-vous, a une fâcheuse tendance : c'est d'en rester à ce qu'il connaît.

Or l'amour connaît deux grands excès : soit ce qui lui a fait du bien, soit ce qui lui a fait du mal.

Et tout ça, c'est toujours par derrière, c'est rarement par devant (par derrière le rétroviseur, je regarde dans le passé).

La nostalgie, on ne peut pas tellement faire sans, mais ça nous traverse continuellement : chaque fois qu’on aime, on aime comme on a aimé ou comme on a été aimé.

Alors il se trouve que, on a nos bagages et on n’est pas forcément toujours aimé comme les petits oiseaux chantent.

Il y a comme quelques petites fragilités, ici ou là ; mais je l'offre aussi ; parce que peut-être que j'ai besoin d'être guéri de cela.

 

La myrrhe pour dire notre souffrance ; parce qu’un amour réparé c'est un amour qui porte sa souffrance.

Non pas qui souffre, mais qui l'assume quand ça vient, pour ne pas transformer nos relations d'amour en fardeau que l'on déposerait sur l'épaule des autres, les épaules des autres : tiens, je t'aime bien, mais viens avec ma béquille ; ô ! je t'aime beaucoup, mais viens avec mon bâton de vieillesse.

Non ; l'amour et l'amour qui est vécu dans la Trinité est un amour qui rend autonome, qui rend droit, qui rend singulier ; un amour qui s'assume et un amour qui rayonne mais qui n'est pas bancal, qui n'a pas besoin d'étais de part en part.

Tout ceci c'est possible par le don de Jésus à son Père, pour tous, librement ; c'est ce que l'on célèbre dans l'eucharistie.

 

La crèche est devant l'autel, mais sur l'autel, ce n'est pas la crèche.

Sur l'autel c'est la Croix ; sur l'autel c'est la mort-résurrection de Jésus : un amour aimé, aimant, un amour pur, un amour de roi, un amour comme nous en avons besoin pour réparer nos nostalgies ou permettre d'assumer ce qui nous fait souffrir.

Alors on s'offre à celui qui est reconnu homme, Dieu, celui qui nous sauve.

 

Et dans cette démarche de tout à l'heure, de l'offertoire (n'oubliez pas), vraiment, vraiment, donnons notre cœur au Christ : je t'aime, mais pas uniquement pour que tu viennes faire plaisir à ce qui ne va pas dans ma vie, mais pour que tu me restaures.

Amen.


Vendredi 6 janvier :

1Jn 5, 5-13 : Avertissements aux fidèles.

Ps 147

Mc 1, 7-11 : le baptême de Jésus.

 

Nous allons d'une fête de Noël à une autre fête de Noël, en nous approchant de cette célébration de l'Épiphanie, dimanche.

Dans beaucoup de pays, la fête de l'Épiphanie est l'équivalent de notre 25 décembre, à nous ; dans la tradition qui l'accompagne : les cadeaux échangés, le rassemblement familial.

Bien sûr, dans ces mêmes pays, le 25 décembre, il y a le récit de la nativité, chez Saint Luc (nous, c'est plutôt autour du 25).

 

Mais nous allons bien d'un récit de la naissance de Jésus à un autre récit de la naissance de Jésus ; et entre les deux, la liturgie nous prépare à retomber sur nos pieds, d'une certaine façon.

C'est-à-dire que, sitôt la célébration de l'Épiphanie, (et cette année, le lendemain, le baptême du Seigneur) nous retombons dans le temps ordinaire.

Et pour retomber sur nos pieds, pour que la marche ne soit pas trop haute entre les Évangiles de l'enfance et la Nativité de Jésus et tout d'un coup Jésus grand, à l'âge de 30 ans, qui vit son ministère public, (pour que la marche ne soit pas trop haute entre les deux), eh bien, petit à petit, la liturgie nous recentre sur le mystère pascal.

Nous étions beaucoup à la crèche (on sait que la crèche, elle est vraiment empreinte de mystère pascal), mais, peu à peu, nous retombons sur ce que nous célébrons dans chaque eucharistie : Jésus-Christ mort et ressuscité, nous fait ressusciter avec lui.

 

Alors, nous avons ce récit du baptême de Jésus, chez Marc.

Souvenez-vous que cette semaine, nous avons lu aussi un récit chez St Jean qui évoquait son baptême.

Là, il est explicitement décrit, ce baptême : "Jésus vint de Nazareth, ville de Galilée et fut baptisé par Jean dans le Jourdain et aussitôt en remontant de l'eau… ".

Alors, nous avons une belle allusion au déluge et à ce récit dans le livre de la Genèse, où Noé, après le déluge, non seulement les eaux descendent (comme Jésus sort de l'eau), mais une colombe vient pour signifier que, ça y est, les premières terre ressortent de l'eau, (les premières terre qui ont été immergées).

Et cette allusion à Noé est une allusion très forte à la re-création, au salut, à cette re-naissance, comme il l’a été pour Noé, mais comme c'est nécessaire après la destruction produite par l'eau qui fait mourir.

 

Alors, je regarde Nicole, qui prépare le baptême des petits enfants ; on a l'habitude de dire aux parents (je pourrais dire la même chose à Françoise), on a l'habitude d’expliquer aux parents que l'allusion première à cette eau que l'on utilise pour le baptême (je pourrais dire la même chose à Martine, pour les adultes), c'est vraiment l'eau qui fait mourir, avant que, par Jésus-Christ nous re-naissions avec lui.

Avant que par Jésus Christ nous renaissions avec lui.

 

Alors, nous voyons Jésus sortir de l'eau et regarder le Ciel se déchirer, comme dans une prophétie d'Isaïe : "je vis les cieux se déchirer" et de ces Cieux-là, descend cette voix qui s'adresse directement à Jésus, (alors que chez Matthieu elle ne s'adresse pas directement à lui, mais ce n'est pas très grave) : "tu es mon fils bien-aimé, en toi je trouve ma joie".

Ce fils c'est Jésus, certes, c'est nous ; c'est nous dans le grand élan de la résurrection.

Et prenez, par exemple, le récit de la résurrection, chez St Jean où Marie Madeleine est attachée à son fantôme (au fantôme de Jésus, mort), eh bien, elle le rencontre : "Marie", lui dit-il, "ne me retiens pas, va voir mes frères, dis-leur que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu".

 

Cette obligation de quitter quelque chose pour une re-naissance, cette obligation de laisser l'absence en nous faire son deuil, pour une meilleure présence de Celui qui vient habiter en nous : le Père ; non seulement nous insère au milieu des frères, mais en plus, nous fait renaître.

Marie-Madeleine est re-née à ce moment-là, tout comme Jésus le promet à Nicodème (alors là, on est bien avant), et tout comme chacun, nous pouvons le vivre, par le baptême.

Ce que Paul n'arrête pas de dire aux siens, dans ses lettres, notamment, dans un très bel extrait des Colossiens.

 

Alors, le baptême de Jésus, c'est notre re-naissance : nous sommes nés avec lui, à la crèche, mais bien entendu, tout comme Nicodème avait du mal à le comprendre : "faut-il de nouveau sortir du ventre de notre mère ?" posait-il la question, de nuit, à Jésus.

Eh bien, non, ce n'est pas nécessaire, si on renaît de l'eau et de l'Esprit Saint.

Eh bien, c'est ce qui se produit pour nous-mêmes : "tu es mon fils bien-aimé", (pas besoin de rentrer dans le ventre de ta mère et d’en sortir), "tu es mon fils bien-aimé", cette voix qui tombe du ciel s'adresse à chacun d'entre nous, par notre baptême.

Une voix qui vient fendre nos cieux intérieurs pour mieux nous libérer de nos caveaux et de nos tombeaux et nous en faire sortir : notre naissance et notre résurrection.

Amen.

 

 

Jeudi 5 janvier :

1 Jn 3, 11-21 : Garder les commandements, surtout celui de la charité.

Ps99

Jn 1, 43-51 : Les premiers disciples.

 

Les récits de l'enfance, situent Jésus à Bethléem ; le lien très fort avec la ville de David.

Ici, on voit déjà apparaître Nazareth, (un autre lien, une autre ville), la ville où il va grandir et vivre les débuts de son ministère, avant d'aller à Capharnaüm (du moins quittant Nazareth, il va à Capharnaüm) ; et nous avons la rencontre avec Nathanaël.

 

Au début de l'Évangile de Jean, plusieurs jours se succèdent avant d'arriver aux noces de Cana : "et le lendemain..." "et le lendemain..." " et le lendemain...", avant d'arriver aux noces de Cana.

Ça commence par la rencontre avec le Baptiste et l'évocation du baptême de Jésus et puis, la rencontre avec les premiers disciples.

La rencontre avec Nathanaël est la promesse de la venue d’un nouvel Israël : "voici un véritable fils d'Israël, un homme qui ne sait pas mentir".

Cette parole-là de Jésus, plus la parole à la fin de l'extrait où il est question d'une échelle et des anges qui montent et qui descendent, pourraient faire penser (ou nous invitent à penser, sans doute, avec force) au songe de Jacob.

 

Jacob, qui était Israël, mais qui lui, n'était pas un homme qui ne savait pas mentir.

C'est un homme rusé, certes, comme l'est aussi Nathanaël, mais un homme équivoque.

La rencontre avec ce Nathanaël et ce que Jésus dit, c'est une venue, une promesse de l'advenue d'un nouvel Israël, un Israël sans mensonge, un Israël tout tourné vers l'Alliance.

 

Cette promesse également, des cieux ouverts, c'est pour nous, ce que le Verbe nous permet.

Alors peut-être pas tellement, le regard tourné vers le cosmos, mais sans doute par ce qu'il produit dans nos cœurs : une ouverture, une disposition.

Sans doute, ce que la rencontre avec un autre personnage chez St Jean, représente le mieux, ou promet le plus : c'est Nicodème ; cette nouvelle naissance, cette recréation qui est une véritable ouverture vers le Ciel : la vision même du Père.

 

Alors, réjouissons-nous pour ce que le Verbe est capable de produire dans nos vies.

Que cette éternité,à l'intérieur de nous, produise tout son fruit.

Amen.

 

 

Mardi 3 janvier : Le saint Nom de Jésus, Ste Geneviève

1Jn 2, 29-3, 6 : Vivre en enfants de Dieu.

Ps 97

 

Jn 1, 29-34 : Le témoignage de Jean.

 

Beaucoup d'éléments se concentrent dans cet Évangile.

Le premier élément c'est que nous ne sommes pas témoins du baptême de Jésus, dans cet Évangile ; même s'il est question du baptême de Jésus, Saint Jean ne raconte pas le baptême de Jésus.

Matthieu, Marc, Luc racontent, Jean ne raconte pas.

St Jean-Baptiste raconte mais nous ne sommes pas témoins de cette scène.

 

Ce qui est très beau, c'est cette transmission, ce passage d'une Alliance vers une autre Alliance.

Et ce qui fait la richesse de notre vie de disciple et notre vie d'Eglise, quand nous lisons la parole de Dieu dans le cycle total de la liturgie, c'est que nous avons toujours, au moins deux ou trois éléments qui permettent des passages entre générations :

le fait que Jean-Baptiste désigne celui qui va le succéder et accomplir la Loi, l'Agneau ;

le fait que des disciples soient appelés par Jésus et s'appellent les uns les autres

ou le fait encore que de grands témoins de l'Ancienne Alliance (en dehors de Jean-Baptiste, alors par exemple, ça peut être Zacharie, le papa de Jean-Baptiste, mais ça peut être le vieillard Siméon, la prophétesse Anne dans le temple), reconnaissent et se réjouissent devant celui qui est présenté.

 

Cela nous entraîne donc, toujours, dans une succession ininterrompue dans notre vie d'Eglise et dans notre vie personnelle, de génération en génération, n'étant jamais fixés sur une seule génération ou sur nous ; car il est toujours question de transmission et de transition et de passage.

En ce temps de Noël, nous y étions habitués par tous ces passages de l'Évangile qui ont précédé Noël, nous sommes aussi habitués par ceux qui succèdent, et entre autres Jean-Baptiste qui désigne l'Agneau de Dieu : "il est plus fort que moi"

 "Je ne suis pas digne de délier la courroie de ses sandales""Celui sur qui repose l'Esprit, c'est lui"

 

Notre regard, toujours, est amené, à se poser sur un autre, Lui, précisément ; de la même façon que nous, aujourd'hui, ici, nous sommes conduits en permanence à penser au suivant et à l'autre, et pas toujours à nous ou avant nous, mais aussi aux autres et après nous.

 

Cette succession de l'Évangile, cette succession des promesses et des Alliances, nous entraîne, nous aussi, dans une succession, aujourd'hui et maintenant, qui est un vrai dynamisme missionnaire dans l'Esprit Saint.

Et puis, ce qui est propre au témoignage de St Jean, qui a vu le baptême du Seigneur, c'est que l'Esprit Saint demeure sur Jésus alors que dans l'Ancien Testament, l'Esprit Saint tombe, touche ; il y a quelque chose de ponctuel quand l'Esprit Saint arrive sur un prophète ou arrive sur un juge ou un roi.

Sur Jésus, il demeure : "celui sur qui tu verras l'Esprit descendre et demeurer".

Il demeure et il continue à demeurer, par Jésus, dans son Eglise et dans le monde.

 

Enfin, nous fêtons le saint Nom de Jésus, aujourd'hui; rappelons-nous qu'un nom est donné.

Alors, nous nous souvenons de cet épisode fameux de l'imposition du nom de Jean-Baptiste ; pour Jésus c'est beaucoup plus simple : un nom est donné par l'ange, ce nom est donné à Jésus.

Un nom est donné et il fait autorité en tant qu'il est accueilli comme un nom donné.

 

Eh bien, recevons Jésus comme un don, un nom qui signifie "le Seigneur sauve", "Dieu avec nous", Emmanuel.

 

Ce nom, ce cadeau, recevons-le et continuons à rendre grâce pour tout ce qu'il produit dans l'Esprit, pour nous, aujourd'hui.

 

 

 

Dimanche 1er janvier : Ste Marie, Mère de Dieu

Nb 6, 22-27 : Formule de bénédiction.

Ps 66

Ga 4, 4-7 : Filiation divine.

Lc 2, 16-21 : la visite des bergers.

 

Chers amis, vous savez qu'il y a deux grands piliers dans notre foi :

 il y a la résurrection du Seigneur (qui est même, d’ailleurs, le pilier chronologiquement premier dans la construction de l'Eglise, de son histoire, dans la foi),

 et puis le deuxième grand pilier : c'est l'incarnation.

Ces deux piliers, dans la vie liturgique sont honorés de huit jours, prolongation de huit jours après la célébration de la fête qui lui correspond.

Alors, avec la fête de Pâques, nous avons les huit jours qui suivent ; on appelle ça l'octave Pascale et ces huit jours se terminent par le dimanche de la divine Miséricorde (deuxième dimanche de Pâques).

Et puis, après la fête de Noël (deuxième pilier, pilier de l'incarnation), huit jours durant lesquels nous avons fêté entre autres : Saint-Jean l'évangéliste, les martyrs, Etienne ; ces huit jours s'achèvent avec cette fête aujourd'hui, Sainte-Marie, Mère de Dieu.

 

Comme en même temps, c'est le 1er janvier, et que l'Eglise n'ignore pas l'importance que ça peut avoir dans la vie des peuples, eh bien, la première lecture est tirée du livre des Nombres.

Quand parfois, on veut chercher quelque correspondance avec l'actualité liturgique, on cherche dans les textes, et puis on ne voit pas d'évocation mariale dans la première lecture, c'est parce que nous pouvons trouver dans ce livre des Nombres, comme je l'ai fait, tout à l'heure en paraphrasant, quelques belles formules, quelques vœux que l'on peut s'adresser les uns aux autres.

Alors, je vous les redis, des fois que nous les aurions entendus d'une oreille distraite :

 

"Que le Seigneur te bénisse et te garde,

que le Seigneur fasse briller sur toi son visage,

qu'Il te prenne en grâce.

Que le Seigneur tourne vers toi son visage de paix,

              Qu’il t'apporte la paix".

 

Ce sont des mots que le Seigneur adresse à Moïse pour que Moïse lui-même, les adresse à Aaron et ses fils, dans le livre des Nombres, (un livre de l'Ancien Testament, bien entendu, l’un des cinq premiers livres de la Bible).

On l'appelle livre des Nombres parce que, dans cette époque-là de l'histoire du salut, le peuple d'Israël se trouve dans le désert, après avoir quitté la terre d'Egypte et n'est encore pas dans sa terre, dans laquelle il est censé arriver, (cette fameuse terre promise, la terre de Canaan, vous savez qu'il erre une quarantaine d'années).

Et à un moment donné, il est question de compter chacun des membres de chacune des 12 tribus d'Israël.

Alors, c'est pour ça que l'on appelle le livre des Nombres, parce qu'il faut compter : alors il y a des listes, tribu de Dan, de Gad ; il y a tant de personnes, de Ruben, il y a tant de personnes ; de Manassé, il y a tant de personnes (donc, il y a des nombres) ; on appelle ça le livre des Nombres.

Il n'y a pas que des nombres, puisque vous avez entendu ces belles formules qui nous permettent de nous associer les uns aux autres à ces vœux pour le premier janvier.

 

Alors, venons-en à cet Évangile.

Cet Évangile fait suite à celui que nous avons entendu dans la nuit de Noël après le chant des anges : ‘gloire à Dieu au plus haut des cieux’.

Eh bien, les bergers se mettent en route pour pouvoir voir ce qu'il aura été annoncé.

Ils y vont en hâte, comme Marie, elle-même, s'était mis en hâte vers Elisabeth.

Et ils voient et ils racontent à Marie et Joseph.

Et Marie et Joseph s'étonnent de ce qu'ils racontent (on peut se demander d'ailleurs, pourquoi ils s'étonnent puisque, au fond, ils savent ce qui s'est passé : ils en sont les premiers protagonistes avec l'Esprit Saint).

Et puis, il y a cette très belle évocation, je vous la relis (deux fois dans l'Evangile de Luc, ça apparaît) :

"Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur".

C'est la première fois que ça apparaît.

Ça apparaît une deuxième fois quand Jésus a 12 ans :

"Marie retient tous ces événements et les médite dans son cœur".

 

Je suis resté sur cette phrase pour me plonger dans cette fête du 1er janvier et j'ai pensé relire pour vous, la première encyclique du pape Jean-Paul II.

Nous étions le 4 mars 1979, l'année de ma naissance.

Dans cette encyclique intitulée : Redemptor Hominis, (le Christ rédempteur de l'homme), Jean-Paul II, dans son style, dit des choses magnifiques qui ont marqué tout son pontificat et qui continuent aujourd'hui (le pape François est absolument dans le même élan).

 

Si vous voulez savoir ce que signifie l'Eglise, allez lire cette encyclique.

Alors, je vous la résume.

Les plus jeunes, si jamais on vous dit : l'Eglise ça sert à quoi? les chrétiens… vous pourrez répondre en reprenant ces différents points que vous apportent le pape Jean-Paul II.

Vous allez voir, il y a, (dans mon esprit tout du moins), vous verrez le lien qui peut se faire avec : "Marie retenait tous ces événements dans son cœur".

 

Le pape Jean-Paul II commence par dire (on est en 79 et vous allez voir que ça n'a pas pris une ride), il trace le tableau, il plante le décor, le contexte :

 "Le cœur de l'homme est insatiable", c'est-à-dire, vous pouvez lui donner à boire toutes les fontaines du monde, il aura encore soif ; vous pouvez lui donner à manger tout ce qu'il y a sur terre, il aura encore faim, insatiable.

 

Premier point : le cœur de l'homme est insatiable.

 

Deuxième point, qui est plus important,

"le Christ rédempteur est au cœur de l'histoire et du cosmos".

Ça c'est ce que l'on a célébré entre autres, lors du jubilé de l'an 2000 :

Christ hier, aujourd'hui et demain ; Christ toujours, "je suis l'alpha et l'oméga" : le Christ est au cœur de l'histoire et du cosmos.

 

Troisième point, en relisant tout ce que l'on fête à Noël : "le Christ est descendu au cœur de l'homme" ; il est descendu dans son cœur.

Le Verbe fait chair c'est Dieu qui descend au cœur, au centre, dans le mystère même de l'humain ; c'est très beau : descendant dans la chair.

En prenant chair de Marie et en naissant dans cette crèche, c'est Dieu qui descend au cœur de l’humain, au cœur du cœur.

 

Quatrième point : oui mais, comme l'homme a tellement faim et tellement soif (et c'est là que ça n'a pas pris une ride), il finit par perdre le chemin de son propre cœur.

C'est comme s'il se mangeait lui-même (si vous voulez) ; c'est comme s'il avait tellement faim et tellement soif qu'il se mangeait lui-même.

 

Comment retrouver le chemin du cœur ?

Suivez le chemin du Christ qui descend, lui, jusqu'au cœur de l'humain.

Alors, si vous voulez retrouver les panneaux indicateurs de la bonne route du cœur, regardez la route qu'emprunte Jésus.

 

Cinquième point : "l'Eglise, en elle, palpite (comme un cœur qui bat), palpite tout ce qui est bon, bien, beau et vrai, dans l'homme".

La recherche de la vérité, la recherche du bien, la voix de la conscience : en l'Eglise, palpite cela.

Pourquoi en l'Eglise ?

Parce que l'Eglise se reçoit de Jésus, elle suit le chemin du Christ.

Magnifique !

 

Du coup, ce qui me permet de dire : Marie, qui médite tous ces événements dans son cœur et qui reçoit la visite des bergers en cette nuit de Noël est l'image de cette Eglise, qui, à travers l'histoire, comme elle est, cherche, cherche à la suite de Jésus à ouvrir et à accompagner tous ceux et toutes celles qui recherchent la route de leur cœur.

L'Eglise recherche le chemin même de la vie du salut pour chacun.

 

Alors, c'est très beau, c'est très beau, puisque, au fond, ça nous dit : nous, communauté chrétienne, nous ne sommes pas à nous tâter le pouls en permanence, ni à nous auto-satisfaire ou à nous auto-condamner ; nous, communauté chrétienne, nous venons puiser régulièrement à la source : parole, eucharistie, charité ; à la source même de ce beau, de ce bien, de ce bon, de ce vrai.

Pourquoi ?

Eh bien d'abord, parce que chacun en a besoin (voilà !) et aussi parce que nous pouvons éclairer cette route que d'autres cherchent à emprunter pour retrouver leur cœur; pour que les hommes et les femmes puissent retomber sur leur pieds ; pour que les hommes et les femmes puissent ne plus souffrir d'avoir faim et soif de vérité.

Jésus est une source inépuisable qui vient étancher nos soifs : c'est la seule, il n'y a pas d'autre source.

 

Regardons donc Marie qui médite tous ces événements dans son cœur et rendons grâce et louons Dieu pour cette merveille, (grâce à elle et grâce à l'Esprit, en Jésus), cette merveille de pouvoir, les uns et les autres, renaître, retrouver notre cœur et lui permettre de produire et d'offrir lui-même, le meilleur.

 

Lorsque l'homme a très faim, il peut se livrer à de nombreux errements et le pape, dans son message pour la paix, en dénonce un cette année, particulièrement : c'est celui de la violence.

La violence est un symptôme (va-t-il dire), le symptôme de quelqu'un qui a perdu complètement le chemin de son cœur, qui a faim et soif ; et qui, pour pouvoir apaiser sa faim et étancher sa soif, va finir par être violent.

La violence n’a jamais rien résolu, surtout pas durablement.

Et dans l'Évangile, rien ne la justifie ; c'est plutôt le contraire.

 

En regardant, par exemple, le texte des Béatitudes (Matthieu chapitre cinq, Luc chapitre six) ; alors va-t-il dire, le Pape, (cette fois-ci c'est le pape François), va-t-il dire : entrons dans cette vie domestique de Marie, de Joseph, dans cette vie de Nazareth, dans cette vie de l'Evangile qui cherche très concrètement, par des gestes très simples et des actions tout à fait pratiques, à vivre l'humilité de celui qui, peu à peu est en train de réapprendre à aimer.

 

On va pouvoir résoudre des grandes difficultés, des grands conflits internationaux, si on commence par le tout petit petit petit petit, c'est-à-dire à toute petite échelle ; s'il y en a deux ou trois, quelque part sur cette terre, qui peuvent se réconcilier, ça peut finir tôt ou tard par réconcilier des peuples entiers.

 

Commençons par notre communauté en n'oubliant jamais que, ce qui va lui permettre de vivre la paix, c'est ce qui lui est le plus cher : la parole et l'eucharistie.

 

Amen.